J.O. 13 du 15 janvier 2006
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Avis de la commission consultative aéroportuaire sur la saisine de M. le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer en date du 23 novembre 2005 dans le cadre de la préparation du contrat de régulation économique d'Aéroports de Paris pour la période 2006-2010
NOR : EQUA0502210V
Le transport aérien en région parisienne est un atout majeur pour le développement de notre pays, tant en ce qui concerne l'activité économique et la compétitivité des entreprises françaises que le tourisme. Il contribue à faire de Paris et de sa région un pôle européen et mondial de première importance.
Pour se développer, le transport aérien a besoin de plates-formes aéroportuaires performantes en termes de capacité, d'infrastructures, de qualité de service et de coûts, répondant à tous les besoins de transport des personnes et des marchandises.
A cet égard, les plates-formes parisiennes ont pris du retard, notamment par rapport à la plupart des autres grands aéroports européens. Ce retard risque de se creuser dans la mesure où des investissements importants sont programmés dans les prochaines années sur ces aéroports concurrents.
Il est primordial que les plates-formes d'Orly et de Roissy comblent rapidement ce retard et retrouvent pour la fin de la décennie une situation qui soutienne facilement la comparaison avec Londres, Francfort, Amsterdam ou encore Madrid.
C'est une ambition qui doit être portée par tous les acteurs concernés : l'Etat, les compagnies aériennes, Aéroports de Paris :
- l'Etat dont la responsabilité est de créer les conditions d'un développement économique soutenu pour la région parisienne et, plus généralement, pour notre pays ;
- les compagnies aériennes, et notamment le groupe Air France - KLM, car les aéroports parisiens sont un atout majeur de leur développement ;
- Aéroports de Paris, dont c'est la mission et la raison d'être.
Ce rattrapage va nécessiter un effort particulier sur la période 2006-2010 : cet effort doit être consenti par toutes les parties concernées. Il sera à la fois facilité et exigé par la croissance attendue du trafic, qui donne l'opportunité d'améliorer la performance globale des plates-formes.
Les développements ci-dessous et les propositions formulées répondent aux questions que le ministre a posées à la commission. Ils s'inscrivent dans le cadre de l'ambition commune qui anime tous les acteurs. Ils précisent l'avis de la commission sur les efforts à consentir par chacun d'entre eux et sur les modalités de leur mise en oeuvre.
I. - L'évolution du trafic
1. La première opportunité à saisir pour mettre les plates-formes parisiennes à niveau, c'est de tirer au mieux parti de la croissance anticipée de l'activité.
Tous les acteurs prévoient en effet une progression sensible du trafic sur la période. Cette croissance sera génératrice pour Aéroports de Paris de revenus tant aéronautiques que non aéronautiques. Elle permettra, si elle s'accompagne d'une maîtrise des charges, d'améliorer l'efficacité économique des plates-formes.
L'évaluation de la contribution de cette croissance à l'amélioration de la performance des aéroports parisiens repose sur des prévisions de trafic, exercice délicat, qui plus est lorsqu'il concerne un horizon temporel de cinq ans. En effet, dans le secteur du transport aérien, particulièrement sensible aux aléas de toute nature, la probabilité pour qu'un accident de parcours se produise sur une telle période n'est pas négligeable et, si tel était le cas, la période est trop courte pour que son impact soit atténué.
Compte tenu des incertitudes inévitables sur le scénario de trafic à retenir, il paraît ainsi important de prévoir dès l'origine des mécanismes d'ajustement ou de révision du contrat de régulation.
2. Il ressort des analyses des différents acteurs des appréciations relativement contrastées s'agissant du rythme de croissance de l'activité sur les plates-formes parisiennes.
Ainsi, si Aéroports de Paris s'est fondée sur un scénario de croissance du trafic de passagers de 3,0 % ou 3,5 % par an, les transporteurs aériens présentent des prévisions s'échelonnant de 3,5 % à 4,5 % de croissance, l'écart étant le plus sensible sur le trafic international.
