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Décision n° 2002-1027 du 5 novembre 2002 portant sur l'adoption des coûts moyens incrémentaux de long terme comme coûts de référence pour les tarifs d'interconnexion de France Télécom


NOR : ARTE0200667S



L'Autorité de régulation des télécommunications,

Vu le code des postes et télécommunications, et notamment ses articles D. 99-19 et D. 99-20 ;

Vu la directive 97/33 /CE du Parlement européen et du Conseil du 30 juin 1997 relative à l'interconnexion dans le secteur des télécommunications en vue d'assurer un service universel et l'interopérabilité par l'application des principes de fourniture d'un réseau ouvert (ONP) ;

Vu la recommandation de la Commission 98/195/CE en date du 8 janvier 1998 concernant l'interconnexion dans un marché de télécommunications libéralisé ;

Vu l'arrêté du 12 mars 1998 autorisant la société France Télécom à établir et exploiter un réseau de télécommunications ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public ;

Vu l'arrêté du 27 septembre 2002 modifiant l'arrêté du 12 mars 1998 autorisant la société France Télécom à établir et exploiter un réseau de télécommunications ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public ;

Après concertation menée auprès du comité de l'interconnexion du 17 mai au 12 juin 2001 ;

Après consultation publique portant sur la mise en place des coûts moyens incrémentaux de long terme comme coûts de référence pour les tarifs d'interconnexion de France Télécom, réalisée du 31 juillet au 14 septembre 2001 ;

Après en avoir délibéré le 5 novembre 2002,



I. - Cadre réglementaire


L'article D. 99-19 du code des postes et télécommunications définit les coûts de référence pour déterminer les tarifs d'interconnexion de France Télécom et dispose qu'« à partir des tarifs 1997, tant que l'Autorité de régulation des télécommunications n'aura pas arrêté une autre méthode en application de l'article D. 99-20, [...], les tarifs d'interconnexion pour une année donnée sont fondés sur les coûts moyens comptables prévisionnels pertinents pour l'année considérée, évalués par l'Autorité de régulation des télécommunications en prenant en compte :

- l'efficacité des nouveaux investissements réalisés ou prévus par l'opérateur au regard des meilleures technologies industriellement disponibles ;

- les références internationales en matière de tarifs et de coûts d'interconnexion. »

Le code des postes et télécommunications prévoit par ailleurs la possibilité d'adopter d'autres coûts de référence, selon les dispositions de l'article D. 99-20 qui précise qu'« après concertation au sein du comité de l'interconnexion et consultation publique, l'Autorité de régulation des télécommunications définira une méthode tendant vers une meilleure efficacité à long terme des coûts pris en compte que celle résultant de la méthode initiale énoncée à l'article D. 99-19 tout en respectant les principes énoncés à l'article D. 99-17. A cette fin, elle s'appuie sur la comparaison des résultats de modèles technico-économiques et de modèles fondés sur la comptabilité de l'opérateur en maintenant la référence aux comparaisons internationales disponibles ». Cet article précise que « l'Autorité de régulation des télécommunications associe les opérateurs à l'élaboration de la méthode » et « publie la méthode qu'elle a arrêtée ».

En 2001, l'Autorité a entrepris des travaux en vue de l'adoption dès 2002 des coûts moyens incrémentaux de long terme ou CMILT, comme coûts de référence de l'interconnexion. Ce changement se justifie à la fois par des raisons de meilleure efficacité économique mais aussi par souci de cohérence avec le dégroupage de la boucle locale, où ces coûts sont déjà utilisés.

Le processus suivi a été conforme aux dispositions de l'article D. 99-20, associant le secteur à la fois à la définition de la méthode et à l'élaboration d'un modèle technico-économique. Dans le cadre de cette concertation, l'Autorité a défini une méthodologie semblable à celle suivie dans de nombreux pays européens, reposant sur la comparaison entre deux modèles, l'un dit « bottom-up » développé avec le secteur, l'autre dit « top-down » basé sur un modèle de l'opérateur historique.


II. - Méthode de passage aux CMILT


L'Autorité a procédé à une concertation auprès des membres du comité de l'interconnexion du 17 mai au 12 juin 2001, suivie d'une consultation publique du 31 juillet au 14 septembre 2001, dont le texte est rappelé en annexe I de la présente décision.

