L'Autorité de régulation des télécommunications,
Vu le code des postes et télécommunications, et notamment ses articles L. 33-1-V et L. 36-7 (6o) ;
Vu la décision 128/1999/CE du Parlement européen et du Conseil en date du 14 décembre 1998 relative à l'introduction coordonnée dans la Communauté d'un système de communications mobiles et sans fil (UMTS) de troisième génération ;
Vu la décision ERC/DEC (99) 25 de la CEPT en date du 29 novembre 1999 relative à une utilisation harmonisée du spectre pour les systèmes UMTS dans les bandes 1900-1980 MHz, 2010-2025 MHz et 2110-2170 MHz ;
La commission consultative des radiocommunications ayant été consultée le 14 septembre 1999, le 21 octobre 1999, le 25 novembre 1999 et le 27 janvier 2000 ;
Vu la décision no 2000-191 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 3 mars 2000 proposant au ministre chargé des télécommunications les modalités et les conditions d'attribution des autorisations pour l'introduction en France métropolitaine des systèmes mobiles de troisième génération ;
Vu la décision no 2000-273 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 15 mars 2000 portant rectification de l'annexe de la décision no 2000-191 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 3 mars 2000 proposant au ministre chargé des télécommunications les modalités et les conditions d'attribution des autorisations pour l'introduction en France métropolitaine des systèmes mobiles de troisième génération ;
Après en avoir délibéré le 28 juillet 2000,
Adopte la présente délibération fondée sur les faits et les motifs exposés ci-après :
1. Enjeux de l'introduction des systèmes mobiles
de troisième génération en France
Introduction
Les systèmes de communications mobiles sont aujourd'hui devenus une composante majeure du marché français et européen des télécommunications. L'exigence de mobilité, peu perceptible jusqu'au début des années quatre-vingt-dix, s'est rapidement affirmée pour constituer désormais la principale source de croissance du secteur des télécommunications.
La radiotéléphonie a également joué un rôle d'aiguillon en matière de libéralisation, puisque la plupart des pays d'Europe avaient ouvert ce domaine à la concurrence bien avant la date du 1er janvier 1998, date à laquelle il a été mis fin aux systèmes de monopoles nationaux pour la téléphonie fixe.
La France, comme ses principaux partenaires européens, a engagé avec détermination, depuis maintenant plus de deux ans, une réflexion sur la manière d'introduire, à l'horizon 2002, une nouvelle génération de systèmes mobiles qui, dans la continuité des systèmes GSM existants, permettra d'offrir au plus grand nombre une gamme très large et très diversifiée de services nouveaux.
Cette réflexion conduit aujourd'hui l'Autorité de régulation des télécommunications à proposer le lancement d'un appel à candidatures, destiné à sélectionner les opérateurs de système de troisième génération qui seront autorisés à déployer un réseau et à fournir les services, conformément aux dispositions prévues par le code des postes et télécommunications.
Les principaux objectifs à prendre en considération peuvent être énoncés comme suit :
- promouvoir le développement du marché du multimédia mobile, dans un sens conforme aux attentes du plus grand nombre ;
- assurer une compatibilité avec les systèmes mobiles existants ;
- permettre l'optimisation de la ressource spectrale disponible ;
- répondre aux préoccupations liées à l'investissement, à l'emploi et à l'aménagement du territoire.
1.1. Généralités sur les systèmes mobiles
de troisième génération
Les systèmes mobiles de troisième génération (3G) permettront d'enrichir considérablement l'offre de services de mobilité, grâce à l'introduction, au niveau des réseaux, de fonctionnalités et de capacités nouvelles telles que la transmission de données à haut débit.
Par rapport aux réseaux mobiles actuels, conçus essentiellement pour fournir un service vocal à bas débit, reposant sur la technologie de commutation de circuits, les réseaux de troisième génération devraient permettre aux utilisateurs d'accéder à une large gamme de services nouveaux, au premier rang desquels un accès rapide à internet, grâce à l'introduction progressive dans les réseaux mobiles de la technologie de commutation par paquets.
