J.O. 300 du 26 décembre 2002       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 21612

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Décret n° 2002-1499 du 18 décembre 2002 portant publication de la convention établie sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, faite à Bruxelles le 26 juillet 1995 (1)


NOR : MAEJ0230050D



Le Président de la République,

Sur le rapport du Premier ministre et du ministre des affaires étrangères,

Vu les articles 52 à 55 de la Constitution ;

Vu la loi no 99-419 du 27 mai 1999 autorisant la ratification de la convention établie sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, faite à Bruxelles le 26 juillet 1995 ;

Vu le décret no 53-192 du 14 mars 1953 modifié relatif à la ratification et à la publication des engagements internationaux souscrits par la France,

Décrète :


Article 1


La convention établie sur la base de l'article K. 3 du traité sur l'Union européenne relative à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes, faite à Bruxelles le 26 juillet 1995, sera publiée au Journal officiel de la République française.

Article 2


Le Premier ministre et le ministre des affaires étrangères sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.


Fait à Paris, le 18 décembre 2002.


Jacques Chirac


Par le Président de la République :


Le Premier ministre,

Jean-Pierre Raffarin

Le ministre des affaires étrangères,

Dominique de Villepin


(1) La présente convention est entrée en vigueur le 17 octobre 2002.

C O N V E N T I O N


ÉTABLIE SUR LA BASE DE L'ARTICLE K. 3 DU TRAITÉ SUR L'UNION EUROPÉENNE RELATIVE À LA PROTECTION DES INTÉRÊTS FINANCIERS DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Les Hautes Parties contractantes à la présente convention, Etats membres de l'Union européenne,

Se référant à l'acte du Conseil de l'Union européenne du 26 juillet 1995 ;

Désireuses de faire en sorte que leurs législations pénales contribuent de manière efficace à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes ;

Notant que la fraude affectant les recettes et les dépenses communautaires ne se limite pas, dans bien des cas, à un seul pays et est souvent le fait de filières criminelles organisées ;

Convaincues que la protection des intérêts financiers des Communautés européennes exige que tout comportement frauduleux portant atteinte aux intérêts en question donne lieu à des poursuites pénales et qu'à cette fin une définition commune soit adoptée ;

Convaincues de la nécessité d'ériger ces comportements en infractions pénales passibles de sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives, sans préjudice de l'application d'autres sanctions dans certains cas appropriés, et de prévoir, au moins dans les cas graves, des peines privatives de liberté pouvant entraîner l'extradition ;

Reconnaissant que les entreprises jouent un rôle important dans les domaines financés par les Communautés européennes et que les personnes ayant le pouvoir de décision dans les entreprises ne devraient pas échapper à la responsabilité pénale dans certaines circonstances ;

Déterminées à lutter ensemble contre la fraude portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés européennes en prenant des engagements en matière de compétences, d'extradition et de coopération mutuelle,

Conviennent des dispositions qui suivent :


Article 1er

Dispositions générales


1. Aux fins de la présente convention, est constitutif d'une fraude portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés européennes :

a) En matière de dépenses, tout acte ou omission intentionnel relatif :

- à l'utilisation ou à la présentation de déclarations ou de documents faux, inexacts ou incomplets, ayant pour effet la perception ou la rétention indue de fonds provenant du budget général des Communautés européennes ou des budgets gérés par les Communautés européennes ou pour leur compte ;

- à la non-communication d'une information en violation d'une obligation spécifique ayant le même effet ;

- au détournement de tels fonds à d'autres fins que celles pour lesquelles ils ont initialement été octroyés ;

b) En matière de recettes, tout acte ou omission intentionnel relatif :

- à l'utilisation ou à la présentation de déclarations ou de documents faux, inexacts ou incomplets, ayant pour effet la diminution illégale de ressources du budget général des Communautés européennes ou des budgets gérés par les Communautés européennes ou pour leur compte ;

- à la non-communication d'une information en violation d'une obligation spécifique, ayant le même effet ;

- au détournement d'un avantage légalement obtenu, ayant le même effet.

2. Sous réserve de l'article 2, paragraphe 2, chaque Etat membre prend les mesures nécessaires et appropriées pour transposer en droit pénal interne les dispositions du paragraphe 1 de telle sorte que les comportements qu'elles visent soient érigés en infractions pénales.

3. Sous réserve de l'article 2, paragraphe 2, chaque Etat membre prend également les mesures nécessaires pour assurer que l'établissement ou la fourniture intentionnel de déclarations ou de documents faux, inexacts ou incomplets ayant l'effet mentionné au paragraphe 1 sont érigés en infractions pénales s'ils ne sont pas déjà punissables soit comme infraction principale, soit à titre de complicité, d'instigation ou de tentative de fraude telle que définie au paragraphe 1.

4. Le caractère intentionnel d'un acte ou d'une omission visé aux paragraphes 1 et 3 peut résulter de circonstances factuelles objectives.