Ces divergences reposent sur des approches méthodologiques propres à chaque acteur. L'approche d'Aéroports de Paris consiste à évaluer l'évolution de la demande potentielle sur la base, pour l'essentiel, d'hypothèses macro-économiques. Les compagnies aériennes, en particulier Air France - KLM, ont une approche différente, qui repose sur une estimation de croissance de l'offre, à partir notamment des programmes de flotte anticipés sur les prochaines années. L'essentiel de la différence avec la prévision d'Aéroports de Paris se situerait dans la prise en compte d'une meilleure exploitation de la demande potentielle grâce aux outils dont disposent les compagnies aériennes (« yield management »).
3. Au vu des auditions auxquelles elle a procédé et des analyses dont elle a été destinataire, la commission considère que l'estimation réalisée par Aéroports de Paris est trop prudente, tant au regard des hypothèses macro-économiques que du pouvoir d'attraction que devrait avoir la place aéroportuaire de Paris dans les années à venir. Parallèlement, celles des compagnies aériennes ont semblé volontaristes, ne prenant pas suffisamment en compte les aléas que pourrait connaître le trafic sur une période aussi longue.
Elle estime, dans ces conditions, que le contrat de régulation pourrait retenir un scénario central de croissance du trafic de passagers de 3,75 % par an, l'essentiel de la différence avec la proposition d'Aéroports de Paris concernant le développement du trafic intercontinental.
4. La commission considère que les écarts qui seront immanquablement constatés entre le scénario retenu et la réalité devraient pouvoir être pris en compte de manière souple et réactive sur les paramètres du contrat de régulation, sans pour autant conduire à des ajustements trop volatils, d'une année à l'autre, sur les tarifs des redevances.
Ainsi, le contrat de régulation devrait prévoir des mécanismes d'intéressement des partenaires, aéroport et compagnies aériennes, selon les écarts à la hausse et à la baisse de l'activité.
La commission considère légitime que soit répercutée sur les compagnies aériennes une part majoritaire des effets financiers de ces écarts. En effet, il paraît juste de les accompagner et de les récompenser pour les effets bénéfiques d'une croissance volontariste de l'offre. A contrario, en cas de croissance moins soutenue, il est équitable qu'elles participent à l'effort d'investissement d'Aéroports de Paris consenti le plus souvent à leur demande.
Il apparaît cependant légitime à la commission qu'une part des écarts de recettes aéronautiques, à la hausse comme à la baisse, soit affectée à Aéroports de Paris. Cela traduirait notamment le fait que les écarts de trafic ont potentiellement des répercussions sur les charges d'Aéroports de Paris ainsi que sur ses autres recettes. Elle juge en outre nécessaire d'inciter au mieux Aéroports de Paris, par un tel mécanisme de juste partage, à accompagner les efforts qui seraient déployés par les compagnies aériennes.
Dans ces conditions, la commission propose que :
- dans une fourchette relativement étroite, de l'ordre de 0,2 % à 0,3 % de trafic, l'évolution prévue des tarifs reste inchangée, pour éviter des ajustements systématiques et pour refléter le risque normal qu'Aéroports de Paris doit assumer ;
- en cas de dépassement de ces seuils, les effets sur les recettes aéronautiques d'un niveau de trafic s'écartant du scénario de base, à la hausse comme à la baisse, soient compensés majoritairement et rapidement sur les tarifs des redevances, à hauteur des deux tiers environ de l'écart de recettes ;
- si le trafic devait s'écarter deux années de suite trop fortement du scénario de base, à un rythme annuel qui différerait de 1,5 % à 2,0 % par exemple, cela constituerait un motif de révision du contrat, pour prendre en compte le changement notable de ses conditions économiques.
