L'Autorité de régulation des télécommunications,
Vu le règlement européen no 2887/2000 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2000 relatif au dégroupage de l'accès à la boucle locale ;
Vu le code des postes et télécommunications, notamment ses articles L. 34-8, L. 36-8, R. 11-1 et D. 99-23 ;
Vu la décision no 99-528 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 18 juin 1999 portant règlement intérieur ;
Vu l'arrêté du 6 mars 2000 modifié autorisant la société LDCOM à établir et exploiter un réseau de télécommunications ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public ;
Vu l'arrêté du 12 mars 1998 autorisant la société France Télécom à établir et exploiter un réseau de télécommunications ouvert au public et à fournir le service téléphonique au public ;
Vu la décision no 2000-1328 de l'Autorité en date du 15 décembre 2000 complétant la décision no 2000-813 en date du 28 juillet 2000 établissant pour 2001 la liste des opérateurs exerçant une influence significative sur un marché des télécommunications ;
Vu la décision no 2001-750 de l'Autorité en date du 25 juillet 2001 établissant pour 2002 la liste des opérateurs exerçant une influence significative sur le marché du service téléphonique fixe et celui des liaisons louées ;
Vu la décision no 2001-1006 de l'Autorité en date du 17 octobre 2001 fixant le taux de rémunération du capital employé pour évaluer les tarifs du dégroupage de la boucle locale de France Télécom pour l'année 2002 ;
Vu la demande de règlement d'un différend enregistrée le 4 janvier 2002, présentée par la société LDCOM, RCS Nanterre B 414 946 194, dont le siège social est situé 1, square Chaptal, 92300 Levallois-Perret, représentée par Me Olivier Fréget, cabinet Bird et Bird ;
Le différend porte sur la conclusion de la convention de dégroupage entre France Télécom et LDCOM, et plus précisément sur les conditions techniques et tarifaires du dégroupage partiel.
Dans sa saisine, LDCOM demande à l'Autorité de :
A titre principal :
- dire que la mise à disposition des fréquences non vocales est une prestation de service et doit à ce titre faire l'objet d'une tarification pertinente sous la forme de redevances mensuelles correspondant à l'immobilisation d'éléments du réseau de France Télécom pour le compte de l'opérateur et de frais d'accès au service de filtrage (couvrant les coûts de déploiement d'un ou plusieurs liens intra-salle LIS) ;
- fixer les conditions techniques et tarifaires de cette mise à disposition de fréquences non vocales, pour l'instant à hauteur de 0,85 Euros (HT) par accès et par mois et de 259 Euros tous les 128 accès, cette prestation étant corrélée au dégroupage partiel d'une ligne et ne pouvant faire l'objet d'une facturation par France Télécom, préalable à tout dégroupage ;
- fixer les conditions techniques et tarifaires d'une offre de garantie de temps de rétablissement (GTR) de 4 heures, 7 jours sur 7, 24 heures sur 24 ;
- autoriser la société LDCOM à choisir la chambre 0 de pénétration dans les unités de raccordement d'abonnés distants (URAD) ;
- dire que les frais d'accès au service doivent être égaux au tarif que France Télécom propose dans ses offres de revente de gros, soit 54,12 Euros (HT) ;
A titre subsidiaire :
- dire que la mise à disposition des fréquences non vocales doit prévoir une possibilité de location du dispositif de filtrage ;
- fixer le prix de cette location à 0,85 Euros (HT) par mois et par accès ;
Dans tous les cas :
- dire que sa décision sera réputée s'intégrer rétroactivement dans la convention de dégroupage conclue entre France Télécom et LDCOM et qu'en conséquence, elle sera applicable à l'ensemble des accès commandés au titre du dégroupage partiel et qui sont soumis à cette convention.
Eu égard aux nombreuses demandes effectuées par LDCOM auprès de France Télécom et qui n'auraient pas été satisfaites, LDCOM estime que l'échec des négociations est avéré avec France Télécom et que sa demande est par conséquent recevable.
I. - Sur l'absence de conformité des conditions de tarification de mise à disposition des fréquences hautes avec l'objet du dégroupage partiel
LDCOM indique que les montants des devis adressés le 11 octobre dernier par France Télécom s'éloignent considérablement des prix annoncés à l'origine. Les conditions financières actuelles de mise à disposition des fréquences non vocales varient en moyenne de 100 Euros à plus de 500 Euros par accès en fonction du nombre d'opérateurs susceptibles de passer une commande ferme. LDCOM soulève trois moyens ci-après exposés tendant à démontrer l'absence de conformité de l'architecture offerte par France Télécom avec l'objet du dégroupage partiel.
Sur la violation des dispositions du décret du 12 septembre 2000 :
LDCOM considère que l'article D. 99-23 du code des postes et télécommunications fixe très précisément le point de partage des obligations entre opérateurs et qu'en matière d'accès partagé, ce point de séparation se situe après la séparation des fréquences. Le dispositif permettant de livrer les fréquences hautes fait par conséquent partie intégrante du réseau de France Télécom. Le refus opposé par France Télécom à la demande de LDCOM, tendant à ce qu'elle utilise ses propres filtres intégrés, ne peut résulter selon LDCOM que du fait que France Télécom se considère comme seul responsable des conditions d'accès aux fréquences non vocables, cet accès s'effectuant dans son réseau.
LDCOM estime que France Télécom est soumis en vertu de l'article D. 99-23 à une obligation de non-discrimination et que la séparation des fréquences doit par conséquent s'effectuer selon une architecture commune aux opérateurs et à France Télécom, puisque le dégroupage partiel repose sur un partage des fréquences. Le choix d'une architecture dédiée aux opérateurs, intégralement séparée de celle que France Télécom utilise pour ses propres besoins ne constitue pas une offre objective, ce qui est par conséquent contraire au texte précité.
Sur les effets en termes de discrimination :
LDCOM constate que le choix d'architecture de France Télécom introduit des discriminations sur au moins les deux types de marchés suivants.
Sur le marché de la collecte ADSL, LDCOM considère que le marché pertinent pour apprécier les effets de cette architecture est celui sur lequel les opérateurs de dégroupage et France Télécom, d'une part, rencontrent les fournisseurs d'accès Internet haut débit, d'autre part, en position de clients afin de leur offrir des solutions collecte ADSL. Ce marché étant détenu en quasi-totalité par France Télécom, le choix d'une architecture ADSL dédiée procure à France Télécom des conditions de mise à disposition des fréquences hautes plus favorables que celles d'un opérateur entrant dans le cadre du dégroupage partiel.
LDCOM indique que le coût des filtres dans un DSLAM intégré s'établit à environ 21 Euros. Ce prix est inférieur d'environ 60 % à celui actuellement proposé par France Télécom, sous la condition que l'ensemble des nouveaux entrants parvienne à conquérir au moins 40 % du marché effectivement adressable, lequel est actuellement préempté à 100 % par France Télécom. LDCOM précise que même si ce prix était ramené à 43 Euros par accès, la différence de prix serait encore de l'ordre de 50 %.
Sur le marché de la téléphonie vocale, LDCOM indique qu'il sera relativement moins coûteux à l'opérateur historique de reconquérir un abonné passé à la concurrence que pour un opérateur nouvel entrant de faire migrer un abonné ADSL vers un service « voix ». En effet, l'architecture pour le dégroupage total est distincte de celle prévue pour le dégroupage partiel ; il ne sera donc pas possible de réutiliser cette dernière si un abonné souhaite confier aussi à LDCOM l'exploitation de la voix. Les opérateurs entrants devront donc gérer parallèlement deux parcs de filtres, dont ceux dédiés au dégroupage partiel qui sont potentiellement caducs à terme. Ce mécanisme conduira, selon LDCOM, à conforter le monopole de France Télécom sur les fréquences vocales alors même qu'il rend impossible l'entrée du marché de la fourniture d'accès Internet ADSL.
Sur les modalités financières qui génèrent une barrière à l'entrée et rendent impossible toute planification de déploiement :
LDCOM considère que la tarification de la mise à disposition des fréquences hautes est contraire à la décision no 2000-1171 en date du 31 octobre 2000 de l'Autorité. LDCOM soulève trois arguments : la tarification est dépendante du nombre d'accès commandés, elle comporte des contraintes en matière de gestion du parc de cartes, ce qui augmente le prix d'accès, et, enfin, elle n'est pas lisible et ne permet pas d'instaurer la confiance. Chacun de ces aspects et leur cumul constituent une barrière à l'entrée des marchés précités, difficile à franchir.
LDCOM estime que les prévisions de marché de France Télécom permettant d'atteindre le prix plancher de 50/51 Euros par accès sont irréalistes, le coût minimal de l'architecture dédiée en fonction du nombre de lignes n'étant approché qu'après le dégroupage partiel, par répartiteur, d'un millier de lignes et atteint après le dégroupage de 2 000 lignes. Par ailleurs, en imposant aux opérateurs alternatifs de procéder à des commandes site par site et de souscrire à un lot de cartes supplémentaires par site et par opérateur, France Télécom met à leur charge un surcoût très significatif. Enfin, LDCOM reproche la France Télécom l'imprévisibilité des coûts des filtres dont les devis fluctuent par site et par trimestre.
A titre principal, LDCOM demande la fixation d'une tarification unique reproduisant celle d'un service de mise à disposition des fréquences hautes.
LDCOM précise qu'il est nécessaire de concevoir la mise à disposition des fréquences hautes comme un service intégré qui aurait dû être proposé par France Télécom. LDCOM se fonde sur l'article D. 99-23 du code qui impose selon elle à France Télécom d'offrir une prestation intégrée de services. La définition d'une tarification intégrée en matière de mise à disposition des fréquences hautes comporterait de nombreux avantages.
LDCOM considère que le coût global de ce service doit se déduire du coût des éléments d'infrastructure qu'il utilise. Ainsi, un tarif intégré maximal de mise à disposition des fréquences hautes pourrait être évalué à 0,85 Euros par mois. Enfin, le coût d'un lien intra-salle équivaudrait à 259 Euros par rack de 128 accès.
A titre subsidiaire, LDCOM souhaiterait que l'Autorité fixe des conditions financières concernant spécifiquement la mise à disposition des filtres.
LDCOM souhaiterait obtenir la mise à disposition des filtres à un coût :
- correspondant à un prix de location ;
- établi selon une méthode d'amortissement telle que préconisée par l'Autorité ;
- dont l'assiette correspondrait aux coûts asymptotiques indiqués par France Télécom.
LDCOM est d'avis que le coût de ce loyer, étant considéré que France Télécom est propriétaire de l'ensemble des équipements situés en amont de la salle de cohabitation, et donc des filtres, devrait être fixé à 0,85 Euros.
