Sur l'intelligibilité et la sincérité de la loi déférée et son incidence sur l'équilibre financier des régimes de sécurité sociale :
2. Considérant qu'il est soutenu qu'à plusieurs titres la loi manquerait à l'objectif d'intelligibilité et à l'exigence de sincérité ; qu'elle porterait également atteinte aux missions des régimes de sécurité sociale ainsi qu'à l'équilibre financier de ces régimes ;
En ce qui concerne l'intelligibilité de la loi déférée :
3. Considérant que, si la loi déférée se caractérise encore par la complexité des circuits financiers entre les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale, les organismes créés pour concourir à leur financement et l'Etat, elle énonce de façon précise les nouvelles règles de financement qu'elle instaure ; qu'ainsi elle détermine les nouvelles recettes de chaque organisme et fixe les clés de répartition du produit des impositions affectées ; que, de même, les transferts entre les différents fonds spécialisés, les régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et l'Etat sont précisément définis ; que, dès lors, doit être rejeté le grief tiré de l'atteinte à l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité de la loi ;
En ce qui concerne la sincérité de la loi déférée :
Quant au réalisme des prévisions pour 2002 :
4. Considérant, en premier lieu, qu'en application du I de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale, l'article 16 de la loi déférée fixe, pour 2002, par catégorie, les prévisions de recettes de l'ensemble des régimes obligatoires de base et des organismes créés pour concourir à leur financement ; que l'article 69 prévoit pour 2002 les objectifs de dépenses par branche des mêmes régimes ; que l'objectif national de dépenses d'assurance maladie de l'ensemble des régimes obligatoires de base pour 2002 est fixé à l'article 71 ;
5. Considérant que les auteurs des deux saisines contestent le réalisme des prévisions d'évolution de la masse salariale et de croissance du produit intérieur brut sur lesquelles se fondent les prévisions de recettes figurant à l'article 16 ; que les députés requérants invoquent le rapport présenté lors de la réunion du 20 septembre 2001 de la commission des comptes de la sécurité sociale, aux termes duquel « l'hypothèse retenue en matière de dépenses d'assurance maladie est particulièrement ambitieuse » et selon lequel la réalisation de l'objectif fixé pour 2002 « supposerait un freinage considérable par rapport à la tendance moyenne des deux dernières années », alors que, pour les sénateurs requérants, la loi déférée ne comprendrait « aucun dispositif permettant d'espérer un ralentissement des dépenses d'assurance maladie » ; que, selon les sénateurs requérants, au vu des prévisions et des réalisations des années précédentes, l'objectif de dépenses de la branche famille pour 2002 aurait été surestimé ; que, dès lors, les objectifs fixés aux articles 69 et 71 seraient entachés d'une « erreur manifeste d'appréciation » ;
6. Considérant qu'il ne ressort pas des éléments fournis au Conseil constitutionnel que les prévisions de recettes et les objectifs de dépenses, présentés pour 2002, soient entachés d'une erreur manifeste, compte tenu des aléas inhérents à leur évaluation et des incertitudes particulières relatives à l'évolution de l'économie en 2002 ; que, toutefois, s'il apparaissait en cours d'année que les conditions générales de l'équilibre financier des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale étaient remises en cause, il appartiendrait au Gouvernement de soumettre au Parlement les ajustements nécessaires dans une loi de financement de la sécurité sociale rectificative ou, à défaut, s'il en était encore temps, dans la loi de financement de la sécurité sociale pour l'année 2003 ;
7. Considérant, en second lieu, que les députés requérants mettent en cause l'insuffisance de la part affectée au fonds de réserve des retraites par l'article 67, relatif à la répartition du produit des prélèvements sociaux mentionnés aux articles L. 245-14 et L. 245-15 du code de la sécurité sociale sur les revenus du patrimoine et les produits de placement ; qu'ils allèguent que ni ce relèvement ni l'affectation nouvelle de recettes de privatisation prévue dans le cadre du projet de loi de finances pour 2002, soumis par ailleurs à l'examen du Parlement, ne suffiraient à compenser la « réduction drastique » du prix des autorisations d'établissement et d'exploitation de réseau de téléphonie mobile de troisième génération ; que, pour contester la sincérité de ces prévisions, ils font état de l'annonce par le Gouvernement de l'affectation desdites recettes de privatisation à d'autres dépenses ;
8. Considérant que les évaluations de recettes de cession d'actifs publics figurant dans le projet de loi de finances pour 2002 apparaissent suffisantes pour compenser la perte de recettes subie par le fonds de réserve des retraites du fait de la réduction du prix des autorisations susmentionnées ; que, dès lors, la répartition fixée par l'article 67 n'est pas entachée d'insincérité ;
Quant à la révision des prévisions pour 2001 :
9. Considérant que les sénateurs auteurs de la seconde saisine mettent en cause la constitutionnalité du « volet rectificatif pour 2001 » figurant aux articles 17, 70 et 72 de la loi déférée, « qui évite au Gouvernement de déposer un projet de loi de financement rectificatif » ;
10. Considérant que le II de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale ne fait pas obstacle à la révision, par l'article 17 de la loi de financement pour 2002, des prévisions de recettes pour 2001, non plus qu'à celle, par les articles 70 et 72, des objectifs de dépenses des branches et de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie pour 2001 ;
11. Considérant que les sénateurs requérants font plus particulièrement grief à l'article 17 de manquer au principe de sincérité du fait des modalités retenues pour relever, au titre de l'exercice 2001, l'évaluation du produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés ;
