J.O. Numéro 209 du 7 Septembre 2002       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 14877

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Décision no 2002-508 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 27 juin 2002 prise au terme de la procédure engagée à l'encontre de la société Landtel France SAS en application de l'article L. 36-11 du code des postes et télécommunications


NOR : ARTJ0200338S



L'Autorité de régulation des télécommunications,
Vu le code des postes et télécommunications, et notamment ses articles L. 34-6 et L. 36-11 ;
Vu le règlement intérieur de l'Autorité de régulation des télécommunications, approuvé par la décision no 99-258 de l'Autorité en date du 18 juin 1999 ;
Vu l'arrêté du 4 août 2000 autorisant la société Landtel France SAS à établir et exploiter un réseau de télécommunications ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public ;
Vu l'avis relatif à trois appels à candidatures pour l'établissement et l'exploitation de réseaux ouverts au public de boucle locale radio dans les bandes de fréquence à 3,5 GHz et à 26 GHz, publié le 30 novembre 1999 ;
Vu le courrier adressé le 28 décembre 2001 par le président de l'Autorité de régulation des télécommunications à M. Laurent Abril, président de Landtel France SAS ;
Vu la réponse de Landtel France SAS, reçue le 15 janvier 2002, au courrier précité ;
Vu le courrier du chef du service juridique de l'Autorité adressé à M. Laurent Abril, président de Landtel France SAS, en date du 8 mars 2002, l'informant de l'ouverture de la procédure de sanction et l'invitant à présenter ses observations au cours d'une audition par les rapporteurs ;
Vu le procès-verbal de la rapporteure de l'audition de la société Landtel France SAS en date du 21 mars 2002 ;
Vu les observations de la société Landtel France SAS enregistrées à l'Autorité le 22 mars 2002 au procès-verbal de la rapporteure du 21 mars 2002 ;
Vu la lettre du rapporteur en date du 25 mars 2002 transmettant à la société Landtel France SAS le procès-verbal définitif de l'audition du 21 mars 2002 ;
Vu la décision no 2002-273 de l'Autorité de régulation des télécommunications, en date du 26 mars 2002, portant mise en demeure de la société Landtel France SAS ;
Vu la réponse enregistrée à l'Autorité le 29 avril 2002 de la société Landtel France SAS à la décision no 2002-273 de l'Autorité ;
Vu la lettre du chef de service juridique, en date du 23 mai 2002, notifiant à la société Landtel France SAS le rapport d'instruction établi par la rapporteure contenant l'exposé des faits et griefs retenus et l'invitant à consulter le dossier ;
Vu le procès-verbal de consultation du dossier de la société Landtel France SAS en date du 28 mai 2002 ;
Vu le courrier de la société Landtel France SAS enregistré à l'Autorité le 4 juin 2002 transmettant ses observations au rapport de la rapporteure ;
Vu la lettre du chef du service juridique de l'Autorité, en date du 6 juin 2002, convoquant la société Landtel France SAS à une audience devant le collège le 20 juin 2002 ;
Vu la lettre de la société Landtel France SAS enregistrée à l'Autorité le 17 juin 2002, indiquant ses représentants à l'audience du 20 juin 2002 ;
Vu la lettre de Me Frédérique Lévy, en date du 20 juin 2002, liquidatrice judiciaire de la société Landtel France SAS, donnant mandat à M. Laurent Abril pour assurer sa représentation lors de l'audience du 20 juin 2002 ;
Après avoir entendu, le 20 juin 2002, lors de l'audience devant le collège, hors la présence de M. Feneyrol :
- le rapport de Mme Caroline Mischler, rapporteure ;
- les observations de MM. Laurent Abril et Thierry Othnin-Girard, pour la société Landtel France SAS ;
Cette audience s'est déroulée en présence de :
MM. Jean Marimbert, directeur général, Gilles Crespin,
Frédéric Camus, Loïc Taillanter, Elisabeth Rolin, agents de l'Autorité ;
Mme Elisabeth Cotte, pour la société Landtel France SAS.
Le collège en ayant délibéré le 27 juin 2002, hors la présence de la rapporteure, du rapporteur adjoint et des agents de l'Autorité.


