J.O. 193 du 22 août 2007
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Observations du Gouvernement sur les recours dirigés contre la loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs
NOR : CSCL0710824X
Dans un champ bien délimité, celui du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs, le texte adopté par le Parlement le 2 août 2007 a pour objet d'organiser le dialogue social et d'aménager les conditions propres à assurer la continuité du service.
Il comprend trois volets.
Le premier porte sur la prévention, par un meilleur dialogue social, du déclenchement des conflits collectifs dans les entreprises concernées et prévoit les modalités selon lesquelles se déroule une procédure de négociation préalable au dépôt d'un préavis de grève. Ce faisant, le législateur donne la base légale pour organiser par voie d'accord une telle négociation obligatoire. La procédure est définie par un accord-cadre au sein de l'entreprise ou un accord de branche dont le législateur a encadré le contenu, en prévoyant notamment un délai de huit jours de négociations avant l'intervention du préavis. Un décret en Conseil d'Etat supplée, le cas échéant, l'absence d'accord-cadre ou d'accord de branche.
Le deuxième volet porte sur l'organisation de la continuité du service en cas de grève ou de toute autre perturbation prévisible du trafic. Aucune exigence de service normal n'est posée par la loi. Celle-ci attribue à l'autorité organisatrice de transport la charge de définir les différents niveaux de service, en fixant la fréquence et les plages horaires correspondantes, ainsi qu'un niveau minimal destiné à assurer les besoins essentiels de la population. Il revient à l'entreprise d'établir un plan de transport adapté et un plan d'information des usagers. Le législateur confie aux partenaires sociaux le soin de signer un accord collectif de prévisibilité qui recense les fonctions nécessaires pour assurer les différents niveaux de service ainsi que l'organisation du travail en cas de grève. Le représentant de l'Etat, tenu informé, peut, en cas de carence de l'autorité organisatrice de transport, définir les priorités de desserte et approuver un plan de transport adapté.
Le dernier volet du texte reconnaît les droits des usagers : un droit d'information préalable, d'une part, en cas de grève ou de perturbation prévisible, ainsi qu'un droit à remboursement si le premier a été méconnu.
Tel est l'équilibre général de la loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs qui a été déférée au Conseil constitutionnel par plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs. Ces recours appellent, de la part du Gouvernement, les observations suivantes.
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I. - Sur l'exercice de sa compétence par le législateur
A. - L'article 5 de la loi déférée dispose qu'il revient aux partenaires sociaux de conclure un accord collectif de prévisibilité du service applicable en cas de perturbation prévisible du trafic ou de grève. A défaut d'un tel accord applicable au 1er janvier 2008, un plan de prévisibilité est défini par l'employeur. Le troisième alinéa du I de l'article 2 de la loi déférée prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat pris après consultation des organisations syndicales représentatives des employeurs et des salariés des secteurs d'activité concernés fixe les règles d'organisation et de déroulement de la négociation préalable dans les entreprises de transport où, à la date du 1er janvier 2008, aucun accord-cadre n'a pu être signé et aucun accord de branche ne s'applique. Enfin, le I de l'article 4 de la loi renvoie à l'autorité organisatrice de transport la définition des dessertes prioritaires et la détermination des différents niveaux de service.
Les auteurs des recours soutiennent que, sur ces différents aspects, le législateur aurait méconnu l'étendue de sa propre compétence en abandonnant à d'autres autorités le soin de réglementer le droit de grève.
B. - Le Gouvernement estime que ces critiques ne sont pas fondées.
1. En laissant, en premier lieu, aux employeurs et aux organisations syndicales représentatives le soin d'établir, avant le 1er janvier 2008, un accord collectif de prévisibilité du service applicable en cas de perturbation prévisible du trafic ou de grève, et en indiquant qu'à défaut d'un tel accord applicable au 1er janvier 2008 un plan de prévisibilité est défini par l'employeur, le législateur n'est pas resté en deçà de sa compétence.
On doit rappeler que le législateur peut investir les partenaires sociaux d'un pouvoir de mise en oeuvre des principes qu'il énonce, sous réserve d'avoir défini ces principes. Il est ainsi jugé qu'« il est loisible au législateur, après avoir défini les droits et obligations touchant aux conditions et aux relations de travail, de laisser aux employeurs et aux salariés, ou à leurs organisations représentatives, le soin de préciser, notamment par la voie de la négociation collective, les modalités concrètes d'application des normes qu'il édicte » (voir la décision no 2004-494 DC du 29 avril 2004).
L'article 5 critiqué répond aux exigences de cette jurisprudence.
Le législateur a ainsi énoncé que l'accord collectif de prévisibilité du service recense, par métier, fonction et niveau de compétence ou de qualification, les catégories d'agents et leurs effectifs, ainsi que les moyens matériels, indispensables à l'exécution, conformément aux règles de sécurité en vigueur applicables à l'entreprise, de chacun des niveaux de service prévus dans le plan de transport adapté. L'article 5 précise aussi que l'accord collectif de prévisibilité fixe les conditions dans lesquelles, en cas de perturbation prévisible, l'organisation du travail est révisée et les personnels disponibles réaffectés afin de permettre la mise en oeuvre du plan de transport adapté.
Cette habilitation conférée par la loi aux partenaires sociaux apparaît ainsi suffisamment encadrée pour satisfaire aux exigences constitutionnelles qui tiennent à la compétence du législateur.