II. - Les enjeux de la régulation économique
1. Le deuxième facteur, en matière d'efforts à consentir pour restaurer la compétitivité des plates-formes parisiennes, concerne les objectifs de rentabilité financière de l'entreprise. Il doit pouvoir, selon la commission, s'apprécier à la fois au regard de la situation propre d'Aéroports de Paris et des conditions d'une régulation économique saine.
En particulier, au vu de la rentabilité actuelle d'Aéroports de Paris, il est apparu à la commission que l'application d'un mécanisme de caisse unique intégrale était justifiée lors du premier contrat de régulation.
2. La commission considère que l'un des fondements de la régulation économique doit consister en l'adéquation entre le retour sur les capitaux engagés par Aéroports de Paris (RCE) et le coût moyen pondéré de ces capitaux (CMPC).
Cette équation, RCE = CMPC, n'est contestée par aucun des acteurs. Elle est cohérente avec la réglementation issue du décret du 20 juillet 2005 relatif aux redevances pour services rendus sur les aéroports, qui stipule que l'exploitant d'aéroport reçoit une juste rémunération évaluée au regard du CMPC.
Dès lors, la commission estime que, s'agissant de cette équation financière, les deux questions fondamentales sont les suivantes :
- quel est le niveau de CMPC à retenir par le régulateur pour les activités d'Aéroports de Paris entrant dans le champ de la caisse unique ?
- à quelle échéance temporelle convient-il d'examiner l'adéquation entre le RCE et le CMPC ?
3. La question de l'évaluation du CMPC d'Aéroports de Paris peut prêter à discussion. Sur la base des évaluations très divergentes des différents acteurs, la commission a choisi, plutôt qu'une valeur unique, de retenir une fourchette d'évaluation prenant en compte les éléments suivants :
- la comparaison avec la situation des grands aéroports cotés sur les marchés financiers et avec des monopoles régulés dans d'autres secteurs d'activité ;
- l'évaluation des différents paramètres non seulement sur la base de leurs valeurs instantanées, mais également, compte tenu du caractère pluriannuel de la régulation économique, sur celle de leurs évolutions historiques et prospectives ;
- l'évolution de la structure financière d'Aéroports de Paris, notamment le ratio d'endettement ;
- le fait que le périmètre de régulation n'englobe pas toutes les activités de l'entreprise.
Dans ces conditions, la commission recommande de retenir, pour les besoins de la régulation économique, un CMPC situé dans une fourchette allant de 5,8 % à 6,5 % en valeur nominale et après impôt.
4. La seconde question concerne l'horizon temporel sur lequel doit s'apprécier la juste rémunération des capitaux investis.
L'appréciation de la commission sur cette question a pris en compte les éléments suivants :
- Aéroports de Paris doit encore améliorer sa performance économique ;
- l'entreprise connaît actuellement un haut de cycle en matière d'investissements, qui se traduit par un volume de dépenses en capital très élevé ces dernières années et sur le début de la période 2006-2010 ; ce rythme de dépenses devrait être amené à se réduire sensiblement à compter de 2008 et sur la période couverte par le deuxième contrat de régulation.
Ces éléments incitent à prévoir un rattrapage du RCE par rapport au CMPC plutôt en fin de période de régulation. La commission a constaté que, dans son dossier public, Aéroports de Paris indique vouloir tendre vers l'objectif d'une égalité entre le RCE et le CMPC en 2010.
Dans ces conditions, la commission recommande que la régulation économique prenne en compte l'objectif d'un RCE prévisionnel égal au CMPC à l'horizon de 2010, en retenant pour cette valeur un niveau situé dans le bas de la fourchette précitée.
III. - Les enjeux pour Aéroports de Paris
1. Le retard pris par les plates-formes parisiennes par rapport à la plupart des grands aéroports européens est reconnu par tous les acteurs : il est urgent de le rattraper, ce qui exige, du point de vue de la commission, qu'Aéroports de Paris poursuive, dans les cinq prochaines années, les efforts engagés. Ces efforts doivent porter autant sur l'offre aux clients, le développement des capacités, la réhabilitation d'installations qui ont vieilli et l'amélioration significative de la qualité de service que sur les moyens d'y parvenir, notamment par la meilleure maîtrise des coûts tant d'investissement que d'exploitation.
