J.O. 286 du 11 décembre 2003       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 21085

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Décision n° 2003-485 DC du 4 décembre 2003


NOR : CSCL0306996S



Le Conseil constitutionnel a été saisi, dans les conditions prévues à l'article 61, deuxième alinéa, de la Constitution, de la loi modifiant la loi no 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile, le 25 novembre 2003, par M. Jean-Marc Ayrault, Mmes Patricia Adam, Sylvie Andrieux-Bacquet, MM. Jean-Marie Aubron, Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Eric Besson, Jean-Louis Bianco, Serge Blisko, Patrick Bloche, Maxime Bono, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carillon-Couvreur, MM. Jean-Paul Chanteguet, Michel Charzat, Alain Claeys, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mme Claude Darciaux, M. Michel Dasseux, Mme Martine David, MM. Marcel Dehoux, Michel Delebarre, Jean Delobel, Bernard Derosier, Marc Dolez, François Dosé, René Dosière, Julien Dray, Jean-Pierre Dufau, Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Henri Emmanuelli, Claude Evin, Laurent Fabius, Jacques Floch, Pierre Forgues, Michel Françaix, Jean Gaubert, Mmes Nathalie Gautier, Catherine Génisson, MM. Jean Glavany, Gaëtan Gorce, Alain Gouriou, Mmes Elisabeth Guigou, Paulette Guinchard-Kunstler, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. François Hollande, Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Serge Janquin, Armand Jung, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Jean-Yves Le Drian, Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Bruno Le Roux, Mme Marylise Lebranchu, M. Patrick Lemasle, Mme Annick Lepetit, MM. Jean-Claude Leroy, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Philippe Martin, Christophe Masse, Didier Mathus, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Arnaud Montebourg, Henri Nayrou, Alain Néri, Mme Marie-Renée Oget, MM. Michel Pajon, Christian Paul, Germinal Peiro, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Jean-Jack Queyranne, Paul Quilès, Simon Renucci, Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Mmes Ségolène Royal, Odile Saugues, MM. Dominique Strauss-Kahn, Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, Daniel Vaillant, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vergnier, Alain Vidalies, Jean-Claude Viollet, Philippe Vuilque, Jean-Pierre Defontaine, Paul Giacobbi, Mme Chantal Robin-Rodrigo et M. Roger-Gérard Schwartzenberg, députés,

et le même jour, par M. Claude Estier, Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Robert Badinter, Jean-Pierre Bel, Jacques Bellanger, Mme Maryse Bergé-Lavigne, M. Jean Besson, Mmes Marie-Christine Blandin, Yolande Boyer, Claire-Lise Campion, MM. Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Gérard Collomb, Raymond Courrière, Roland Courteau, Marcel Debarge, Jean-Pierre Demerliat, Claude Domeizel, Michel Dreyfus-Schmidt, Mme Josette Durrieu, MM. Bernard Dussaut, Bernard Frimat, Charles Gautier, Jean-Pierre Godefroy, Jean-Noël Guérini, Claude Haut, Mme Odette Herviaux, MM. Yves Krattinger, Serge Lagauche, André Lejeune, Claude Lise, Philippe Madrelle, Jacques Mahéas, Jean-Yves Mano, François Marc, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Pierre Mauroy, Louis Mermaz, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Jean-Marc Pastor, Guy Penne, Daniel Percheron, Jean-Claude Peyronnet, Jean-François Picheral, Bernard Piras, Mmes Danièle Pourtaud, Gisèle Printz, MM. Daniel Raoul, Paul Raoult, Daniel Reiner, Gérard Roujas, André Rouvière, Mme Michèle San Vicente, MM. Claude Saunier, Michel Sergent, René-Pierre Signé, Jean-Pierre Sueur, Simon Sutour, Michel Teston, Jean-Marc Todeschini, Pierre-Yvon Trémel, André Vantomme, André Vezinhet, Marcel Vidal et Henri Weber, sénateurs ;

Le Conseil constitutionnel,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu la Convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ;

Vu la loi no 52-893 du 25 juillet 1952 modifiée relative au droit d'asile ;

Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 28 novembre 2003 ;

Vu les observations en réplique présentées par les députés auteurs de la première saisine, enregistrées le 3 décembre 2003 ;

Vu les observations en réplique présentées par les sénateurs auteurs de la seconde saisine, enregistrées le 3 décembre 2003 ;