Quant à la disposition selon laquelle, à défaut d'accord applicable au 1er janvier 2008, le plan de prévisibilité est défini par l'employeur, elle se comprend dès lors que ce plan n'est qu'un recensement des moyens propres à lui permettre de s'organiser et de réagir en cas de conflit.
2. En ce qui concerne, en deuxième lieu, le troisième alinéa du I de l'article 2 de la loi déférée, le Gouvernement estime que le législateur n'a pas renvoyé au décret en Conseil d'Etat dont il prévoit l'intervention le soin d'énoncer des règles qui relèveraient de la compétence exclusive du législateur.
Il estime, en effet, que dans cette matière de la réglementation du droit de grève, comme dans les autres matières relevant de la compétence du législateur, il y a place pour une intervention du pouvoir réglementaire afin de mettre en oeuvre les règles fixées par la loi.
Il peut, à cet égard, se recommander de la jurisprudence du Conseil constitutionnel qui s'est prononcé en ce sens. Il a ainsi été jugé, par une décision, rangée par la doctrine au rang des « grandes décisions du Conseil constitutionnel », rendue à propos d'une loi relative à l'exercice du droit de grève dans un service public, que n'est pas contraire à la Constitution la disposition « qui, après avoir indiqué, les conditions dans lesquelles doivent être assurées la création, la transmission et l'émission des signaux de radio et de télévision, prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application de ces conditions, conformément à la répartition des compétences opérée entre le domaine de la loi et celui du règlement par les articles 21, 34 et 37 de la Constitution » (voir la décision no 79-105 DC du 25 juillet 1979).
On doit souligner que le Conseil constitutionnel s'est, à cette occasion, fondé sur les articles 21, 34 et 37 de la Constitution, marquant ainsi que les règles générales fixées par la Constitution en termes de partage entre le domaine de la loi et celui du règlement s'appliquent pour le droit de grève comme dans les autres matières et que la rédaction du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 en matière de réglementation du droit de grève ne conduit pas à une solution particulière.
Ce raisonnement apparaît très solide.
L'objet de la mention des « lois qui le réglementent » dans le septième alinéa du Préambule de 1946 n'est, en effet, pas de désigner une autorité qui serait seule compétente pour réglementer le droit de grève et lui ôter en conséquence toute possibilité de renvoyer à une autorité subalterne le soin de déterminer certaines modalités d'application des principes qu'elle fixe.
Une telle interprétation se montrerait, sans doute, oublieuse des conditions d'adoption du texte en 1946 : le constituant, retenant alors cette rédaction, n'entendait pas régler, dans une matière isolée, le partage des attributions entre le Parlement et le Gouvernement, lequel n'était d'ailleurs pas au coeur des préoccupations du moment. En réalité, la rédaction s'explique par le fait que le constituant a renoncé à exclure explicitement les fonctionnaires du bénéfice du droit de grève mais, songeant à la nécessité de sauvegarder le fonctionnement des services publics, il a maintenu la référence à l'intervention législative pour permettre à la loi de ménager un équilibre en l'exercice du droit de grève pour les agents publics et la continuité des services publics. Cette référence n'est ainsi pas révélatrice d'une volonté d'attribuer au législateur une compétence exclusive de toute intervention réglementaire, mais traduit que, s'agissant du cas particulier des services publics, le constituant avait à l'esprit la nécessité pour le législateur de fixer des règles destinées à préserver le fonctionnement des services publics.
Conférer aux termes « dans le cadre des lois qui le réglementent » la valeur d'une attribution exclusive de compétence dans le domaine du droit de grève reviendrait, ainsi, à leur donner une portée qu'ils n'ont pas eue dans l'intention du constituant et qui n'a pas été reconnue depuis lors par la jurisprudence.
On peut observer que, si le droit de grève est le seul pour lequel le Préambule de 1946 se réfère directement à l'intervention du législateur, il reste que d'autres dispositions constitutionnelles mentionnent des attributions de compétence au législateur, voire au législateur organique, sans qu'il lui soit, pour autant, interdit de renvoyer au pouvoir réglementaire le soin de prendre certaines mesures d'application.
Ainsi, en vertu de l'article 72 de la Constitution, les collectivités territoriales s'administrent librement « dans les conditions prévues par la loi ». Il n'a jamais été déduit de ces dispositions qu'elles feraient obstacle à ce que le pouvoir réglementaire se voie confier le soin de déterminer certaines modalités d'application des conditions de la libre administration des collectivités territoriales. La partie réglementaire du code général des collectivités territoriales en témoigne abondamment.
Par ailleurs, selon le troisième alinéa de l'article 64 de la Constitution, « une loi organique porte statut des magistrats ». Le Conseil constitutionnel n'a pas analysé cette disposition comme impliquant l'obligation, pour le législateur organique, d'édicter lui-même l'intégralité des dispositions statutaires applicables aux magistrats, sous peine de rester en deçà de sa compétence. Tout au contraire, il a explicitement jugé « que la loi organique relative au statut des juges de proximité doit (...) déterminer elle-même les règles statutaires qui leur sont applicables, sous la seule réserve de la faculté de renvoyer au pouvoir réglementaire la fixation de certaines mesures d'application des règles qu'elle a posées » (décision no 2003-466 DC du 20 février 2003).