A cet égard, la commission a pu apprécier la volonté de la direction d'Aéroports de Paris en matière de remise à niveau des installations et services aéroportuaires, et les orientations retenues pour que l'entreprise soit à l'avenir davantage tournée vers les besoins de ses clients, avec le souci d'améliorer son efficacité de gestion.
2. L'amélioration des services offerts par Aéroports de Paris passe, dans les cinq prochaines années, par la réalisation d'un volumineux programme d'investissements. Ce programme sera notamment composé d'opérations qui auront une influence certaine sur la qualité de service offerte aux passagers et aux compagnies, dont les plus significatives sont :
- la réalisation du satellite S3 de CDG ;
- la reconstruction de la jetée du terminal 2 E ;
- la réhabilitation du terminal CDG1 ;
- la réalisation de CDG Val ;
- le réaménagement des circuits internationaux d'Orly Sud.
Le respect du calendrier prévu pour ces opérations représente un enjeu essentiel pour les utilisateurs des plates-formes. La question a été posée des incitations financières qu'il conviendrait de prévoir dans le futur contrat afin que le calendrier de ces opérations soit tenu.
La commission observe que l'entreprise est déjà incitée à tenir le calendrier des principales opérations : les retards engendreraient en effet pour elle des surcoûts d'investissement et de moindres recettes commerciales ; ils se feraient également sentir sur le niveau de qualité de service pour lequel des incitations financières sont prévues.
La commission considère donc qu'il n'est pas nécessaire de prévoir de pénalités spécifiques pour des retards dans la mise en service des principaux investissements.
3. Un autre enjeu important, qui concerne plus spécifiquement le « hub » de la compagnie Air France - KLM, réside dans le calendrier de réalisation du satellite S4 de CDG. Aéroports de Paris n'a prévu, sur la période 2006-2010, que des travaux préliminaires, correspondant à une mise en service de ce terminal en 2014.
La compagnie Air France - KLM considère quant à elle qu'une mise en service dès l'été 2011 est fortement souhaitable pour accompagner la croissance vigoureuse du trafic anticipée et pour permettre à son « hub » de bénéficier d'un taux de contact se rapprochant de celui des autres grandes plates-formes européennes de correspondances.
La commission considère que la réalisation anticipée du satellite S4 est effectivement souhaitable dans l'optique d'une remise à niveau de la qualité de service offerte à CDG. Elle estime qu'en raison des contraintes techniques de conception et de construction une mise en service à l'été 2011 est difficilement envisageable ; cette mise en service devrait intervenir au plus tard en 2012, Aéroports de Paris devant rechercher avec Air France - KLM l'optimisation du programme permettant d'avoir un impact le plus limité possible sur les investissements 2006-2010.
4. Les défis posés à Aéroports de Paris, tant en ce qui concerne la mise en place de nouvelles capacités que le niveau de qualité de service, nécessitent un effort particulier d'investissements sur la période 2006-2010.
Selon le dossier présenté par Aéroports de Paris, ce programme d'investissements de 2 519 MEUR (valeur 2005) se scinde en plusieurs parties :
- des investissements de capacité pour 1 087 MEUR concentrés sur les installations passagers ;
- des investissements de restructuration lourde des terminaux pour 238 MEUR ;
- des investissements courants de 731 MEUR ;
- des investissements de développement immobilier pour 185 MEUR ;
- des frais d'études et de surveillance des travaux (FEST) pour 243 MEUR.
S'agissant des FEST immobilisés, la commission considère que leur montant est ramené sur la période à un niveau conforme aux usages de la profession.