1. Dispositions légales et réglementaires

Sur la base du cadre juridique prévu par les articles L. 33-1 (V) et L. 36-7 (6o) du code des postes et télécommunications, l'Autorité a publié le 11 juillet 2000 les résultats de l'appel à candidatures qui visait à la sélection de deux exploitants de réseaux de boucle locale radio dans la bande 26 GHz dans chacune des régions du territoire métropolitain.
Le texte relatif aux conditions générales de la procédure d'autorisation des exploitants de boucle locale radio dans la bande 26 GHz dans les régions métropolitaines prévoyait, dans le chapitre 4 relatif aux principales dispositions de l'autorisation et de l'attribution des fréquences, que :
« Sur chaque région, les deux candidats retenus bénéficieront :
- d'une autorisation d'établissement et d'exploitation d'un réseau ouvert au public et de fourniture du service téléphonique au public délivrée en application des articles L. 33-1 et L. 34-1 ;
- d'une attribution de fréquences dans la bande 24,5-26,5 GHz. »
A l'issue de l'appel à candidatures mentionné précédemment, la société Landtel France SAS, compte tenu notamment de ses engagements de déploiement de systèmes point à multipoint de boucle locale radio, a été retenue dans sept régions.
Dans ces conditions, l'ensemble des autorisations au titre des régions retenues pour la société Landtel France SAS a été regroupé sous un acte unique qui s'est matérialisé par l'arrêté du 4 août 2000 autorisant cette société à établir et exploiter un réseau de télécommunications ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public.
Le cahier des charges annexé à cet arrêté d'autorisation contient les prescriptions que doit respecter la société Landtel France SAS et notamment des obligations de déploiement dans la bande 26 GHz au 31 décembre 2001. Celui-ci prévoit :
« Obligations de déploiement dans la bande 26 GHz :
Le taux régional de couverture radioélectrique de la population par les systèmes point à multipoint installés par l'opérateur dans la bande 26 GHz atteint, dans chaque région, au minimum les valeurs mentionnées dans le tableau ci-dessous aux différentes échéances :

Vous pouvez consulter le tableau dans le JO
n° 209 du 07/09/2002 page 14877 à 14880

De plus, afin de contrôler le respect de ces obligations, ce même cahier des charges prévoit :
« Respect des obligations de déploiement :
Les obligations de déploiement figurant ci-dessus seront déclarées avoir été respectées si les objectifs assignés au taux de couverture radioélectrique sont vérifiés par l'indicateur de couverture radioélectrique défini comme suit.
L'indicateur est défini sur une zone donnée comme le pourcentage de la population de cette zone située en vue directe d'au moins une station de base, où la probabilité qu'un point donné soit en vue directe d'une station de base est évaluée de la façon suivante :
- a1 si le point se trouve dans la zone de couverture d'une seule station de base dans la bande considérée ;
- a2 si le point se trouve dans celles de deux stations de base dans la bande considérée ;
- a3 si le point se trouve dans celles d'au moins trois stations de base dans la bande considérée.
Les valeurs de ces paramètres sont précisées ci-dessous :

Vous pouvez consulter le tableau dans le JO
n° 209 du 07/09/2002 page 14877 à 14880

La zone de couverture d'une station de base est définie comme la zone constituée de la réunion des secteurs de couverture géographique de chaque antenne d'émission point à multipoint dans la bande de fréquences concernée en service sur la station de base. Le secteur de couverture géographique d'une antenne est évalué par le secteur angulaire dont l'origine est le point d'implantation de la station de base, l'azimut celui de l'antenne, l'angle d'ouverture à 3 dB de l'antenne, et le rayon égal à une valeur constante r définie ci-dessous.