En ce qui concerne le choix de la chambre 0 :
LDCOM demande à France Télécom de pouvoir choisir la chambre 0 la plus proche du tracé de ses boucles métropolitaines, parmi celles dont les alvéoles ne sont pas saturées. France Télécom n'ayant pas répondu à cette demande, et aucun motif ne justifiant un tel refus, LDCOM demande à l'Autorité d'enjoindre à France Télécom de laisser LDCOM choisir la chambre la plus proche de son réseau.
En ce qui concerne la diminution des frais d'accès au service :
LDCOM demande à France Télécom une diminution contractuelle des frais d'accès au service de fourniture de l'accès total ou dégroupé afin qu'ils reflètent les seuls coûts induits par une solution d'architecture comparable à celle utilisée par France Télécom et, au maximum, le tarif proposé par France Télécom dans ses offres de revente en gros, soit 350 FF HT. LDCOM demande donc à l'Autorité de fixer le tarif de la prestation d'accès au service à un niveau semblable à celui qui est pratiqué dans les offres de collecte de France Télécom.
Vu la lettre du chef du service juridique de l'Autorité en date du 9 janvier 2002 communiquant aux parties le calendrier prévisionnel de dépôt des mémoires et le nom des rapporteurs ;
Vu la lettre de la société LDCOM enregistrée à l'Autorité le 16 janvier 2002 ;
Vu les observations en défense enregistrées le 6 février 2002 présentées par la société France Télécom, RCS Paris no 380 129 866, dont le siège social est situé 6, place d'Alleray, 75505 Paris Cedex 15, représentée par M. Marc Fossier, directeur des relations extérieures ;
Dans ses observations, France Télécom souhaite, à titre préliminaire, attirer l'attention de l'Autorité sur des irrégularités qu'elle a pu constater dans la procédure.
France Télécom indique que la saisine de l'Autorité n'a pas été effectuée dans des conditions conformes aux dispositions de l'article R. 11-1 du code des postes et télécommunications et du règlement intérieur de l'Autorité, tel qu'il résulte de la décision no 99-528 du 18 juillet 1999.
France Télécom précise que le dossier est incomplet : la demande de LDCOM ne comportait pas l'ensemble des pièces pourtant référencées dans le document de saisine. France Télécom indique qu'elle n'a toujours pas reçu, malgré ses demandes, une copie complète de l'acte de saisine et des pièces annexées à l'acte de saisine, ce en violation des dispositions du règlement intérieur et plus particulièrement des articles 9 et 10.
France Télécom estime ainsi que toute la procédure semble viciée. France Télécom indique que le rapporteur et le rapporteur adjoint ont été désignés alors même que le dossier n'était pas complet. Enfin, le chef du service juridique de l'Autorité a convoqué les parties à une réunion le mercredi 9 janvier à 10 heures avant même la notification à France Télécom de la saisine afin de fixer le calendrier de procédure.
France Télécom indique qu'elle avait jusqu'au 6 février 2002 pour présenter ses observations alors qu'elle ne dispose toujours pas à ce jour d'un certain nombre de pièces qui semblent pourtant essentielles au respect du contradictoire et à l'établissement de sa défense.
Dans ces conditions, France Télécom demande à l'Autorité de constater l'irrégularité de la procédure et en demande l'annulation.
France Télécom souhaite néanmoins revenir sur les points suivants :
Sur les discriminations et barrières à l'entrée générées par l'architecture retenue :
En ce qui concerne l'argument fondé sur la discrimination, France Télécom estime qu'il n'existe aucune discrimination entre elle et les opérateurs accédant à la boucle locale de France Télécom. France Télécom constate que LDCOM souhaite faire de la discrimination un principe absolu qui aboutirait à interdire toute différenciation de traitement. France Télécom estime cependant qu'il n'est pas dans la même situation que les opérateurs qui dégroupent. En effet, France Télécom n'effectue pas de dégroupage mais utilise une ressource propre dans des conditions techniques et réglementaires qui par essence ne sont pas les mêmes que celles auxquelles peut prétendre LDCOM ; le dégroupage est un mode d'accès spécifique, différent de celui auquel peut prétendre l'opérateur de boucle locale et qui nécessite la mise en oeuvre de ressources et d'équipements supplémentaires à ceux déjà mis en place par l'opérateur de boucle locale dans son réseau. L'accès à la boucle locale de France Télécom dans des conditions totalement identiques à celles dans laquelle France Télécom l'utilise n'a pas de sens, tant sur le plan technique que sur le plan réglementaire.
En ce qui concerne l'argument fondé sur l'existence de barrières à l'entrée, France Télécom entend rappeler que cet argument n'est pas recevable devant l'Autorité, mais relève de la procédure de l'article L. 36-10 du code des postes et télécommunications qui impose à l'Autorité de saisir les autorités de concurrence.
Par ailleurs, France Télécom ne s'estime nullement responsable du contexte défavorable à l'accès partagé et considère que, s'il existe aujourd'hui des barrières au développement de l'accès partagé, elles ne peuvent nullement lui être imputées. France Télécom estime au contraire que la demande de LDCOM ne fait que retarder l'effectivité du dégroupage en laissant entendre qu'il existerait une solution plus favorable aux opérateurs que France Télécom refuserait de mettre en oeuvre.
France Télécom précise qu'il s'est parfaitement conformé à la réglementation en mettant en oeuvre l'architecture qui lui était demandée par l'ensemble des acteurs du marché et en leur proposant les tarifs orientés vers les coûts, conformément aux dispositions du code des postes et télécommunications, ce que LDCOM ne semble d'ailleurs pas contester.
En conséquence, France Télécom considère n'avoir érigé aucune barrière à l'entrée au travers de son offre d'accès partagé.
b) Sur les conditions financières de mise à disposition des fréquences non vocales :
Concernant l'existence d'un double coût soi-disant imposé par France Télécom :
France Télécom rappelle que le choix par l'Autorité de cette architecture était connu dès 2000 et que c'est LDCOM qui, en décidant d'intégrer des filtres dans ses DSLAM alors qu'elle demande l'accès partagé, s'impose un double coût. Par conséquent, France Télécom ne saurait être responsable des conséquences des choix retenus par l'ART, puis des décisions prises par LDCOM.
Sur le montant des devis :
France Télécom rappelle que le tarif est le résultat d'un appel d'offres réalisé dans le strict respect des recommandations issues des travaux du sous-groupe « spécifications techniques » auquel participent les opérateurs et l'Autorité. L'Autorité a d'ailleurs reconnu la conformité de cet appel d'offres avec ses recommandations.
France Télécom estime que LDCOM utilise des démonstrations confuses dans lesquelles elle avance des chiffres sans jamais les justifier.
Concernant la visibilité sur le prix des filtres :
France Télécom souhaite souligner que le caractère imprévisible ne se situe pas au niveau du prix d'achat des filtres et des éléments associés, car la détermination de ce prix repose sur le résultat de l'appel d'offres. France Télécom précise que cette absence de visibilité est due à l'absence de prévisions et d'engagements des opérateurs, dont LDCOM, tant au niveau national qu'au niveau des répartiteurs.
France Télécom estime que l'imprévisibilité ne concerne pas que les filtres, mais est intrinsèque au dégroupage en cette phase de démarrage. Cette incertitude et les risques qui en découlent sont inhérents à toute activité économique, et notamment aux télécommunications. France Télécom rappelle qu'il est évident que, dans un marché naissant en phase d'équipement, la sensibilité des tarifs aux volumes est forte, les opérateurs ne pouvant bénéficier des effets de volume sur les prix que s'ils s'engagent. C'est pourquoi, France Télécom a participé à des discussions visant à mettre en place des solutions provisoires moins chères bien que très complexes pour amorcer un cercle vertueux. LDCOM ne peut ignorer les faits puisque cet opérateur a été le premier à commander des filtres sur la base d'une solution alternative.
Par ailleurs, LDCOM reproche à France Télécom de lui imposer des charges excessives dans ses prix en anticipant la demande d'achat des filtres des opérateurs. France Télécom précise qu'elle ne fait que se conformer aux recommandations de l'Autorité du 22 décembre 2000.
Concernant la solution proposée par LDCOM :
France Télécom indique que le coût de 21 Euros par accès avancé par LDCOM est sous-évalué, sauf à considérer que LDCOM simplifie la situation en occultant de nombreux autres coûts qui viennent surenchérir le coût d'une telle architecture. France Télécom considère que l'affirmation de LDCOM selon laquelle l'architecture proposée par cette dernière serait moins coûteuse n'est donc pas fondée.
Concernant la proposition de LDCOM d'assujettir la mise à disposition des filtres à une redevance :
France Télécom indique que le dispositif de filtrage est un élément spécifique du dégroupage et qu'il a été envisagé pour répondre aux besoins du dégroupage et plus précisément à ceux de l'accès partagé. Par conséquent, LDCOM ne peut considérer ce dispositif comme un élément du réseau de France Télécom. France Télécom considère que l'analogie faite par LDCOM avec le dégroupage total est erronée. L'emplacement de ces filtres dans le réseau ne saurait avoir pour conséquence de les considérer comme des éléments du réseau de France Télécom. France Télécom précise qu'elle n'est pas propriétaire de ces éléments puisque le fait d'être installateur ou exploitant d'un équipement ne signifie pas qu'on en est le propriétaire.
Par ailleurs, France Télécom indique que le cas du filtre ne saurait en aucun cas être rapproché de celui de la paire de cuivre ; cette dernière est constitutive du réseau de France Télécom alors que le filtre est, au même titre que le câble de renvoi ou les équipements de cohabitation, un équipement rendu nécessaire pour le dégroupage. France Télécom estime qu'elle n'a pas à assumer les coûts et risques liés à la mise en place des filtres et qu'en tout état de cause elle n'a pas à faire une avance de trésorerie aux opérateurs achetant les filtres. France Télécom n'a donc pas à assurer un système de location des filtres. En outre, France Télécom précise que LDCOM peut réaffecter les cartes filtres, tout comme elle le ferait au sein de ses DSLAM.
France Télécom souligne à nouveau l'absence de justification concernant les hypothèses et les chiffres avancés par LDCOM, la détermination d'un tarif de location ne s'appuyant sur aucune base ou hypothèse solide. France Télécom considère que le coût des filtres est un coût spécifique à l'accès partagé et doit être assumé par les opérateurs souhaitant le dégroupage.
Sur les discriminations et barrières à l'entrée générées par l'architecture retenue :
Sur l'absence de respect du principe de discrimination en matière de dégroupage de la boucle locale, LDCOM en se fondant sur la définition du dégroupage partiel du règlement européen estime que France Télécom, opérateur puissant, doit fournir l'accès aux fréquences non vocales à un opérateur tiers dans des conditions équivalentes à celles qu'il met en oeuvre pour ses propres besoins, permettant ainsi une concurrence équitable. France Télécom ne peut prétendre qu'il existe une différence de principe entre le filtrage des fréquences non vocales et des fréquences vocales qu'il réalise pour proposer ses services sur la bande haute du spectre et le filtrage nécessaire pour permettre à un opérateur tiers d'accéder à cette même ressource afin de proposer des services équivalents à ceux de France Télécom.
