J.O. 74 du 30 mars 2005       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet
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Décision du 16 février 2005 se prononçant sur le différend qui oppose la société SA Colombié et Fils à Electricité de France sur la conclusion d'un contrat d'achat d'électricité


NOR : CREX0508131S



Vu la demande de règlement de différend, enregistrée le 7 janvier 2005, sous le numéro no 05-38-01, présentée par la société SA Colombié et Fils (ci-après dénommée « la société Colombié »), société anonyme au capital de 2 847 500 F, enregistrée sous le numéro SIRET 715 621 017 00014, dont le siège social est situé usine de Lagarrigue, 81660 Bout-du-Pont-de-l'Arn, prise en la personne de son représentant légal, M. Thierry Colombié.

La société Colombié a saisi la Commission de régulation de l'énergie du différend qui l'oppose à Electricité de France sur les conditions d'achat de l'électricité produite par sa centrale hydroélectrique du moulin de Sourniès, située à Limoux (Aude).

Elle expose qu'à la suite de l'augmentation de puissance de son installation de 343 kW à 538 kW, elle a notamment demandé, le 22 octobre 2003, un projet de contrat d'obligation d'achat additionnel au contrat du 9 octobre 1997.

La société Colombié précise qu'elle a joint à ses demandes une copie de la demande de certificat d'obligation d'achat formulée auprès du préfet de l'Aude (DRIRE).

Elle indique avoir reçu de la part d'Electricité de France, le 17 décembre 2004, pour signature, le contrat définitif, dont elle conteste la référence au coefficient d'indexation « K » de l'année 2003.

La société Colombié soutient que la valeur du coefficient fixée par Electricité de France dans le contrat d'achat correspond à celle applicable pour une demande complète de contrat d'achat effectuée en 2003. Elle estime que sa demande définitive de contrat d'achat ne pouvait être formalisée qu'à compter de la date de délivrance du certificat d'obligation d'achat, à savoir le 8 janvier 2004, et que, par suite, la demande formulée le 17 novembre 2003 ne pouvait s'apparenter qu'à un « projet de nouveau contrat d'achat ».

La société Colombié demande que la date retenue pour sa demande complète de contrat d'achat soit celle du 27 avril 2004, de sorte que l'année 2004 soit retenue comme année de référence pour la détermination du coefficient « K », au lieu de l'année 2003.

La société Colombié demande, en conséquence, à la Commission de régulation de l'énergie :

- que le coefficient d'indexation « K » figurant dans le contrat d'achat soit fixé par référence à l'année 2004, au lieu de l'année 2003 ;

- que les contrats signés par les parties le 22 décembre 2004 soient modifiés par une annexe et que les factures établies à partir de décembre 2004 soient rectifiées en conséquence ;

- que soit appliqué un taux de majoration de qualité de 63,3 %, au lieu d'un taux arrondi à 63 % ;


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Vu les observations en défense, enregistrées le 20 janvier 2005, présentées par Electricité de France, société anonyme, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris sous le numéro B 552 081 317, dont le siège social est situé 22-30, avenue de Wagram, 75008 Paris, représentée par EDF réseau distribution, pris en la personne de M. Marc Espalieu, directeur d'EDF réseau distribution.

EDF demande à la Commission de régulation de l'énergie de déclarer irrecevable la demande de la société Colombié et de se déclarer, en tout état de cause, incompétente pour en connaître.

Electricité de France soutient que la Commission de régulation de l'énergie n'aurait pas dû saisir EDF réseau distribution, dès lors que la partie mise en cause par la société Colombié est Electricité de France, en sa qualité de producteur, à savoir EDF branche énergie, qui est seule soumise à l'obligation d'achat en application des dispositions de l'article 10 de la loi du 10 février 2000.

Electricité de France soutient, en outre, que seul le juge administratif est compétent pour se prononcer sur la légalité d'une décision par laquelle Electricité de France a refusé de signer un contrat d'obligation d'achat et que, par suite, la Commission de régulation de l'énergie est incompétente en l'espèce.

Electricité de France soutient, à titre subsidiaire, que la Commission de régulation de l'énergie est incompétente pour statuer sur un litige relatif à l'obligation d'achat, dès lors que les dispositions de l'article 38 de la loi du 10 février 2000 limitent sa compétence en matière de règlement de différend aux demandes liées à l'accès ou à l'utilisation des réseaux publics opposant un utilisateur et un gestionnaire de réseau. Elle conclut que la commission est incompétente pour se prononcer sur le présent litige, qui porte exclusivement sur l'exécution par Electricité de France de l'obligation d'achat de l'électricité produite par l'installation hydroélectrique de la société Colombié, et non sur l'accès et l'utilisation du réseau.