En ce qui concerne le calendrier de mise en service des nouvelles installations, outre l'anticipation en 2012 du satellite S4, il est apparu à la commission que l'opération relative à la phase 2 du Tri-Bagages Est (TBE) de CDG n'était pas suffisamment mature pour envisager une mise en service dès 2009. De plus, la commission a constaté que la compagnie Air France - KLM, qui sera l'utilisatrice unique de cet équipement, n'était pas demanderesse d'une mise en service avant 2011.
Elle estime qu'Aéroports de Paris devrait prendre en considération les besoins des compagnies basées autres qu'Air France - KLM en matière de hangar de maintenance légère.
La commission considère qu'une optimisation du programme d'investissement est souhaitable sur la période 2006-2010, conduisant à une réduction de 250 MEUR des dépenses hors impact du satellite S4. Celle-ci doit être conduite en concertation avec les utilisateurs, à la fois sur la simplification de certains programmes et le calendrier de leur réalisation.
En matière d'éventuelles clauses d'ajustement des tarifs en fonction de la réalisation ou non du volume d'investissements prévu, la commission considère qu'il n'est pas nécessaire d'en prévoir sur la période 2006-2010, dans la mesure où le programme d'investissements serait préalablement optimisé et où la majorité des dépenses concernent des opérations déjà lancées. La commission estime toutefois qu'il serait légitime qu'un bilan des dépenses en capital soit réalisé en fin de contrat, de telle sorte à jouer, le cas échéant, sur le niveau des redevances du contrat suivant. La commission estime en revanche que toute augmentation des coûts du programme d'investissements non imputable à des demandes des clients devrait être en totalité prise en charge par Aéroports de Paris.
Enfin, la commission estime qu'une attention particulière doit être portée aux investissements immobiliers non aéronautiques, dans la mesure où cette activité sera exclue du périmètre de régulation pour le deuxième contrat.
5. La commission a pris connaissance des hypothèses retenues par Aéroports de Paris, sur la période 2006-2010, pour améliorer la performance économique et financière des plates-formes parisiennes.
Ces orientations traduisent une volonté certaine de l'entreprise de développer les recettes non aéronautiques comme de maîtriser l'évolution des charges d'exploitation.
Il revient à la direction d'Aéroports de Paris de mieux prendre en compte certains points qui affectent la situation financière et de déterminer les domaines dans lesquels des efforts complémentaires pourraient intervenir. La commission a noté les quelques pistes suivantes, qui ne sont pas exhaustives :
- l'hypothèse d'inflation, qui devrait s'aligner sur les prévisions du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie ;
- l'hypothèse d'évolution de l'indice du coût de la construction ;
- la réduction des frais d'études non immobilisés ;
- le développement des recettes commerciales ;
- l'amélioration de la productivité globale, sur le périmètre régulé, confortant les efforts déjà prévus par Aéroports de Paris ;
- l'évolution du chiffre d'affaires des redevances aéronautiques accessoires (tris-bagages, banques d'enregistrement, comptoirs d'embarquement, etc.).
Hors effets liés à la croissance du trafic et à l'objectif de RCE, la prise en compte des points ci-dessus est de nature à réduire le besoin d'augmentation des tarifs de 1,3 à 1,8 point par an.
Par ailleurs, Aéroports de Paris a proposé un incrément de 0,6 point de la hausse de tarifs de 2006 destiné à compenser l'effet de l'introduction d'une redevance mise à sa charge par la direction générale de l'aviation civile (DGAC). Au vu des informations données à la commission par la DGAC, la commission recommande que le niveau et le calendrier de cet incrément soient vérifiés le moment venu.
6. L'amélioration de la qualité de service rendue aux utilisateurs des plates-formes parisiennes doit incontestablement constituer un point central de l'action d'Aéroports de Paris sur la période 2006-2010. II est reconnu par tous les acteurs que les aéroports franciliens ne figurent pas en bon rang à cet égard dans les comparaisons internationales. La commission a eu confirmation qu'Aéroports de Paris plaçait bien cette problématique au coeur de ses préoccupations des prochaines années.