A l'issue de cette concertation et de cette consultation publique, l'Autorité a arrêté à la fois la définition des CMILT et la méthode d'évaluation des coûts de référence retenus pour l'interconnexion.


II.1. - Définition et méthode de détermination des CMILT


Les CMILT ont déjà été définis et décrits dans le cadre du dégroupage de la boucle locale et en particulier dans l'annexe II de la décision no 2000-1171 de l'Autorité consacrée à la méthode de calcul. Les mêmes principes ont été retenus et adaptés au cadre particulier des tarifs d'interconnexion de France Télécom.

Les CMILT recouvrent deux notions :

- il s'agit de coûts incrémentaux moyens. Leur calcul revient à se placer à un niveau de production donné, à définir un incrément de production et à estimer le coût moyen lié à cet incrément et uniquement à cet incrément. Les tarifs d'interconnexion doivent intégrer, outre les coûts calculés sur la base de CMILT, une contribution équitable aux coûts communs afin de respecter la contrainte budgétaire de l'opérateur ;

- les CMILT sont calculés dans une perspective de long terme : à cet horizon, tous les coûts sont considérés comme variables, c'est-à-dire que l'opérateur peut optimiser tous ses postes de coûts au regard du niveau de production considéré. De plus, l'approche se veut prospective et l'opérateur est considéré comme efficient, c'est-à-dire qu'il utilise la meilleure technologie disponible.


Les CMILT doivent répondre à un principe d'efficience et peuvent être estimés sur la base de deux types de modèles technico-économiques :

- top-down, c'est-à-dire fondé sur des coûts de remplacement établis à partir de la comptabilité analytique et de prévisions d'évolution de réseau de France Télécom, et sur un réseau correctement dimensionné au regard du trafic ;

- bottom-up, c'est-à-dire basé sur un réseau optimisé sous certaines contraintes intégrant les meilleures pratiques du marché. Ce modèle est construit en concertation avec le secteur.

Il s'agit enfin de comparer les résultats des deux modèles dans une phase dite de conciliation.

Ce rapprochement des modèles est conforme aux recommandations de la Commission européenne qui préconise d'utiliser un modèle bottom-up conjointement à un modèle top-down plus proche du réseau de l'opérateur historique. Le recours à deux modèles respecte aussi les dispositions de l'article D. 99-20 qui prévoit la mise en place par l'Autorité d'une « méthode tendant vers une meilleure efficacité à long terme des coûts pris en compte que celle résultant de la méthode initiale [...] » et qui précise que l'Autorité pourra s'appuyer à cette fin « sur la comparaison des résultats de modèles technico-économiques et de modèles fondés sur la comptabilité de l'opérateur en maintenant la référence aux comparaisons internationales disponibles ».


II.2. - Principes retenus dans le cadre

de la détermination des tarifs d'interconnexion


Au-delà des principes généraux exposés ci-dessus, la mise en place des CMILT pour l'interconnexion nécessite des précisions sur les points suivants :

- définition de l'incrément et d'un réseau de référence ;

- valorisation économique des actifs et détermination de fonctions de coûts ;

- conditions de passage aux CMILT à l'issue de la phase de conciliation des modèles.


Incrément


Dans le cadre de l'interconnexion, l'incrément considéré est le trafic transitant sur les éléments de commutation et de transmission du réseau général de France Télécom. Ce trafic inclut a minima le trafic commuté, mais peut aussi intégrer le trafic généré par d'autres types de services, comme par exemple les liaisons louées pour ce qui concerne la transmission.

S'agissant des services de base d'interconnexion (intra-CA, simple transit et double transit), un opérateur interconnecté à France Télécom rémunère à travers les tarifs d'interconnexion l'utilisation du réseau général de France Télécom, c'est-à-dire l'utilisation d'éléments de transmission et de commutation.

Or, ces éléments de réseau ne sont pas forcément dédiés au seul trafic commuté. C'est notamment le cas des éléments de transmission qui peuvent être partagés avec d'autres trafics : par exemple, une fibre optique ou une conduite de génie civil peuvent être utilisées conjointement par les communications téléphoniques (trafic commuté) et les liaisons louées.

Cette mutualisation de certaines ressources du réseau général de France Télécom nécessite, pour chaque élément de réseau concerné par l'interconnexion, d'identifier dans un premier temps l'ensemble des services l'utilisant (trafic commuté, liaisons louées...).