12. Considérant que les dispositions figurant à cet effet dans la loi déférée ont pour objet de tirer les conséquences d'une mesure, figurant dans le projet de loi de finances rectificative pour 2001 actuellement examiné au Parlement, qui relève de 1,5 milliard de francs la fraction de ladite contribution affectée au budget annexe des prestations sociales agricoles en 2001 ; qu'à l'article 17, l'évaluation révisée des « impôts et taxes affectés » en 2001 est majorée en conséquence du même montant ; que le solde à reporter en 2002 est donc réduit de 1,5 milliard de francs ; que, toutefois, cette diminution du solde est partiellement compensée par une plus-value de recettes de 0,8 milliard de francs constatée en 2001 ; que, dès lors, l'article 16 réduit de 0,7 milliard de francs la rubrique « Impôts et taxes affectées » pour 2002 ;
13. Considérant que la coordination ainsi opérée entre l'article 8 du projet de loi de finances rectificative pour 2001 et les articles 16 et 17 de la loi déférée ne porte pas atteinte au principe de sincérité ;
En ce qui concerne la dégradation alléguée des comptes des régimes de base :
14. Considérant que les sénateurs requérants font valoir que la loi déférée aurait « pour principal effet, sinon pour objet, de dégrader considérablement les comptes des régimes de base pour les exercices 2000, 2001 et 2002 afin d'éviter de faire supporter au budget de l'Etat les conséquences financières des politiques décidées par le Gouvernement » ; qu'ils estiment ces mouvements contraires à l'objectif constitutionnel d'équilibre financier de la sécurité sociale découlant du dix-neuvième alinéa de l'article 34 de la Constitution ;
15. Considérant que sont critiqués à cet égard les transferts de recettes figurant aux articles 13, 16 et 67 ainsi que les changements d'imputation de charges opérés notamment par l'article 42 ;
16. Considérant que l'article 13 de la loi déférée comprend diverses mesures tendant à accroître les recettes du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales de sécurité sociale ; qu'en particulier son II transfère à ce fonds, à compter du 1er janvier 2002, la totalité de la contribution sur les contrats d'assurance en matière de circulation de véhicules terrestres à moteur ; que le III du même article lui affecte la totalité du droit de consommation sur les alcools dès le 1er janvier 2001 ; qu'il est allégué que, du fait de ces transferts de recettes, le déficit de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés serait aggravé de 5,9 milliards de francs en 2001 et de 11,8 milliards de francs en 2002 ; qu'en outre il serait porté atteinte au principe du consentement à l'impôt, en raison, selon les requérants, de la « grande opacité » des nouvelles affectations ;
17. Considérant que sont également mises en cause deux dispositions au motif qu'elles aggraveraient le déficit du fonds de solidarité vieillesse, organisme créé pour concourir au financement des régimes de base ; que les requérants soutiennent, en premier lieu, que le V de l'article 13 prive le fonds, à compter du 1er janvier 2002, de la totalité du produit de la taxe sur les contributions au bénéfice des salariés pour le financement des prestations complémentaires de prévoyance, à hauteur de 2,9 milliards de francs ; qu'ils font valoir, en second lieu, que la part de la contribution sociale de solidarité des sociétés affectée au même fonds est réduite de 0,7 milliard de francs du fait de l'article 16 de la loi déférée « coordonné avec l'article 8 du projet de loi de finances rectificative pour 2001 » ;
18. Considérant, en outre, selon les saisissants, que l'article 67 de la loi déférée réduirait les recettes de la Caisse nationale d'assurance vieillesse en relevant la part, affectée au fonds de réserve pour les retraites, des prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine et les revenus de placement mentionnés aux articles L. 245-14 et L. 245-15 du code de la sécurité sociale ;
19. Considérant, enfin, que, s'agissant des charges nouvelles pesant sur les comptes de certains régimes de base, les sénateurs requérants mettent en cause l'incidence de l'article 42 qui prévoit en 2001 une participation exceptionnelle de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés au financement du « plan Biotox », à hauteur de 1,3 milliard de francs ;
20. Considérant, en premier lieu, que l'exigence constitutionnelle qui s'attache à l'équilibre financier de la sécurité sociale n'impose pas que cet équilibre soit strictement réalisé pour chaque branche et pour chaque régime au cours de chaque exercice ;
21. Considérant, en deuxième lieu, que les transferts critiqués de recettes fiscales et de charges, qui sont définis avec une précision suffisante, n'entravent pas, eu égard à leur montant, le fonctionnement des régimes et organismes concernés au point de les empêcher d'exercer leurs missions ou de mettre en oeuvre les politiques nécessaires au respect des exigences découlant des dixième et onzième alinéas du préambule de la Constitution de 1946 ;
22. Considérant, enfin, que ces transferts ne méconnaissent pas davantage le principe du consentement à l'impôt, proclamé par l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, dès lors que le Parlement a été clairement informé de leurs motifs et y a librement consenti par son vote ; que le principe du consentement à l'impôt n'implique pas qu'une imposition prélevée initialement pour couvrir un besoin déterminé ne puisse être affectée à la couverture d'un autre besoin ;
Sur l'article 12 :
23. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa du II de l'article 12 de la loi déférée : « Sont annulées les créances sur le fonds créé à l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale, enregistrées au 31 décembre 2000 par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale et par les régimes concernés, afférentes aux exonérations visées au 1o de l'article L. 131-9 du même code dans sa rédaction issue de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 précitée. En conséquence, les comptes de l'exercice 2000 des organismes de sécurité sociale concernés sont modifiés pour tenir compte de cette annulation » ;