Dans ces conditions, le Gouvernement estime que la répartition des attributions revenant respectivement au législateur et au pouvoir réglementaire doit s'opérer, s'agissant du droit de grève, conformément aux articles 34 et 37 de la Constitution et identiquement aux autres matières visées par ces dispositions, sans que le septième alinéa du Préambule de 1946 affecte cette répartition. Il considère que cet alinéa ne saurait, en toute hypothèse, être interprété comme réservant au législateur, en matière de droit de grève, une compétence exclusive de toute intervention, à titre complémentaire, du pouvoir réglementaire d'application des lois.
Au cas présent, on doit observer que le législateur n'a prévu l'intervention d'un décret en Conseil d'Etat que dans une mesure limitée et encadrée.
L'objet de l'article 2 de la loi déférée est d'organiser, dans les entreprises de transport concernées, par la négociation d'un accord-cadre entre les partenaires sociaux, d'ici au 1er janvier 2008, une procédure de prévention des conflits et tendant à développer le dialogue social. Les dispositions du même article prévoient également que des négociations sont engagées en vue de la signature d'un accord de branche ayant le même objet destiné à s'appliquer dans les entreprises de transport où aucun accord-cadre n'a pu être signé.
Ce n'est qu'à défaut d'un accord d'entreprise et d'un accord de branche que peuvent trouver à s'appliquer les dispositions du décret en Conseil d'Etat mentionné au troisième alinéa du I de l'article 2. Ce texte est ainsi conçu pour se substituer à la carence ou à l'échec de la négociation collective.
Le contenu de ce décret, qui sera pris après consultation des organisations syndicales représentatives des employeurs et des salariés des secteurs d'activité concernés, est strictement délimité puisqu'il lui revient de fixer les règles d'organisation et de déroulement de la négociation préalable qui doivent, en principe, être fixées par un accord d'entreprise ou un accord de branche. Le II de l'article 2 détermine très précisément les éléments que doit comporter le décret en Conseil d'Etat, comme l'accord-cadre ou l'accord de branche : conditions de notification à l'employeur des motifs pour lesquels il est envisagé de déposer un préavis de grève ; délai dans lequel l'employeur est tenu de réunir les organisations syndicales représentatives ; durée de la négociation préalable ; conditions dans lesquelles la négociation préalable entre les organisations syndicales représentatives qui ont procédé à la notification et l'employeur se déroule.
Enfin, la portée du décret mentionné par l'article 2 de la loi déférée est restreinte dès lors que, ainsi que l'indique expressément la dernière phrase de son I, l'accord de branche ou l'accord-cadre régulièrement négocié après le 1er janvier 2008 s'applique, dès sa signature, en lieu et place de ce décret.
Dans ces conditions, le Gouvernement considère que le grief tiré de l'incompétence négative au motif du renvoi opéré à l'article 2 à un décret en Conseil d'Etat ne peut qu'être écarté.
3. En troisième lieu, le choix du législateur de confier à l'autorité organisatrice de transport le soin de définir les dessertes prioritaires en cas de perturbation prévisible du trafic et de déterminer les différents niveaux de services en fonction de l'importance de la perturbation ne peut être sérieusement taxé d'incompétence négative.
La loi met seulement à la charge de l'autorité organisatrice de transport le soin de définir des dessertes prioritaires. Cette mission s'inscrit dans la logique de l'organisation des transports résultant notamment de la loi d'orientation sur les transports intérieurs. Seule l'autorité organisatrice de transport paraît à même de l'effectuer. On ne voit pas pourquoi, en lui confiant cette mission, le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence.
On doit ajouter que, sur ce point, le droit de grève n'est pas en cause : la fixation des dessertes prioritaires comme des niveaux de service n'affecte, en effet, en aucun cas le droit de grève des salariés.
Le Conseil constitutionnel écartera, par suite, l'ensemble des griefs adressés à la loi déférée sur le terrain de l'incompétence négative.
II. - Sur l'exercice individuel du droit de grève
A. - Le I de l'article 2 de la loi déférée dispose qu'un préavis de grève ne peut intervenir qu'après une négociation préalable entre l'employeur et la ou les organisations syndicales représentatives qui envisagent de déposer un préavis. L'article 3 précise que, lorsqu'un préavis a été déposé dans les conditions prévues à l'article L. 521-3 du code du travail par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives, un nouveau préavis ne peut être déposé par la ou les mêmes organisations et pour les mêmes motifs qu'à l'issue du délai du préavis en cours et avant que la procédure prévue à l'article 2 n'ait été mise en oeuvre. En vertu du II de l'article 5, en cas de grève, les salariés relevant des catégories d'agents mentionnés au I du même article informent, au plus tard, 48 heures avant de participer à la grève, le chef d'entreprise ou la personne désignée par lui de son intention d'y participer.
Les sénateurs saisissants reprochent à ces dispositions de porter atteinte à l'exercice individuel par les agents concernés du droit de grève constitutionnellement protégé.
B. - Le Conseil constitutionnel ne pourra faire sienne cette argumentation.
On doit rappeler, de manière liminaire, que la grève est une liberté individuelle exercée collectivement. Il s'agit de l'un de ces droits sociaux collectifs qui est d'abord regardé comme une liberté individuelle. Il en résulte, sans doute, que le législateur ne saurait prendre des mesures qui, par exemple, feraient des organisations syndicales représentatives les détentrices du droit de grève ou encore rendraient une grève illicite faute de l'aval de ces organisations ou de l'accord de la majorité du personnel de l'établissement concerné.