Le rapporteur ayant été entendu,

1. Considérant que les auteurs des deux saisines défèrent au Conseil constitutionnel la loi modifiant la loi no 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile ; qu'ils contestent notamment la conformité à la Constitution de ses articles 1er, 2, 4, 5, 6 et 10 ;

2. Considérant que le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel renvoie le Préambule de la Constitution de 1958, dispose en son quatrième alinéa : « Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur les territoires de la République » ; que, si certaines garanties attachées à ce droit ont été prévues par des conventions internationales introduites en droit interne, notamment par la Convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés, il incombe au législateur d'assurer en toutes circonstances l'ensemble des garanties légales que comporte cette exigence constitutionnelle ;

Sur l'article 1er de la loi déférée :

3. Considérant que l'article 1er de la loi déférée donne une nouvelle rédaction à l'article 2 de la loi du 25 juillet 1952 susvisée ; que le I du nouvel article 2 énonce les attributions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que les six premiers alinéas du II déterminent la procédure applicable à l'examen des demandes d'asile par l'Office ; qu'en vertu du 1° du II, l'Office reconnaît la qualité de réfugié, d'une part, à toute personne persécutée « en raison de son action en faveur de la liberté », d'autre part, à toute personne qui répond aux définitions de l'article 1er de la Convention de Genève en raison des persécutions qu'elle subit du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques et, enfin, à toute personne sur laquelle le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés exerce son mandat ; qu'en vertu du 2° du II, l'Office accorde le bénéfice d'une protection subsidiaire aux personnes qui, bien qu'elles ne remplissent pas les conditions d'admission au statut de réfugié, établissent qu'elles sont exposées dans leur pays à l'une des menaces graves qu'il mentionne ; que le III définit les auteurs des persécutions prises en compte pour l'octroi de la qualité de réfugié et des menaces graves conduisant au bénéfice de la protection subsidiaire et détermine les autorités susceptibles d'offrir une protection dans le pays d'origine ; que le IV écarte du bénéfice de la protection subsidiaire les auteurs de certains crimes, agissements ou activités ;

4. Considérant que les requérants critiquent les dispositions des II, III et IV du nouvel article 2 de la loi du 25 juillet 1952 issu de l'article 1er de la loi déférée ;

En ce qui concerne le II du nouvel article 2 de la loi du 25 juillet 1952 :

5. Considérant qu'en vertu du II du nouvel article 2 de la loi du 25 juillet 1952, pour statuer sur les demandes d'asile dont il est saisi, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides convoque le demandeur à une audition ; que, toutefois, « il peut s'en dispenser s'il apparaît que : ... b) le demandeur d'asile a la nationalité d'un pays pour lequel ont été mises en oeuvre les stipulations du 5 du C de l'article 1er de la Convention de Genève susmentionnée » ; qu'aux termes de ces stipulations, la Convention de Genève cesse d'être applicable à toute personne : « 5) Si les circonstances à la suite desquelles elle a été reconnue comme réfugiée ayant cessé d'exister, elle ne peut plus continuer à refuser de se réclamer de la protection du pays dont elle a la nationalité » ;

6. Considérant que les requérants reprochent, en premier lieu, au législateur d'avoir supprimé la « garantie essentielle de nature à rendre plus effectif le droit d'asile » que constitue l'examen individuel de chaque demande ; qu'ils font en particulier valoir que la dispense accordée à l'Office d'entendre les demandeurs d'asile auxquels peut être opposé un changement de circonstances dans leur pays d'origine en application du 5 du C de l'article 1er de la Convention de Genève viderait de sa substance le droit que cette disposition elle-même réserve aux intéressés d'invoquer « des raisons impérieuses tenant à des persécutions antérieures » pour solliciter le maintien de leur protection ; qu'ils soutiennent que ce droit inclut nécessairement celui « de se faire entendre et d'apporter un témoignage oral » ;

7. Considérant que la disposition critiquée se borne à énoncer les motifs pour lesquels l'Office français de protection des réfugiés et apatrides peut décider de ne pas procéder à l'audition du demandeur ; qu'elle ouvre à l'Office une simple faculté qu'il lui appartient de mettre en oeuvre en appréciant, cas par cas, et notamment dans les hypothèses soulevées par les auteurs des saisines, s'il y a lieu ou non de convoquer le demandeur à une audition ; que l'absence d'audition du demandeur ne saurait avoir pour effet de dispenser l'Office de procéder à un examen particulier des éléments produits à l'appui de sa demande, conformément au principe posé par le sixième alinéa du II du nouvel article 2 ; qu'en conséquence, la disposition critiquée ne prive le droit d'asile d'aucune garantie essentielle ;