La Conférence mondiale des radiocommunications (CMR) de l'UIT de 1992 a désigné, au plan mondial, la bande de fréquences 1885-2025 MHz et 2110-2200 MHz, soit 230 MHz, comme bande d'accueil pour les services mobiles de troisième génération (IMT 2000). La partie la plus importante de cette bande (170 MHz) est réservée à la composante terrestre, la composante satellite ayant vocation à occuper la sous-bande 1980-2010 MHz et 2170-2200 MHz (60 MHz).
De plus, la Conférence mondiale des radiocommunications de 2000 a identifié des nouvelles bandes de fréquences utilisables à terme par les systèmes mobiles de troisième génération IMT 2000, notamment pour leur composante terrestre. Il s'agit de la bande 2520-2670 MHz ainsi que les bandes utilisées aujourd'hui par les systèmes mobiles de deuxième génération (GSM).
Au plan européen, le comité radio (ERC) de la Conférence européenne des postes et télécommunications (CEPT) a identifié en juin 1997 une bande dite « bande coeur » pour ces systèmes, à savoir 155 MHz pour la composante terrestre (les 170 MHz identifiés par l'UIT, moins 15 MHz utilisés par le DECT) et 60 MHz pour la composante satellite.
Le Parlement européen et le Conseil ont par ailleurs adopté, en décembre 1998, une décision sur l'introduction coordonnée des systèmes mobiles au sein de la Communauté, en vertu de laquelle (...) « Les Etats membres prennent toutes les mesures nécessaires pour permettre (...) l'introduction coordonnée et progressive de services UMTS sur leur territoire le 1er janvier 2002 au plus tard, et mettent en place un système d'autorisation pour l'UMTS le 1er janvier 2000 au plus tard ».
Dans le cadre des travaux de normalisation dont elle trace les grandes lignes, l'UIT a été amenée à choisir cinq interfaces radio terrestres pour les systèmes mobiles de troisième génération, qui se trouvent de ce fait « labellisées » IMT 2000. L'UMTS constitue la version privilégiée par le 3GPP, forum de normalisation qui regroupe plusieurs instituts de normalisation européen (ETSI), japonais (ARIB, TTC), coréen (TIA) et américain (T1), qui en élabore les spécifications techniques. La proposition ci-après reprend la formulation préconisée par la Commission européenne, à savoir que les réseaux 3G devront être conformes à une ou plusieurs normes d'interface radio terrestre de la famille IMT 2000 et qu'au moins l'un des réseaux devra être conforme à l'interface UMTS. L'UMTS devrait permettre d'assurer une compatibilité satisfaisante avec les systèmes GSM.
2. Les grandes étapes de la réflexion au niveau français
2.1. Les travaux du groupe CCR/UMTS
Dans le cadre de la commission consultative des radiocommunications (CCR), un groupe de travail spécialisé a été créé, en janvier 1998, avec pour mandat de remettre un rapport identifiant les points clés d'une introduction réussie des systèmes de troisième génération : modalités d'attribution des autorisations, calendrier de leur délivrance, mise à disposition des fréquences, identification des services. Le groupe a remis ses propositions en septembre 1998.
2.2. La consultation publique sur l'introduction de l'UMTS
Parmi les recommandations du groupe CCR/UMTS, figurait une invitation au lancement d'une large consultation publique destinée, d'une part, à mieux cerner les enjeux des futurs systèmes mobiles, notamment en termes de marchés et de services, et, d'autre part, à préciser les conditions et les modalités d'attribution des autorisations.