Il appartient, en revanche, à la loi d'aménager les règles de mise en mouvement de l'action collective pour assurer la conciliation entre la défense des intérêts professionnels et la continuité du service public. L'article L. 521-3 du code du travail, issu de la loi du 31 juillet 1963, procède ainsi à l'organisation des conditions du déclenchement de la grève en prévoyant que le préavis qui précède la cessation concertée du travail émane de l'organisation ou de l'une des organisations syndicales les plus représentatives sur le plan national, dans la catégorie professionnelle ou dans l'entreprise, l'organisme ou le service intéressé.
1. Le Gouvernement considère, en premier lieu, qu'en exigeant une négociation préalable entre l'employeur et la ou les organisations syndicales représentatives qui envisagent de déposer un préavis, et en reprenant, s'agissant du dépôt d'un nouveau préavis, la règle posée par l'article L. 521-3 du code du travail qui réserve à ces mêmes organisations le droit de déposer un préavis, le législateur n'a pas porté une atteinte excessive à la liberté individuelle de faire grève.
Les sénateurs requérants, en critiquant les articles 2 et 3 de la loi déférée, dispositions qui se bornent à se combiner avec le mécanisme prévu par celles, existantes, de l'article L. 521-3 du code du travail, reprochent en réalité au législateur de 1963 d'avoir confié aux organisations syndicales représentatives le « monopole » de l'engagement de la grève. Ils dénoncent ce « privilège » que la loi déférée confirmerait et aggraverait alors qu'il serait contraire à la liberté individuelle de faire grève.
Le Gouvernement estime, pour sa part, que, si le droit de grève appartient individuellement à chaque agent, le fait qu'il demeure un droit d'exercice collectif implique que les représentants des agents concernés soient investis, dans le cadre des services publics et en vue d'assurer la continuité de leur fonctionnement, de certaines prérogatives particulières relatives à cet exercice.
Le législateur peut ainsi, alors qu'il est question d'organiser les conditions du fonctionnement continu du service public, accorder une place spécifique aux organisations syndicales dans le déclenchement de la grève. On doit rappeler, à cet égard, que, si le « monopole syndical », en matière de négociation collective, n'est pas une exigence constitutionnelle (voir la décision no 96-383 DC du 6 novembre 1996), il est néanmoins jugé qu'il est loisible au législateur de conférer à des organisations syndicales des prérogatives particulières (voir la décision no 89-275 DC du 25 juillet 1989).
Il faut ajouter que confier aux organisations syndicales le préavis et, aujourd'hui, leur attribuer une place particulière dans la négociation préalable et pour déposer un nouveau préavis contribue à garantir que le déclenchement de la grève s'opère au terme d'un processus de dialogue et de prévention. Autrement dit, l'attribution de telles prérogatives aux organisations syndicales représentatives a pour but, d'abord, de structurer la prévention des conflits autour d'une négociation sociale et, ensuite, d'ordonner l'engagement de la grève pour éviter des déclenchements désorganisés ou mal maîtrisés qui seraient susceptibles de porter atteinte au fonctionnement continu du service public.
Par ailleurs, on ne peut qu'admettre la licéité, dans les services publics, de l'obligation d'un préavis au regard des exigences constitutionnelles. Elle est à coup sûr justifiée dès lors que reconnaître une liberté totale de déclenchement de la grève reviendrait à autoriser une faculté généralisée d'engager une action collective, ce qui pourrait conduire à des phénomènes incontrôlés et des grèves non représentatives incompatibles avec les nécessités de la continuité du service public. Dans ces conditions, il convient ainsi de confier le dépôt du préavis à quelqu'un, et le choix du législateur de le donner aux organisations syndicales représentatives n'apparaît pas inapproprié.
On doit souligner, à cet égard, que les « organisations syndicales représentatives », au sens du texte déféré, ne sont pas les seules organisations figurant sur la liste des organisations syndicales les plus représentatives au plan national figurant sur l'arrêté du 31 mars 1966. L'expression employée par le législateur couvre, en outre, les organisations qui sont représentatives dans l'entreprise.
Dans ces conditions, les articles 2 et 3 de la loi ne souffrent pas les critiques qui leur sont adressées.
Il était, d'une part, loisible au législateur, dans l'exercice de sa compétence l'habilitant à porter au droit de grève les limitations nécessaires à la continuité du service public, de privilégier la négociation sociale, conduite entre les employeurs et les seules organisations syndicales représentatives, avant le dépôt du préavis, en vue de permettre, dans les entreprises concernées, la prévention des conflits. Ce faisant, la loi déférée ne fait qu'organiser un processus de négociation en amont pour conduire les parties concernées à dialoguer et prévenir un conflit collectif du travail.
L'article 3 de la loi déférée pouvait, d'autre part, sans davantage méconnaître la liberté individuelle de faire grève, confier aux seules organisations syndicales représentatives la faculté de déposer un nouveau préavis, après le dépôt d'un premier en application de l'article L. 521-3 du code du travail, et sous les conditions que le législateur a fixées.
2. En deuxième lieu, la critique adressée, sur le terrain de l'atteinte portée à la liberté individuelle de faire grève, aux dispositions du II de l'article 5 relatives à l'information de l'intention de participer à la grève ne pourra également qu'être écartée.