24. Considérant que les députés requérants soutiennent que seul un motif d'intérêt général suffisant pouvait justifier la remise en cause rétroactive d'un exercice clos ; que l'annulation d'une créance portant sur une somme de plus de 16 milliards de francs compromet l'équilibre financier du régime général pour l'exercice 2000 et « obère la capacité de contrôle du Parlement sur les comptes de la sécurité sociale » ; que « la réouverture des comptes 2000 est contraire au principe de l'annualité qui régit les lois de financement de la sécurité sociale » ;
25. Considérant que, pour leur part, les sénateurs requérants font grief à la disposition précitée d'affecter « substantiellement les conditions de l'équilibre financier arrêté par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2000, telles que déterminées en application de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale » et de méconnaître « l'objectif d'équilibre financier de la sécurité sociale, devenu un principe à valeur constitutionnelle par la révision constitutionnelle du 22 février 1996 » ; qu'ils estiment en outre que la loi de financement de la sécurité sociale pour l'année 2002 ne peut comporter des dispositions relatives à l'année 2000 ; que la disposition contestée est, selon eux, contraire aux exigences constitutionnelles de clarté et de sincérité régissant les lois de financement de la sécurité sociale ;
26. Considérant qu'il résulte de l'ensemble des dispositions des articles L. 131-7 à L. 131-10 du code de la sécurité sociale applicables à l'année 2000 que la créance détenue, au 31 décembre 2000, par les régimes de sécurité sociale sur le fonds créé par l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale constituait, par la volonté même du législateur, un élément du patrimoine de ces régimes ;
27. Considérant que le principe de non-rétroactivité des lois n'a valeur constitutionnelle, en vertu de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, qu'en matière répressive ; que, si, dans les autres matières, le législateur a la faculté d'adopter des dispositions rétroactives, il ne peut le faire qu'en considération d'un motif d'intérêt général suffisant et sous réserve de ne pas priver de garanties légales des exigences constitutionnelles ;
28. Considérant que la disposition critiquée aurait pour effet de faire disparaître une créance sur l'Etat garantie par la loi et constituée à l'actif des bilans des régimes de sécurité sociale au 31 décembre 2000 ; qu'eu égard au montant de cette créance, à la situation financière de ces régimes, ainsi qu'à l'exigence constitutionnelle qui s'attache à l'équilibre financier de la sécurité sociale, le souci de remédier aux difficultés financières du fonds créé par l'article L. 131-8 du code de la sécurité sociale ne constitue pas un motif d'intérêt général suffisant pour remettre en cause rétroactivement les résultats d'un exercice clos ;
29. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le deuxième alinéa du II de l'article 12 doit être déclaré contraire à la Constitution ;
Sur l'article 18 :
30. Considérant que l'article 18 de la loi déférée insère plusieurs articles dans le code de la sécurité sociale et en modifie plusieurs autres, en vue de réorganiser complètement les rapports entre les organismes d'assurance maladie et les professions mentionnées aux articles L. 162-5, L. 162-9, L. 162-12-2, L. 162-14 et L. 322-5-2 du même code ;
31. Considérant que les députés requérants reprochent à ces dispositions de rompre l'égalité entre professionnels de santé en ce que « le pouvoir unilatéral des caisses de prendre des mesures de sanction (application des lettres clés flottantes) est supprimé pour les professions placées sous une convention et maintenu pour les autres » ;
32. Considérant que les sénateurs requérants soutiennent, quant à eux, que l'article 18 a été adopté à l'issue d'une procédure irrégulière ; que, dans un premier temps, « il s'agissait, selon les propres termes du Gouvernement, d'un "amendement d'esquisse", comprenant deux modestes paragraphes » ; que, dans un second temps, « l'article 18 s'est transformé en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale en un dispositif de quinze paragraphes occupant six pages de la petite loi » ; qu'ainsi, selon les requérants, la procédure suivie par le Gouvernement n'aurait tendu qu'à contourner la jurisprudence du Conseil constitutionnel relative à l'introduction de dispositions nouvelles après la réunion de la commission mixte paritaire ;
33. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées des articles 39, 44 et 45 de la Constitution que le droit d'amendement peut, sous réserve des limitations posées aux deuxième, troisième et quatrième alinéas de l'article 45, s'exercer à chaque stade de la procédure législative ; que le deuxième alinéa de celui-ci précise en particulier que la commission mixte paritaire est « chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion » ;
34. Considérant qu'il ressort de l'économie de l'article 45 que des adjonctions ne sauraient, en principe, être apportées au texte soumis à la délibération des assemblées après la réunion de la commission mixte paritaire ; qu'en effet, s'il en était ainsi, des mesures nouvelles, résultant de telles adjonctions, pourraient être adoptées sans avoir fait l'objet d'un examen lors des lectures antérieures à la réunion de la commission mixte paritaire et, en cas de désaccord entre les assemblées, sans être soumises à la procédure de conciliation confiée par l'article 45 de la Constitution à cette commission ; qu'il ressort en outre du deuxième alinéa de cet article que des dispositions adoptées en termes identiques avant la réunion de la commission mixte paritaire ne sauraient, en principe, être modifiées après cette réunion ;