Il convient alors de déterminer parmi ces services ceux retenus pour l'incrément. Le coût incrémental correspond alors au coût de production de l'ensemble des services (inclus ou exclus de l'incrément) diminué des coûts de production isolée des services non retenus dans l'incrément.

Pour des raisons d'équité, l'incrément retenu doit alors comprendre un nombre suffisant de services car le coût incrémental, calculé comme le coût de production de l'incrément à partir d'un niveau de production de référence, ne fait bénéficier qu'aux services inclus dans cet incrément des effets de rendements d'échelle croissants, caractéristiques des économies de réseau.

Si on considère, à titre d'illustration, un opérateur faisant transiter par une même artère de génie civil du trafic commuté et des liaisons louées, le coût incrémental d'un incrément limité au trafic commuté ferait bénéficier à ce seul service des effets de rendements croissants, les liaisons louées supportant alors l'intégralité des coûts de génie civil.

Ces principes ont été suivis dans la définition de l'incrément qui, dans les deux modèles, n'est pas limité au seul tratic commuté :

- le modèle bottom-up développé avec le secteur inclut dans l'incrément, outre le trafic commuté, les liaisons louées jusqu'à un débit de 155 Mbit/s. La limitation à ces deux trafics est un compromis entre une approche jugée trop simple, n'incluant que le trafic commuté, et une approche trop complexe, consistant à modéliser sur la base de données publiques d'autres trafics ;

- le modèle top-down de France Télécom est basé sur un modèle global qui inclut tous les services transitant par le réseau général (services commutés, haut débit...), incluant donc, a minima, le trafic commuté et les liaisons louées.


Réseau de référence


Un compromis a été recherché entre les coûts reflétant une architecture de réseau utilisant les meilleures technologies industriellement disponibles et ceux correspondant à l'architecture existante de l'opérateur historique.

Dans la modélisation du réseau, l'optimisation s'est faite, à qualité de service constante, en dimensionnant les liens de transmission au regard du trafic transitant sur le réseau et en intégrant les matériels de transmission et de commutation réputés les plus efficaces.

L'optimisation n'a par contre pas remis en cause le nombre et la position des noeuds de ce réseau. Il s'agissait en effet, à la fois de retenir une architecture et un dimensionnement efficaces, tout en permettant de modéliser les coûts d'un service d'interconnexion semblable à celui effectivement utilisé par les opérateurs, tant en terme de qualité de service que de zone géographique couverte.



Le modèle bottom-up n'a pas remis en cause l'architecture actuelle du réseau de France Télécom, jugée efficace, mais a intégré les évolutions prévisibles pour 2002 en terme de parc de commutateurs et a dimensionné le réseau de transmission en fonction du trafic prévisionnel.


Valorisation des actifs


Les actifs ont été évalués suivant la méthode des coûts de remplacement. Cette méthode a déjà été décrite dans l'annexe II de la décision no 2000-1171 en date du 31 octobre 2000. Les coûts de remplacement permettent de prendre en compte l'effet du progrès technique à la différence des coûts comptables calculés sur la base du prix d'acquisition historique de l'actif. Ils intègrent en effet l'évolution des prix de l'actif au cours du temps.


Fonctions de coût


Les CMILT reflètent les coûts d'un opérateur efficace pour une qualité de service donnée.

Les modèles bottom-up et top-down doivent donc permettre de justifier les niveaux de coûts modélisés au regard de choix efficaces de la part de l'opérateur considéré. Il est donc nécessaire qu'ils présentent un niveau de détail suffisant explicitant les relations existant entre les inducteurs de coûts et les coûts de réception correspondants.

Idéalement, la modélisation sera basée sur des fonctions de coûts explicites reliant les unités d'oeuvre (trafic, longueur de génie civil...) aux coûts considérés. A défaut, le modèle fournira les volumes d'unités d'oeuvre, permettant de déduire des fonctions de coûts implicites (coûts par BPN pour un commutateur, coût par kilomètre de génie civil pour la transmission).

Le modèle bottom-up est construit par nature sur de telles fonctions et permet de comprendre l'ensemble de la chaîne de formation des coûts.

S'agissant du modèle top-down, l'Autorité a défini en concertation avec France Télécom un format de reporting faisant apparaître les coûts et les unités d'oeuvre correspondantes, avec un niveau de détail suffisant pour permettre une comparaison avec le modèle bottom-up. France Télécom a transmis à l'Autorité courant juillet 2002 le reporting 2002 renseigné conformément à ce format.