Vous pouvez consulter le tableau dans le JO
n° 209 du 07/09/2002 page 14877 à 14880

La population située dans une zone donnée est évaluée en fonction des densités moyennes d'habitants des communes situées en totalité ou en partie dans la zone.
Contrôle du respect des obligations de déploiement :
L'opérateur fournit à l'Autorité de régulation des télécommunications, à sa demande, les informations permettant la vérification du respect par l'opérateur des obligations de déploiement mentionnées ci-dessus et l'évaluation des conditions d'utilisation des fréquences.
Ces informations comprennent notamment la liste et les coordonnées géographiques des sites de station de base en fonctionnement dans la bande 26 GHz, l'azimut et l'angle d'ouverture à 3 dB des secteurs d'émission installés sur ce site, au 31 décembre 2001, au 30 juin 2003 et au 31 décembre 2004. »
Considérant qu'en vertu de l'article L. 36-7 (3o) du code des postes et télécommunications l'Autorité contrôle le respect par les opérateurs des obligations résultant des autorisations dont ils bénéficient. Il lui appartient, le cas échéant, de sanctionner les manquements constatés dans les conditions prévues à l'article L. 36-11 du code des postes et télécommunications. Il suit de là que l'Autorité, en application de l'article L. 34-6 de ce même code, peut prononcer, en fonction de la gravité du manquement, la suspension, la réduction de durée et le retrait total ou partiel de l'autorisation de l'opérateur.

2. Exposé des faits

Sur l'évaluation de l'indicateur de couverture radioélectrique atteint par Landtel France SAS au 31 décembre 2001 :
Afin de contrôler le respect de ces obligations de déploiement de système point à multipoint, le président de l'Autorité a demandé à la société Landtel France SAS, dans un courrier en date du 28 décembre 2001, les informations permettant le calcul de taux de couverture radioélectrique au 31 décembre 2001 (liste et coordonnées géographiques des stations de base, azimut et angle d'ouverture à 3 dB des secteurs d'émission,...) ainsi que des informations concernant son offre de services. La société Landtel France SAS avait préalablement été consultée sur le format des informations techniques demandées. Elle avait alors indiqué à l'Autorité que ce format ne lui posait pas de difficultés.
Par courrier reçu le 15 janvier 2002, la société Landtel France SAS a fourni les données demandées. Elle a indiqué qu'elle avait proposé à l'Autorité un critère pertinent de mesure des obligations de déploiement des opérateurs de boucle locale radio. Ce critère consiste à mesurer la couverture du marché adressable, c'est-à-dire, dans le cas de la boucle locale radio, les petites et moyennes entreprises.
En outre, elle a précisé qu'elle était en mesure de commercialiser ses services à plus de 226 000 petites et moyennes entreprises en région d'Ile-de-France, soit 36 % des établissements des unités urbaines de la région. Elle a également indiqué des raisons de circonstances, notamment extérieures à la société, expliquant le décalage entre les engagements de déploiement et les réalisations effectuées au 31 décembre 2001.
L'Autorité a utilisé les données fournies par l'opérateur afin de calculer les indicateurs de couverture radioélectrique, tels qu'ils sont définis dans le paragraphe 1.3.1 du cahier des charges et conformément aux textes d'appels à candidatures. Elle a pour cela développé une application informatique basée sur un système d'information géographique capable de calculer ces indicateurs à partir notamment des coordonnées géographiques des sites de stations de base.
L'Autorité a ainsi constaté que l'indicateur de couverture radioélectrique de la population par la société Landtel France SAS sur la région Ile-de-France était égal à 10,07 %. Dans les six autres régions, l'indicateur est égal à 0 % du fait que la société n'a pas déployé.