35. Considérant, en conséquence, que les seuls amendements susceptibles d'être adoptés après la réunion de la commission mixte paritaire doivent être soit en relation directe avec une disposition restant en discussion, soit dictés par la nécessité de respecter la Constitution, d'assurer une coordination avec d'autres textes en cours d'examen au Parlement ou de corriger une erreur matérielle ; que, par suite, à ce stade de la discussion parlementaire, doivent être regardés comme adoptés selon une procédure irrégulière les amendements qui ne remplissent pas l'une ou l'autre de ces conditions ;
36. Considérant que l'article 18 ne présente de relation directe qu'avec l'un des articles introduits dans le texte en première lecture, numéroté 10 A en cours d'examen ; que ce dernier est issu d'un amendement gouvernemental déposé la veille de son adoption par l'Assemblée nationale et n'évoque que de façon vague et succincte des « engagements collectifs et individuels, le cas échéant pluriannuels, portant notamment sur l'organisation des soins, sur l'évolution des pratiques et de l'activité des professions concernées » ; que l'amendement insérant l'article 10 A dans le texte de la loi a été présenté par le Gouvernement lui-même comme « un amendement d'esquisse » dont la portée serait déterminée à une étape ultérieure de la procédure législative ; que ce n'est qu'en nouvelle lecture, à la suite d'un amendement déposé par le Gouvernement devant l'Assemblée nationale, que le contenu de l'article 10 A a été présenté ;
37. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'article 10 A a été remplacé après la réunion de la commission mixte paritaire par des dispositions qui, compte tenu de leur portée et de leur ampleur, doivent être considérées comme nouvelles ; que son adoption n'était dictée ni par la nécessité de respecter la Constitution, ni par celle d'assurer une coordination avec d'autres textes en cours d'examen au Parlement ou de corriger une erreur matérielle ;
38. Considérant qu'il y a lieu, dès lors, de déclarer l'article 10 A, devenu 18, contraire à la Constitution ;
Sur l'article 20 :
39. Considérant que l'article 20 a pour objet de modifier l'article L. 245-2 du code de la sécurité sociale, relatif au calcul de la contribution des entreprises de préparation des médicaments, en augmentant les taux de cette contribution et en modifiant ses règles d'abattement ;
En ce qui concerne l'incompétence négative du législateur et le défaut d'intelligibilité de la loi :
40. Considérant que les députés requérants estiment que le législateur est resté en deçà de sa compétence en ne déterminant pas avec précision l'assiette de la taxe et, en particulier, en laissant au pouvoir réglementaire le soin de définir les « frais de prospection et d'information » ; que, pour les mêmes raisons, la loi serait inintelligible et aurait pour effet de restreindre l'exercice des « libertés de communication, de publicité, de réunion et d'entreprendre » ;
41. Considérant que le III de l'article 20 de la loi déférée se borne à compléter le premier alinéa de l'article L. 245-2 du code de la sécurité sociale pour appliquer à l'assiette de la contribution en cause un abattement de 3 % destiné à prendre en compte les dépenses de « pharmaco-vigilance » mentionnées à l'article L. 5122-11 du code de la santé publique ; qu'il ne modifie aucun autre élément de l'assiette ; que, par suite, les griefs tirés de ce que cette disposition porterait atteinte à l'article 34 de la Constitution et à l'objectif d'intelligibilité de la loi manquent en fait ;
En ce qui concerne la méconnaissance du principe de nécessité de l'impôt :
42. Considérant que les députés requérants soutiennent que le principe de nécessité de l'impôt n'est pas respecté ; qu'en particulier « la pénalisation fiscale des dépenses de promotion des entreprises pharmaceutiques a pour effet de restreindre leur liberté de communiquer des informations médicales ainsi que la liberté des prescripteurs de recevoir celles-ci » ; que « l'exercice des libertés constitutionnelles en cause participe d'une démarche de santé publique et, comme telle, de la protection constitutionnelle de la santé visée à l'alinéa 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 » ;
43. Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la Déclaration de 1789 : « Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique... » ; qu'en vertu du onzième alinéa du Préambule de 1946, la Nation garantit à tous la protection de la santé ;
44. Considérant que le I de l'article 20 de la loi déférée procède à une augmentation des taux d'imposition applicables à la contribution due par les laboratoires pharmaceutiques selon un barème comportant quatre tranches, lesquelles sont fonction du rapport entre les dépenses de prospection et d'information qu'ils ont engagées à l'égard des praticiens et le chiffre d'affaires hors taxes qu'ils ont réalisé en France ; que cette augmentation a pour double objectif de faire contribuer les entreprises exploitant des spécialités pharmaceutiques au financement de l'assurance maladie et de prévenir les dépenses de médicaments injustifiées ; qu'en adoptant cette disposition, le législateur n'a porté atteinte ni au principe de nécessité de l'impôt posé par l'article 14 de la Déclaration de 1789 ni à la protection de la santé telle qu'elle est garantie par le Préambule de 1946 ;
En ce qui concerne la rupture du principe d'égalité devant les charges publiques :