D'une part, l'exigence d'information préalable posée par le II de l'article 5 de la loi déférée ne remet nullement en cause la liberté individuelle de faire grève. La grève est l'agrégation de choix individuels en un choix collectif. L'identification des choix individuels s'opérait, avant l'intervention du législateur, en fait et a posteriori. Désormais, la loi permet, en cas de grève, l'identification d'intentions de choix individuels a priori, en vue, pour l'organisateur du service, de mieux apprécier quelle sera l'étendue du choix collectif. Une telle mesure ne modifie pas ni la possibilité pour l'employeur d'identifier les choix individuels décidés par les salariés, ni la liberté individuelle de ces derniers. Elle modifie seulement le moment où cette identification intervient. Il s'agit, en revanche, d'une mesure indispensable pour obtenir les informations nécessaires à l'organisation du service et dont le caractère proportionné au regard du droit de grève sera démontré plus bas.
D'autre part, la loi déférée ne crée pas le risque, dénoncé par les sénateurs saisissants, de pressions de la part des employeurs pendant le délai de 48 heures qu'elle fixe. Elle ne pourrait avoir pour conséquence, dans le cas où de telles pressions s'exerceraient, de les anticiper un peu dans le temps.
Le Gouvernement considère donc que les différents griefs tirés d'une atteinte du législateur à la liberté individuelle de faire grève doivent être écartés.
III. - Sur le caractère proportionné
des aménagements apportés à l'exercice du droit de grève
A. - Le II de l'article 2 de la loi déférée prévoit que l'accord-cadre, l'accord de branche et, le cas échéant, le décret en Conseil d'Etat prévus au I déterminent notamment : les conditions dans lesquelles une organisation syndicale représentative procède à la notification à l'employeur des motifs pour lesquels elle envisage de déposer un préavis ; le délai dans lequel, à compter de cette notification, l'employeur est tenu de réunir les organisations qui ont procédé à la notification, qui ne peut dépasser trois jours ; la durée dont l'employeur et les organisations syndicales représentatives qui ont procédé à la notification disposent pour conduire la négociation préalable, qui ne peut excéder huit jours francs à compter de cette notification.
Le I de l'article 4 de la loi critiquée dispose que l'autorité organisatrice de transport détermine différents niveaux de service en fonction de l'importance de la perturbation et que pour chaque niveau elle fixe les fréquences et les plages horaires. Il est précisé que le niveau minimal de service doit permettre d'éviter que soit portée une atteinte disproportionnée à différentes libertés à valeur constitutionnelle.
Le II de l'article 5 de la loi déférée instaure, on l'a dit, une obligation individuelle d'information préalable de l'employeur 48 heures avant de participer à la grève.
Le II de l'article 6 prévoit qu'au-delà de huit jours de grève l'employeur, une organisation syndicale représentative ou le médiateur éventuellement désigné peut décider l'organisation par l'entreprise d'une consultation, ouverte aux salariés concernés par les motifs figurant dans le préavis, et portant sur la poursuite de la grève. La loi précise les modalités d'une telle consultation.
Les auteurs des recours critiquent l'ensemble de ces dispositions au motif que les limitations que la loi apporte ainsi au droit de grève seraient disproportionnées à différents titres.
B. - Cette argumentation ne peut être retenue.
1. En ce qui concerne, en premier lieu, l'obligation de négociation préalable instaurée par l'article 2, le Gouvernement considère que, ni dans la détermination de son champ d'application, ni dans l'encadrement des modalités de déroulement de cette négociation devant être fixées par l'accord-cadre, l'accord de branche ou le cas échéant un décret en Conseil d'Etat, le législateur n'a porté une atteinte excessive au droit de grève.
a) La critique des députés requérants relative à la soumission des conflits interprofessionnels à la procédure de négociation préalable organisée par l'article 2 de la loi critiquée doit d'abord être écartée.
En effet, d'une part, exclure du champ d'application de la loi les conflits interprofessionnels aurait fait perdre sa portée au texte et, surtout, il eût été difficile de déterminer une autorité habilitée à identifier ceux des conflits collectifs ayant un caractère effectivement interprofessionnel de ceux propres à l'entreprise pour qu'ensuite une négociation préalable se déroule ou non. Au demeurant, dans l'hypothèse, visée par les requérants, où une négociation serait sans grande portée, il convient de souligner que le délai de huit jours institué par le législateur pour la conduite de la négociation préalable est seulement un maximum.
D'autre part, les conflits interprofessionnels ont, le plus souvent, un motif qui présente une relation avec l'entreprise au sein de laquelle l'exigence de négociation ne sera pas sans portée. On peut songer, à cet égard, à un conflit généralisé sur les salaires : les participants au mouvement collectif pourraient, au sein de leur entreprise, conduire une négociation.
On peut aussi observer que d'ores et déjà, le dernier alinéa de l'article L. 521-3 du code du travail en vigueur prévoit que, pendant la durée du préavis, « les parties intéressées sont tenues de négocier », sans distinguer selon les caractéristiques des conflits.
Le grief ne saurait donc être accueilli.
b) S'agissant des délais maximums que le législateur a fixés pour la réunion des organisations syndicales représentatives et la conduite de la négociation préalable, le Gouvernement estime qu'ils sont appropriés.