Sur l'ouverture d'une procédure de sanction :
Dans ces conditions, l'Autorité a informé le 8 mars 2002 par courrier la société Landtel France SAS de l'ouverture d'une procédure de sanction relative au respect des prescriptions de son autorisation.
A la suite de l'instruction du dossier qui a notamment comporté une audition des représentants de Landtel France SAS, l'Autorité a considéré que la société Landtel France SAS n'avait pas respecté les dispositions relatives aux obligations de déploiement contenues dans son cahier des charges. Dans ces conditions, elle l'a mise en demeure par sa décision no 2002-273 en date du 26 mars 2002 de justifier, dans un délai d'un mois, de la mise en oeuvre des mesures prises en vue d'assurer le respect des dispositions relatives aux obligations de déploiement de réseaux de boucle locale radio dans la bande de fréquences 26 GHz du cahier des charges annexé à l'arrêté d'autorisation du 4 août 2000.
En réponse à la décision no 2002-273, l'Autorité a reçu par courrier, le 29 avril 2002, les observations écrites de la société Landtel France SAS. Landtel France SAS a notamment informé l'Autorité de la prolongation, le 25 avril 2002, de sa période de redressement judiciaire, pour une période de quatre mois par le tribunal de commerce de Paris sur la base des engagements financiers pris par M. Laurence Zimmerman.
Dans le cadre de l'instruction du dossier, l'Autorité a ensuite notifié le 23 mai 2002, par courrier à la société Landtel France SAS, les faits et les griefs retenus. Il a été fait grief à Landtel France SAS de ne pas avoir justifié, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision no 2002-273 susvisée, de la mise en oeuvre des mesures prises en vue d'assurer le respect des dispositions relatives aux obligations de déploiement de réseaux de boucle locale radio dans la bande de fréquences 26 GHz du cahier des charges annexé à l'arrêté d'autorisation du 4 août 2000, dont l'inexécution à la date du 31 décembre 2001 a été constatée.
La société Landtel France SAS a répondu par courrier en date du 4 juin 2002 à la notification de ces griefs.

3. Observations de la société Landtel France SAS
3.1 Les observations de Landtel France SAS
à la mise en demeure

Dans sa réponse à la décision no 2002-273, la société Landtel France SAS a fait valoir les observations suivantes :
En premier lieu, Landtel France SAS a indiqué que, depuis le 1er janvier 2002, elle « a continué d'avancer dans le déploiement de son infrastructure, notamment en ce qui concerne la maintenance des équipements et l'administration du réseau et des services ».
En deuxième lieu, Landtel France SAS a prévu de porter le nombre de stations de base déployées de 6 à 20 d'ici à la fin de l'année 2002 et de 20 à 22 au cours du premier trimestre 2003. Les quatorze stations de base que la société compte déployer d'ici à la fin 2002 le seraient pour onze d'entre elles dans la région Ile-de-France et pour trois d'entre elles dans la région Aquitaine. Au premier trimestre 2003, l'opérateur a prévu d'installer deux stations de base dans la région Champagne-Ardenne. Landtel France SAS a précisé que, selon ses calculs, ses taux de couverture radioélectrique de la population passeraient alors à 22,4 % en Ile-de-France, 3,1 % en Aquitaine et 3,7 % en Champagne-Ardenne. La société a précisé à cet égard qu'elle « conduira son programme de développement en indexant le déploiement de son réseau sur la réalisation de ses objectifs commerciaux ». Elle a ajouté que « dans la période à venir, nous continuons de privilégier la profitabilité (donc le développement des nouveaux services et la pénétration du marché adressable) par rapport à une augmentation significative de nos taux de couverture de population ».
En troisième lieu, Landtel France SAS a fait état de projets de partenariat avec trois sociétés, et a fourni des lettres d'intention correspondantes.
Enfin, Landtel France SAS a indiqué qu'un plan de redressement par voie de continuation sera présenté par la société en juin 2002 au tribunal de commerce.