45. Considérant qu'il est reproché au même article 20 de méconnaître le principe d'égalité devant les charges publiques ainsi que le principe d'égalité entre laboratoires pharmaceutiques ; que, selon les requérants, la détermination des nouveaux taux de cette contribution, « fortement progressifs », ne prendrait en compte « ni les différences de situations objectives et appréciables » existant entre les entreprises redevables, « ni leurs capacités contributives respectives » ; qu'elle constituerait une « incitation forte à la réduction des personnels affectés aux activités de prospection » et porterait atteinte, par suite, « au droit au travail de ces salariés proclamé par l'alinéa 5 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 » ; qu'elle avantagerait « les redevables réalisant les plus gros chiffres d'affaires » et inciterait, en outre, les laboratoires pharmaceutiques à augmenter leur chiffre d'affaires, « contredisant par là même l'objectif que s'est fixé le législateur de maîtrise des dépenses de santé » ; qu'enfin ses effets de seuil seraient excessifs ;
46. Considérant qu'il appartient au législateur, lorsqu'il institue une imposition, d'en déterminer librement l'assiette et le taux, sous réserve du respect des principes et règles de valeur constitutionnelle et compte tenu des caractéristiques de l'imposition en cause ; qu'en particulier, pour assurer le respect du principe d'égalité, il doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose ;
47. Considérant que la disposition contestée modifie les taux des trois tranches supérieures de la contribution en cause en les faisant passer respectivement de 15 %, 18 % et 21 % à 17 %, 25 % et 31 % ; que le choix de tels taux satisfait à l'exigence d'objectivité et de rationalité au regard du double objectif que s'est assigné le législateur ; qu'il n'implique, contrairement à ce qui est allégué, aucun effet de seuil ; qu'il ne porte pas atteinte au « droit d'obtenir un emploi » mentionné au cinquième alinéa du Préambule de 1946 et n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation ; qu'en outre, eu égard, notamment, à la circonstance que sont exonérées de cette contribution, en application de l'article L. 245-4 du code de la sécurité sociale, les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à cent millions de francs, l'article 20 ne crée aucune rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ;
48. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'article 20 de la loi déférée n'est pas contraire à la Constitution ;
Sur l'article 42 :
49. Considérant que l'article 42 de la loi déférée prévoit que le « Fonds national d'assurance maladie de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés participe de façon exceptionnelle en 2001, à hauteur de 1,3 milliard de francs, au financement du fonds de concours créé en vue de l'achat, du stockage et de la livraison par l'Etat de traitements pour les pathologies résultant d'actes terroristes » ;
50. Considérant que les sénateurs requérants font grief à cette disposition de mettre à la charge des assurés de la Caisse nationale d'assurance maladie une dépense relevant du budget de l'Etat, en violation tant du principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques que du douzième alinéa du Préambule de 1946, aux termes duquel : « La Nation proclame la solidarité et l'égalité de tous les Français devant les charges qui résultent des calamités nationales » ;
51. Considérant, en premier lieu, que le fonds de concours visé à l'article 42 a pour objet, face à la menace terroriste, de doter la collectivité nationale, dans les meilleurs délais, d'un dispositif de stockage et de distribution de médicaments permettant de lutter contre la propagation massive de maladies contagieuses ; que, par la création d'un tel dispositif, le législateur poursuit, dans l'intérêt général, des objectifs de sauvegarde de la santé publique ; qu'ainsi, la participation à ce fonds de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés, prévue par l'article 42, n'est pas étrangère à ses missions ;
52. Considérant, en second lieu, que les ressources de la Caisse proviennent, pour près de la moitié, d'impositions de toutes natures ; que, par ailleurs, les cotisations qui lui sont versées sont perçues pour le compte de plus de 80 % des assurés sociaux ; que, dans ces conditions, le législateur pouvait, sans méconnaître le principe d'égalité de tous les citoyens devant les charges publiques ni le principe de solidarité nationale, prévoir à titre exceptionnel une contribution majoritaire de la Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés au financement du fonds en cause ;
53. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que doivent être rejetés les griefs dirigés contre l'article 42 de la loi déférée ;
Sur l'article 56 :
54. Considérant que les I, II et III de l'article 55 de la loi déférée insèrent dans le code du travail des dispositions ayant pour objet de créer au bénéfice des salariés, en cas de naissance ou d'adoption, un « congé de paternité » entraînant la suspension du contrat de travail ; que les IV, V, VI et VII du même article ouvrent aux agents de la fonction publique de l'Etat, de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, ainsi qu'aux militaires, le droit à un congé de paternité « d'une durée égale à celle prévue par la législation sur la sécurité sociale », et, selon le cas, « avec traitement » ou « avec solde » ; que le XI confie à l'assurance maternité « l'octroi des indemnités journalières visées à l'article L. 331-8 pour le compte de la Caisse nationale des allocations familiales et contre remboursement dans les conditions prévues à l'article L. 223-1 » ; que l'article L. 331-8 du code de la sécurité sociale, créé par le XII, détermine les conditions du versement d'indemnités journalières par l'assurance maternité aux assurés relevant du régime général, afin de compenser la perte de salaire résultant, pour eux, de la prise du congé de paternité ; que les autres dispositions de l'article 55 ont pour principal objet d'étendre aux travailleurs et assurés relevant de législations particulières le droit à un congé équivalent et au versement d'une indemnité compensatrice ;
55. Considérant que l'article 56 de la loi déférée met à la charge de la Caisse nationale des allocations familiales le financement de la prestation afférente au congé de paternité ; qu'à cet effet, il complète l'article L. 223-1 du code de la sécurité sociale par trois alinéas qui déterminent les modalités du remboursement, par cette caisse, des organismes ou des employeurs ayant servi cette prestation aux assurés ;