Cette consultation publique, lancée en février 1999, s'est achevée en mai 1999. Elle a permis à plus de trente acteurs du secteur, au premier rang desquels les industriels et les opérateurs de télécommunications, de s'exprimer. Trois enseignements majeurs ont pu être tirés de la consultation, dont la synthèse a été publiée en octobre dernier :
- la persistance d'incertitudes en matière d'émergence des nouveaux réseaux et services mobiles. Ces incertitudes portent à la fois sur les usages et la perception des contours du marché pour des services de type multimédia mobiles et sur les aspects techniques liés à la normalisation, avec comme corollaire une difficulté à percevoir le schéma économique qui pourrait présider à l'avènement de tels systèmes ;
- un optimisme, malgré tout, largement partagé sur les chances de succès des systèmes de troisième génération, appelés à rapprocher le monde du mobile et celui d'internet, pour former l'une des composantes essentielles de la société de l'information ;
- des attentes relativement précises vis-à-vis de la réglementation, qui doit, de l'avis général, se montrer souple, en raison des incertitudes, mais qui doit en même temps s'attacher à préserver les intérêts de deux catégories d'acteurs : les opérateurs, qui supporteront la charge d'investissements lourds et durables, et les fournisseurs de services et de contenu, appelés à participer activement à l'enrichissement des services, au profit des consommateurs.
La consultation a permis de confirmer une convergence de vues sur un grand nombre de points : nombre et champ géographique des autorisations, calendrier de délivrance, préférence exprimée en faveur de systèmes conformes à une norme définie par l'ETSI, quantité de spectre à attribuer par opérateur, organisation de la sélection par voie de soumission comparative plutôt que par enchères, évolution sans rupture du GSM vers les systèmes de troisième génération.
Sur la base des enseignements tirés de la consultation, des discussions ultérieures dans le cadre des réunions de la CCR et des contacts plus ciblés qu'elle a été amenée à nouer avec différents acteurs, l'Autorité a pu formaliser le contenu de la proposition qu'il lui incombe d'adresser au ministre concernant les modalités de la sélection des futurs opérateurs.
3. Le cadre réglementaire pour l'introduction
des systèmes mobiles de troisième génération
3.1. Portée de la proposition
Il est proposé de dissocier la délivrance des autorisations pour la composante terrestre des systèmes de troisième génération de celle des autorisations pour la composante satellitaire, pour laquelle les réflexions sont à ce stade peu avancées au plan international.
Pour ce qui est de la composante terrestre, il est proposé d'attribuer une quantité de fréquences égale à 2 x 15 MHz dans les bandes appariées et 5 MHz dans les bandes non appariées à chaque opérateur 3 G.
L'Autorité a noté que cette quantité de fréquences recueillait l'assentiment de la majorité des contributeurs de la consultation publique, dont certains ont tenu à rappeler qu'elle correspond à la recommandation du Forum UMTS formulée dans son rapport portant sur « la demande de spectre minimal par opérateur public de l'UMTS terrestre en phase initiale ».
Par ailleurs, comme le soulignait le rapport de la CCR/UMTS, cette quantité de fréquences permettra aux opérateurs d'établir une structure de réseau en trois couches (pico, micro et macrocellules) pour permettre d'écouler des débits élevés (384 kbit/s sur la couche macro et micro, et 2 Mbit/s sur les couches micro et pico).
En conséquence, et compte tenu de la quantité de fréquences disponibles pour les systèmes de troisième génération dans les bandes identifiées, il est proposé de limiter à quatre le nombre d'opérateurs autorisés sur une zone géographique donnée.
Au vu des réponses reçues dans le cadre de la consultation publique, il est proposé d'attribuer, dans un premier temps, des autorisations de portée métropolitaine. L'Autorité considère que l'attribution d'autorisations de portée régionale, sur le territoire métropolitain, conduirait à un usage peu efficace des ressources en fréquences.
La situation de la téléphonie mobile dans les départements d'outre-mer est actuellement à l'étude ; l'Autorité proposera donc dans un deuxième temps au ministre un schéma réglementaire d'attribution d'autorisations dans ces départements.
L'Autorité considère que le schéma d'attribution d'autorisations proposé permettra d'ouvrir davantage à la concurrence le marché des services mobiles dans notre pays.
Ce choix ne fait aucunement obstacle à l'attribution ultérieure d'autres autorisations, en fonction de l'évolution des contraintes liées à la disponibilité des fréquences.
Enfin, l'Autorité précisera, le moment venu, les conditions d'utilisation des fréquences des bandes non appariées qui n'auront pas été attribuées aux opérateurs 3 G, après avoir pris en compte le développement du marché et celui de la normalisation, ainsi que des recommandations du comité radio de la CEPT.