Conditions de passage aux CMILT

à l'issue de la phase de conciliation des modèles


La mise en place des CMILT repose donc sur deux modélisations, l'une bottom-up développée avec le secteur et publique, l'autre top-down basée sur le système de comptabilité de France Télécom.

L'utilisation de deux modèles est indispensable et se justifie par le fait que la mise en place des CMILT ne peut :

- ni faire l'économie d'une réflexion sur les coûts d'un opérateur efficace en concertation avec le secteur et donc d'un modèle bottom-up, qui représente l'une des caractéristiques majeures de la démarche CMILT ;

- ni être, à l'inverse, totalement décorrélée de la comptabilité de l'opérateur historique, dont le niveau de détail en terme d'allocation des coûts et le degré de complexité ne peuvent être égalés par un modèle bottom-up.

L'Autorité a par ailleurs fait le choix d'associer le plus possible le secteur à la construction du modèle bottom-up et d'élaborer un modèle à la fois simple et basé sur des données publiques afin de pouvoir discuter des paramètres choisis avec une transparence suffisante. Ce choix a par contre imposé des limites au modèle, qui ne pouvait alors intégrer des données confidentielles de France Télécom et donc évaluer finement tous les coûts de l'opérateur historique.

Le processus de mise en place des CMILT se termine par une phase de comparaison des deux modèles, dite de conciliation, dont les principes ont été débattus avec le secteur.

L'Autorité a ainsi veillé à préparer cette phase le plus en amont possible du processus, celle-ci n'étant en effet possible que si les modèles sont assez proches dans leur conception pour permettre une discussion sur les hypothèses retenues dans chacun des modèles.

Au vu de l'expérience d'autres régulateurs et des différences inévitables entre les deux modèles, le but de la conciliation n'est pas d'aboutir à une convergence parfaite des résultats des modèles vers les tarifs d'interconnexion.

Par contre, c'est un outil qui permet d'identifier les écarts importants, d'en analyser les raisons en comparant les règles de formation des coûts dans les deux approches et d'aboutir à un rapprochement suffisant pour permettre la validation des tarifs.

Le modèle bottom-up permet ainsi à l'Autorité de disposer d'un référentiel pour analyser le modèle top-down de France Télécom.

Au terme de la comparaison des modèles, l'Autorité apprécie le degré d'avancement du dossier et examine les conditions de passage aux CMILT en fonction :

- du degré de convergence des deux approches ;

- de la précision et de la qualité des informations fournies par France Télécom.


III. - Elaboration d'un modèle bottom-up avec le secteur


L'Autorité a chargé début juin 2001 un cabinet de consultants de réaliser un modèle bottom-up. Il s'agissait pour le cabinet retenu :

- de définir l'architecture du modèle au regard des modèles déjà existants, notamment du modèle développé par la Commission européenne, et d'entretiens avec les opérateurs. Le cabinet a été chargé dans cette phase de collecter le maximum d'appréciations sur les meilleures technologies disponibles, aussi bien sur leurs aspects techniques (évolution du réseau en place, possibilités d'optimisation, etc.) qu'économiques (coûts des équipements, durée de vie technico-économique...) ;

- de réaliser et de calibrer le modèle développé avant de le communiquer, avec ses résultats, au secteur.

La méthodologie et l'architecture de réseau retenues dans le modèle ont été présentées au comité de l'interconnexion du 29 juin 2001. Le modèle a fait l'objet d'une présentation plus complète au sous-comité économique du 10 juillet 2001 et les opérateurs ont été invités à faire part de leurs remarques, notamment sur l'architecture retenue et les paramètres de coûts d'équipement et de trafic.

Le modèle a finalement été présenté avec ses résultats lors du sous-comité économique du 11 septembre 2001 et transmis au secteur. L'Autorité a donc veillé à mener le processus en totale transparence et avec une participation réelle du secteur afin de disposer avant la conciliation d'un modèle robuste et représentatif des évaluations du secteur.

Elle a cependant tenu à préciser lors de cette présentation finale que les coûts résultant du modèle ne pouvaient pas être considérés comme les tarifs définitifs des services d'interconnexion, rappelant que le modèle n'évalue qu'une partie des coûts pertinents et que la méthode CMILT suppose une phase de conciliation.