3.2 Les observations de Landtel France SAS
à la notification des griefs

A la notification de ces griefs la société Landtel France SAS a apporté, par courrier en date du 4 juin 2002, les observations suivantes :
Landtel France SAS a indiqué que l'absence de déploiement de nouvelles stations de base depuis le 31 décembre 2001 est due notamment à la situation de redressement judiciaire dans laquelle se trouve la société depuis le 24 janvier 2001 qui ne lui « permet pas d'engager de nouvelles dépenses non indispensables à la survie de l'entreprise ». Par ailleurs, Landtel France SAS a indiqué qu'elle a de nouveaux clients opérateurs et FAI depuis le 31 décembre 2001 qui sont First Télécom, Tiscali International Network SA, Telecity et Initialeonline.
Par ailleurs, Landtel France SAS a détaillé son plan de déploiement pour l'année 2002 :
- fin septembre 2002 : 1 station de base en Ile-de-France et 1 station de base en Aquitaine ;
- fin octobre 2002 : 3 stations de base en Ile-de-France et 1 station de base en Aquitaine ;
- fin novembre 2002 : 3 stations de base en Ile-de-France et 1 station de base en Aquitaine ;
- fin décembre 2002 : 4 stations de base en Ile-de-France.
A l'appui de ce programme de déploiement, Landtel France SAS a joint une copie de la lettre du 3 juin 2002 de son actionnaire principal, M. Zimmerman. Dans ce courrier, M. Zimmerman a écrit : « I am committed to (...) (ii) ensuring the funding of the investment associated to this deployment, that is evaluated at 5 millions euros (both Capex and Opex) until Q1, 2003. (...) » ; ce qui peut être traduit par : « je m'engage (...) à assurer le financement de l'investissement associé à ce déploiement qui se monte à 5 millions d'euros jusqu'au 1er trimestre 2003 ». En outre, Landtel France SAS reprend cet engagement dans sa réponse en indiquant que : « L'engagement financier de l'actionnaire majoritaire de Landtel France, M. Zimmerman, porte sur l'ensemble du programme de déploiement de Landtel France (...) ».
La société a précisé que son contrat-cadre de fourniture avec un équipementier, signé le 22 août 2001, la conduisait dans un premier temps à limiter son déploiement aux zones à haut potentiel.
Landtel France SAS a précisé qu'elle « procédera au déploiement de stations de base profitables en fonction de l'évaluation du marché adressé par ces dernières ». En effet, la société précise qu'elle a été incitée par le marché à établir des plans d'affaires pour chaque station de base.
La société a ajouté qu'elle envisage de déployer dans une seconde phase son réseau dans les régions Bourgogne, Franche-Comté, Limousin et Poitou-Charentes, une fois qu'elle aura renégocié les termes du contrat avec son équipementier.
Enfin, elle a indiqué que « compte tenu de la menace représentée par la poursuite de la procédure de sanction engagée à son encontre, il a été décidé, de concert avec l'administrateur judiciaire et le tribunal de commerce de Paris, que le plan ne serait pas présenté en juin 2002, comme prévu initialement, mais à l'issue des vacances judiciaires, c'est-à-dire postérieurement à la décision finale de l'Autorité ».

3.3 Les observations de Landtel France SAS
lors de l'audience du 20 juin 2002

A l'ouverture de l'audience du 20 juin 2002, le dirigeant de la société Landtel, M. Abril, a produit une lettre susvisée de la liquidatrice judiciaire, dont les termes doivent être regardés comme lui donnant qualité pour s'exprimer valablement dans le cadre de l'audience.
La société a tout d'abord rappelé qu'elle a cherché à démontrer dans son dossier l'existence d'un véritable outil industriel.
En outre, la société a témoigné de son souhait de concilier les obligations de son cahier des charges et la réalité économique. A cet égard, Landtel France SAS a indiqué ne pas souhaiter prendre vis-à-vis de l'Autorité des engagements irréalistes.
Elle a par ailleurs fait état d'un crédit fournisseur auprès de son équipementier dont un tiers de la somme a été utilisé.
De plus, la société a indiqué qu'elle envisage d'enrichir son offre commerciale avec le lancement d'une offre voix.
Enfin, elle a souligné que les financeurs réclamaient aujourd'hui des plans d'affaires individualisés par station de base, tout en exprimant ses doutes quant à la pertinence d'un tel mode de financement, alors que les activités de télécommunications sont basées principalement sur des coûts fixes.