La commission est consciente que l'atteinte du niveau de qualité souhaitable prendra plusieurs années. Les investissements réalisés sur la période 2006-2010 contribueront certes à cet effort, mais la commission estime que l'entreprise doit développer une « attitude de service » plus tournée vers les besoins des clients et leur satisfaction.
La commission considère que la mise en place par Aéroports de Paris d'indicateurs de qualité de service partagés par l'ensemble des acteurs est essentielle dans cette démarche qualité. Le fait d'y adjoindre, pour certains d'entre eux, des incitations financières spécifiques ne peut qu'encourager l'entreprise dans la poursuite de cette priorité.
A cet égard, la commission constate que la liste des indicateurs proposés par Aéroports de Paris comme devant être soumis à objectifs et incitations financières fait l'objet d'un relatif consensus. Elle n'estime pas souhaitable de multiplier davantage leur nombre, afin de maintenir une bonne lisibilité de la régulation économique.
En revanche, la commission considère qu'il serait souhaitable qu'Aéroports de Paris s'engage à mesurer et partager un certain nombre d'autres indicateurs dont l'évolution serait suivie sans pour autant faire l'objet d'incitations financières spécifiques. Il pourrait s'agir par exemple d'indicateurs reflétant les temps d'attente aux postes d'inspection-filtrage des passagers, aux contrôles trans-frontières et à la livraison des bagages, ainsi que d'indicateurs relatifs aux conditions dans lesquelles les personnels des entreprises et services publics exercent leurs activités sur les plates-formes. La commission estime que, même sans incitation financière, la mesure de la performance et le partage d'informations peuvent être un bon levier pour identifier les actions à entreprendre et encourager l'amélioration de la qualité.
S'agissant des indicateurs qui seraient soumis à objectif, la commission appelle l'attention sur la difficulté et l'importance de définir des niveaux de référence pertinents. Etant donné que l'historique des mesures effectuées par Aéroports de Paris est relativement limité, la prudence devrait être de mise quant à l'amplitude des incitations financières associées. A cet égard, ayant entendu les différentes parties prenantes, la commission estime qu'un compte de compensation des malus et des bonus pourrait être institué. Il pourrait être activé à partir de 2007 et soldé en fin de période ou dès lors qu'il atteindrait un certain seuil à déterminer.
IV. - Les enjeux pour les compagnies aériennes
1. Les compagnies aériennes souhaitent fortement voir la performance des aéroports parisiens s'améliorer rapidement pour arriver au niveau, le plus tôt possible, des autres grandes plates-formes européennes. Cela passe en particulier par des investissements très significatifs, tant en capacités nouvelles qu'en restructuration d'installations existantes. Cela passe aussi par l'exigence d'une plus grande écoute et d'une plus grande réactivité d'Aéroports de Paris face aux besoins opérationnels de ses clients.
Si l'ambition de faire dans les prochaines années des plates-formes franciliennes des aéroports de référence au niveau européen est avant tout une exigence qui s'impose à l'entreprise et à l'Etat, la commission estime légitime que les compagnies aériennes contribuent également à l'effort commun pour que cet objectif soit atteint rapidement.
Cette contribution devrait être notamment financière, via une augmentation adaptée des tarifs des redevances aéroportuaires.
2. Les redevances aéroportuaires représentent aujourd'hui une part non négligeable des coûts des compagnies aériennes. Elles rémunèrent des installations et des services fondamentaux dans leurs stratégies de développement.
Après examen de la contribution de la croissance du trafic à l'amélioration de la performance économique des aéroports parisiens, et après avoir tenu compte des efforts qui seraient consentis à la fois par l'Etat et par Aéroports de Paris, la commission recommande que les compagnies aériennes apportent leur contribution à l'effort collectif par une augmentation des redevances. Hors inflation, celle-ci ne devrait pas dépasser 2,5 % chaque année, tout en étant limitée à 11,0 % pour l'ensemble de la période 2006-2010. Cette hausse des tarifs s'entend hors effet de la redevance perçue par la DGAC.