56. Considérant que les sénateurs requérants reprochent à l'article 56 de transférer à une branche de la sécurité sociale une dépense de rémunération des fonctionnaires incombant par nature à l'Etat ; qu'en outre, selon eux, cette disposition méconnaîtrait le 3o du I de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale et porterait ainsi atteinte au principe d'autonomie des branches ;
57. Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la sécurité sociale : « La Caisse nationale des allocations familiales a pour rôle : 1o d'assurer le financement de l'ensemble des régimes de prestations familiales... » ; que les articles 55 et 56 de la loi déférée ont pour objet de créer au bénéfice des personnes concernées, quelle que soit la législation sociale dont elles relèvent, un droit à congé en cas de naissance ou d'adoption ; que la prestation en cause revêt, dès lors, le caractère d'une prestation familiale dont le financement incombe à la Caisse nationale des allocations familiales, tant à l'égard des salariés que, dans la limite du plafond de la sécurité sociale, à l'égard des fonctionnaires, dont le traitement est maintenu par la loi pendant la durée du congé ;
58. Considérant, d'une part, que le maintien du traitement ou de la solde assuré par l'Etat à ses agents, au titre du congé de paternité, sera compris dans les dépenses de personnel figurant au budget de l'Etat ; qu'il n'est donc pas porté atteinte au principe d'universalité budgétaire, qui implique que la rémunération des agents de l'Etat doit être retracée dans son budget ;
59. Considérant, d'autre part, qu'il était loisible au législateur, dans un but de simplification administrative, de confier aux organismes d'assurance maladie de la sécurité sociale la gestion des indemnités journalières afférentes au congé de paternité, tout en mettant à la charge de la Caisse nationale des allocations familiales le coût global du congé de paternité ; qu'en conséquence, les dispositions critiquées ne portent pas atteinte aux prescriptions de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale ; que, pour les mêmes motifs, le grief tiré d'une atteinte au principe d'autonomie des branches de la sécurité sociale manque en fait ;
60. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les griefs dirigés contre l'article 56 de la loi déférée doivent être rejetés ;
Sur l'article 60 :
61. Considérant que l'article 60 a pour objet de porter de 15 % à 30 % la prise en charge par la Caisse nationale des allocations familiales des dépenses du Fonds de solidarité vieillesse au titre des majorations de pension accordées en fonction du nombre d'enfants ;
62. Considérant que les députés requérants soutiennent que cette disposition n'est conforme ni au principe de l'autonomie des branches découlant du 3o du I de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale, ni à l'exigence d'une politique de solidarité envers les familles résultant des dixième et onzième alinéas du préambule de la Constitution de 1946 ; que les sénateurs requérants reprochent à l'article 60 de rompre l'égalité entre les familles au détriment de celles qui ont des enfants à charge et au bénéfice de celles qui en ont eu ;
63. Considérant qu'aux termes du dixième alinéa du Préambule de 1946 : « La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement » ; que, selon son onzième alinéa, la Nation « garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence » ;
64. Considérant que l'existence de branches de la sécurité sociale est reconnue par l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale ; que, si l'autonomie financière des branches ne constitue pas, par elle-même, un principe de valeur constitutionnelle, le législateur ne saurait décider des transferts de ressources et de charges entre branches tels qu'ils compromettraient manifestement la réalisation de leurs objectifs et remettraient ainsi en cause tant l'existence des branches que les exigences constitutionnelles qui s'attachent à l'exercice de leurs missions ;
65. Considérant que les majorations de pension accordées en fonction du nombre d'enfants s'analysent comme un avantage familial différé qui vise à compenser, au moment de la retraite, les conséquences financières des charges de famille ; que, dans ces conditions, le grief tiré d'une atteinte à l'autonomie des branches doit être écarté ; qu'eu égard au montant limité du transfert de charges critiqué, l'article 60 ne porte pas atteinte à l'égalité entre familles selon qu'elles élèvent des enfants ou qu'elles l'ont fait dans le passé ; qu'enfin, la disposition contestée n'est pas contraire aux dispositions précitées du Préambule de 1946 ;
Sur l'article 76 :
66. Considérant que l'article 76 de la loi déférée fixe, pour l'application du 5o du I de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale, les limites dans lesquelles peuvent être couverts par des ressources non permanentes les besoins de trésorerie de cinq régimes obligatoires de base ;
67. Considérant que, selon les sénateurs requérants, les limites ainsi fixées seraient soit inutiles, soit surestimées, soit exagérément optimistes ; que, dès lors, elles seraient contraires à la fois au principe de sincérité et aux dispositions précitées du code de la sécurité sociale, qui en feraient des « indicateurs d'alerte » pour le Parlement ;
68. Considérant qu'il ne ressort pas des éléments fournis au Conseil constitutionnel que les plafonds de ressources non permanentes fixés à l'article 76 soient, eu égard à la variabilité des soldes de trésorerie en cours d'année, entachés d'une erreur manifeste ;
Sur les dispositions ne pouvant figurer dans la loi :
69. Considérant que les députés auteurs de la première saisine font grief aux dispositions des articles 31, 73 et 75 d'être étrangères au domaine des lois de financement de la sécurité sociale ; que, pour leur part, les sénateurs auteurs de la seconde saisine considèrent qu'en tout ou partie les dispositions des articles 30, 59, 68 et 73 ne peuvent y figurer ;