8. Considérant que les requérants estiment, en second lieu, qu'« en appliquant des règles de procédure différentes à des personnes qui demandent le bénéfice du même droit », le II du nouvel article 2 créerait des différences de traitement sans rapport avec l'objet de la loi et porterait dès lors atteinte au principe d'égalité ;

9. Considérant que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ;

10. Considérant que la loi déférée tend à traiter de façon appropriée les demandes d'asile, en vue de mieux protéger les personnes remplissant les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié ou pour se voir accorder le bénéfice de la protection subsidiaire ; qu'eu égard à cet objet, les demandeurs ayant la nationalité d'un pays pour lequel la Convention de Genève a cessé d'être applicable se trouvent dans une situation différente de celle des autres demandeurs ; que, par suite, le principe d'égalité n'est pas méconnu ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les griefs dirigés à l'encontre du II du nouvel article 2 de la loi du 25 juillet 1952 doivent être écartés ;

En ce qui concerne le III du nouvel article 2 de la loi du 25 juillet 1952 :

12. Considérant qu'aux termes du III du nouvel article 2 : « Les persécutions prises en compte dans l'octroi de la qualité de réfugié et les menaces graves pouvant donner lieu au bénéfice de la protection subsidiaire peuvent être le fait des autorités de l'Etat, de partis ou d'organisations qui contrôlent l'Etat ou une partie substantielle du territoire de l'Etat, ou d'acteurs non étatiques dans les cas où les autorités définies à l'alinéa suivant refusent ou ne sont pas en mesure d'offrir une protection. - Les autorités susceptibles d'offrir une protection peuvent être les autorités de l'Etat et des organisations internationales et régionales. - L'Office peut rejeter la demande d'asile d'une personne qui aurait accès à une protection sur une partie du territoire de son pays d'origine si cette personne n'a aucune raison de craindre d'y être persécutée ou d'y être exposée à une atteinte grave et s'il est raisonnable d'estimer qu'elle peut rester dans cette partie du pays. L'Office tient compte des conditions générales prévalant dans cette partie du territoire, de la situation personnelle du demandeur ainsi que de l'auteur de la persécution au moment où il statue sur la demande d'asile » ;

13. Considérant que les requérants estiment que cette disposition crée « un asile interne alternatif » qui priverait de garanties légales le droit d'asile ; qu'il y aurait, selon eux, « un paradoxe constitutionnellement insurmontable à considérer, dans un même mouvement, qu'une personne risque effectivement d'être persécutée dans son pays d'origine et qu'existe une alternative de séjour dans ce même pays » ; qu'au demeurant, l'existence, à un moment donné, d'une telle alternative n'offrirait « aucune garantie sur la suite des événements » ; que, de même, la présence d'organisations internationales ou régionales ne pourrait être considérée comme garantissant une protection suffisante aux victimes de persécutions ;

14. Considérant, en premier lieu, qu'en se référant à la zone géographique dans laquelle les persécutions ou menaces sont exercées, cette disposition tend à préciser les critères permettant à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides d'évaluer le risque des persécutions ou la gravité des menaces encourues par un demandeur, en vue de déterminer si l'intéressé a le droit de se voir reconnaître la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire, en application du II du nouvel article 2 ;

15. Considérant, en deuxième lieu, que, lorsque le demandeur a accès à une protection sur une partie du territoire de son pays d'origine, la loi donne seulement à l'Office la faculté de refuser l'asile et ne lui en fait nullement obligation ;

16. Considérant, en troisième lieu, qu'un refus ne peut être opposé à une personne pour un tel motif qu'à la double condition, d'une part, que celle-ci n'ait « aucune raison de craindre d'y être persécutée ou d'y être exposée à une atteinte grave » et, d'autre part, qu'il soit « raisonnable d'estimer qu'elle peut rester dans cette partie du pays » ; que, dans les cas où la loi envisage la protection pouvant être apportée par des organisations internationales ou régionales présentes sur place, il appartient à l'Office et, le cas échéant, à la Commission des recours des réfugiés, de déterminer si ces organisations offrent au demandeur une protection effective ;