3. Au-delà du niveau global des tarifs aéroportuaires, la question de la structure de tarification constitue un enjeu au moins aussi important pour les clients des aéroports. En effet, en fonction de la structure de flotte des compagnies et de leurs conditions d'exploitation, l'évolution des charges aéroportuaires qu'elles supporteront peut être très sensiblement différente de celle des tarifs dans leur ensemble.
La commission a en particulier examiné l'opportunité d'une différenciation tarifaire entre les plates-formes de CDG et d'Orly. Elle constate à cet égard qu'Aéroports de Paris ne dispose pas, pour l'heure, d'une comptabilité analytique par aéroport. Elle considère en outre que dans la logique de la caisse unique et eu égard aux revenus extra-aéronautiques importants issus de CDG, conjointement au fait que les installations de CDG ont vocation à être utilisées de manière plus intensive que celles d'Orly, l'effet d'une telle différenciation n'irait pas nécessairement dans le sens d'une réduction des tarifs à Orly. Enfin, une différenciation tarifaire risquerait de poser des difficultés au regard du caractère contraint de l'affectation des compagnies aériennes entre les deux plates-formes. Dans ces conditions, la commission considère qu'il n'est pas souhaitable de s'engager à ce stade dans la voie d'une telle différenciation tarifaire.
La commission a été en outre amenée à examiner la question du financement des tris-bagages de l'aéroport de CDG. Ces tris-bagages font aujourd'hui l'objet de modes de tarification différenciés, en fonction de leur caractère commun à plusieurs clients ou spécifique à une compagnie. La commission considère à cet égard qu'il ne serait pas légitime, voire juridiquement risqué au regard du principe de redevance pour services rendus, de prévoir une mutualisation des coûts et des recettes entre des systèmes répondant à des exigences opérationnelles fondamentalement différentes.
En ce qui concerne le poids relatif de la redevance d'atterrissage par rapport à la redevance passager, les orientations d'Aéroports de Paris iraient dans le sens d'une concentration des hausses de tarifs sur cette dernière redevance. Cela est apparu à la commission cohérent avec la nature du programme d'investissements à mettre en oeuvre, qui concerne pour l'essentiel les aérogares, et conforme à l'équilibre entre ces deux ressources constaté sur les autres grandes plates-formes européennes.
Enfin, Aéroports de Paris souhaite procéder à un rééquilibrage des tarifs de la redevance d'atterrissage entre les petits et les gros porteurs, au profit de ces derniers. La commission constate effectivement que les redevances des gros porteurs sont aujourd'hui significativement plus élevées à Paris que sur d'autres grandes plates-formes européennes, ce qui peut nuire à la compétitivité de la place aéroportuaire de Paris ; elle est favorable au principe du rééquilibrage proposé, mais considère que le maintien de conditions raisonnables d'accès aux petits et moyens porteurs représente un enjeu important en matière d'aménagement du territoire et de viabilité financière des transporteurs régionaux.
V. - Les relations entre Aéroports de Paris et les utilisateurs
1. La position de monopole confirmée sur les activités du périmètre régulé implique un devoir de dialogue et de transparence d'Aéroports de Paris vis-à-vis des utilisateurs des plates-formes parisiennes.
Cette transparence doit s'appliquer en premier lieu à l'organisation et l'exploitation des plates-formes, ainsi qu'à la fixation et au suivi des indicateurs de qualité de service : elle passe par une concertation régulière et véritable au sein des commissions aéroportuaires ad hoc.
Elle concerne également le programme et le calendrier des investissements.
Elle nécessite enfin que les éléments financiers déterminants de l'entreprise soient présentés, sans réticence et dans le meilleur esprit d'ouverture, aux partenaires concernés par les services publics aéroportuaires, sauf obstacle juridique.