4. Analyse de l'Autorité

Sur l'incidence du jugement de mise en liquidation judiciaire de Landtel France SAS par le tribunal de commerce de Paris :
L'Autorité note que, postérieurement à la production par la société Landtel France SAS du mémoire en date du 4 juin 2002 transmettant ses observations au rapport de la rapporteure, elle a eu connaissance d'un jugement du tribunal de commerce de Paris prononçant la liquidation judiciaire de la société Landtel France SAS avec poursuite d'activité jusqu'au 30 juin 2002.
En vertu de l'article L. 623-1 du code de commerce, une voie de recours est ouverte contre le jugement du tribunal de commerce prononçant la liquidation judiciaire de la société Landtel France SAS. De plus, en application de l'article 157 du décret du 27 décembre 1985 relatif au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, le délai d'appel des parties est de dix jours à compter de la notification qui leur est faite du jugement.
Conformément à l'article 155 de ce même décret, l'exécution provisoire du jugement rendu en matière de liquidation judiciaire de la société Landtel France SAS peut être arrêtée en cas d'appel, par le premier président de la cour d'appel statuant en référé, si les moyens invoqués à l'appui de l'appel lui paraissent sérieux.
Dans ces conditions, l'Autorité estime que l'existence du jugement de mise en liquidation judiciaire ne prive pas d'objet, à la date où elle statue, l'achèvement de la procédure engagée sur le fondement de l'article L. 36-11 du code des postes et télécommunications.


Sur le contexte :
L'Autorité est consciente que les opérateurs de boucle locale radio ont rencontré des difficultés pour trouver des sources de financement suite au retournement des marchés financiers. Dans ces conditions, les difficultés de la conjoncture peuvent contribuer à expliquer les écarts importants entre les obligations de déploiement définies dans le cahier des charges annexé à l'autorisation et le taux de couverture atteint par les opérateurs de boucle locale radio.


Sur le programme de déploiement de Landtel France SAS sur les régions Ile-de-France et Aquitaine :
Il résulte de l'instruction du dossier que Landtel France SAS exprime de façon explicite sa volonté d'engager la poursuite d'un projet de déploiement dans les régions Ile-de-France et Aquitaine en 2002, portant sur quatorze stations de base supplémentaires.
A l'appui de ce programme de déploiement, elle a apporté un calendrier précis, ainsi que des éléments concrets concernant sa capacité opérationnelle à développer un réseau de boucle locale radio sur ces deux régions. En outre, Landtel France SAS a fourni un courrier d'engagement daté du 3 juin 2002 de son actionnaire principal portant sur le financement du déploiement complémentaire de Landtel France SAS à hauteur de 5 millions d'euros.
Il ressort des observations de la société Landtel France SAS concernant le contrat cadre de fourniture avec son équipementier que « 14 stations de base restent à l'actif du contrat actuellement en vigueur (...) dès la sortie de Landtel France de la situation de redressement judiciaire dans laquelle elle se trouve depuis le mois de janvier 2002 ». A cet égard, Landtel France SAS a indiqué lors de l'audience que le crédit fournisseur dont elle dispose auprès de son équipementier n'a été utilisé qu'à concurrence du tiers environ.
Dans ces conditions, il apparaît que, compte tenu des éléments fournis, la perspective du passage à une mise en oeuvre effective du déploiement sur les régions Ile-de-France et Aquitaine est suffisamment étayée. L'engagement de déploiement pris par la société dans ces deux régions est corroboré par des éléments financiers et opérationnels du dossier, sans préjudice des conséquences pour la pérennité de la société de sa mise en liquidation judiciaire avec poursuite d'activité jusqu'au 30 juin 2002.