IV. - Conciliation des modèles top-down et bottom-up

IV.1. - Modèle top-down


France Télécom a construit son modèle top-down sur la base de son modèle de comptabilité analytique traditionnel, dit TCP, en y apportant certaines adaptations.

Concernant les coûts d'investissement en capital, France Télécom les a valorisés en coûts de remplacement, en se basant sur des données fournies par sa branche réseaux au vu des derniers devis disponibles ou des derniers coûts audités, à savoir 1999, extrapolés en 2002 sur la base d'un facteur de progrès technique.

Concernant les coûts directs d'exploitation et les coûts indirects, France Télécom utilise son système de comptabilité analytique extrapolé à l'année considérée, estimant que ces niveaux sont justifiés au regard de la qualité de service atteinte.

Le modèle et la méthode de valorisation en coûts de remplacement ont fait l'objet d'un audit par un cabinet externe au cours du premier semestre 2002 et les conclusions ont été prises en compte dans la phase de conciliation.


IV.2. - Processus de conciliation


Des réunions bilatérales entre France Télécom et l'Autorité ont été organisées à plusieurs reprises entre octobre 2001 et février 2002.

Dans un premier temps, ces réunions ont permis d'améliorer et de compléter le modèle bottom-up :

- s'agissant de la modélisation des trafics, le modèle tel que transmis au secteur n'avait pas modélisé, par souci de simplicité, une partie du trafic commuté (international, services spéciaux hors internet...) qui représente environ 10 % du trafic total de France Télécom, ce qui a été pris en compte dans le modèle final. D'autre part, le modèle a été corrigé afin de reprendre les mêmes prévisions de volumes de trafic que France Télécom pour rendre les deux approches comparables ;

- s'agissant des taux de remplissage des circuits, le modèle final a repris ceux des fiches transmises par France Télécom ;

- s'agissant du dimensionnement du réseau, et notamment du dimensionnement des équipements de transmission comme les multiplexeurs, le modèle final a pris en compte les règles de dimensionnement transmises par France Télécom ;

- afin de modéliser l'ensemble des coûts pertinents pour l'interconnexion, ont été intégrés dans le modèle final les coûts de fiscalité locale, les coûts d'autoconsommation ainsi que les coûts spécifiques et certains coûts communs, non pris en compte dans le modèle bottom-up initial.

Cette phase a permis de disposer d'un modèle calculant les coûts d'un réseau qui permet de faire transiter un trafic identique à celui retenu par France Télécom dans ses prévisions 2002 et avec une qualité de service proche.

France Télécom avait présenté, avant la phase de conciliation, les principes généraux de son modèle et transmis les principaux résultats :

- en détaillant les coûts de réseau général sous forme d'une fiche (dite fiche 1) ;

- en explicitant les différents postes de coûts pour les coûts spécifiques et coûts communs.

France Télécom a complété ces résultats en donnant des informations complémentaires sur les points identifiés par l'Autorité :

- mode d'affectation des coûts de transmission et indication des longueurs de câble et de tranchée ;

- explication des coûts indirects et d'exploitation affectés aux différents types de réseau.


IV.3. - Résultats de la conciliation


Dans l'analyse des résultats des deux modèles, l'Autorité s'est attachée à identifier pour les principaux éléments de commutation et de transmission :

- les différences liées aux unités d'oeuvre et à l'architecture du réseau, s'il en subsistait ;

- les différences de valorisation de coût de capital, notamment en ce qui concerne le prix des équipements et les formules et paramètres d'investissement ;

- les différences dans les coûts d'exploitation et les coûts indirects.

A ce stade, l'Autorité a réalisé les constats suivants :

Concernant la commutation, les différences subsistant en fin de conciliation proviennent des écarts de valorisation des prix d'équipements de commutation. France Télécom utilise des prix supérieurs à ceux utilisés dans le modèle bottom-up. L'Autorité n'a pas estimé que les éléments fournis par le modèle bottom-up étaient suffisants pour remettre en cause les valorisations de France Télécom dont l'analyse se poursuivra lors des prochains audits.