Il faut souligner que les députés auteurs de l'un des recours se méprennent sur le décompte du délai qui encadre la durée de la négociation préalable.
En effet, il ressort sans ambiguïté du texte même des 2° et 3° du II de l'article 2 de la loi déférée que, d'une part, le délai dans lequel, à compter de la notification par une organisation syndicale représentative des motifs pour lesquels elle envisage de faire grève, l'employeur est tenu de réunir celles-ci ne peut dépasser trois jours et que, d'autre part, la durée dont l'employeur et les organisations syndicales représentatives qui ont procédé à la notification disposent pour conduire la négociation préalable ne peut excéder huit jours francs à compter de cette notification.
Autrement dit, le délai de trois jours prévu par le 2° se situe à l'intérieur de celui de huit jours mentionné au 3° dès lors qu'ils se décomptent tous les deux à compter de la notification.
Le préavis légal de cinq jours prévu par les dispositions de l'article L. 521-3 du code du travail est donc déposé, au maximum, à l'issue des huit jours francs de négociations, si ces dernières ont échoué. Le délai total maximum qui sépare l'ouverture des négociations, le jour de la notification, du début effectif d'un éventuel mouvement de grève, confirmé par le dépôt du préavis cinq jours avant son commencement, est ainsi fixé à treize jours.
Les plafonds ainsi fixés par le législateur pour la détermination des délais de négociation apparaissent proportionnés compte tenu des exigences qu'il lui appartenait de concilier : prévoir, d'un côté, une durée suffisante pour que s'instaure une réelle négociation et, de l'autre, éviter le contournement de ce temps de négociation et maintenir l'urgence d'aboutir.
Le délai total de treize jours prévu par le législateur, qui n'est qu'un délai maximum, apparaît dans ces conditions comme raisonnable et comme ne portant pas une atteinte excessive au droit de grève.
Peut être écarté d'un même mouvement le grief ponctuel adressé par les députés au même article 2 lorsqu'ils estiment qu'il « laisse entendre qu'il y aurait un accord préalable entre les organisations syndicales... sur le contenu du préavis et qu'à défaut d'un tel accord il n'y aurait pas de possibilité pour une autre organisation syndicale représentative d'envisager le dépôt d'un autre préavis... ». Les dispositions de l'article 2 n'ont ni cet objet ni cet effet ; le moyen invoqué, qui tend à conférer aux dispositions critiquées une portée qu'elles n'ont pas, ne peut être accueilli.
2. En ce qui concerne, en deuxième lieu, les dispositions du I de l'article 4 qui précisent les motifs dont l'autorité organisatrice de transport doit tenir compte pour déterminer les niveaux de service, elles n'apportent au droit de grève aucune limitation.
En prévoyant, d'une part, que le niveau minimal de service « correspond à la couverture des besoins essentiels de la population », le législateur n'a, contrairement à ce que soutiennent les sénateurs saisissants, aucunement permis à l'autorité organisatrice de transport de faire obstacle à l'exercice du droit de grève. A supposer même que des besoins essentiels de la population soient en cause, les dispositions critiquées ne font aucunement obstacle à ce que l'ensemble des agents participent à la grève.
D'autre part, la critique selon laquelle « en juxtaposant un nombre très important de besoins de la population à satisfaire obligatoirement a minima en cas de grève » le législateur obligerait l'autorité organisatrice de transport à porter atteinte au droit de grève est également erronée : la définition de dessertes prioritaires, de différents niveaux de service et d'un niveau minimal de service ne font, en effet, aucunement obstacle à l'exercice individuel et collectif du droit de grève. Les énonciations critiquées de l'article 4 ne s'opposent pas à ce que l'ensemble des agents décident de participer à la grève. Il n'est, ainsi, porté par ces dispositions aucune atteinte au droit de grève constitutionnellement protégé.
3. S'agissant, en troisième lieu, de la déclaration individuelle préalable requise par les dispositions du II de l'article 5 de la loi déférée, celle-ci n'est susceptible d'affecter l'exercice du droit de grève que de façon très faible et apparaît pleinement justifiée au regard de la nécessité pour l'organisateur du service de disposer d'une information suffisante afin d'assurer le fonctionnement du service public.
On doit souligner que la déclaration individuelle préalable requise par les dispositions critiquées laisse entièrement libre l'exercice du droit de grève. Elle n'est qu'une information donnée par le salarié qui constitue seulement une condition préalable à cet exercice.
En subordonnant la participation à une grève à cette déclaration individuelle préalable, le législateur a entendu garantir une meilleure prévisibilité du service. Cette formalité est, en effet, indispensable pour obtenir les informations nécessaires à l'organisation du service et, par suite, à sa continuité, laquelle présente également le caractère d'un principe à valeur constitutionnelle. Elle est, par ailleurs, de nature à contribuer à une meilleure information des usagers.
On doit relever que la règle énoncée par le législateur ne s'oppose pas à ce qu'un salarié qui s'est abstenu de participer à une grève dès l'origine rejoigne une action collective en cours dès lors qu'il observe la formalité de la déclaration individuelle préalablement à ce qu'il se joigne au mouvement. De même, un salarié peut cesser de participer à une grève puis, de nouveau, arrêter le travail sous réserve, là aussi, d'avoir informé l'employeur 48 heures avant.