Article 2

Sanctions


1. Chaque Etat membre prend les mesures nécessaires pour assurer que les comportements visés à l'article 1er, ainsi que la complicité, l'instigation ou la tentative relatives aux comportements visés à l'article 1er, paragraphe 1, sont passibles de sanctions pénales effectives, proportionnées et dissuasives, incluant, au moins dans les cas de fraude grave, des peines privatives de liberté pouvant entraîner l'extradition, étant entendu que doit être considérée comme fraude grave toute fraude portant sur un montant minimal à fixer dans chaque Etat membre. Ce montant minimal ne peut pas être fixé à plus de 50 000 écus.

2. Toutefois, un Etat membre peut prévoir, pour les cas de fraude mineure portant sur un montant total inférieur à 4 000 écus et ne présentant pas de circonstances particulières de gravité selon sa législation, des sanctions d'une autre nature que celles prévues au paragraphe 1.

3. Le Conseil de l'Union européenne, statuant à l'unanimité, peut modifier le montant visé au paragraphe 2.


Article 3

Responsabilité pénale des chefs d'entreprise


Chaque Etat membre prend les mesures nécessaires pour permettre que les chefs d'entreprise ou toute personne ayant le pouvoir de décision ou de contrôle au sein d'une entreprise puissent être déclarés pénalement responsables selon les principes définis par son droit interne, en cas d'actes frauduleux commis au préjudice des intérêts financiers des Communautés européennes, tels que visés à l'article 1er, par une personne soumise à leur autorité pour le compte de l'entreprise.


Article 4

Compétence


1. Chaque Etat membre prend les mesures nécessaires pour établir sa compétence sur les infractions qu'il a instituées conformément à l'article 1er et à l'article 2, paragraphe 1, dans les cas où :

- la fraude, la participation à une fraude ou la tentative de fraude portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés européennes est commise, en tout ou en partie, sur son territoire, y compris le cas de fraude où le gain a été réalisé sur ce territoire ;

- une personne se trouvant sur son territoire participe ou incite sciemment à la perpétration d'une telle fraude sur le territoire de tout autre Etat ;

- l'auteur de l'infraction est un ressortissant de l'Etat membre concerné, étant entendu que la législation de cet Etat membre peut prévoir que le comportement est également punissable dans le pays où il a eu lieu.

2. Tout Etat membre peut déclarer, lors de la notification visée à l'article 11, paragraphe 2, qu'il n'applique pas la règle énoncée au paragraphe 1, troisième tiret, du présent article .


Article 5

Extradition et poursuites


1. Tout Etat membre qui, en vertu de sa législation, n'extrade pas ses propres ressortissants prend les mesures nécessaires pour établir sa compétence sur les infractions qu'il a instituées conformément à l'article 1er et à l'article 2, paragraphe 1, lorsqu'elles sont commises par ses propres ressortissants hors de son territoire.

2. Chaque Etat membre doit, lorsqu'un de ses ressortissants est présumé avoir commis dans un autre Etat membre une infraction pénale consistant en un comportement tel que décrit à l'article 1er et à l'article 2, paragraphe 1, et qu'il n'extrade pas cette personne vers cet autre Etat membre uniquement en raison de sa nationalité, soumettre l'affaire à ses autorités compétentes aux fins de poursuites, s'il y a lieu. Afin de permettre l'exercice des poursuites, les dossiers, informations et objets relatifs à l'infraction sont adressés selon les modalités prévues à l'article 6 de la convention européenne d'extradition. L'Etat membre requérant sera informé des poursuites engagées et de leurs résultats.

3. Un Etat membre ne peut refuser l'extradition en cas de fraude portant atteinte aux intérêts financiers des Communautés européennes au seul motif qu'il s'agit d'une infraction en matière de taxes ou de droits de douane.

4. Aux fins du présent article , les termes « ressortissants d'un Etat membre » sont interprétés conformément à toute déclaration faite par cet Etat en vertu de l'article 6, paragraphe 1, point b de la convention européenne d'extradition et au paragraphe 1, point c, de ce même article .


Article 6

Coopération


1. Si une fraude telle que définie à l'article 1er constitue une infraction pénale et concerne au moins deux Etats membres, ceux-ci coopèrent de façon effective à l'enquête, aux poursuites judiciaires et à l'exécution de la sanction prononcée, au moyen, par exemple, de l'entraide judiciaire, de l'extradition, du transfert des poursuites ou de l'exécution des jugements prononcés dans un autre Etat membre.

2. Lorsqu'une infraction relève de la compétence de plus d'un Etat membre et que n'importe lequel de ces Etats peut valablement engager des poursuites sur la base des mêmes faits, les Etats membres concernés coopèrent pour décider lequel d'entre eux poursuivra le ou les auteurs de l'infraction, avec pour objectif de centraliser, si possible, les poursuites dans un seul Etat membre.


Article 7

Ne bis in idem


1. Les Etats membres appliquent en droit pénal interne le principe ne bis in idem, en vertu duquel une personne qui a été définitivement jugée dans un Etat membre ne peut être poursuivie pour les mêmes faits dans un autre Etat membre, à condition que, en cas de condamnation, la sanction ait été exécutée, soit en cours d'exécution ou ne puisse plus être exécutée selon la loi de l'Etat de condamnation.