Concernant la transmission, plusieurs différences subsistent en fin du processus :

- les coûts annuels de capital affectés à la transmission pour le trafic commuté sont proches dans les deux modèles. Cependant, la valorisation de l'investissement en transmission est plus importante dans le domaine bottom-up que dans le modèle top-down. Ceci peut s'expliquer en partie par le fait que la totalité des coûts, et notamment les coûts de génie civil, sont affectés uniquement à deux types de trafic, à savoir les liaisons louées et le trafic commuté, dans le modèle bottom-up, alors qu'ils sont affectés à une palette beaucoup plus large de services dans le modèle top-down, réduisant par là même la part allouée au trafic commuté et aux liaisons louées.

Par ailleurs, France Télécom amortit ses coûts sur une durée moyenne plus courte, ce qui a pour effet de conduire à un rapport plus élevé entre le coût annuel et le coût d'investissement que pour le modèle bottom-up.

Les coûts d'exploitation sont en revanche plus importants dans le modèle top-down que dans le bottom-up pour la transmission. Cela peut s'expliquer par le fait que France Télécom encourt des coûts d'exploitation réels plus importants que ce que le secteur estime justifié pour un opérateur efficace. Cela peut résulter aussi d'un manque de précision du modèle bottom-up par rapport au modèle top-down, ce dernier permettant de retracer finement l'allocation de tous les coûts indirects et les coûts d'exploitation entre les différents éléments de réseau.


IV.4. - Passage aux CMILT


A l'issue de la phase de conciliation, l'Autorité estime avoir pu réaliser un examen approfondi des résultats du modèle top-down sur la base d'une comparaison avec le modèle bottom-up et, ainsi, valider la cohérence de ses résultats.

L'Autorité estime donc que le modèle top-down tel que présenté par France Télécom peut servir de base de coûts CMILT pour évaluer les tarifs d'interconnexion.

L'Autorité souligne cependant que les vérifications approfondies ont été menées avant tout pour les services de base de l'interconnexion commutée et que, s'agissant des autres services, et notamment des liaisons louées partielles, elle pourra au besoin étendre l'usage d'une approche bottom-up à l'examen des coûts tels qu'issus du modèle top-down.


V. - Perspectives

V.1. - Détermination des tarifs d'interconnexion


Désormais, la détermination des tarifs de base de France Télécom se fera sur la base des résultats du modèle top-down après comparaison avec les résultats du modèle bottom-up, dont les hypothèses d'alimentation seront revues régulièrement.

S'agissant des autres services d'interconnexion, France Télécom sera amenée à déterminer les tarifs sur la base de son modèle top-down et l'Autorité pourra, au besoin et en fonction des services, utiliser une modélisation bottom-up pour son expertise.


V.2. - CMILT et principe de non-discrimination


Conformément à l'article 13.1 du cahier des charges annexé à l'arrêté d'autorisation de France Télécom du 12 mars 1998, France Télécom est tenue de produire « les comptes des produits et des charges appelés comptes individualisés suivants : réseau général, réseau d'accès commuté, interconnexion, service téléphonique au public, liaisons louées et autres activités couvertes par la présente autorisation ».

Afin de respecter le principe de non-discrimination et ainsi garantir les conditions nécessaires à une concurrence loyale, l'article 13.2 de ce même cahier des charges précise que « l'opérateur valorise chacun des éléments du réseau général qu'il utilise au même coût unitaire que celui utilisé pour établir les tarifs de ses services d'interconnexion destinés aux opérateurs autorisés au titre de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications. La méthode d'évaluation des coûts utilisée par l'opérateur est la même que celle utilisée pour établir les tarifs d'interconnexion ».

En conséquence, France Télécom est tenue, du fait de l'adoption des CMILT comme coûts de référence pour l'interconnexion, de produire l'ensemble de ses comptes individualisés en CMILT calculés sur la base de son modèle top-down en coûts de remplacement,

Décide :


Article 1


Les coûts de référence utilisés pour calculer les tarifs d'interconnexion de France Télécom sont désormais les coûts moyens incrémentaux de long terme.

Article 2


Les coûts moyens incrémentaux de long terme seront déterminés sur la base du modèle de comptabilité en coûts de remplacement de France Télécom et éventuellement d'une comparaison avec les résultats d'un modèle bottom-up, si l'Autorité l'estime nécessaire.

Article 3


Le directeur général de l'Autorité est chargé de l'exécution de la présente décision, qui sera publiée au Journal officiel et notifiée à France Télécom.


Fait à Paris, le 5 novembre 2002.


Le président,

J.-M. Hubert