On doit aussi souligner que, contrairement à ce que font valoir les députés auteurs d'une des saisines, la combinaison des I et II de l'article 5 n'a aucunement pour effet d'interdire l'exercice du droit de grève aux catégories d'agents recensés par l'accord collectif de prévisibilité. Cet accord n'est, en effet, pas autre chose qu'un recensement de moyens humains et matériels destiné à permettre à l'entreprise de mieux préparer l'organisation du travail et l'affectation de ces moyens en cas de conflit.
Enfin, la disposition du II de l'article 5 selon laquelle est passible d'une sanction disciplinaire le salarié qui n'a pas informé son employeur de son intention de participer à la grève dans les conditions prévues à son premier alinéa ne saurait davantage être regardée comme portant une atteinte au droit de grève.
Elle répond, d'une part, à l'importance, pour l'ensemble du dispositif conçu par le législateur, du respect de l'obligation d'information préalable posée à l'article 5. D'autre part, la sanction ne réprime pas un exercice du droit de grève qui serait illicite mais seulement l'inobservation de la formalité nouvelle instituée par le législateur. Une telle sanction, comme toutes les autres, sera d'ailleurs placée sous le contrôle du juge auquel il reviendra d'apprécier le caractère fautif du comportement du salarié comme la proportionnalité de la mesure prise par l'employeur.
4. Le Gouvernement considère, en quatrième lieu, qu'en prévoyant la possibilité et les conditions de l'organisation par l'entreprise d'une consultation portant sur la poursuite de la grève le législateur n'a, à l'évidence, attribué aucun pouvoir de police à l'entreprise, personne privée, contrairement à ce que soutiennent les députés auteurs de l'un des recours.
On se bornera à cet égard à indiquer que la loi ne confère à l'entreprise aucune attribution en matière de maintien de l'ordre public et à observer que les résultats de la consultation en cause sont dépourvus de toute incidence sur l'exercice du droit de grève par les salariés, de sorte que la disposition critiquée ne porte aucune atteinte à ce principe constitutionnel.
IV. - Sur la méconnaissance du principe constitutionnel
de libre administration des collectivités territoriales
A. - Ainsi qu'il a déjà été dit, l'article 4 de la loi déférée impose à l'autorité organisatrice de transport de déterminer différents niveaux de service en fonction de l'importance de la perturbation.
Le IV de l'article 4 de la loi déférée prévoit qu'en cas de carence de l'autorité organisatrice de transport, et après une mise en demeure, le représentant de l'Etat arrête les priorités de desserte ou approuve les plans visés au II du même article .
L'article 9 dispose qu'en cas de défaut d'exécution dans la mise en oeuvre du plan de transport adapté ou du plan d'information des usagers prévu à l'article 4 l'autorité organisatrice de transport impose à l'entreprise de transport, quand celle-ci est directement responsable du défaut d'exécution, un remboursement total des titres de transport aux usagers en fonction de la durée d'inexécution de ces plans.
Les parlementaires saisissants de l'un des recours soutiennent que ces dispositions méconnaîtraient le principe constitutionnel de libre administration des collectivités locales.
B. - Cette critique est dépourvue de fondement.
Il convient de souligner, en premier lieu, que, sur le principe, selon une jurisprudence bien établie, l'article 72 de la Constitution ne fait pas obstacle à ce que le législateur prévoie l'intervention du représentant de l'Etat pour surmonter les difficultés résultant de l'absence de décision des autorités décentralisées normalement compétentes, lorsque leur carence risque de compromettre le fonctionnement des services publics et l'application des lois (voir en particulier la décision no 82-149 DC du 28 décembre 1982).
Au cas présent, on doit souligner que l'ensemble des dispositions critiquées de l'article 4 sont conçues pour que leur mise en oeuvre soit préparée de manière active, ce qui explique le délai fixé par le III au 1er janvier 2008 pour la modification des conventions en cours. On doit observer, sur ce point, que la durée de ce délai doit être appréciée au regard de la circonstance que de nombreuses mesures prévues figuraient déjà dans la Charte pour une prévisibilité du service public de transport en période de perturbations.
Par ailleurs, le représentant de l'Etat est, en vertu du premier alinéa du IV de l'article 4, tenu informé par l'autorité organisatrice de transport de la définition des dessertes prioritaires et des niveaux de service attendus, ainsi que de l'élaboration des plans visés au II et de leur intégration aux conventions d'exploitation.
Ce n'est qu'en cas de carence de l'autorité organisatrice de transport, et après une mise en demeure, que le pouvoir de substitution est susceptible de jouer.
Le législateur ayant ainsi prévu les conditions précises et défini étroitement le domaine dans lequel ce pouvoir est susceptible de s'appliquer, il n'a nullement méconnu le principe constitutionnel de libre administration des collectivités locales.
Le Gouvernement estime, en second lieu, qu'eu égard aux objectifs poursuivis par le législateur l'exigence imposée à l'autorité organisatrice de transport de déterminer certains niveaux de service ne méconnaît pas l'article 72 de la Constitution, et que les dispositions critiquées de l'article 9, qui visent à protéger les droits des usagers des transports terrestres réguliers, ne portent pas davantage atteinte au principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales.