17. Considérant, enfin, qu'aux termes mêmes de la loi, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides instruira la demande en tenant compte des conditions générales prévalant dans la partie concernée du territoire d'origine et de la situation personnelle du demandeur ; qu'il devra également tenir compte de l'auteur des persécutions, selon qu'il relève ou non des autorités de l'Etat ; que le bien-fondé de chaque demande sera examiné individuellement au regard de ces éléments concrets, appréciés à la date à laquelle l'Office statue ; qu'il appartiendra à l'Office, sous le contrôle de la Commission des recours des réfugiés, de ne refuser l'asile pour le motif énoncé au troisième alinéa du III du nouvel article 2 de la loi du 25 juillet 1952 qu'après s'être assuré que l'intéressé peut, en toute sûreté, accéder à une partie substantielle de son pays d'origine, s'y établir et y mener une existence normale ;

18. Considérant que, sous la réserve énoncée au précédent considérant, la disposition en cause n'est pas contraire à la Constitution ;

En ce qui concerne le IV du nouvel article 2 de la loi du 25 juillet 1952 :

19. Considérant qu'en vertu du IV du nouvel article 2, « la protection subsidiaire n'est pas accordée à une personne s'il existe des raisons sérieuses de penser... qu'elle a commis un crime grave de droit commun » ou que « son activité sur le territoire constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat » ;

20. Considérant que les auteurs des saisines estiment, en premier lieu, que la notion de « crime grave de droit commun » est entachée d'incompétence négative dans la mesure où le législateur n'a précisé ni la nature des crimes en cause, ni leur lieu de commission, ni la législation pénale applicable ;

21. Considérant, d'une part, qu'en application du b) du F de l'article 1er de la Convention de Genève, la présomption sérieuse de « crime grave de droit commun » commis en dehors du pays d'accueil avant d'y être admis comme réfugié exclut son auteur du bénéfice de cette convention ; qu'ainsi, la loi déférée applique à la protection subsidiaire un motif d'exclusion déjà mis en oeuvre, sous le contrôle du juge, en matière de reconnaissance de la qualité de réfugié ;

22. Considérant, d'autre part, que la rédaction de la disposition critiquée implique sans ambiguïté que le crime en cause a pu être commis tant dans le pays d'origine qu'en France ou dans un pays tiers ; que cette définition n'appelle aucune critique sur le plan constitutionnel ;

23. Considérant, enfin, que la gravité du crime susceptible d'exclure une personne du bénéfice de ce droit ne peut être appréciée qu'à la lumière des principes du droit pénal français ; qu'il était loisible au législateur de laisser à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sous le contrôle de la Commission des recours des réfugiés, le soin d'apprécier, après un examen concret et approfondi de la situation du demandeur, si les faits en cause, notamment par leur nature, les conditions dans lesquelles ils ont été commis et la gravité des dommages causés aux victimes, constituent un « crime grave de droit commun » justifiant l'exclusion de la protection subsidiaire ;

24. Considérant, en second lieu, qu'il est fait grief à la loi déférée d'avoir retenu comme motif d'exclusion de la protection subsidiaire la « menace grave pour l'ordre public », ce qui conduirait à assigner à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides « une mission contraire à la protection de l'individu consubstantielle au droit d'asile » ;

25. Considérant qu'aucune règle ni aucun principe de valeur constitutionnelle ne fait obstacle à ce que le législateur, en définissant le régime de la protection subsidiaire, décide qu'une activité constituant une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat constitue un motif d'exclusion de cette protection ;

26. Considérant que, si la loi déférée laisse à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le soin d'apprécier s'il y a lieu d'opposer ce motif d'exclusion, cette compétence n'est que la conséquence du choix fait par le législateur de confier à un même organisme indépendant l'ensemble des attributions relatives à la reconnaissance de la qualité de réfugié et à l'octroi du bénéfice de la protection subsidiaire ; qu'un tel choix, fondé sur l'intérêt général qui s'attache à l'unification et à la rationalisation des procédures, n'appelle aucune critique de constitutionnalité ;

27. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les griefs formulés à l'encontre du IV du nouvel article 2 de la loi du 25 juillet 1952 doivent être écartés ;

Sur les articles 2 et 5 de la loi déférée :

En ce qui concerne la liste des pays sûrs :

