J.O. Numéro 247 du 24 Octobre 2000       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet
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Décision no 2000-971 du 22 septembre 2000 rejetant la demande de Cégétel tendant à ce que soit prononcée une mise en demeure à l'encontre de France Télécom


NOR : ARTT0000489S


L'Autorité de régulation des télécommunications,
Vu le code des postes et télécommunications, et notamment ses articles L. 36-11, D. 99-6 et D. 99-16 ;
Vu la décision no 99-528 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 18 juin 1999 portant règlement intérieur ;
Vu la décision no 99-490 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 9 juin 1999 portant adoption des lignes directrices relatives aux procédures opérationnelles de la présélection ;
Vu la décision no 99-1077 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 8 décembre 1999 précisant les conditions et les délais de mise en oeuvre de la sélection du transporteur appel par appel et de la présélection, homologuée par l'arrêté ministériel du 23 mars 2000 ;
Vu la demande enregistrée le 18 février 2000 présentée par Cégétel, dont le siège social est situé 1, place Carpeaux, 92915 Paris-La Défense Cedex, représentée par M. Philippe Germond, directeur général, et tendant à ce que l'Autorité mette en demeure la société France Télécom, dont le siège social est situé 6, place d'Alleray, 75505 Paris Cedex 15, représentée par M. Gérard Moine, directeur des relations extérieures, de se conformer aux dispositions de l'article D. 99-6 du code des postes et télécommunications ; Cégétel produit à l'appui de sa demande deux courriers envoyés par France Télécom à deux abonnés ayant demandé la présélection d'un opérateur concurrent ; Cégétel dénonce le fait que l'un des deux courriers émane d'une agence commerciale. Cette pratique lui semble enfreindre les dispositions de l'article D. 99-6 du code des postes et télécommunications ;
Vu le courrier de l'Autorité en date du 23 mars 2000 adressé à la société Cégétel accusant réception de sa demande ;
Vu le courrier de l'Autorité en date du 23 mars 2000 notifiant à la société France Télécom l'ouverture d'une procédure de sanction à son encontre ;
France Télécom, représentée par Mmes Laurence Coste et Pierrette Mesnard et M. Michel Seiler, ayant été entendue à sa demande le 14 avril 2000 par le rapporteur ;
Vu le courrier de France Télécom enregistré le 10 mai 2000 concluant au rejet de la saisine, les dispositions de l'article D. 99-6 du code des postes et télécommunications n'ayant pas été méconnues ;
En ce qui concerne la procédure qui, partant d'une demande de présélection d'un client, aboutit à l'envoi du courrier en question à ce client, France Télécom précise que deux procédures ont été mises en place pour l'envoi du courrier : l'une nationale, l'autre régionale.
La première procédure donne lieu à l'édition du courrier sur une imprimante située dans un service logistique dépendant d'une entité nationale, chargée par ailleurs de l'envoi de factures. Ni cette entité ni le service logistique ne sont en contact avec les clients. Le courrier fourni par Cégétel sans référence à une agence commerciale est issu de cette procédure.
La seconde procédure donne lieu à l'édition du courrier sur une imprimante située dans un service logistique d'une agence commerciale régionale dont dépend le client. France Télécom estime que cette solution est conforme aux dispositions de l'article D. 99-6 du code des postes et télécommunications dans la mesure où le service logistique relève du « back office de l'agence chargée de la mise sous pli et de l'envoi des courriers et n'est à aucun moment en contact avec le client ».
France Télécom ajoute qu'elle prévoit de généraliser la procédure d'envoi local, d'une part, dans une démarche d'harmonisation des applications informatiques et, d'autre part, à cause d'« un certain nombre » de réclamations émanant de ses abonnés. Le courrier issu de la procédure nationale ne comportant aucune référence permettant à l'abonné de contacter France Télécom, les réclamations seraient ainsi souvent mal orientées. France Télécom indique en conséquence avoir donné des consignes pour orienter les réclamations vers les agences commerciales et prévoit de faire figurer sur les courriers « présélection » un numéro de contact (1014 ou 1016).
Le collège en ayant délibéré le 20 septembre 2000, hors la présence du rapporteur, du rapporteur adjoint et des agents de l'Autorité,
Adopte la présente délibération fondée sur les faits et moyens exposés ci-après :
Aux termes des dispositions de l'article L. 36-11 du code des postes et télécommunications : « L'Autorité de régulation des télécommunications peut, soit d'office, soit à la demande du ministre chargé des télécommunications, d'une organisation professionnelle, d'une association agréée d'utilisateurs ou d'une personne physique ou morale concernée, sanctionner les manquements qu'elle constate, de la part des exploitants de réseaux ou des fournisseurs de services de télécommunications, aux dispositions législatives et réglementaires afférentes à leur activité ou aux décisions prises pour en assurer la mise en oeuvre. (...). »