La présente proposition porte donc uniquement sur la définition du cadre réglementaire d'attribution de quatre autorisations de portée métropolitaine, pour la seule composante terrestre des systèmes de troisième génération.
3.2. Fondements juridiques de la procédure d'autorisation
des systèmes mobiles de troisième génération
La loi prévoit que l'établissement et l'exploitation d'un réseau ouvert au public utilisant des fréquences radioélectriques suppose à la fois de détenir une autorisation d'opérateur de réseau ouvert au public délivrée par le ministre, sur le fondement de l'article L. 33-1 du code des postes et télécommunications, et de bénéficier d'une attribution de fréquences par l'Autorité, sur la base des pouvoirs qui lui sont conférés par l'article L. 36-7 (6o). Les systèmes en question étant susceptibles de fournir le service téléphonique au public, les autorisations reposeront également sur le fondement de l'article L. 34-1 du code.
L'Autorité, en application des dispositions de l'article L. 36-6, adoptera avant la délivrance des autorisations, une décision précisant les droits et obligations des opérateurs titulaires d'une autorisation d'établir et d'exploiter un réseau de troisième génération.
3.3. Justification du recours à l'appel à candidatures
Compte tenu à la fois du spectre disponible sur les premières années, de la quantité de fréquences à attribuer à chaque opérateur comme précisée au paragraphe 3.1 et du nombre de sociétés potentiellement intéressées par une autorisation, une rareté relative de fréquences est avérée. Il convient de noter que la Finlande, seul pays à avoir délivré des autorisations pour des systèmes de troisième génération, a reçu quinze demandes pour quatre autorisations. Treize candidats ont concouru pour cinq licences au Royaume-Uni, six en Espagne pour quatre licences et six aux Pays-Bas pour cinq licences.
Dans ce contexte, les dispositions de l'article L. 33-1 V du code doivent s'appliquer.
4. Les conditions générales de l'appel à candidatures
Les conditions générales de l'appel à candidatures sont décrites dans le document no 2 de l'annexe à la présente décision.
5. Les principales dispositions des autorisations
Les principales dispositions des autorisations sont décrites dans le document no 1 de l'annexe à la présente décision.
6. Les principales dispositions liées à l'attribution des fréquences pour les réseaux mobiles de troisième et deuxième génération
Les principales dispositions liées à l'attribution des fréquences pour les réseaux mobiles de troisième et deuxième génération sont décrites dans le document no 3 de l'annexe à la présente décision.
7. La nécessité d'une nouvelle proposition au ministre
L'autorité a adopté le 3 mars 2000 et transmis au ministre chargé des télécommunications le 7 mars une première décision relative aux modalités et conditions d'attribution des autorisations pour l'introduction en France métropolitaine de systèmes mobiles de troisième génération.
L'annonce par le Gouvernement, début juin 2000, du montant des charges financières payables par les opérateurs 3 G, de même que les délais nécessaires pour en préciser les modalités, conduisent aujourd'hui l'Autorité à adopter une nouvelle décision aux fins de sa publication.
Cette décision sera accompagnée d'une annexe particulière, établie par le Gouvernement, relative au paiement des montants financiers pour l'utilisation des fréquences allouées aux exploitants des systèmes de radiocommunications mobiles de troisième génération,
Décide :
Art. 1er. - Est approuvée la proposition annexée à la présente décision et relative aux modalités et conditions d'attribution des autorisations pour l'introduction en France métropolitaine de systèmes mobiles de troisième génération. Cette proposition sera transmise au ministre chargé des télécommunications en vue de sa publication.
Art. 2. - La décision no 2000-191 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 3 mars 2000 proposant au ministre chargé des télécommunications les modalités et les conditions d'attribution des autorisations pour l'introduction en France métropolitaine des systèmes mobiles de troisième génération, modifiée par la décision no 2000-273 de l'Autorité de régulation des télécommunications en date du 15 mars 2000, est abrogée.
Art. 3. - Le président de l'Autorité de régulation des télécommunications est chargé de transmettre au ministre chargé des télécommunications la présente décision, qui sera publiée au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 28 juillet 2000.