LDCOM réitère donc ses demandes qui s'inscrivent dans cette logique et conclut aux mêmes fins que dans son mémoire de saisine.
En ce qui concerne l'argument fondé sur l'existence d'une barrière à l'entrée, LDCOM revient sur la remarque préliminaire d'irrecevabilité de France Télécom et considère que ce moyen devra être rejeté par l'Autorité.
Concernant l'existence d'une barrière à l'entrée sur le marché ADSL, LDCOM indique qu'elle n'a découvert que récemment la difficulté de mettre en oeuvre l'accès à la boucle locale, dans le cadre de l'architecture retenue par France Télécom. En effet, France Télécom n'a manifesté qu'à partir de juin sa volonté de corréler la mise à disposition des cartes-filtres à la mise en place d'une architecture épousant avant tout ses propres besoins et de faire porter aux opérateurs l'intégralité du coût de cette architecture. Ce double choix constitue une barrière à l'entrée sur le marché précité.
En outre, LDCOM précise que la notion d'orientation vers les coûts des tarifs est un préalable nécessaire mais non suffisant pour déterminer l'absence de barrière à l'entrée sur un marché, le choix d'une architecture complexe pouvant constituer une barrière à l'entrée. LDCOM considère donc qu'elle est en droit d'obtenir une architecture alternative.
Enfin, France Télécom n'a pas démontré l'absence de caractère raisonnable de la demande de LDCOM, contrairement aux dispositions de l'article 3-2 du règlement européen.
b) Sur les conditions financières de mise à disposition des fréquences non vocales :
Concernant l'existence d'un double coût soi-disant imposé par France Télécom :
LDCOM conclut aux mêmes fins et en vertu des mêmes moyens que dans son précédent mémoire. LDCOM précise que l'architecture qu'elle propose est alternative, de sorte qu'elle n'a pas vocation à s'ajouter à l'architecture actuellement imposée par France Télécom.
Sur le montant des devis :
LDCOM ne conteste pas la régularité de l'appel d'offres mené par France Télécom, mais souligne que l'architecture sur laquelle a porté l'appel d'offres a été progressivement enrichie par France Télécom pour devenir disproportionnée et inappropriée, et de ce fait les montants produits sur les devis ne pouvaient que s'éloigner des objectifs de cette consultation.
LDCOM relève que la confidentialité imposée par France Télécom sur les conditions de l'appel d'offres constitue une violation manifeste au principe de transparence et précise que cette violation ne pourrait s'expliquer que si France Télécom reconnaissait être propriétaire de cet élément de réseau. Pour LDCOM, France Télécom ne peut prétendre agir au nom des opérateurs en s'abstenant dans le même temps de rendre compte des opérations effectuées en leur nom et pour leur compte. LDCOM donne acte à France Télécom du fait que c'est bien la solution la moins-disante qui a été retenue, mais dans le cadre d'une architecture inadéquate car disproportionnée.
LDCOM précise que ses analyses menées sur les tarifs sont justifiées, LDCOM ayant pris la peine de citer systématiquement l'origine des chiffres avancés dans sa démonstration.
Sur l'absence de visibilité sur le prix des filtres :
LDCOM rejette les justifications de France Télécom expliquant que l'imprévisibilité du coût de fourniture des filtres tiendrait à la nature même du dégroupage dans sa phase de démarrage. LDCOM précise que l'imprévisibilité provient bien du choix d'architecture de France Télécom et du mode d'allocation des coûts retenus par celle-ci.
LDCOM insiste sur le fait que la méthode choisie par France Télécom est naturellement source d'inefficacité. Par ailleurs, LDCOM insiste sur le fait que l'imprévisibilité portant sur le coût du filtrage retenu par France Télécom n'est en aucun cas du même ordre que celle pesant sur les DSLAM, comme le prétend France Télécom. France Télécom corrèle de par son offre la structure de coût d'un opérateur à des contingences qui lui sont totalement étrangères et entretient donc une imprévisibilité structurelle propre à cette problématique de filtrage.
Sur la solution proposée par LDCOM :
LDCOM confirme que le coût des cartes-filtres est évalué à 21 Euros par accès, les coûts des autres éléments du réseau étant déjà pris en compte, contrairement à ce que France Télécom prétend. Par ailleurs, LDCOM souligne qu'elle n'a pas intégré dans son calcul les économies de place et d'énergie réalisées dans le répartiteur de France Télécom si la solution d'intégration des filtres dans le répartiteur des opérateurs était retenue.
Sur la proposition de LDCOM d'assujettir la mise à disposition de ces filtres à une redevance :
LDCOM conteste l'argumentation utilisée par France Télécom pour rejeter sa demande d'assujettissement de la mise à disposition des filtres à une redevance. LDCOM confirme ses premières conclusions tendant à démontrer que France Télécom est propriétaire du dispositif de filtrage. France Télécom étant propriétaire de ces éléments, leur mise à disposition aux opérateurs ne peut s'appliquer que comme une location. Or, la prise en compte d'un tarif de location au titre de l'usage d'un élément de réseau de l'opérateur historique correspond à une méthode qui a été préconisée par l'Autorité et repose sur des critères objectifs.
LDCOM se fonde sur l'article 2229 du code civil pour affirmer que France Télécom doit être considérée comme propriétaire des filtres, puisqu'elle dispose de la possession réelle de ces filtres. LDCOM demande donc à l'Autorité de déterminer un tarif de location des filtres, dans l'hypothèse où l'architecture alternative préconisée par LDCOM ne serait pas retenue.
Enfin, LDCOM considère que la méthode de calcul du prix de location qu'elle a adoptée repose sur des critères objectifs et qu'elle est particulièrement détaillée dans son mémoire introductif. La prétention d'une absence de justification du tarif mensuel est donc sans fondement.
a) Sur l'importance du respect des règles édictées notamment par le règlement intérieur de l'Autorité au regard du respect du contradictoire dans les procédures de règlement de différend :
France Télécom précise le règlement intérieur de l'Autorité n'est pas une simple mesure d'organisation interne comme le prétend LDCOM, mais un texte qui s'impose à l'Autorité et aux parties, garantissant le respect d'un débat contradictoire au cours de la procédure.
b) Sur les violations des dispositions du règlement intérieur, qui portent à l'évidence sur des règles de forme pour le moins substantielles :
Tout d'abord, France Télécom considère que le délai de trois mois dont dispose l'Autorité pour régler le différend, conformément à l'article R. 11-1 du code des postes et télécommunications, a été fixé en violation des articles 9 et 10 du règlement intérieur, puisqu'il a commencé à courir avant que la saisine soit complète.
Ensuite, France Télécom constate que la nomination des rapporteurs n'a pas été faite conformément à la réglementation, de sorte que l'instruction ne semble pas s'être déroulée dans des conditions satisfaisantes au regard du respect du principe du contradictoire.
France Télécom attire l'attention de l'Autorité sur le fait qu'elle n'a reçu un questionnaire du rapporteur que le 28 février 2002, soit quelques jours à peine avant la date qui lui était laissée pour présenter ses observations en réplique. France Télécom estime ne pas être en mesure de répondre de manière satisfaisante à ce questionnaire compte tenu du délai particulièrement bref, lequel est incompatible avec les dispositions de l'article 12 du règlement intérieur.
Par ailleurs, France Télécom considère que les pièces du dossier et en particulier la saisine ne lui ont pas été communiquées conformément à la réglementation, France Télécom n'ayant toujours pas reçu l'ensemble des pièces déposées par LDCOM.
Enfin, France Télécom estime que l'article 10 du règlement intérieur a été violé puisque le calendrier de procédure a été fixé lors d'une réunion le 9 janvier 2002 alors que la saisine n'était pas complète et ne lui avait pas encore été communiquée.
France Télécom constate donc que la plupart des règles prévues par le règlement intérieur pour organiser la procédure de règlement de différend et permettre le respect du contradictoire ont été violées. France Télécom souligne que ces règles étant substantielles, leur violation justifie l'annulation de la procédure. France Télécom n'a pu présenter sa défense dans des conditions de délai satisfaisantes, ce qui lui cause un grief.
a) Sur la solution préconisée par LDCOM :
France Télécom souligne qu'à aucun moment dans ses premières observations, elle n'a reconnu que la solution proposée par LDCOM était conforme au règlement européen.
L'architecture proposée par LDCOM n'est pas raisonnable au sens de l'article 3 du règlement européen :
Pour France Télécom, la solution proposée par LDCOM risque de porter atteinte à l'intégrité du service téléphonique en insérant un tiers dans la boucle locale et présente aussi des risques non négligeables de dégradation de la qualité de service téléphonique. Ces raisons ont amené les opérateurs et l'Autorité à rejeter la solution aujourd'hui proposée par LDCOM.
La demande de LDCOM n'est pas justifiée :
France Télécom estime que l'analyse des coûts de LDCOM renvoie à une architecture non opérationnelle puisque incomplète. France Télécom considère que le coût annoncé par LDCOM ne concerne que la fonction filtrage sans prendre en compte les nombreux éléments nécessaires à son fonctionnement, éléments venant surenchérir le coût annoncé par LDCOM. En prenant en compte tous les éléments, France Télécom considère que le coût de cette architecture ne serait pas moins élevé que celui de l'architecture retenue dans la communauté des opérateurs sous l'égide de l'Autorité.
b) Sur l'architecture actuelle :
Sur la question des discriminations et barrières à l'entrée :
Pour France Télécom, il est surprenant que LDCOM prétende ne pas vouloir remettre en cause l'architecture proposée par France Télécom tout en soutenant qu'elle serait discriminatoire et imposerait des barrières à l'entrée. France Télécom constate que LDCOM n'apporte aucun élément ou argument nouveau susceptible de remettre en cause le constat fait par France Télécom dans ses propres écritures.
France Télécom indique que l'Autorité rejettera l'argumentation de LDCOM basée sur le code de commerce, en ce qu'elle se fonde sur des dispositions dont l'application ne relève pas de la compétence de l'Autorité et constatera qu'au regard de la réglementation des télécommunications, il n'existe aucune discrimination illicite de la part de France Télécom.
Sur le choix de l'architecture actuelle :
France Télécom constate que LDCOM remet en cause les travaux des groupes de travail et plus généralement le processus de dégroupage engagé par l'Autorité et rappelle ses premières écritures en ce qui concerne le déroulement de l'appel d'offres.
Sur la propriété du filtre :
France Télécom conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire et par les mêmes moyens. France Télécom précise que la salle de répartiteur de France Télécom a été considérée par l'Autorité et la communauté des opérateurs comme l'emplacement des filtres le plus approprié dans le réseau dans le seul but de garantir l'intégrité du service téléphonique. Ce choix ne peut avoir pour conséquence de rendre France Télécom propriétaire de ce filtre.