2. Tout Etat membre peut déclarer, lors de la notification visée à l'article 11, paragraphe 2, qu'il n'est pas lié par le paragraphe 1 du présent article dans un ou plusieurs des cas suivants :

a) Lorsque les faits visés par le jugement rendu à l'étranger ont eu lieu, soit en tout, soit en partie, sur son territoire. Dans ce dernier cas, cette exception ne s'applique cependant pas si ces faits ont eu lieu en partie sur le territoire de l'Etat membre où le jugement a été rendu ;

b) Lorsque les faits visés par le jugement rendu à l'étranger constituent une infraction contre la sûreté ou d'autres intérêts également essentiels de cet Etat membre ;

c) Lorsque les faits visés par le jugement rendu à l'étranger ont été commis par un fonctionnaire de cet Etat membre en violation des obligations de sa charge.

3. Les exceptions qui ont fait l'objet d'une déclaration au titre du paragraphe 2 ne s'appliquent pas lorsque l'Etat membre concerné a, pour les mêmes faits, demandé la poursuite à l'autre Etat membre ou accordé l'extradition de la personne concernée.

4. Les accords bilatéraux ou multilatéraux conclus entre les Etats membres en la matière et les déclarations y relatives ne sont pas affectés par le présent article .


Article 8

Cour de justice


1. Tout différend entre Etats membres relatif à l'interprétation ou à l'application de la présente convention doit, dans une première étape, être examiné au sein du Conseil selon la procédure prévue au titre VI du traité sur l'Union européenne en vue d'une solution.

A l'expiration d'un délai de six mois, si une solution n'a pu être trouvée, la Cour de justice des Communautés européennes peut être saisie par une Partie au différend.

2. Tout différend relatif aux articles 1er ou 10 de la présente convention entre un ou plusieurs Etats membres et la Commission des Communautés européennes qui n'a pu être réglé par voie de négociation peut être soumis à la Cour de justice.


Article 9

Dispositions internes


Aucune disposition de la présente convention n'empêche les Etats membres d'adopter des dispositions de droit interne allant au-delà des obligations découlant de cette convention.


Article 10

Communication


1. Les Etats membres communiquent à la Commission des Communautés européennes le texte des dispositions transposant dans leur droit interne les obligations qui leur incombent en vertu des dispositions de la présente convention.

2. Aux fins de l'application de la présente convention, les Hautes Parties contractantes définissent au sein du Conseil de l'Union européenne les informations qui doivent être communiquées ou échangées entre les Etats membres ou entre eux et la Commission, et les modalités de leur transmission.


Article 11

Entrée en vigueur


1. La présente convention est soumise à l'adoption par les Etats membres selon leurs règles constitutionnelles respectives.

2. Les Etats membres notifient au secrétaire général du Conseil de l'Union européenne l'accomplissement des procédures requises par leurs règles constitutionnelles respectives pour l'adoption de la présente convention.

3. La présente convention entre en vigueur quatre-vingt-dix jours après la notification visée au paragraphe 2 par l'Etat membre qui procède le dernier à cette formalité.


Article 12

Adhésion


1. La présente convention est ouverte à l'adhésion de tout Etat qui devient membre de l'Union européenne.

2. Le texte de la présente convention dans la langue de l'Etat adhérent, établi par le Conseil de l'Union européenne, fait foi.

3. Les instruments d'adhésion sont déposés auprès du dépositaire.

4. La présente convention entre en vigueur à l'égard de tout Etat qui y adhère quatre-vingt-dix jours après le dépôt de son instrument d'adhésion ou à la date de l'entrée en vigueur de cette convention, si elle n'est pas encore entrée en vigueur au moment de l'expiration de ladite période de quatre-vingt-dix jours.


Article 13

Dépositaire


1. Le secrétaire général du Conseil de l'Union européenne est dépositaire de la présente convention.

2. Le dépositaire publie au Journal officiel des Communautés européennes l'état des adoptions et des adhésions, les déclarations et les réserves, ainsi que toute autre notification relative à la présente convention.

Fait à Bruxelles, le 26 juillet 1995, en un exemplaire unique, en langues allemande, anglaise, danoise, espagnole, finnoise, française, grecque, irlandaise, italienne, néerlandaise, portugaise et suédoise, tous ces textes faisant également foi, exemplaire qui est déposé dans les archives du Secrétariat général du Conseil de l'Union européenne.


Déclaration de la République française


Lorsque les infractions prévues à l'article 1er et à l'article 2 paragraphe 1 de la présente convention sont commises hors du territoire de la République, la France déclare, conformément aux dispositions de l'article 4 paragraphe 2 que la poursuite desdites infractions visant les personnes énumérées à l'article 4 paragraphe 1 troisième tiret ne pourra être exercée qu'à la requête du ministère public. Cette poursuite devra être précédée d'une plainte de la victime ou de ses ayants droit ou d'une dénonciation officielle par l'autorité du pays où le fait a été commis.