28. Considérant que l'article 2 de la loi déférée, qui modifie l'article 3 de la loi du 25 juillet 1952, confie au conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le pouvoir de fixer « la liste des pays considérés comme des pays d'origine sûrs » jusqu'à l'adoption de dispositions communautaires ayant cet objet ; qu'en vertu de l'article 5 de la loi déférée, qui modifie l'article 10, devenu l'article 8, de la loi du 25 juillet 1952, l'admission au séjour peut être refusée si le demandeur d'asile a la nationalité d'un pays figurant sur cette liste ; que, dans cette hypothèse, l'Office statue « par priorité » ; qu'en vertu du dernier alinéa du nouvel article 10, l'étranger bénéficie alors « du droit à se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides » ;

29. Considérant que, selon les députés et sénateurs requérants, les dispositions relatives à la liste des pays sûrs méconnaîtraient l'article 34 de la Constitution et, à titre subsidiaire, son article 21 ; qu'en outre, elles priveraient le droit d'asile de garanties essentielles et porteraient atteinte au principe d'égalité et aux droits de la défense ;

Quant à la violation de l'article 34 de la Constitution :

30. Considérant que les requérants soutiennent à titre principal que la liste des pays sûrs ne peut être déterminée que par le législateur ; qu'en confiant l'établissement de cette liste à une autre autorité, celui-ci aurait méconnu l'étendue de sa compétence ;

31. Considérant que, si l'article 34 de la Constitution dispose que « la loi fixe les règles concernant... les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques », la mise en oeuvre des garanties déterminées par le législateur relève du pouvoir exécutif ;

32. Considérant que le 2° du nouvel article 8 de la loi du 25 juillet 1952 dispose qu'un pays est considéré comme pays d'origine sûr « s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'Etat de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales » ; qu'en retenant cette définition, et en chargeant le conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides d'arrêter, au vu de leur situation effective, la liste des pays répondant à ladite définition, le législateur n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence ;

Quant à la violation de l'article 21 de la Constitution :

33. Considérant que les auteurs des saisines soutiennent à titre subsidiaire qu'en confiant l'établissement de la liste des pays sûrs à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le législateur n'aurait pas respecté l'article 21 de la Constitution qui confère au Premier ministre l'exercice du pouvoir réglementaire ;

34. Considérant qu'aux termes de l'article 21 de la Constitution : « Le Premier ministre... assure l'exécution des lois. Sous réserve des dispositions de l'article 13, il exerce le pouvoir réglementaire... » ;

35. Considérant que, si ces dispositions ne font pas obstacle à ce que le législateur confie à une autorité de l'Etat autre que le Premier ministre le soin de fixer des normes permettant de mettre en oeuvre une loi, c'est à la condition que cette habilitation ne concerne que des mesures de portée limitée tant par leur champ d'application que par leur contenu ; que tel est le cas de l'établissement de la liste des pays sûrs par le conseil d'administration de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

Quant aux autres griefs :

36. Considérant que, selon les requérants, l'établissement d'une liste de pays d'origine considérés comme sûrs et les effets de droit qui lui sont attachés méconnaissent tant la Constitution que la Convention de Genève, qui excluent toute discrimination en fonction du pays d'origine ; qu'une telle liste porterait atteinte au droit de chaque demandeur d'asile de voir sa situation personnelle faire l'objet d'un examen particulier et d'être entendu par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; qu'en outre, elle romprait l'égalité entre demandeurs d'asile ; qu'enfin, le renvoi à l'Office de la fixation de la liste des pays sûrs mettrait en cause l'indépendance et l'impartialité de la Commission des recours des réfugiés ;

37. Considérant, en premier lieu, que le nouvel article 9 de la loi du 25 juillet 1952, dans sa rédaction issue de l'article 5 de la loi déférée, prévoit que l'Office « statue par priorité sur la demande d'asile » lorsque le document provisoire de séjour est refusé ou retiré, ou son renouvellement refusé, au motif que le demandeur a la nationalité d'un pays considéré comme sûr ; que le fait d'avoir la nationalité d'un pays sûr a ainsi pour seul effet de mettre en oeuvre une procédure prioritaire, comme c'était déjà le cas, en vertu du sixième alinéa de l'article 2 de la loi du 25 juillet 1952 dans sa rédaction antérieure, pour les demandeurs d'asile provenant d'un pays auquel il a été fait application du 5 du C de l'article 1er de la Convention de Genève ; que le 2° du nouvel article 8 de la même loi précise que « la prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande » ; qu'ainsi qu'il a été dit, l'intéressé dispose, en vertu du nouvel article 10 de ladite loi, du droit de rester en France pendant cet examen ; qu'enfin, le II du nouvel article 2 de cette loi ne dispense pas l'Office de l'obligation de procéder à l'audition de l'intéressé dès lors que sa demande ne relève d'aucun des cas mentionnés à ce même paragraphe ; que, dans ces conditions, la disposition critiquée ne prive le droit d'asile d'aucune garantie essentielle ;

