J.O. Numéro 79 du 2 Avril 2000
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Texte paru au JORF/LD page 05118
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Décision no 2000-2581 du 30 mars 2000
NOR : CSCX0004037S
AN, LANDES (3e CIRCONSCRIPTION)
M. ROBERT LUCAS
Le Conseil constitutionnel,
Vu la requête no 2000-2581 présentée par M. Robert Lucas, demeurant à Artassenx (Landes), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 14 février 2000 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 30 janvier et 6 février 2000 dans la 3e circonscription des Landes pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus le 3 mars 2000 ;
Vu le mémoire en défense présenté par M. Henri Emmanuelli, député, enregistré comme ci-dessus le 8 mars 2000 ;
Vu le mémoire en réplique présenté par M. Lucas, enregistré comme ci-dessus le 15 mars 2000 ;
Vu l'article 59 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu la loi no 95-65 du 19 janvier 1995 relative au financement de la vie politique ;
Vu le code électoral ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
Considérant que M. Lucas demande l'annulation de l'élection de M. Emmanuelli en soutenant que ce dernier était inéligible, à la date de cette élection, en application des dispositions du premier alinéa de l'article LO 130 du code électoral et de celles de l'article L. 7 du même code ;
Considérant que l'article LO 130 du code électoral dispose : « Les individus dont la condamnation empêche temporairement l'inscription sur une liste électorale sont inéligibles pendant une période double de celle durant laquelle ils ne peuvent être inscrits sur la liste électorale.
« Sont en outre inéligibles :
« 1o Les individus privés par décision judiciaire de leur droit d'éligibilité, en application des lois qui autorisent cette privation ;
« 2o Les personnes pourvues d'un conseil judiciaire. »
Considérant qu'aux termes de l'article L. 7 du code électoral, dans sa rédaction issue de la loi susvisée du 19 janvier 1995 : « Ne doivent pas être inscrites sur la liste électorale, pendant un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive, les personnes condamnées pour l'une des infractions prévues par les articles 432-10 à 432-16, 433-1, 433-2, 433-3 et 433-4 du code pénal ou pour le délit de recel de l'une de ces infractions, défini par les articles 321-1 et 321-2 du code pénal » ;
Considérant que M. Emmanuelli a été condamné, par un arrêt de la cour d'appel de Rennes en date du 13 mars 1996, à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et à une amende de 30 000 F pour le délit de recel de trafic d'influence, faits prévus et réprimés par les articles 321-1, 321-9, 321-10, 433-2, 433-22 et 433-23 du code pénal ; que la cour d'appel a, en outre, prononcé à son encontre l'interdiction des droits de vote et d'éligibilité mentionnés aux 1o et 2o de l'article 131-26 du code pénal pour une durée de deux ans ; que le pourvoi qu'il a formé contre cet arrêt a été rejeté par un arrêt de la Cour de cassation en date du 16 décembre 1997 ;
Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes mêmes de l'article LO 130 du code électoral que son premier alinéa s'applique aux personnes dont une condamnation empêche de plein droit l'inscription sur une liste électorale et non à celles qui ont été condamnées expressément à la peine de privation de leurs droits de vote et d'éligibilité par une décision judiciaire ; que s'appliquent exclusivement à ces dernières les dispositions du 1o du second alinéa dudit article ;
Considérant, en conséquence, que la situation de M. Emmanuelli relève des seules dispositions du 1o du second alinéa de l'article LO 130 ; que la période de deux ans d'interdiction des droits de vote et d'éligibilité à laquelle il a été condamné était expirée à la date de l'élection contestée ;
Considérant, en second lieu, que les faits pour lesquels M. Emmanuelli a été condamné ont été commis entre 1988 et 1990, soit avant l'entrée en vigueur de la loi susvisée du 19 janvier 1995 ; que, dès lors, les dispositions de l'article L. 7 du code électoral ne lui sont pas applicables ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête doit être rejetée,
Décide :
Art. 1er. - La requête de M. Robert Lucas est rejetée.
Art. 2. - La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 30 mars 2000, où siégeaient : MM. Yves Guéna, président, Georges Abadie, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Alain Lancelot, Mme Noëlle Lenoir, M. Pierre Mazeaud et Mmes Monique Pelletier et Simone Veil.
Le président,
Yves Guéna