Electricité de France demande donc à la Commission de régulation de l'énergie de déclarer irrecevable la demande de la société Colombié et, en tout état de cause, de se déclarer incompétente ;


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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi no 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, notamment son article 38 ;

Vu le décret no 2000-894 du 11 septembre 2000 relatif aux procédures applicables devant la Commission de régulation de l'énergie ;

Vu la décision du 15 février 2001 de la Commission de régulation de l'énergie relative au règlement intérieur de la commission ;

Vu la décision du 12 janvier 2005 du président de la Commission de régulation de l'énergie relative à la désignation d'un rapporteur et d'un rapporteur adjoint pour l'instruction de la présente demande de règlement de différend ;


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Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique de la Commission de régulation de l'énergie, qui s'est tenue le 16 février 2005, en présence de :

M. Jean Syrota, président, Mme Jacqueline Benassayag et MM. Bruno Lechevin, Pascal Lorot, Jacques-André Troesch, commissaires ;

M. Olivier Challan Belval, directeur général, Mme Gisèle Avoie, directrice juridique ;

M. Cyril Harry, rapporteur, M. Gaël Bouquet, rapporteur adjoint ;

M. Jean-Claude Millien, pour Electricité de France.

Après avoir entendu :

- le rapport de M. Cyril Harry, présentant les moyens et les conclusions des parties ;

- les observations de M. Jean-Claude Millien et M. Ambrosi, pour Electricité de France : Electricité de France déclare s'en remettre à ses écritures.

La commission en ayant délibéré le 16 février 2005, après que les parties, le rapporteur, le rapporteur adjoint, le public et les agents de la Commission de régulation de l'énergie se sont retirés ;


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Les faits :

Le 22 octobre 2003, la société Colombié a informé Electricité de France de l'augmentation de la puissance de son installation hydroélectrique du moulin de Sourniès, située à Limoux (Aude), de 343 kW à 538 kW.

Le 13 novembre 2003, Electricité de France a adressé à la société Colombié l'imprimé de la demande de contrat d'achat, en lui précisant que l'augmentation de puissance sollicitée, de plus de 10 %, nécessitait une nouvelle convention de raccordement.

Le 17 novembre 2003, la société Colombié a retourné à Electricité de France la demande de contrat d'achat complétée et signée.

Après avoir obtenu du préfet de l'Aude (DRIRE) un certificat d'obligation d'achat, le 8 janvier 2004, et, en l'absence de réponse d'Electricité de France, la société Colombié a renouvelé, le 27 avril 2004, sa demande tendant à obtenir un contrat d'achat additionnel à son contrat d'origine en date du 9 octobre 1997.

Le 17 décembre 2004, la société Colombié a reçu d'Electricité de France, pour signature, le contrat d'obligation d'achat qui retient l'année 2003, première année de fonctionnement de l'installation, pour la fixation du coefficient « K » d'indexation du tarif d'achat.

Le 22 décembre 2004, la société Colombié a signé le contrat d'achat communiqué par Electricité de France en exprimant, toutefois, son désaccord sur la prise en compte de l'année 2003 comme référence du coefficient d'indexation « K ».

La société Colombié a saisi la Commission de régulation de l'énergie, le 7 janvier 2005, d'une demande de règlement du différend qui l'oppose à Electricité de France sur les conditions d'achat de l'électricité produite par son installation hydroélectrique à la suite de son augmentation de puissance.

Sur la compétence de la CRE :

Aux termes du I de l'article 38 de la loi no 2000-108 du 10 février 2000, « en cas de différend entre les gestionnaires et utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution lié à l'accès auxdits réseaux ou à leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès aux réseaux publics de transport et de distribution ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats et protocoles visés au III de l'article 15 et à l'article 23, l'une ou l'autre des parties peut saisir la Commission de régulation de l'énergie ».

La Commission de régulation de l'énergie est compétente en vertu de ces dispositions pour connaître des seules demandes de règlement de différend liées à l'accès ou à l'utilisation des réseaux publics.

Or, il résulte des pièces du dossier que le litige opposant la société Colombié à Electricité de France, dont elle a saisi la Commission de régulation de l'énergie, porte exclusivement sur les conditions d'achat prévues par un contrat ayant pour objet l'exécution, par Electricité de France, de l'obligation d'achat de l'électricité, en application de l'article 10 de la loi du 10 février 2000.

Dès lors, le présent litige ne porte ni sur l'accès aux réseaux publics, ni sur leur utilisation par l'installation de production de la société Colombié.

Le différend soumis à la Commission de régulation de l'énergie ne relève donc pas de ceux dont il lui appartient de connaître au titre de l'article 38 de la loi du 10 février 2000.

Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres fins de non-recevoir opposées par Electricité de France, la demande de la société Colombié ne peut qu'être rejetée, comme portée devant une autorité incompétente pour en connaître,

Décide :


Article 1


La demande de la société SA Colombié et Fils est rejetée.

Article 2


La présente décision sera notifiée à la société SA Colombié et Fils et à Electricité de France ; elle sera publiée au Journal officiel de la République française.


Fait à Paris, le 16 février 2005.


Pour la Commission de régulation de l'énergie :

Le président,

J. Syrota