Par conséquent, l'Autorité ne pourra que rejeter les arguments de LDCOM tendant à démontrer que le filtre est un élément de réseau de France Télécom. France Télécom n'étant pas propriétaire du filtre, celui-ci ne peut faire l'objet d'une location. En outre, France Télécom tient à souligner que le principe de location reviendrait à lui imposer de réaliser des dépenses à la place des opérateurs sans aucune garantie de recouvrement. Le paiement des coûts assumés par France Télécom reposerait alors sur la viabilité économique des stratégies des opérateurs.
France Télécom considère que la demande de LDCOM est d'autant plus inacceptable qu'elle établit un tarif de location à partir du montant de 51 euros par accès qu'elle considère comme imprévisible et inatteignable. De plus, il n'est prévu aucune rémunération des dépenses avancées pour le compte de l'opérateur, ni des risques assumés à la place de l'opérateur par France Télécom. Pour France Télécom, cette logique n'est pas acceptable et va à l'encontre du principe selon lequel les opérateurs doivent prendre en charge les coûts liés à des éléments spécifiques du dégroupage.
En ce qui concerne le tarif des filtres, France Télécom rappelle le contenu de ses premières conclusions.
Sur la publicité de l'audience :
Aux termes de l'article 14 du règlement intérieur : « l'audience est publique, sauf demande conjointe de toutes les parties. Si cette demande n'est pas conjointe, le collège de l'Autorité en délibère ».
LDCOM, par un courrier enregistré le 12 mars 2002, a demandé que l'audience devant le collège soit publique ; France Télécom, par un courrier enregistré le 13 mars 2002, a demandé que l'audience devant le collège ne soit pas publique. Interrogé sur ce point par le président de l'Autorité à l'ouverture de l'audience du 14 mars 2002, France Télécom a précisé qu'elle ne souhaitait pas que certaines données chiffrées relevant du secret des affaires soient évoquées lors de l'échange oral contradictoire, mais qu'elle n'avait pas d'exigence particulière quant au caractère public ou non de la séance. LDCOM a réitéré son souhait quant au caractère public de l'audience. Le collège, après en avoir délibéré hors la présence du public, des parties, du rapporteur, du rapporteur adjoint et des agents de l'Autorité, a décidé que l'audience serait publique.
Le collège en ayant délibéré le 28 mars 2002, hors la présence du rapporteur, du rapporteur adjoint et des agents de l'Autorité,
Adopte la présente décision fondée sur les faits et moyens exposés ci-après :
Sur les conclusions présentées par France Télécom tendant à ce que l'Autorité constate la nullité de la procédure pour vices de procédure :
L'Autorité rappelle en premier lieu qu'en application de l'article 9 du règlement intérieur, « La saisine et les pièces annexées sont adressées à l'Autorité en autant d'exemplaires que de parties concernées plus neuf exemplaires (...). La saisine indique les faits qui sont à l'origine du différend, expose les moyens invoqués et précise les conclusions présentées. Elle indique également la qualité du demandeur, et notamment - si le demandeur est une personne physique : ses nom, prénom, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ; - si le demandeur est une personne morale : sa dénomination, sa forme, son siège social, l'organe qui la représente légalement et la qualité de la personne qui a signé la saisine ; les statuts sont joints à la saisine. Le demandeur doit préciser les nom, prénom et domicile du ou des défendeurs, ou, s'il s'agit d'une ou plusieurs personnes morales, leur dénomination et leur siège social. Si la saisine ne satisfait pas aux règles mentionnées ci-dessus, le chef du service juridique ou son adjoint met en demeure le demandeur par lettre recommandée avec avis de réception de la compléter. Le délai mentionné à l'article R. 11-1 du code des postes et télécommunications ne court qu'à réception des éléments manquants. » L'article 10 de ce même règlement précise qu'il convient de transmettre aux parties, d'une part, la copie de l'acte de saisine et, d'autre part, la copie des pièces annexées à l'acte de saisine. En outre, en vertu de l'article 11 du règlement intérieur, les parties à un litige peuvent annexer des pièces à l'appui de la saisine ou de leurs observations. Par suite, les parties disposent de la faculté de compléter l'acte de saisine par des pièces annexes à tout moment de la procédure.
Il ressort de ces dispositions qu'il convient d'effectuer une distinction entre l'acte de saisine proprement dit et les pièces qui lui sont annexées. Si les pièces effectivement annexées doivent être transmises par l'Autorité à la partie adverse afin de respecter le principe du contradictoire, elles ne constituent pas en tant que tel un élément conditionnant la régularité de l'acte de saisine. En application du règlement intérieur, un acte de saisine est, par conséquent, complet dès lors qu'il comprend les faits, conclusions et moyens présentés par l'opérateur demandeur et la justification de la qualité de ce demandeur.
L'acte de saisine étant complet, l'Autorité dispose en vertu des dispositions de l'article R. 11-1 du code des postes et télécommunications d'un délai de trois mois pour régler le litige qui lui a été soumis. En vertu de l'article 10 du règlement intérieur, d'une part, le chef du service juridique ou son adjoint désigne un rapporteur et un rapporteur adjoint et transmet l'acte de saisine et les pièces annexées à la partie mentionnée dans la saisine. D'autre part, le chef du service juridique ou son adjoint dispose de la possibilité de réunir les parties afin de déterminer le calendrier prévisionnel fixant les dates de production des observations.
Dans son mémoire en défense enregistré le 6 février 2002 et dans son nouveau mémoire du 6 mars 2002, France Télécom soutient que la procédure encourt la nullité dans la mesure où l'article R. 11-1 du code des postes et télécommunications ainsi que les articles 9 et 10 du règlement intérieur n'auraient pas été respectés, et qu'il en serait résulté une violation du respect des droits de la défense, et en particulier du principe du contradictoire. France Télécom considère que la non-transmission par LDCOM de deux pièces répertoriées parmi les pièces annexées à l'acte de saisine a vicié la procédure dans son ensemble. Ces pièces litigieuses sont des comptes rendus de réunion d'un groupe de travail relatif au dégroupage et présidé par une personnalité qualifiée et de son sous-groupe tarifaire. France Télécom estime que la saisine ne peut être considérée comme complète au sens des dispositions susvisées, et qu'elle n'a par conséquent pas eu la possibilité d'assurer sa défense dans des conditions satisfaisantes.
Or, il résulte des pièces du dossier que la société LDCOM, représentée par le cabinet Bird & Bird, a déposé le 27 décembre 2001 sa demande de règlement de différend. Le service juridique de l'Autorité a adressé à ce cabinet, le 28 décembre 2001, un courrier lui demandant de bien vouloir compléter sa demande, les statuts de la société LDCOM n'ayant pas été transmis. L'acte de saisine a été complété par LDCOM et enregistré à l'Autorité le 4 janvier 2002. Les documents dont France Télécom relève l'absence de transmission par LDCOM sont des pièces répertoriées parmi les pièces annexées à l'acte de saisine. Cette absence de transmission est donc sans incidence sur le caractère complet de l'acte de saisine, et sa régularité de ce chef.
Il résulte de ce qui précède que l'acte de saisine dont France Télécom a reçu notification le 7 janvier était régulier.
En outre, l'Autorité constate qu'il ressort des fiches de procédure que la réunion destinée à fixer le calendrier a eu lieu le 9 janvier 2002, soit cinq jours après que l'acte de saisine complet a été enregistré. A l'issue de cette réunion, le chef du service juridique a adressé aux parties un courrier leur précisant les délais qui leur ont été impartis pour faire leurs observations et les informant de la désignation des rapporteur et rapporteur adjoint. Dans ces conditions, les dispositions du règlement intérieur relatives à l'organisation d'une réunion pour fixer le calendrier de la procédure et à la désignation du rapporteur et rapporteur adjoint ont été, en tout état de cause, respectées.
Au demeurant, les règles de procédure précitées du règlement intérieur ne sont prescrites ni à peine d'irrecevabilité, ni à peine de nullité. Par conséquent, à supposer que de telles règles auraient été méconnues, cette seule circonstance ne pourrait justifier une annulation de la procédure.
En second lieu, France Télécom ne saurait soutenir que la circonstance que LDCOM n'ait pas transmis deux des pièces qu'elle présentait comme annexées à sa saisine lui aurait fait grief en portant atteinte au caractère contradictoire de la procédure. En ce qui concerne le compte rendu de la réunion du sous-groupe tarifaire, l'Autorité note que l'absence de transmission par LDCOM ne pouvait aucunement faire grief à France Télécom puisque sa mention par LDCOM constitue une erreur matérielle, d'ailleurs soulignée par France Télécom dans son mémoire en défense enregistré le 6 mars 2002 : « LDCOM s'appuie sur le compte rendu d'une réunion du sous-groupe tarifaire en date du 8 juin 2001 .... Or il n'existe aucune réunion de ce sous-groupe à cette date, ce qui explique peut-être l'absence de pièce jointe dans le dossier de saisine de LDCOM. » Pour ce qui est du deuxième compte rendu, l'Autorité n'a pu en tenir compte, ce compte rendu n'ayant pas été produit par LDCOM dans le cadre du présent règlement de litige.
Il résulte de ce qui précède que la procédure suivie en l'espèce par l'Autorité a respecté les règles édictées par le code des postes et télécommunications, n'a pas davantage méconnu en tout état de cause celles du règlement intérieur et a été conduite dans le respect du principe du contradictoire. Par suite, sa demande tendant à ce que l'Autorité constate la nullité de la procédure ne peut qu'être rejetée.
Sur les conclusions de LDCOM tendant à ce que l'Autorité considère que la mise à disposition des fréquences non vocales est une prestation de service devant faire l'objet d'une tarification sous la forme de redevances mensuelles correspondant à l'immobilisation d'éléments du réseau de France Télécom pour le compte de l'opérateur et de frais d'accès au service de filtrage (couvrant les coûts de déploiement d'un ou de plusieurs LIS) :
Sur la recevabilité de la demande :
Aux termes de l'article D. 99-23 du code des postes et télécommunications et relatif à l'accès à la boucle locale, « en cas de litige, l'Autorité de régulation des télécommunications peut être saisie et se prononce dans les conditions prévues à l'article L. 36-8 ». En vertu de cet article L. 36-8, « en cas de refus d'interconnexion, d'échec des négociations commerciales ou de désaccord sur la conclusion ou l'exécution d'une convention d'interconnexion ou d'accès à un réseau de télécommunications, l'Autorité de régulation des télécommunications peut être saisie du différend par l'une ou l'autre des parties ».
Il résulte de ces dispositions que l'Autorité peut être saisie d'une demande de règlement des litiges par un opérateur de télécommunications qui a signé une convention d'interconnexion ou d'accès à un réseau public, tout en émettant une réserve expresse lors de la conclusion de ladite convention sur les points de celle-ci qui lui paraissent encore litigieux.