38. Considérant, en deuxième lieu, que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ;

39. Considérant que la loi déférée tend à traiter de façon appropriée les demandes d'asile, en vue de mieux protéger les personnes remplissant les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié ou accorder le bénéfice de la protection subsidiaire ; qu'eu égard à cet objet, les demandeurs d'asile provenant de pays qui peuvent être considérés comme assurant le respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'Etat de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sont dans une situation différente de celle des demandeurs d'asile provenant d'autres pays ; qu'ainsi, la circonstance que les règles de procédure soient différentes selon que le demandeur provient ou non d'un pays sûr n'est pas contraire au principe d'égalité ;

40. Considérant, en troisième lieu, que la décision fixant la liste des pays considérés comme pays d'origine sûrs pourra faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; qu'elle ne liera pas la Commission des recours des réfugiés dans l'appréciation à laquelle elle se livre de la situation de chaque demandeur d'asile ; que, dès lors, la disposition critiquée ne porte pas atteinte à l'indépendance de la Commission des recours des réfugiés vis-à-vis de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui constitue une garantie essentielle du droit d'asile ; que cette disposition est sans incidence sur son impartialité ;

En ce qui concerne la communication de documents à des agents habilités :

41. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 2 de la loi déférée : « Lorsqu'une demande d'asile est rejetée, le directeur général de l'Office ou le président de la Commission des recours des réfugiés transmet la décision motivée au ministre de l'intérieur. A la demande de ce dernier, le directeur général de l'Office communique à des agents habilités des documents d'état civil ou de voyage permettant d'établir la nationalité de la personne dont la demande d'asile a été rejetée, ou à défaut une copie de ces documents, à la condition que cette communication s'avère nécessaire à la mise en oeuvre d'une mesure d'éloignement et qu'elle ne porte pas atteinte à la sécurité de cette personne ou de ses proches » ;

42. Considérant que, selon les requérants, la faculté reconnue au directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides de communiquer à des agents habilités certains documents permettant d'établir la nationalité d'un étranger dont la demande d'asile a été rejetée est contraire au quatrième alinéa du préambule de la Constitution de 1946 ; que cette disposition porterait atteinte à la confidentialité des éléments d'information détenus par l'Office, garantie essentielle du droit d'asile ; qu'elle serait entachée d'incompétence négative, le législateur ayant renvoyé à un décret en Conseil d'Etat les modalités de désignation des agents destinataires de ces documents ;

43. Considérant que la confidentialité des éléments d'information détenus par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides relatifs à la personne sollicitant l'asile en France est une garantie essentielle du droit d'asile, principe de valeur constitutionnelle qui implique notamment que les demandeurs d'asile bénéficient d'une protection particulière ;

44. Considérant, toutefois, que les documents communicables en vertu de la disposition critiquée concernent exclusivement des personnes dont la demande d'asile a été rejetée soit par une décision de la Commission des recours des réfugiés, soit par une décision devenue définitive de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que la communication des documents ne peut en aucun cas porter sur les pièces produites à l'appui de la demande d'asile ; qu'elle se limite aux « documents d'état civil ou de voyage permettant d'établir la nationalité de la personne dont la demande d'asile est rejetée » ;

45. Considérant, en outre, que ces documents ne peuvent être communiqués qu'à des agents habilités à cet effet ; qu'il appartiendra au décret en Conseil d'Etat mentionné au nouvel article 19 de la loi du 25 juillet 1952 de fixer les modalités de cette habilitation et de prévoir notamment que les agents concernés seront personnellement et spécialement désignés en fonction des responsabilités qu'ils exercent dans le cadre de l'application de la législation relative à l'entrée et au séjour des étrangers ;