70. Considérant qu'aux termes du dix-neuvième alinéa de l'article 34 de la Constitution : « Les lois de financement de la sécurité sociale déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique » ;
71. Considérant que le I de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi susvisée du 22 juillet 1996, qui constitue la loi organique prévue par l'article 34 de la Constitution, dispose :
« Chaque année, la loi de financement de la sécurité sociale :
« 1o Approuve les orientations de la politique de santé et de sécurité sociale et les objectifs qui déterminent les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale ;
« 2o Prévoit, par catégorie, les recettes de l'ensemble des régimes obligatoires de base et des organismes créés pour concourir à leur financement ;
« 3o Fixe, par branche, les objectifs de dépenses de l'ensemble des régimes obligatoires de base comptant plus de vingt mille cotisants actifs ou retraités titulaires de droits propres ;
« 4o Fixe, pour l'ensemble des régimes obligatoires de base, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie ;
« 5o Fixe, pour chacun des régimes obligatoires de base visés au 3o ou des organismes ayant pour mission de concourir à leur financement qui peuvent légalement recourir à des ressources non permanentes, les limites dans lesquelles ses besoins de trésorerie peuvent être couverts par de telles ressources » ;
72. Considérant que le III du même article prévoit en son premier alinéa : « Outre celles prévues au I, les lois de financement de la sécurité sociale ne peuvent comporter que des dispositions affectant directement l'équilibre financier des régimes obligatoires de base ou améliorant le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale » ;
73. Considérant que l'article 31 pose le principe de la réduction du temps de travail dans la fonction publique hospitalière ; qu'il renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin d'en fixer les modalités précises ; que cette diminution de la durée hebdomadaire de travail implique, dès l'année 2002, la création de nombreux emplois dans les établissements publics hospitaliers ; qu'au demeurant, le financement de cette disposition est pris en compte dans l'objectif national de dépenses d'assurance maladie à hauteur de trois milliards de francs, correspondant à la part prise en charge par l'assurance maladie dans le recrutement d'agents et le financement d'heures supplémentaires ; qu'ainsi, l'article 31 a une incidence directe sur l'équilibre financier des régimes obligatoires de base de la branche maladie ; que, par suite, doit être rejeté le grief tiré de ce que l'article 31 ne trouverait pas sa place dans la loi de financement de la sécurité sociale ;
74. Considérant que l'article 73 a pour objectif de moderniser et de simplifier le recouvrement des cotisations sociales ; qu'à cet effet, il autorise notamment la transmission des déclarations sociales et le paiement des cotisations par voie électronique ; qu'en raison tant des investissements nécessaires à la mise en place de ce dispositif que de l'amélioration du recouvrement des cotisations sociales qui en est attendue, l'article 73 aura une incidence significative sur l'équilibre financier des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale dès 2002 ; que, par suite, cet article est au nombre de ceux qui peuvent figurer dans une loi de financement de la sécurité sociale ;
75. Considérant que l'article 75, qui réforme les missions et les modes de gestion de l'Union des caisses nationales de sécurité sociale, a pour objet de donner à cet organisme les moyens d'exercer ses missions afin de pallier la carence actuelle de ses instances dirigeantes liée à la décision prise par certains partenaires sociaux de ne plus siéger à son conseil d'administration ; qu'il permettra ainsi de reprendre les négociations collectives, au niveau national, avec les représentants des quelque 200 000 agents des organismes du régime général de sécurité sociale ; que de telles négociations ont des incidences directes sur la rémunération de ces personnels et, par suite, pour une part significative, sur les coûts de fonctionnement des organismes du régime général retracés dans les objectifs de dépenses mentionnés au 3o du I de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale ; que, dès lors, l'article 75 a sa place dans la loi déférée ;
76. Considérant, en revanche, que le III de l'article 30 de la loi déférée modifie la définition des ressources des bénéficiaires de l'allocation personnalisée d'autonomie, hébergés en établissement, prises en compte pour le calcul de cette allocation ; qu'ainsi que le soutiennent les sénateurs requérants, cette disposition n'affecte pas directement l'équilibre financier des régimes obligatoires de base de la sécurité sociale et, en principe, n'aurait pas sa place dans la loi déférée ;
77. Considérant cependant que la déclaration de non-conformité du III de l'article 30 aurait pour effet de faire subsister dans la législation en vigueur une erreur matérielle conduisant à une disparité de traitement, contraire dans le cas d'espèce au principe d'égalité, entre les allocataires, selon qu'ils sont hébergés en établissement ou qu'ils résident à leur domicile ; que, cette disposition étant ainsi dictée par la nécessité de respecter la Constitution, il n'y a pas lieu de la déclarer contraire à celle-ci ;
78. Considérant qu'aux termes de l'article 59 de la loi déférée : « Le compte de réserves affectées au financement du Fonds d'investissement pour le développement des structures d'accueil de la petite enfance créé par l'article 23 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (no 2000-1257 du 23 décembre 2000) est abondé de 228,67 millions d'euros. - Ce montant est prélevé sur l'excédent de l'exercice 2000 de la branche famille du régime général de la sécurité sociale » ;