Par un courrier en date du 12 octobre 2001, LDCOM a contesté l'offre de France Télécom relative aux filtres lui demandant « la définition d'une offre permettant à LDCOM d'installer ses filtres de façon intégrée à ses DSLAM » pour, au minimum, toutes les nouvelles commandes de sites. Pour les sites déjà commandés, LDCOM a considéré que l'architecture proposée par France Télécom était « discriminatoire en ce sens que France Télécom n'y participe ni physiquement ni financièrement » et a demandé une modification de la tarification. LDCOM, dans un courrier du 25 octobre, a confirmé auprès de France Télécom la commande d'un certain nombre de filtres, tout en assortissant cette commande de réserves sur les montants du devis « qui ne sauraient être les montants définitifs ». LDCOM a ensuite confirmé dans les mêmes termes sa volonté de voir l'architecture de l'offre de filtres modifiée dans une lettre du 23 novembre 2001 et a mis France Télécom en demeure de lui faire une nouvelle proposition avant le 7 décembre 2001. Enfin, LDCOM a signé le 30 novembre 2001 la convention d'accès à la boucle locale de France Télécom en émettant une réserve expresse générale sur le chapitre relatif aux filtres, l'architecture de l'offre et sa tarification : « LDCOM est en désaccord avec l'architecture imposée par France Télécom et a adressé des demandes d'architectures alternatives dans un cadre bilatéral et multilatéral. LDCOM émet donc des réserves sur l'ensemble de la partie X, en attente d'une proposition de France Télécom plus adaptée à ses besoins spécifiques ».
Il s'ensuit que cet échange de correspondances entre les parties et la signature avec réserves de la convention de dégroupage doivent être regardés comme traduisant un désaccord sur l'architecture retenue par les filtres ainsi que sa tarification, et par conséquent, sur la conclusion de la convention d'accès à la boucle locale de France Télécom, au sens de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.
Par suite, la demande de LDCOM est recevable pour ce qui est du procédé de filtrage.
Cependant, l'Autorité constate qu'il ne ressort d'aucune pièce du dossier que les coûts de déploiement d'un ou de plusieurs câbles de renvoi ont fait l'objet de négociations. Par conséquent, les conditions de recevabilité imposées par l'article L. 36-8 du code ne sont pas réunies et il n'existe pas de litige entre les parties, au sens de cet article , sur ce chef de demande.
Il s'ensuit que la demande de LDCOM doit être considérée comme irrecevable sur ce point et que la question du coût des câbles de renvoi devra être écartée du litige.
Sur les obligations qui s'imposent à France Télécom :
L'Autorité rappelle tout d'abord que la société France Télécom a été désignée comme opérateur puissant par l'Autorité par la décision no 2000-813 en date du 28 juillet 2000 pour l'année 2001 et comme opérateur puissant sur le marché de la téléphonie fixe pour 2002 par une décision no 2001-750 de l'Autorité en date du 25 juillet 2001. France Télécom est ainsi un opérateur notifié, au sens de l'article 2 (a) du règlement européen no 2887/2000 du Parlement européen et du Conseil du 18 décembre 2000 relatif au dégroupage de la boucle locale.
Dans ces conditions, France Télécom doit respecter les dispositions européennes et nationales en vigueur qui imposent aux opérateurs notifiés de fournir notamment un accès partagé à la boucle locale. Ainsi, l'article 3-2 du règlement européen dispose que : « A partir du 31 décembre 2000, les opérateurs notifiés accèdent à toute demande raisonnable des bénéficiaires visant à obtenir un accès dégroupé à la boucle locale et aux ressources connexes, à des conditions transparentes, équitables et non discriminatoires. »
Rappel du contexte :
Il ressort des échanges de mémoires que le filtrage entre basses fréquences supportant la voix et hautes fréquences supportant un service ADSL est rigoureusement nécessaire, tant pour la mise en oeuvre de l'accès partagé que pour la fourniture par France Télécom de services du type IP/ASDL sur des paires de cuivre supportant des communications téléphoniques classiques. Cette séparation de fréquences peut être effectuée soit au sein des DSLAM, le filtre étant directement intégré à la carte modem ou mis en oeuvre sur des cartes séparées, soit au sein d'un dispositif de filtrage dédié.
LDCOM avance trois types d'arguments à l'appui de sa demande :
- le coût du dispositif de filtrage que supporte France Télécom pour ses propres besoins est très inférieur au prix, même en régime de croisière, que LDCOM supporterait dans l'état actuel de l'offre de référence. Le principe de non-discrimination impliquerait que les opérateurs alternatifs souhaitant accéder aux fréquences non vocales puissent le faire dans des conditions similaires à celles mises en oeuvre par France Télécom pour elle-même ;
- si LDCOM filtrait les fréquences dans ses propres DSLAM, le coût qu'elle supporterait serait proche de celui supporté par France Télécom pour ses propres besoins et très inférieur aux tarifs proposés dans le cadre contractuel existant ;
- l'architecture de filtrage retenue et ses modalités corollaires induisent une barrière à l'entrée interdisant le développement du marché ADSL fondé sur l'accès partagé du dégroupage. France Télécom devrait en conséquence proposer une prestation de filtrage, dont le tarif serait récurrent. De plus, l'architecture retenue induirait, de facto, que France Télécom est d'ores et déjà propriétaire du filtre et pourrait donc le louer.
Il appartient à l'Autorité, en vertu de l'article L. 36-8 du code, auquel renvoie l'article D. 99-23 pour le règlement des litiges en matière de dégroupage, de préciser « les conditions équitables, d'ordre technique et financier » des litiges qui lui sont soumis. Enfin, en vertu de l'article 4.3 du règlement européen, l'autorité réglementaire nationale dispose de la possibilité d'intervenir afin d'assurer notamment « l'efficacité économique » de l'accès à la boucle locale. Sur la base de ces dispositions, il revient à l'Autorité de se prononcer sur les méthodes de filtrage et de tarification mises en cause par les parties.
Sur les arguments fondés sur l'existence d'une discrimination génératrice de barrières à l'entrée et d'inefficacité économique :
En vertu de l'article 2 (g) du règlement européen, « l'accès partagé à la boucle locale (est) le fait de fournir à un bénéficiaire un accès à la boucle locale ou à la sous-boucle locale de l'opérateur notifié autorisant l'usage des fréquences non vocales du spectre de fréquences disponible sur la paire torsadée métallique. La boucle locale continue d'être utilisée par l'opérateur notifié pour fournir le service téléphonique ». De même, aux termes de l'article D. 99-23 du code des postes et télécommunications, il incombe aux opérateurs notifiés dans le cadre d'une demande d'accès partagé à la boucle locale de mettre à disposition des opérateurs alternatifs les fréquences non vocales. L'Autorité considère que ces articles n'imposent pas d'architecture de dégroupage partagé particulière et n'en excluent pas a priori, notamment parmi les différentes hypothèses avancées par les parties dans le cadre du présent règlement de différend.
Par ailleurs, l'Autorité rappelle que le règlement européen susvisé en son article 3-2 impose le respect du principe de non-discrimination en ces termes : « Les opérateurs notifiés fournissent aux bénéficiaires des ressources équivalentes à celles qu'ils fournissent à leurs propres services ou à des entreprises qui leur sont associées, dans les mêmes conditions et délais. »
En matière de filtrage des basses et hautes fréquences, l'Autorité estime qu'il s'agit d'une opération technique similaire, qu'elle soit réalisée pour séparer ces fréquences entre un opérateur tiers et France Télécom ou entre deux services distincts fournis tous deux par France Télécom.
Par conséquent, l'Autorité considère légitime de comparer les coûts des solutions mises en place pour les propres besoins de France Télécom et celle utilisée pour LDCOM, notamment en termes d'efficacité économique et, le cas échéant, de barrière à l'entrée.
Or, il ressort des échanges de mémoires que les coûts supportés par France Télécom pour ses propres besoins sont prévisibles, proportionnels au nombre d'accès installés et relativement faibles comparés aux tarifs proposés aux opérateurs alternatifs, parce qu'elle utilise des cartes filtres produites en grandes séries et installées dans des châssis de DSLAM par ailleurs utilisés pour l'installation des cartes modems.
En revanche, la solution de filtrage et de tarification retenue par France Télécom pour LDCOM engendre des coûts dépendant du volume de commande passé par les autres opérateurs, et non proportionnels au nombre d'accès installés. Par conséquent, cette solution est discriminatoire puisqu'elle crée effectivement une barrière à l'entrée pour le développement du marché résidentiel non négligeable et que le coût en régime permanent reste élevé. Enfin, elle est globalement moins efficace d'un point de vue économique.
Au vu de ces éléments, et sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur le choix de l'architecture technique du dégroupage partagé, l'Autorité considère que la mise en oeuvre d'une prestation de service de filtrage tarifée sur une base récurrente permettrait de corriger la discrimination mentionnée ci-dessus et tendrait à mettre les opérateurs dans une situation équivalente, en matière de filtrage, à celle de France Télécom car elle serait de nature à diminuer les coûts d'entrée et à améliorer la visibilité des opérateurs sur leurs coûts prévisionnels. Il est donc équitable de faire droit sur ce point à la demande de LDCOM.
L'Autorité entend par « prestation de service de filtrage » le fait pour France Télécom de filtrer les fréquences des lignes partiellement dégroupées pour lesquelles le filtrage est demandé et de mettre les seules fréquences non vocales à disposition de LDCOM sur le répartiteur principal ou le répartiteur auxiliaire si celui-ci est déjà utilisé pour la mise à disposition des accès totalement dégroupés.
Sur le coût du dispositif de filtrage :
France Télécom indique dans ses mémoires et le questionnaire qu'elle estime que la solution avancée par LDCOM serait pénalisante pour elle et pour les raisons suivantes :
- les coûts dépendant du volume, France Télécom ne pourrait prévoir le tarif à appliquer aux tiers ;
- en fournissant une telle prestation, France Télécom supporterait le risque du dégroupage ;
- elle ferait de plus une avance de trésorerie aux opérateurs alternatifs concurrents ;
- elle ne pourrait se prémunir contre des comportements d'opérateurs commandant de nombreux accès pour les résilier aussitôt.
Ces arguments seront examinés successivement, en commençant par évaluer le tarif mensuel maximal qui devrait être appliqué pour la fourniture d'une telle prestation de filtrage.
Les coûts de mise en place d'un dispositif de filtrage dépendent de l'architecture déployée. Afin de se prononcer sur un tarif maximal pour la prestation de filtrage, l'Autorité se réfère à une prestation de filtrage construite à partir de l'architecture actuellement mise en place pour les opérateurs tiers, sans préjudice du fait qu'une autre architecture pourrait se révéler plus efficace et moins coûteuse.
Cette architecture est constituée des éléments suivants :
- le bâti, pouvant supporter au maximum quatre châssis ;
- le châssis, pouvant supporter jusqu'à seize cartes filtres ;
- les trois câbles qui relient dès son installation le châssis à trois réglettes de renvoi ;
- ces trois câbles, supportant respectivement l'ensemble du spectre, les hautes fréquences, et les basses fréquences et leurs réglettes d'extrémité ;
- la carte filtre, supportant huit dispositifs de filtrage unitaires.