V. - Sur le principe constitutionnel d'égalité
A. - En vertu du I de l'article 4 de la loi déférée, l'autorité organisatrice de transport est tenue de définir les dessertes prioritaires en cas de perturbation prévisible du trafic ainsi que des niveaux de service et il revient à l'entreprise d'élaborer un plan de transport adapté aux priorités de desserte ainsi définies ainsi qu'un plan d'information des usagers.
Ainsi qu'il a déjà été dit, le second alinéa du II de l'article 5 prévoit que le salarié qui n'a pas informé son employeur de participer à la grève dans les conditions requises est passible d'une sanction disciplinaire.
Les parlementaires requérants font valoir que ces dispositions méconnaîtraient, à trois différents égards, le principe constitutionnel d'égalité.
B. - Ces griefs ne sont assurément pas fondés.
Contrairement à ce qui est soutenu, le législateur n'a, en premier lieu, pas méconnu le principe constitutionnel d'égalité en attribuant à chaque autorité organisatrice de transport le soin de définir les dessertes prioritaires. Tout au contraire, il a, ainsi, assuré la meilleure adaptation du dispositif que la loi organise à la diversité des situations locales, en vue de garantir à l'ensemble des usagers l'application effective des principes qu'il a fixés, en fonction des circonstances locales et de la situation propre à chaque entreprise.
La loi déférée n'a, en deuxième lieu, ni pour objet ni pour effet d'avantager les grandes entreprises de transport parmi celles qui sont candidates aux conventions d'exploitation. Au demeurant, les entreprises aptes à présenter les « meilleurs » plans de transport et d'information ne sont pas celles qui disposent d'importantes capacités financières mais celles qui sont dotées de la meilleure organisation et au sein desquelles le dialogue social est une réalité.
En troisième lieu, la loi déférée ne porte aucune atteinte au principe d'égalité en renvoyant au règlement intérieur de chaque entreprise le soin de fixer les sanctions disciplinaires applicables en cas d'inobservation de la formalité de déclaration préalable. On doit observer, à cet égard, que le code du travail ne mentionne aucune sanction disciplinaire et que son article L. 122-34 prévoit que le règlement intérieur fixe la nature et l'échelle des sanctions que peut prendre l'employeur.
VI. - Sur les autres griefs
A. - Ainsi qu'il a été dit, l'article 5 de la loi déférée prévoit une déclaration individuelle obligatoire 48 heures avant de participer à la grève.
Le III de l'article 2 de la loi dispose que les procédures de prévention des conflits prévues dans les accords-cadres signés les 30 mai 1996, 23 octobre 2001 et 20 février 2006 à la RATP et le 8 octobre 2004 à la SNCF, ainsi que celles prévues dans les accords conclus avec d'autres entreprises de transport avant le 1er juillet 2007, sont mises en conformité, par voie d'avenant, avec le présent article au plus tard le 1er janvier 2008.
Les députés auteurs de l'une des saisines soutiennent que l'article 6 de la loi déférée méconnaîtrait le droit au respect de la vie privée et que le III de l'article 2 porterait atteinte à la liberté contractuelle protégée par l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
B. - Ces moyens seront écartés.
En premier lieu, en énonçant que les informations issues des déclarations individuelles ne peuvent être utilisées que pour l'organisation du service durant la grève, qu'elles sont couvertes par le secret professionnel et que leur utilisation à d'autres fins ou leur communication à toute personne autre que celles désignées par l'employeur comme étant chargées de l'organisation du service est passible des peines prévues à l'article 226-13 du code pénal, le législateur a entouré l'utilisation de la déclaration individuelle de garanties propres à assurer pleinement, et en tout état de cause, le respect du droit à la vie privée.
En second lieu, les dispositions critiquées du III de l'article 2 de la loi ne portent pas atteinte aux accords existants dans les entreprises qu'elles visent. Elles ont pour seul objet de mettre à la charge de celles-ci une obligation de mise en conformité, pour l'avenir, des procédures de prévention des conflits que ces accords contiennent avec les dispositions de l'article 2 qui imposent de fixer les modalités d'une négociation préalable obligatoire.
On doit préciser que, dans les accords-cadres signés à la SNCF et à la RATP, un article unique porte sur la prévisibilité des conflits mais que la règle fixée dans chaque accord est optionnelle, conformément à l'état du droit applicable lorsqu'ils ont été conclus. La loi met à la charge des deux entreprises concernées la seule obligation de rendre obligatoire ce qui n'était qu'une possibilité. Cette obligation répond, au demeurant, au motif d'intérêt général de faire entrer les dispositifs prévus dans les entreprises concernées dans le droit commun organisé par la loi déférée.
On peut remarquer que le législateur, loin de remettre en cause des conventions en cours, s'est appuyé sur ces accords passés pour organiser le dispositif qu'il prévoit et, s'agissant des sociétés précitées, il n'impose pas une obligation de renégociation globale, mais seulement sur un point particulier, pour la mise en conformité avec les dispositions qu'il édicte.
Le moyen tiré d'une atteinte portée à la liberté contractuelle résultant de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ne pourra, par suite, qu'être écarté.
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Pour ces raisons, le Gouvernement est d'avis qu'aucun des griefs articulés par les députés et sénateurs requérants n'est de nature à conduire à la censure des dispositions de la loi sur le dialogue social et la continuité du service public dans les transports terrestres réguliers de voyageurs. Aussi estime-t-il que le Conseil constitutionnel devra rejeter les recours dont il est saisi.