46. Considérant, enfin, que la transmission des documents en cause doit être nécessaire à la mise en oeuvre d'une mesure d'éloignement ; qu'elle ne doit en aucun cas porter atteinte à la sécurité de l'intéressé ou à celle de ses proches ;

47. Considérant que, dans ces conditions, la disposition critiquée, qui n'est pas entachée d'incompétence négative, ne porte pas atteinte au principe de confidentialité des éléments d'information relatifs aux demandeurs d'asile et ne prive donc pas le droit d'asile d'une garantie essentielle ;


48. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les griefs dirigés contre les articles 2 et 5 de la loi déférée doivent être rejetés ;

Sur l'article 4 de la loi déférée :

49. Considérant que l'article 5 de la loi du 25 juillet 1952, dans sa rédaction issue de l'article 4 de la loi déférée, est relatif à la Commission des recours des réfugiés ; que cette juridiction administrative est compétente pour statuer sur les recours formés contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides prises en application du II et du IV du nouvel article 2 de la loi du 25 juillet 1952 ; que le V du nouvel article 5 de la même loi permet au président et aux présidents de section de la commission de régler, par ordonnance, les « affaires dont la nature ne justifie pas l'intervention d'une formation collégiale » ; qu'en particulier, ils peuvent statuer en cette forme sur « les demandes qui ne présentent aucun élément sérieux susceptible de remettre en cause les motifs de la décision du directeur général de l'office » ;

50. Considérant que, selon les saisines, cette procédure priverait le droit d'asile d'une garantie essentielle en interdisant aux intéressés de présenter leur recours devant la Commission dans le cadre d'un débat oral ; que la disposition critiquée serait en outre entachée d'incompétence négative ;

51. Considérant, d'une part, qu'en permettant d'écarter, selon une procédure accélérée, des demandes manifestement infondées, la mesure contestée tend à réduire les délais de jugement de la Commission des recours des réfugiés et à assurer ainsi un exercice plus effectif du droit de recours des demandeurs d'asile ;

52. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du nouvel article 19 de la loi du 25 juillet 1952, dans sa rédaction résultant de l'article 10 de la loi déférée : « Les modalités d'application de la présente loi sont fixées par décret en Conseil d'Etat, notamment : ... 7° Les conditions d'exercice des recours prévus à l'article 5 ainsi que les conditions dans lesquelles le président et les présidents de section de la Commission des recours peuvent, après instruction, statuer par ordonnance sur les demandes qui ne présentent aucun élément sérieux susceptible de remettre en cause les motifs de la décision du directeur général de l'Office » ; qu'il résulte des travaux préparatoires de la loi que les affaires dont la nature ne justifie pas l'intervention d'une formation collégiale seront examinées par un rapporteur avant d'être soumises au président de la Commission ou aux présidents de section ; que, dans ces conditions, le législateur n'a porté atteinte ni au droit au recours garanti par l'article 16 de la Déclaration de 1789 ni au droit d'asile ;

53. Considérant, enfin, que les dispositions précitées du 7° du nouvel article 19 de la loi du 25 juillet 1952 ne portent atteinte à aucune des règles ni à aucun des principes fondamentaux réservés à la loi par l'article 34 de la Constitution ; que, par suite, cet article n'est pas entaché d'incompétence négative ;

Sur l'article 6 de la loi déférée :

54. Considérant que l'article 6 de la loi déférée, qui modifie l'article 11, devenu l'article 9, de la loi du 25 juillet 1952, prévoit que l'étranger qui demande à bénéficier de l'asile et qui est admis à séjourner sur le territoire national se voit remettre un document provisoire lui permettant de résider en France jusqu'à ce que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, la Commission des recours des réfugiés, aient statué sur sa demande ; que le document provisoire de séjour peut cependant être refusé, retiré ou son renouvellement refusé pour l'un des motifs mentionnés aux 2° à 4° du nouvel article 8 de la loi du 25 juillet 1952, c'est-à-dire lorsque le demandeur d'asile a la nationalité d'un pays sûr ou pour lequel ont été mises en oeuvre les stipulations du 5 du C de l'article 1er de la Convention de Genève, lorsque sa présence en France constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat, ou enfin lorsque sa demande d'asile est abusive, frauduleuse ou dilatoire ; que, dans ces trois hypothèses, l'Office statue « par priorité » sur la demande d'asile en vertu du dernier alinéa du nouvel article 9 ;