L'essentiel du coût de l'architecture globale est situé dans le châssis et son installation, c'est-à-dire son câblage vers les réglettes de renvoi. L'installation d'un châssis suppose en général l'installation préalable d'un bâti. Une fois le châssis en place, l'installation d'une carte filtre est aisée et ne nécessite pas d'opération technique complémentaire. Une fois la carte installée, l'activation d'un accès suppose la mise en place de jarretières, mais ne nécessite pas de modification du dispositif de filtrage.
L'Autorité note :
- que la mise en place de plusieurs bâtis distincts dans les répartiteurs multimodules ne saurait se justifier que lorsque ce choix d'architecture permet éventuellement d'optimiser les coûts et lorsque les volumétries le justifient. Dans la mesure où un bâti supporte 512 accès, la solution a priori la plus économique en phase de démarrage est de n'installer qu'un seul bâti par répartiteur, quel que soit le nombre de modules ;
- que le câblage direct du câble de renvoi des fréquences hautes au répartiteur cuivre opérateur pourrait constituer une option alternative. Toutefois, l'Autorité retient l'hypothèse où le renvoi est fait sur le répartiteur de France Télécom, au moyen d'un câble dédié de courte longueur, comme dans l'architecture actuelle. Cette hypothèse conduit à majorer le coût global de la solution de filtrage.
Afin d'évaluer le tarif maximal, l'Autorité s'est fondée sur les coûts suivants, issus des mémoires :
Coût des équipements installés :
- une carte filtre coûte ... et supporte 8 accès, valeur constatée dans des devis fournis par France Télécom et reprise par LDCOM ;
- le bâti coûte ... et supporte 4 châssis, selon la pièce no 6 transmise par LDCOM et annexée à son mémoire en date du 4 janvier 2002, non contesté par France Télécom et ne paraissant pas déraisonnable au vue des caractéristiques de l'équipement ;
- l'ensemble des autres postes de coûts (châssis, câbles de renvoi...) sont valorisés à 1 165 Euros par LDCOM, ce qui représente une sous-estimation d'un facteur 3 selon France Télécom, en raison des coûts des câbles ; le coût du châssis et des câbles serait ainsi de l'ordre de 3 495 Euros. L'Autorité retient pour la somme de ces postes la valeur de 3 576 Euros, cohérente avec l'estimation de France Télécom qui donne un coût d'équipements hors filtres de 60 542 Euros pour 2 000 accès.
Coûts annuels :
- l'emplacement de baie est valorisé à 1 570 Euros par an, ce qui correspond au tarif le plus coûteux, en zone 1, sachant que ce coût est inférieur à 300 Euros en zone 5 ;
- l'exploitation est considérée comme représentant 0,5 % par an du coût d'investissement des équipements, d'après les estimations fournies par France Télécom.
Selon ces hypothèses hautes, il en coûte au maximum 4 572 Euros d'équipements (hors coûts récurrents) pour acquérir les matériels nécessaires au filtrage sur un site, c'est-à-dire un bâti, un châssis, et une carte filtre avec leur coût d'installation.
Selon ces mêmes hypothèses, une fois cet investissement initial réalisé, et en dehors de remises au volume, le coût incrémental d'un accès, châssis, installation, câblage et, tous les 512 accès, d'un bâti supplémentaire, est de 50 Euros. Cette valeur obtenue, une fois lissés les effets d'escalier dus aux seuils de capacité des équipements, est cohérente avec le coût asymptotique donné par un devis de France Télécom et repris par LDCOM.
Toutefois, pour tenir compte de la nécessité de pouvoir faire face à la demande, l'Autorité considère qu'il est utile de prévoir une sécurité de 32 accès d'avance sur les quantités demandées par les opérateurs, soit 1 600 Euros qui correspondent à tous les coûts incrémentaux de ces 32 accès supplémentaires (filtres, fraction du châssis, du câblage, etc.).
Le coût des équipements de filtrage peut ainsi s'exprimer comme un coût fixe de 4 572 Euros et un coût variable de 50 Euros par accès, avec une avance de 1 600 Euros correspondant à 32 accès, soit ce qui est numériquement équivalent, une fonction de coût de la forme de 6 172 Euros initiaux + 50 Euros par accès.
Afin de déduire de cette fonction de coût un tarif pouvant être appliqué accès par accès, l'Autorité retient les valeurs suivantes :
- les filtres et l'ensemble des investissements réalisés pour le filtrage sont à amortir sur une durée de cinq ans, ainsi qu'il ressort des échanges de mémoires ;
- le taux d'actualisation utilisé est de 10,4 %, conformément à la décision no 01-1006 de l'Autorité, qui fixe le taux de rémunération du capital à utiliser pour le calcul des tarifs du dégroupage ;
- les deux parties des coûts, fixe et variable au nombre d'accès, doivent être traitées différemment, tel qu'explicité ci-dessous.
La partie variable du coût, qui vaut 50 Euros, représente le coût incrémental d'investissement d'un filtre supplémentaire. Cette partie peut être mensualisée et est déjà rapportée à un accès unitaire. Cette composante s'établit alors à 1,06 Euros. La partie fixe du coût, qui vaut 6 172 Euros par site, pour être mensualisée, nécessite en revanche d'être rapportée à un nombre d'accès prévisionnel installé par site.
L'Autorité est amenée, dans le cadre de cette décision, à formuler une hypothèse sur la croissance du marché considéré. Cette démarche est classique pour la fixation des tarifs. Ainsi, l'adaptation du système d'information de France Télécom, d'un coût nettement plus élevé que les coûts engendrés par le filtrage, n'a pu être traduite en tarifs applicables aux opérateurs qu'à partir d'hypothèses de croissance de marché, en l'occurrence plus ambitieuses que celles retenues dans le cadre de la présente décision. Bien évidemment, ce tarif pourra être amené à évoluer en fonction du rythme de progression constaté du dégroupage partiel et des prévisions qui pourraient en découler.
Cependant, l'Autorité observe que le marché résidentiel du haut débit est en croissance forte, de plus de 300 % en 2001, et vraisemblablement de plus de 100 % en 2002 d'après France Télécom. La demande potentielle du marché résidentiel pour le haut débit est donc très importante. L'Idate et France Télécom elle-même estiment actuellement que plus de 3 millions de lignes supporteront du haut débit en 2004, soit 10 % des lignes téléphoniques.
A cet égard, il y a lieu d'escompter que dans cinq ans le taux de pénétration des opérateurs alternatifs sur le marché du haut débit sera au moins du même ordre de grandeur que leur taux de pénétration actuel sur le marché du bas débit, sur les zones dans lesquelles ils auronts déployé leurs équipements techniques. Ce taux de pénétration pourrait donc être évalué à 30 %. En vertu de ces hypothèses, et sur un répartiteur de taille moyenne de 30 000 lignes, plus de 3 000 lignes devraient supporter des services haut débit en 2007, dont 900 par des opérateurs alternatifs.
L'Autorité retient dans le cadre du présent litige une hypothèse prudente de 500 lignes en dégroupage partiel à horizon 2007 en moyenne par site, soit une croissance linéaire d'une centaine de lignes par an et par site. Cette hypothèse conduit à fixer le tarif mensuel permettant de recouvrer les frais fixes relatifs aux équipements de filtrage à hauteur de 0,55 Euros par accès et par mois.
Concernant les coûts annuels, la location d'un emplacement de baie et les coûts d'exploitation des équipements, les mêmes hypothèses ont été retenues. Ainsi, en retenant que les coûts d'exploitation se montent à 0,5 % de la valeur en investissement des équipements exploités, ces coûts s'établissent à 332 Euros par site pour les cinq ans, soit le coût d'exploitation de 50 lignes la première année (la moyenne de 0 en début d'année à 100 lignes en fin d'année), plus le coût actualisé de 150 lignes la deuxième année et ainsi jusqu'à la cinquième année. De la même manière, le coût de location d'un emplacement de baie, qui s'établit à 1 570 Euros par an et par site, représente pour les cinq ans un coût actualisé de 6 504 Euros. Un tarif mensuel de 0,62 Euros permet de recouvrir la somme de ces coûts sur cinq ans, en conservant les hypothèses de déploiement exposées.
Au total, le coût mensuel de la prestation de filtrage ne saurait être établi à plus de 2,25 Euros par accès et par mois.
Il apparaît ainsi que l'argument de France Télécom selon lequel il serait impossible de fixer un tarif indépendant du nombre de filtres commandés doit être rejeté.
S'agissant de l'argument de France Télécom en vertu duquel si la solution préconisée par LDCOM devait être retenue, il reviendrait à France Télécom de supporter le risque du dégroupage, l'Autorité souligne qu'elle a retenu le taux d'actualisation de 10,4 % tel qu'il a été déterminé dans sa décision no 2001-1006 en date du 17 octobre 2001 fixant le taux de rémunération du capital employé pour évaluer les tarifs du dégroupage de la boucle locale de France Télécom pour l'année 2002. Ce taux couvre donc la rémunération du capital immobilisé et notamment le risque encouru par France Télécom.
Enfin, compte tenu de la mise en oeuvre d'un principe de rémunération du capital, la fourniture d'un service de filtrage ne saurait être assimilée à une avance de trésorerie non compensée pour France Télécom.
L'Autorité considère en revanche que la remarque de France Télécom selon laquelle elle devrait se prémunir contre des comportements d'opérateurs commandant un grand nombre d'accès filtrés pour les résilier aussitôt est légitime.
Dès lors, l'Autorité considère qu'il ne saurait être commandé de prestation de filtrage de manière décorrélée du nombre de commande de lignes dégroupées passées. Ainsi, une prestation de filtrage ne saurait être demandée par un opérateur indépendamment d'une nouvelle commande de dégroupage de lignes, sauf si cette demande concerne une ligne qu'il a déjà dégroupée.
France Télécom est ainsi prémunie contre les éventuels comportements opportunistes des opérateurs, car il est peu probable que ceux-ci trouvent des clients, leur fassent signer un mandat, s'acquittent des frais d'accès au service de dégroupage de ligne pour résilier ensuite leur commande.
Enfin, l'Autorité tient à souligner que les termes de cette décision ne doivent avoir aucune incidence sur les délais d'activation d'accès lors de la commande d'une ligne partiellement dégroupée par rapport aux conditions de son offre de référence, sauf dans le cas où un opérateur commanderait, sans avoir averti France Télécom au préalable, une quantité inhabituelle ou imprésivible par France Télécom d'accès filtrés.