Sur l'absence de projet de déploiement en 2002 dans les 5 autres régions :
En région Champagne-Ardenne, il apparaît que la société Landtel France SAS envisage un déploiement au premier trimestre 2003, mais cette intention qui porte au demeurant sur une période proche de la deuxième étape de contrôle prévue au 30 juin 2003 par le cahier des charges annexé à l'autorisation n'est assortie d'aucun élément précis. En outre, le contrat actuel avec un équipementier porte exclusivement sur les quatorze premières stations de base complémentaires que l'opérateur envisage de déployer dans les régions Ile-de-France et Aquitaine. Ainsi, il ressort du dossier que, d'une part, Landtel France SAS n'a pas déployé dans cette région et, d'autre part, que la société n'a pas apporté d'éléments suffisamment probants et circonstanciés de nature à étayer un projet de déploiement dans cette région.
Par ailleurs, il résulte des observations de Landtel France SAS, corroborées par les propos du représentant de Landtel France SAS lors de l'audience, que celle-ci n'a pas déployé dans les quatres autres régions où la société est autorisée, qui sont les suivantes : Bourgogne, Franche-Comté, Limousin, Poitou-Charentes, et qu'elle n'a pas fourni de plan de déploiement concernant ces régions. Ces faits n'ont pas été contestés par la société lors de l'audience. Dans ces conditions, les arguments de circonstance présentés par la société Landtel France SAS lors de cette même audience ne sont pas apparus à l'Autorité de nature à exonérer cette société des conséquences auxquelles l'exposait l'inexécution de ses engagements de déploiement au titre de ces régions.
Dans ces conditions, l'Autorité considère que la société Landtel France SAS, dans ces cinq régions, n'a pas mis en oeuvre de mesures de nature à permettre le respect des dispositions relatives aux obligations de déploiement de réseaux de boucle locale radio dans la bande de fréquences 26 GHz du cahier des charges annexé à l'arrêté d'autorisation du 4 août 2000.

5. Conclusion

1o Il y a lieu de sanctionner Landtel France SAS au vu des faits et motifs exposés ci-dessus dans cinq des sept régions couvertes par son autorisation
L'Autorité estime, au vu des faits et motifs exposés ci-avant, qu'il y a lieu de sanctionner Landtel France SAS pour le non-respect des dispositions relatives aux obligations de déploiement de réseaux de boucle locale radio dans la bande de fréquences 26 GHz du cahier des charges annexé à l'arrêté d'autorisation dans les régions suivantes : Bourgogne, Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Limousin et Poitou-Charentes.

2o Sur la nature de la sanction

Aux termes de l'article L. 36-11 2o du code des postes et télécommunication, « lorsqu'un exploitant de réseau ou un fournisseur de services ne se conforme pas (...) à la mise en demeure prévue au 1o ci-dessus, l'Autorité de régulation des télécommunications peut prononcer à son encontre une des sanctions suivantes :
a) Soit, en fonction de la gravité du manquement, la suspension totale ou partielle, pour un mois au plus, la réduction de la durée, dans la limite d'une année, ou le retrait de l'autorisation (...) »
Le retrait de l'autorisation peut être total ou partiel. En effet, en application de l'article L. 34-6 : « la suspension, la réduction de durée et le retrait total ou partiel des autorisations sont prononcés par l'Autorité de régulation des télécommunications, dans les conditions prévues à l'article L. 36-11 ».
Il résulte de tout ce qui précède que, compte tenu de l'étendue et du degré de gravité du manquement constaté, il y a lieu de retirer à Landtel France SAS son autorisation au titre des régions Bourgogne, Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Limousin et Poitou-Charentes, en application des articles L. 34-6 et L. 36-11 2, a du code des postes et télécommunications,
Décide :


Art. 1er. - Un retrait partiel de l'autorisation est prononcé à l'encontre de la société Landtel France SAS. Les régions Bourgogne, Champagne-Ardenne, Franche-Comté, Limousin et Poitou-Charentes sont retirées de la zone de couverture de l'autorisation délivrée à la société Landtel France SAS par arrêté du 4 août 2000 l'autorisant à établir et à exploiter un réseau de télécommunications ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public.


Art. 2. - La présente décision sera notifiée à la société Landtel France SAS, transmise au ministre chargé des télécommunications et sera publiée au Journal officiel de la République française.


Fait à Paris, le 27 juin 2002.

Le président,
J.-M. Hubert