Aux termes des dispositions de l'article D. 99-6 du même code : « Les opérateurs disposant d'informations dans le cadre d'une négociation ou de la mise en oeuvre d'un accord d'interconnexion ne peuvent les utiliser qu'aux seules fins explicitement prévues lors de leur communication. En particulier, ces informations ne sont pas communiquées à d'autres services, filiales ou partenaires pour lesquels elles pourraient constituer un avantage concurrentiel. »
Au surplus, les lignes directrices relatives aux procédures opérationnelles de la présélection adoptées par l'Autorité le 9 juin 1999 précisent que « conformément aux dispositions de l'article D. 99-6 du code des postes et télécommunications, l'envoi du courrier ne doit pas avoir pour conséquence d'informer, directement ou indirectement, les services commerciaux de France Télécom en relation avec le client final des demandes de présélection des clients ».
La présélection est un mécanisme permettant aux utilisateurs de sélectionner par défaut un opérateur transportant leurs communications téléphoniques longue distance avec la numérotation habituelle commençant par 0.
La présélection est un service d'interconnexion que France Télécom, opérateur inscrit sur la liste établie en application du 7o de l'article L. 36-7 du code des postes et télécommunications, est tenue de fournir aux autres opérateurs, depuis janvier 2000, en application de l'article D. 99-16 modifié du code des postes et télécommunications.
L'activation de la présélection sur une ligne d'abonné nécessite des échanges d'informations et de commandes entre les opérateurs présélectionnés et France Télécom.
Il résulte de l'instruction que, depuis l'introduction de la présélection, France Télécom envoie aux abonnés ayant demandé à présélectionner un autre opérateur un courrier type qui les informe que la présélection a été activée sur leur ligne, que leur contrat avec France Télécom a été modifié, et leur précise qui, de France Télécom et de l'opérateur présélectionné, achemine quels types d'appels. Or il ressort des pièces versées au dossier par Cégétel, dans le cadre de sa demande de mise en demeure, que l'un de ces courriers émane d'une agence commerciale de France Télécom, ce que cette dernière ne conteste pas.
Il résulte cependant également de l'instruction que les courriers envoyés aux abonnés ayant demandé à présélectionner un opérateur concurrent sont édités, au terme d'une procédure entièrement automatisée, dans un service logistique chargé de la mise sous pli et de l'envoi desdits courriers.
L'utilisation de papier à en-tête de l'agence commerciale sur le courrier versé au dossier ne prouve pas que celui-ci ait transité par un service, autre que logistique, pour lequel il aurait pu représenter un quelconque avantage concurrentiel. Il est à noter que ce courrier ne comporte pas de signature manuscrite. La seule circonstance que l'envoi des courriers relatifs à la présélection soit matériellement effectué depuis une agence commerciale de France Télécom ne saurait être regardée comme impliquant nécessairement que les services commerciaux de France Télécom en relation avec le client final soient informés, directement ou indirectement, d'une demande de présélection.
Il s'ensuit que la méconnaissance alléguée des dispositions de l'article D. 99-6 du code des postes et télécommunications n'étant pas établie, il n'y a donc pas lieu de mettre en demeure France Télécom de respecter les dispositions réglementaires susmentionnées. En conséquence, la demande de la société Cégétel tendant à ce que France Télécom soit mise en demeure de se conformer aux dispositions de l'article D. 99-6 du code des postes et télécommunications doit être rejetée.
L'Autorité souligne toutefois que la procédure d'envoi des courriers relatifs à la présélection à partir d'une agence commerciale lui semble présenter davantage de risques que celle au niveau national. Elle appelle donc l'attention de France Télécom sur la nécessité de prendre toutes les précautions nécessaires pour que la procédure d'envoi à partir des agences commerciales garantisse un traitement des demandes de présélection respectant les dispositions de l'article D. 99-6 du code des postes et télécommunications,
Décide :


Art. 1er. - La demande de la société Cégétel tendant à ce que soit prononcée une mise en demeure à l'encontre de France Télécom est rejetée.

Art. 2. - Le chef du service juridique de l'Autorité de régulation des télécommunications est chargé de la notification de la présente décision à la société Cégétel et à la société France Télécom. Elle sera rendue publique, sous réserve des secrets protégés par la loi.

Fait à Paris, le 22 septembre 2000.


Le président,
J.-M. Hubert