Sur les conclusions de LDCOM tendant à ce que l'Autorité fixe les conditions techniques et tarifaires d'une offre de garantie temps de rétablissement de 4 heures, 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24 :
Sur la recevabilité de la demande :
La demande de LDCOM relative à une offre de garantie temps de rétablissement (GTR) de 4 heures, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, a été formulée dès le 12 octobre 2001 dans un courrier adressé à France Télécom. France Télécom y a répondu dans une lettre en date du 12 novembre 2001 dans laquelle elle confirme qu'elle n'entend pas proposer une telle offre car : « France Télécom considère que sa boucle locale est suffisamment fiable et que dédier des équipes 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 à la superviser et la maintenir, aurait un coût élevé que France Télécom devrait intégralement faire assumer à LDCOM. En effet, ces équipes n'existent pas, ni pour les besoins propres de France Télécom, ni pour ceux d'autres opérateurs, et jusqu'à aujourd'hui l'Autorité et les opérateurs ayant pleinement mesuré l'impact de cette demande de GTR 4, n'ont pas souhaité la maintenir ». LDCOM dans une réponse en date du 23 novembre 2001 souligne que « nous n'avons pas connaissance pour notre part que l'ART serait revenue sur la disposition figurant dans la décision 01-521 du 8 juin dernier. (...) En tout état de cause, nous sommes étonnés des conclusions de votre analyse économique sur le coût d'un tel service et l'impossibilité dans laquelle France Télécom se trouverait de le fournir à un prix raisonnable. Nous sommes à votre disposition pour revoir avec vos services les hypothèses de coûts sur lesquels ils se fondent. »
Cet échange de courriers démontre un désaccord entre les parties sur l'offre de GTR 4 heures et un échec des négociations commerciales au sens de l'article L. 36-8 I du code des postes et télécommunications.
Par suite, la demande de LDCOM concernant l'offre de GTR 4 heures doit être regardée comme recevable.
La circonstance que France Télécom ait proposé dans ses conclusions en défense le lancement d'une étude pour parvenir à un compromis sur ce point est sans incidence sur la recevabilité de la demande de règlement de différend présentée par LDCOM, et il revient à l'Autorité de trancher ce litige.
Sur le fond :
LDCOM peut commercialiser des offres qualitatives à ses clients, notamment professionnels, basées sur des lignes dégroupées, dans la mesure où :
- la fourniture de services de télécommunication, notamment de communication de données, suppose en général un certain engagement du fournisseur en matière de rétablissement d'un service interrompu ;
- la norme du marché, structurée par les offres de France Télécom, est l'existence d'une garantie de temps de rétablissement (GTR), avec une option 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 ;
- les services fournis par LDCOM et fondés sur le dégroupage dépendent en partie de France Télécom, tant par les erreurs de manipulation qui pourraient survenir de son fait et interrompre le service de LDCOM que dans sa capacité de réparer ces erreurs ou d'autres ne survenant pas de son propre fait.
Par suite, l'Autorité considère que la demande de LDCOM doit être regardée comme justifiée. Il convient dès lors d'examiner le caractère raisonnable de cette demande. France Télécom, sans nier la possibilité d'une telle offre :
- récuse la comparaison faite par LDCOM avec l'offre de GTR similaire du contrat Turbo DSL au motif que celui-ci couvre également la couche logique ;
- récuse la comparaison avec l'offre Turbo DSL au motif que le support cuivre serait spécifiquement conditionné pour la fourniture de ce service et particulièrement supervisé ;
- juge son coût élevé, et l'évalue à 135 Euros par accès dans le cadre du présent règlement de différend.
Dans le cas de Turbo DSL, l'option GTR 24 heures sur 24 porte sur le service entier et non pas seulement sur le support. Lorsqu'un incident survient sur le service, une réparation est effectivement proposée en moins de quatre heures. En revanche, lorsqu'un incident survient sur le support physique, la réparation est, selon France Télécom, impossible en moins de quatre heures dans la majorité des cas.
L'Autorité considère qu'effectivement le caractère de l'offre de GTR 24 heures sur 24 dans le cadre de Turbo DSL est double, conformément à ce que soutient France Télécom :
- d'une part, elle porte sur la mise en place de moyens pour un rétablissement technique en moins de quatre heures lorsqu'il s'agit d'un problème sur la couche logique de communication ;
- d'autre part, elle fonctionne comme un système d'assurance, prévoyant un paiement de pénalités lorsque le problème porte sur le support physique.
Toutefois, l'Autorité considère que le périmètre des incidents sur la couche physique effectivement non réparables dans un délai de quatre heures est moins large que ne le soutient France Télécom. En effet, l'Autorité distingue deux parties :
- la ligne en tant que telle, enfouie ou aérienne, et sur laquelle un incident qui survient peut s'avérer irréparable en quatre heures, que ce soit pendant les heures ouvrées ou non ;
- le dispositif de jarretiérage au sein du répartiteur, où une mauvaise manipulation peut engendrer une rupture de connexion, et qui est réparable dans les quelques minutes suivant sa détection.
L'Autorité note que LDCOM demande une option de GTR 24 heures sur 24 pour le dégroupage qui soit comparable à celle qu'offre France Télécom dans le cadre de Turbo DSL. Aussi, compte tenu des remarques préalables et des échanges de mémoires, l'Autorité note que la demande de LDCOM ne saurait être réduite, comme tend à le faire France Télécom, à une simple demande de réparation systématique des incidents éventuels en moins de quatre heures, ce qui serait effectivement coûteux.
Au contraire, l'Autorité estime que LDCOM demande une offre de GTR comparable au dispositif de GTR mis en place par France Télécom dans le cadre du contrat Turbo DSL et comprenant :
- une garantie que les incidents réparables rapidement le soient effectivement à moyens constants, y compris lorsque l'incident survient moins de quatre heures avant la fin de la journée de travail ;
- une garantie qui fonctionne, comme pour les clients finaux de Turbo DSL, comme une assurance couvrant les préjudices qui pourraient être causés par une interruption de service effectivement non réparable dans un délai bref, et y compris pour les incidents survenant hors heures ouvrées.
Il est exact qu'une nouvelle ligne est créée pour chaque client Turbo DSL. Dès lors, il serait possible d'envisager que France Télécom se livre à des tests particuliers sur cette ligne pour s'assurer de sa qualité avant sa mise en service.
Toutefois, l'Autorité note :
- qu'il est peu probable que les tests de qualité de ligne puissent apporter des renseignements utiles sur la probabilité ultérieure d'un incident grave sur la ligne ou les câbles en aval du répartiteur ;
- que France Télécom impose aux opérateurs, dans le cadre de la convention de dégroupage et pour bénéficier de la GTR 4 heures, d'être en mesure de mesurer le défaut à 100 mètres près ;
- que ces mêmes outils imposés aux opérateurs alternatifs et donc vraisemblablement utilisés par France Télécom pour ses propres besoins pourraient permettre à France Télécom, lors du test de ligne avant son dégroupage, de détecter, si cela était possible, un éventuel risque de dysfonctionnement ultérieur sur les câbles de transport ou de distribution et d'adapter en conséquence sa politique d'entretien de la boucle locale.
Par conséquent, l'Autorité considère que la demande de LDCOM de disposer d'une option de GTR est raisonnable.
En ce qui concerne le coût d'une telle offre, France Télécom a avancé, lors des échanges, un coût hypothétique de 135 Euros par ligne pour la mise en place d'une telle GTR, sans préciser l'influence du nombre de lignes dégroupées sur ce coût. Par ailleurs, France Télécom n'a produit aucun élément précis permettant de déterminer le coût exact de l'option GTR 24 heures sur 24 en dépit des questions posées par le rapporteur et du délai supplémentaire qui lui a été accordé pour fournir des observations en délibéré.
En conséquence, l'Autorité a utilisé les éléments et tarifs publics à sa disposition. Il apparaît, dans un premier temps, que les tarifs de GTR proposés par France Télécom sont équilibrés. Ainsi, le tarif de GTR quatre heures en heures ouvrées proposé dans le cadre d'un contrat professionnel, option S1 selon la nomenclature des tarifs de France Télécom, est légèrement supérieur au tarif de l'option GTR quatre heures en heures ouvrées proposé dans le cadre du dégroupage, qui est lui-même orienté vers les coûts (7,62 Euros contre 5,95 Euros).
De même, dans le cas de Turbo DSL, le tarif de l'option GTR 24 heures sur 24, qui est de 20 Euros, est supérieur à celui de l'option équivalente proposée dans le cadre du contrat professionnel, qui est de 17,53 Euros, ce qui tend à montrer que le tarif pour Turbo DSL est également équilibré.
Une approche complémentaire montre également qu'un tarif de 20 Euros pour une option de GTR quatre heures 24 heures sur 24 est équilibré. Une ligne sous contrat « professionnel présence » dispose d'emblée d'une GTR quatre heures en heures ouvrées, qui est comparable à l'option GTR quatre heures en heures ouvrées proposée dans le cadre du dégroupage et facturée 5,95 Euros, selon un tarif orienté vers les coûts. La souscription de l'option GTR quatre heures 24 heures sur 24 pour le titulaire d'une ligne sous contrat « professionnel présence » ou pour le titulaire d'une ligne dégroupée ayant déjà souscrit l'option GTR quatre heures en heures ouvrées représente alors un incrément comparable. Cette option étant facturée 13,72 Euros dans le cas du contrat « professionnel présence », il ressort que le coût total d'une option GTR quatre heures 24 heures sur 24 dans le cadre du dégroupage ne saurait être supérieur à 5,95 Euros + 13,72 Euros, soit 19,67 Euros.
Ces deux approches complémentaires donnent un résultat cohérent et montrent qu'un tarif de 20 Euros par accès par mois pour une option GTR quatre heures 24 heures sur 24 est équilibré. Dans le cadre du dégroupage, il ne peut s'agir que d'un tarif maximum, les coûts de réparation sur la couche logique de communication étant à la charge de l'opérateur qui dégroupe, et non de France Télécom. L'Autorité rappelle à ce titre que des incidents sur le support physique d'une ligne n'intervient en moyenne que tous les treize ans.
Enfin, l'Autorité entend souligner que le niveau des pénalités est une partie intrinsèque d'un contrat de type GTR, notamment lorsque ce contrat couvre des incidents potentiels ne pouvant être réparés en moins de quatre heures, et pour lesquels le contrat fonctionne comme une assurance sur la ressource mise en place par son fournisseur pour les aléas qu'il ne maîtrise pas.
Le tarif de l'option de GTR et le montant de ces pénalités doivent être rigoureusement corrélés. Il convient notamment de noter que si le tarif de l'option GTR est de 20 Euros par mois, les pénalités ne sauraient être inférieures en montant à celles prévues par les contrats du type Turbo DSL. Si les pénalités devaient être inférieures, le montant de l'option de GTR ne pourrait qu'être lui-même moindre et réduit dans les mêmes proportions, hors coûts de gestion administratifs. Le niveau des pénalités ne saurait être inférieur à un montant suffisant pour être effectivement fortement incitatif à la réparation rapide des incidents pouvant l'être, notamment au sein du répartiteur, sauf à vider le contrat de GTR de son sens.
