J.O. 49 du 27 février 2007
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Observations du Gouvernement sur les recours dirigés contre la loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament
NOR : CSCL0710046X
Le Conseil constitutionnel a été saisi, par plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs, de deux recours dirigés contre les articles 35 et 36 de la loi portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine du médicament, adoptée le 14 février 2007.
Ces recours appellent, de la part du Gouvernement, les observations suivantes.
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A. - Les articles 35 et 36 de la loi déférée modifient les dispositions de l'article 52 de la loi no 2004-806 du 9 août 2004. Le premier article détermine les conditions dans lesquelles les professionnels ne bénéficiant pas d'une inscription de droit sur la liste départementale sur laquelle sont enregistrées les inscriptions au registre national des psychothérapeutes peuvent s'inscrire sur cette liste. Le second article précise les caractéristiques de la formation que les psychothérapeutes doivent avoir suivi.
Les députés requérants font valoir que cet article aurait été adopté en méconnaissance des articles 39 et 44 de la Constitution.
B. - Cette critique appelle les observations suivantes.
Il résulte des dispositions combinées des articles 39, 44 et 45 de la Constitution que le droit d'amendement peut s'exercer à chaque stade de la procédure législative, sous réserve des dispositions particulières applicables après la réunion de la commission mixte paritaire.
Le Conseil constitutionnel n'impartit plus à l'exercice du droit d'amendement des limites tenant à l'ampleur intrinsèque des adjonctions ou modifications apportées au texte initial (décision no 2001-445 DC du 19 juin 2001 ; décision no 2001-455 DC du 12 janvier 2002). La seule limite opposable à l'exercice du droit d'amendement, avant la réunion de la commission mixte paritaire, tient au fait que les adjonctions et modifications apportées au texte en cours de discussion ne peuvent être dépourvues de tout lien avec le texte soumis au Parlement (décision no 2001-455 DC du 12 janvier 2002 ; décision no 2002-459 DC du 22 août 2002 ; décision no 2003-472 DC du 26 juin 2003 ; décision no 2003-481 DC du 30 juillet 2003 ; décision no 2005-532 DC du 19 janvier 2006 ; décision no 2006-533 DC du 16 mars 2006).
Au cas présent, les articles 35 et 36 de la loi déférée ont été rétablis par la commission mixte paritaire. Le Sénat n'avait, en effet, pas voté les dispositions qu'ils reprennent et qui sont issues d'amendements parlementaires présentés à l'Assemblée nationale et que celle-ci a adoptés le 11 janvier 2007. Ces dispositions, votées en première lecture par l'Assemblée nationale, peuvent être regardées comme n'étant pas dépourvues de tout lien avec le texte en discussion.
On peut observer, d'une part, que le champ principal des dispositions qui figuraient dans le texte du projet de loi initial consistait à procéder à la transposition de directives communautaires. Ces dispositions visaient ainsi, conformément aux exigences constitutionnelles et aux engagements souscrits par la France, à mettre la législation française en conformité avec le droit communautaire et à la rapprocher ainsi de celle applicable dans les autres Etats membres de l'Union européenne. De la même façon, les dispositions critiquées des articles 35 et 36 de la loi déférée, qui encadrent l'usage du titre de psychothérapeute, contribuent à rapprocher la législation française du droit applicable dans la plupart des autres Etats membres de l'Union européenne. La psychothérapie y est, en effet, généralement une activité réglementée, soumise en particulier à une exigence de formation ou liée à l'exercice de la médecine.
Il apparaît, d'autre part, que les psychothérapies offrent une solution alternative ou complémentaire par rapport à la médication. Elles sont pratiquées comme alternatives aux traitements pharmacologiques pour les troubles peu sévères ou qui ne sont pas susceptibles d'être traités par cette voie. Elles accompagnent les médications conçues pour les troubles les plus graves.
Les études de l'INSERM mettent en évidence l'efficacité des psychothérapies, en particulier des thérapies cognitivo-comportementales (TCC), dans le traitement ou la prévention des dépressions, en substitution de médications. Parmi les patients traités seulement au moyen d'antidépresseurs, 60 % rechutent alors que le taux de rechute n'est que de 30 % si les patients ont suivi une thérapie cognitivo-comportementale seule ou en complément de médicaments.
On peut ajouter que, dans le cadre de sa recommandation « prise en charge d'un épisode dépressif isolé de l'adulte en ambulatoire » de mai 2002, l'Agence nationale d'accréditation et d'évaluation en santé (ANAES) a souligné que pour les dépressions légères une TCC peut être utilisée seule en traitement initial. Les autres formes de thérapie sont également efficaces. S'agissant en particulier des enfants et des adolescents, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (AFSSAPS) a rappelé en 2005 qu'un traitement médicamenteux ne peut être envisagé qu'en association avec une psychothérapie.
Compte tenu des liens ainsi établis entre le recours à la psychothérapie et les traitements médicamenteux, le Gouvernement estime que les articles 35 et 36 ne sont pas dépourvus de tout lien avec l'objet initial du projet de loi.
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Pour ces raisons, le Gouvernement considère que les critiques adressées par les députés et sénateurs saisissants ne sont pas de nature à justifier la censure des articles critiqués de la loi déférée. C'est pourquoi il demande au Conseil constitutionnel de rejeter les recours dont il est saisi.