79. Considérant que le I précité de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale énumère les dispositions devant figurer dans les lois de financement de la sécurité sociale ; que son III précise la nature des dispositions pouvant figurer dans ces lois ; qu'aux termes du II du même article : « La loi de financement de l'année et les lois de financement rectificatives ont le caractère de lois de financement de la sécurité sociale. - Seules les lois de financement peuvent modifier les dispositions prises en vertu des 1o à 5o du I » ; que cette dernière disposition ne fait pas obstacle à ce que la loi de financement de l'année à venir contienne des dispositions s'appliquant à l'exercice en cours, s'il est encore temps de les mettre en oeuvre avant la clôture de l'exercice ;
80. Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que sont étrangères au domaine des lois de financement de la sécurité sociale les mesures autres que celles énumérées au I de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale, lorsqu'elles n'affectent directement ni l'équilibre financier des régimes obligatoires de base pour l'année à venir, ni celui de l'année en cours et qu'elles n'ont pas non plus pour objet d'améliorer le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale ;
81. Considérant que l'article 59 de la loi déférée n'aurait d'incidence que sur les résultats de l'exercice 2000 ; qu'en particulier, ses effets ne seraient pris en compte ni dans l'objectif de dépenses pour 2002 de la branche famille figurant à l'article 69, ni dans l'objectif de dépenses révisé pour 2001 de la même branche figurant à l'article 70 ; que l'article 59 n'a pas pour objet d'améliorer le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale ;
82. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'article 59, dont les dispositions constituent un ensemble indivisible, doit être déclaré contraire à la Constitution ;
83. Considérant qu'aux termes de l'article 68 de la loi déférée : « La Caisse nationale des allocations familiales verse en 2002 la somme de 762 millions d'euros au Fonds de réserve pour les retraites mentionné à l'article L. 135-6 du code de la sécurité sociale. Cette somme est prélevée sur le résultat excédentaire 2000 de la branche famille, après affectation d'une fraction de celui-ci au Fonds d'investissement pour le développement des structures d'accueil de la petite enfance créé par l'article 23 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 (no 2000-1257 du 23 décembre 2000). Un arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget fixe la date à laquelle ce versement est effectué » ;
84. Considérant que sont étrangères au domaine des lois de financement de la sécurité sociale, ainsi qu'il a été dit à propos de l'article 59 de la loi déférée, les mesures autres que celles énumérées au I de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale, lorsqu'elles n'affectent directement ni l'équilibre financier des régimes obligatoires de base pour l'année à venir, ni celui de l'année en cours et qu'elles n'ont pas non plus pour objet d'améliorer le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale ;
85. Considérant que la mesure contestée, qui ne relève d'aucune des catégories mentionnées au I de l'article LO 111-3, n'aurait d'incidence que sur les comptes de l'exercice 2000 des régimes obligatoires de base ; qu'elle n'a pas pour objet d'améliorer le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale ; qu'il y a lieu, dès lors, de déclarer contraire à la Constitution l'article 68 dont les dispositions constituent un ensemble indivisible ;
86. Considérant qu'aux termes de l'article 33 de la loi déférée : « Dans un délai de trois mois après la publication de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport exposant les conditions dans lesquelles les techniciens des laboratoires hospitaliers pourraient être classés en catégorie B active de la fonction publique hospitalière » ; que cette disposition, qui n'a pas d'incidence sur l'équilibre financier des régimes obligatoires de base, n'a ni pour objet, ni pour effet d'améliorer le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale ; que l'article 33 n'a donc pas sa place dans la loi déférée ;
87. Considérant que l'article 48 permet au demandeur qui agit contre le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante « de se faire assister ou représenter par son conjoint, un ascendant ou un descendant en ligne directe, ou un avocat ou un délégué des associations de mutilés et invalides du travail les plus représentatives » ; que l'article 50 reconnaît comme accident de trajet pris en charge au titre des accidents du travail l'accident survenu à un salarié pendant le trajet entre les établissements de deux employeurs d'un même groupement d'employeurs ; que l'article 51 prend en compte, pour la définition des accidents de trajet des salariés agricoles, les détours entre le domicile et le lieu de travail rendus nécessaires dans le cadre d'un « covoiturage » régulier ; qu'aucune de ces diverses dispositions n'affecte de façon significative l'équilibre financier des régimes obligatoires de base ;
88. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les articles 48, 50 et 51 de la loi déférée, dont aucun n'améliore le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, doivent être déclarés non conformes à la Constitution comme étrangers au domaine des lois de financement de la sécurité sociale ;
89. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune autre question de conformité à la Constitution,
Décide :
Art. 1er. - Sont déclarés contraires à la Constitution le deuxième alinéa du II de l'article 12 et les articles 18, 33, 48, 50, 51, 59 et 68 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002.
Art. 2. - La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 décembre 2001, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Olivier Dutheillet de Lamothe, Pierre Joxe, Pierre Mazeaud, Mmes Monique Pelletier, Dominique Schnapper et Simone Veil.