Par suite, l'Autorité décide que le tarif d'une option GTR quatre heures 24 heures sur 24 dans le cadre du dégroupage ne saurait ainsi être supérieur à 20 Euros par accès et par mois.
Sur les conclusions de LDCOM tendant à ce que l'Autorité autorise cet opérateur à choisir la chambre 0 de pénétration dans les URAD :
Sur la recevabilité de la demande :
LDCOM revendique la possibilité de pouvoir choisir la chambre 0 la plus proche du réseau de France Télécom. France Télécom a affirmé dans un mail adressé à LDCOM du 20 juillet 2001 que « dans le cadre de la cohabitation physique, le CSPO vous propose un devis concernant une chambre 0 réservant suffisamment d'espace pour faire aboutir le câble fibre optique de dégroupage. Il n'est donc pas possible de choisir la chambre 0 ». LDCOM a renouvelé sa demande concernant la possibilité de choisir même dans l'hypothèse d'une colocalisation physique par l'envoi de courriers électroniques le 5 décembre 2001 et le 10 décembre 2001, restés sans réponse.
Il ressort de ces échanges de courriers électroniques et de propos tenus lors du groupe Bravo que les sociétés LDCOM et France Télécom n'ont pas réussi à se mettre d'accord sur la possibilité pour LDCOM de choisir les chambres 0 dans l'hypothèse d'une colocalisation physique. Il en résulte que l'existence d'un échec des négociations commerciales au sens de l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications est avérée.
Par suite, la demande doit être regardée comme recevable.
Sur le fond :
L'Autorité constate que les définitions de la chambre 0 données par France Télécom et LDCOM convergent vers la formulation suivante : « première chambre de pénétration située sur le domaine public à l'extérieur du bâtiment de France Télécom ».
L'Autorité considère que la lecture qu'a faite France Télécom de cette définition lors de négociations avec LDCOM et dans le cadre des échanges de mémoires est particulièrement restrictive et contraire à la pratique observée dans le cadre de la colocalisation distante.
L'Autorité constate que si LDCOM devait prendre une chambre de pénétration éloignée de son réseau, alors qu'il en existe une plus proche, le surcoût serait très important. En effet, le coût du génie civil en milieu urbain peut être de plus de 10 000 Euros par centaine de mètres. Ainsi si France Télécom proposait à LDCOM une chambre de pénétration se trouvant à plus de 100 mètres du réseau de LDCOM, cet opérateur devrait faire face à un surcoût de quelques dizaines de milliers d'euros. L'Autorité estime par conséquent que la demande de LDCOM tendant à pouvoir choisir la chambre de pénétration la plus proche de son réseau est justifiée.
L'Autorité considère en outre que le terme de première chambre de pénétration ne doit pas se comprendre selon une hiérarchie purement métrique, où la première chambre serait la plus proche du site de France Télécom, mais bien selon une hiérarchie logique, où toute chambre de pénétration en vue logique directe de l'infra-répartiteur est une chambre 0. Ainsi, il existe, sauf cas très particulier, une chambre 0 sur chaque chemin de câble pénétrant dans le bâtiment de France Télécom. Par conséquent, l'Autorité considère que rien ne s'oppose à ce que LDCOM puisse choisir la chambre de pénétration en vue de l'infra-répartiteur qu'elle considère la plus appropriée, si ce n'est le risque de saturation éventuelle de cette chambre, France Télécom s'étant par ailleurs engagée lors de l'audience devant l'Autorité du 14 mars 2002 à signaler à LDCOM les chambres existantes ayant un accès direct avec des disponibilités.
L'Autorité demande donc à France Télécom de prendre l'ensemble des dispositions nécessaires pour que LDCOM puisse choisir la chambre 0 la plus appropriée à ses besoins parmi les chambres 0 non saturées et ait accès à une procédure contradictoire lui permettant de vérifier la saturation éventuelle d'une chambre.
De manière détaillée, France Télécom devra :
- fournir à la demande de LDCOM la liste exhaustive des chambres de pénétration en vue logique de l'infra-répartiteur ;
- permettre à LDCOM de choisir une chambre de pénétration ;
- en cas de saturation de la chambre souhaitée, lui donner accès, d'une part, à une procédure contradictoire lui permettant de vérifier cette saturation et lui accorder, d'autre part, la pénétration dans la chambre non saturée la plus appropriée à ses besoins.
L'ensemble de cette prestation devra être orienté vers les coûts et réalisé dans des délais raisonnables.
Sur les conclusions de LDCOM tendant à ce que l'Autorité dise que les frais d'accès au service doivent être égaux au tarif que France Télécom propose dans ses services de revente en gros, soit 54,12 Euros (HT) :
L'Autorité note que LDCOM se borne à faire valoir au soutien de sa demande que les tarifs de détail sont de 54,12 Euros (HT) dans le cadre de l'offre Turbo DSL. Cet argument n'est pas susceptible de donner un fondement à sa demande, les deux offres n'étant pas de la même nature, alors même que France Télécom n'apporte de son côté, dans le cadre de ce règlement de litige, aucun élément probant susceptible d'établir qu'elle encourt des coûts supérieurs aux tarifs pratiqués dans ses offres commerciales ou que les tarifs des frais d'accès au service du dégroupage sont orientés vers les coûts.
En outre, il semble difficile de déduire que les tarifs des frais d'accès au service de cette offre recouvrent effectivement exactement les coûts de la mise en service des lignes, directement du seul fait que France Télécom n'ait pas fait évoluer le tarif des frais d'accès au service de l'offre ADSL Connect ATM, suite à la publication de l'ordonnance du 25 juillet 2001 portant modification du code des postes et télécommunications qui, en modifiant l'article L. 34-8 IV du même code, impose une orientation de ces tarifs vers les coûts.
Finalement, les frais d'accès au service du dégroupage recouvrent, ne serait-ce qu'en terme de système d'information, des prestations qui ne sont pas strictement identiques à celles des contrats IP/ADSL ou ADSL Connect ATM.
Dans ces conditions et en l'absence d'éléments suffisants et justifiés dans le cadre du présent règlement de différend, l'Autorité ne peut que rejeter la demande de LDCOM.
Sur les demandes additionnelles présentées par LDCOM dans sa réponse au questionnaire enregistrée le 12 mars 2002 :
Si aucune disposition du code des postes et télécommunications, ni même du règlement intérieur, ne fait obstacle à ce que les parties puissent présenter des demandes additionnelles au cours de la procédure, il faut cependant que celles-ci présentent un lien suffisant avec la demande initiale, qu'elles soient formulées par des conclusions écrites déposées au plus tard dans les jours qui précèdent l'audience devant le collège, afin de permettre le respect du principe du contradictoire, et qu'elles remplissent les conditions de recevabilité énoncées à l'article L. 36-8 du code des postes et télécommunications.
S'agissant de la demande additionnelle relative au financement du câble de renvoi par France Télécom tendant à la mise en place d'un système de location mensuelle du câble effectivement déployé sur une période d'amortissement de quinze ans minimum et fixant le coût de la location à 0,3 Euros par mois et par accès, il convient de rappeler qu'aucune négociation n'a été entreprise au sujet des câbles de renvoi entre les parties. Dès lors, cette demande doit être regardée comme irrecevable.
S'agissant de la demande additionnelle de LDCOM relative aux pénalités de retard en cas de non-respect par France Télécom de la GTR et tendant à ce qu'une pénalité supplémentaire, dont le seuil déclenchant serait le volume d'incidents constatés sur une base mensuelle, soit mise en oeuvre, cette demande présente un lien suffisant avec la demande initiale de LDCOM relative à la GTR. Cependant, elle n'a été formulée pour la première fois que dans le questionnaire adressé à l'Autorité le 12 mars 2002. Au surplus, LDCOM ne s'est prévalue ni d'un échec des négociations, ni d'un désaccord sur ce point avec France Télécom. Par suite, cette demande doit être regardée comme irrecevable.
Sur la demande de LDCOM tendant à ce que la décision de l'Autorité s'intègre rétroactivement dans la convention de dégroupage conclue entre France Télécom et LDCOM et qu'en conséquence, elle sera applicable à l'ensemble des accès commandés au titre du dégroupage partiel et qui sont soumis à cette convention :
Dans son mémoire introductif enregistré à l'Autorité le 4 janvier 2002, LDCOM demande à l'Autorité de « dire que sa décision sera réputée s'intégrer rétroactivement dans la convention de dégroupage conclue entre France Télécom et LDCOM et qu'en conséquence, elle sera applicable à l'ensemble des accès commandés au titre du découpage partiel et qui sont soumis à cette convention ».
L'Autorité relève que LDCOM n'apporte pas, en tout état de cause, au cas d'espèce, d'éléments suffisants pour permettre d'apprécier le bien-fondé de sa demande. Par conséquent, cette demande doit être rejetée,
Décide :
Art. 1er. - France Télécom devra proposer à LDCOM un service de filtrage des fréquences. Ce service comprendra le filtre ainsi que les éléments connexes permettant le renvoi des fréquences vocales hautes au répartiteur. La mise en oeuvre de cette prestation pourra être commandée accès par accès, lors du dégroupage de la ligne ou ultérieurement, et résiliée à tout moment.
Art. 2. - Les tarifs de ce service de filtrage seront fixés sur une base mensuelle n'excédant pas 2,25 Euros par mois et par accès en 2002.
Art. 3. - France Télécom devra mettre en place une procédure permettant à LDCOM de choisir la chambre de pénétration en vue de l'infrarépartiteur la plus appropriée à ses besoins parmi les chambres non saturées.
Cette procédure devra être efficace, tant en termes de délais que de coûts, et permettre une contre-expertise de LDCOM concernant le risque de saturation éventuelle des chambres.
Art. 4. - France Télécom devra proposer à LDCOM un contrat de garantie de temps de rétablissement en quatre heures, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7.
Art. 5. - Le tarif mensuel de cette garantie de temps de rétablissement n'excédera pas 20 Euros.
Art. 6. - Ce contrat de garantie de temps de rétablissement devra prévoir des pénalités incitatives à une réparation rapide des incidents susceptibles d'intervenir, le caractère incitatif du montant devant être évalué par comparaison aux autres offres de garantie de temps de rétablissement 24 heures sur 24 proposées par France Télécom.
Art. 7. - France Télécom devra appliquer la présente décision et mettre en conformité la convention signée avec LDCOM dans un délai de quatre semaines à compter de sa notification.
Art. 8. - Le surplus des demandes formulées par les parties est rejeté.
Art. 9. - Le chef du service juridique ou son adjoint est chargé de notifier aux sociétés LDCOM et France Télécom la présente décision, qui sera rendue publique sous réserve des secrets protégés par la loi.
Fait à Paris, le 28 mars 2002.
... Passages relevant du secret des affaires.