Cette transparence est la condition nécessaire de relations responsables entre les principaux acteurs des plates-formes : elle évite les procès d'intention et un sentiment de subordination encore trop souvent répandus ; elle permet la compréhension et la recherche de la voie la plus adaptée entre des intérêts qui peuvent être contraires.
La commission encourage Aéroports de Paris à être exemplaire en la matière.
2. Aménageur, constructeur, gestionnaire, Aéroports de Paris est également vis-à-vis de ses clients (compagnies, passagers, entreprises et services publics implantés) un prestataire de services, dont l'attitude première se doit d'être à l'écoute des besoins exprimés et de chercher à les satisfaire.
Cette « attitude de service » n'est pas naturelle dans une situation en grande partie non concurrentielle ; elle nécessite une prise de conscience de l'ensemble du management et des acteurs de terrain d'autant plus difficile qu'elle ne s'impose pas par un positionnement à conserver sur le marché.
Cette prise de conscience semble initiée au plus haut niveau d'Aéroports de Paris : elle doit irriguer tous les échelons et imprégner les comportements, à la fois de ceux qui sont en position de décision et de ceux qui rendent le service.
Elle passe par un véritable projet d'entreprise dont la poursuite de la mise en oeuvre doit être fortement encouragée.
La préoccupation constante de la commission a été d'inscrire ses propositions dans la recherche de la satisfaction d'une ambition partagée : faire du système aéroportuaire parisien un outil performant au service du développement économique de la région parisienne et de la France.
Cette ambition nécessite un effort important à consentir dans les cinq prochaines années, compte tenu du retard à rattraper par rapport aux autres grandes plates-formes européennes.
Tous les acteurs sont intéressés par sa réussite.
Il est juste que cet effort soit réparti équitablement entre toutes les parties concernées. C'est le sens des propositions qui sont faites.
A N N E X E
Périmètre régulé
Le périmètre régulé est le champ d'activités d'Aéroports de Paris sur lequel est appréciée la rentabilité financière de l'entreprise pour l'exercice de la régulation économique.
Il comprend, pour le premier contrat, l'ensemble des activités d'Aéroports de Paris sur les aéroports franciliens, à l'exclusion :
- des activités d'assistance en escale ;
- des activités de sécurité et de sûreté financées par la taxe d'aéroport ;
- des missions d'insonorisation des logements riverains financées par la taxe sur les nuisances sonores aériennes.
Ce périmètre correspond à celui dit de la « caisse unique ».
Membres de la commission consultative aéroportuaire
M. Michel Bernard, président, désigné comme personnalité qualifiée par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer et le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Claude Blondel, désigné par le premier président de la Cour des comptes.
M. Yves Crozet, désigné comme personnalité qualifiée par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer et le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Patrice Durand, désigné comme personnalité qualifiée par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer et le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Francis Girault, désigné par le vice-président du Conseil d'Etat.
M. François-Michel Gonnot, député, désigné par le président de l'Assemblée nationale.
M. Jean-François Le Grand, sénateur, désigné par le président du Sénat.
Séances de la commission dans le cadre de sa saisine par le ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer
Le 23 novembre 2005.
Le 29 novembre 2005.
Le 30 novembre 2005.
Le 6 décembre 2005.
Le 9 décembre 2005.
Le 13 décembre 2005.
Le 19 décembre 2005.
Le 22 décembre 2005.
Organismes auditionnés
Aéroports de Paris.
Agence des participations de l'Etat.
Air France - KLM.
BAR/FNAM.
EasyJet.
FedEx.
IATA.
SCARA.
Contributions écrites examinées
Aéroports de Paris.
Agence des participations de l'Etat.
Air Canada.
Air France - KLM.
BAR/FNAM.
British Airways.
British Midland.
Conseil national des clients aériens.
Corsair.
Croatia Airlines.
EasyJet.
Emirates.
FedEx.
IATA.
Lufthansa.
SAS.
SCARA.
United Airlines.
WFS.