55. Considérant que les requérants soutiennent qu'en subordonnant la procédure prioritaire d'examen des demandes d'asile à la décision du préfet sur l'admission au séjour, l'article 6 de la loi déférée prive de garanties essentielles le droit d'asile ; qu'en outre, le même article serait entaché d'incompétence négative dès lors que le 12° de l'article 19 de la loi du 25 juillet 1952, dans sa rédaction issue de l'article 10 de la loi déférée, renvoie à un décret en Conseil d'Etat la fixation des délais d'examen dans le cadre de cette procédure prioritaire ;

56. Considérant, en premier lieu, que, si l'autorité administrative peut s'opposer à l'admission au séjour dans les trois cas visés aux 2° à 4° du nouvel article 8 de la loi du 25 juillet 1952, les étrangers concernés ont le droit, en vertu des dispositions du nouvel article 10, de se maintenir sur le territoire national jusqu'à ce que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides leur notifie sa décision ; qu'au regard des exigences de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public, le législateur pouvait soumettre à une procédure prioritaire d'examen les demandes d'asile dans les trois cas de refus d'admission au séjour définis ci-dessus ; qu'ainsi, le nouvel article 9 de la loi du 25 juillet 1952 ne prive le droit d'asile d'aucune garantie essentielle ;

57. Considérant, en second lieu, que le législateur pouvait, sans méconnaître sa compétence, renvoyer à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les délais dans lesquels l'Office français de protection des réfugiés et apatrides statue selon la procédure prioritaire ;

58. Considérant qu'il s'ensuit que les griefs dirigés contre l'article 6 de la loi déférée doivent être rejetés ;

Sur l'article 10 de la loi déférée :

59. Considérant que l'article 10 de la loi déférée ajoute à la loi du 25 juillet 1952 un article 19 qui renvoie à un décret en Conseil d'Etat la fixation des modalités d'application de la loi, et, notamment, les critères d'habilitation des agents auxquels le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides peut communiquer certains documents, la durée du mandat des membres de la Commission des recours des réfugiés, les modalités d'exercice des recours, les conditions dans lesquelles il peut être statué par voie d'ordonnance, les délais afférents à la délivrance du document provisoire de séjour permettant de déposer une demande d'asile et ceux relatifs à la procédure d'examen prioritaire des demandes par l'Office ;

60. Considérant que, selon les requérants, le législateur aurait ainsi renvoyé au pouvoir réglementaire des « prescriptions propres à assurer des garanties essentielles du droit d'asile » et méconnu l'étendue de ses compétences ;

En ce qui concerne la durée du mandat des membres de la Commission des recours des réfugiés :

61. Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant... la création de nouveaux ordres de juridiction... » ;

62. Considérant que la Commission des recours des réfugiés constitue un ordre de juridiction au sens de la disposition précitée ; que, si le caractère limité du mandat des membres de la Commission relève du domaine de la loi, le législateur a pu laisser au pouvoir réglementaire le soin d'en préciser la durée ; que, toutefois, il appartiendra à un décret en Conseil d'Etat, sous le contrôle du juge administratif, de fixer cette durée de sorte qu'il ne soit porté atteinte ni à l'impartialité ni à l'indépendance des membres de la Commission ; que, sous cette réserve, le 6° du nouvel article 19 de la loi du 25 juillet 1952 n'est pas contraire à la Constitution ;

En ce qui concerne le délai de délivrance du document provisoire de séjour :

63. Considérant que, s'agissant d'une procédure purement administrative, le législateur pouvait, sans méconnaître l'étendue de sa compétence, renvoyer à un décret en Conseil d'Etat la fixation du délai de délivrance du document provisoire de séjour permettant de déposer une demande d'asile ;

En ce qui concerne les autres dispositions de l'article 10 de la loi déférée :

64. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit à l'occasion de l'examen des articles précédents, les autres dispositions contestées du nouvel article 19 de la loi du 25 juillet 1952 ne sont pas entachées d'incompétence négative ;

65. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune question de constitutionnalité,

Décide :


Article 1


Sous les réserves énoncées aux considérants 17 et 62, les articles 1er, 2, 4, 5, 6 et 10 de la loi modifiant la loi no 52-893 du 25 juillet 1952 relative au droit d'asile sont conformes à la Constitution.

Article 2


La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 4 décembre 2003, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.


Le président,

Yves Guéna