Paris, le 20 décembre 1999.
Le ministre de l'intérieur, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le ministre de l'équipement, des transports et du logement et la ministre de la culture et de la communication à Mesdames et Messieurs les ministres
Le décret no 98-111 du 27 février 1998, modifié par le décret no 99-634 du 19 juillet 1999, transposant la directive CEE 92/50 du 18 juin 1992, prévoit un certain nombre de dispositions dans le domaine de la maîtrise d'oeuvre.
En particulier, la transposition incorpore dans notre droit la règle de l'anonymat exprimée dans la directive. Il en résulte que le maître d'ouvrage doit organiser les consultations lancées sous la forme de concours lorsque le montant estimé du marché est supérieur au seuil prévu à l'article 378 du code des marchés publics, dans le respect de cette règle.
I. - La règle de l'anonymat
Les articles 83.1, 279.1 et 385.1 du code des marchés publics prévoient les dispositions générales suivant lesquelles est organisé un concours.
Cette rédaction a maintenu la spécificité du concours de maîtrise d'oeuvre. En effet, les articles 83.1 et 279.1 sont applicables « sans préjudice des prescriptions particulières non contraires... prévues pour certains concours ». En conséquence, outre les articles 83.1 et 279.1, les articles 108 ter et 314 ter s'appliquent aux concours de maîtrise d'oeuvre pour autant que leurs dispositions ne sont pas contraires aux dispositions générales des articles 83.1 et 279.1.
Lorsque le montant estimé des marchés est supérieur aux seuils visés à l'article 378, l'article 385.1 est applicable. Il pose le principe de l'anonymat. En vertu des dispositions du deuxième alinéa de l'article 378, il en résulte que l'audition par le jury est incompatible avec l'anonymat, qu'elle soit prévue par des textes particuliers (exemple : appel d'offres avec concours prévu aux articles 98 et 302 du code des marchés publics) ou organisée en l'absence de texte (cas des concours de maîtrise d'oeuvre).
II. - Les modalités d'organisation des concours
A. - Composition et désignation du jury
Les articles 83.1-IV et 279.1-IV du code des marchés publics prévoient des dispositions générales sur la composition des jurys, ceux-ci devant comporter, dans la proportion minimale d'un tiers, des personnes ayant la même compétence ou une compétence équivalente à celle qui est demandée aux candidats du concours. En ce qui concerne les marchés de maîtrise d'oeuvre, il s'agit des maîtres d'oeuvre compétents indiqués aux articles 108 ter et 314 ter du même code. L'attention des membres du jury doit être appelée sur le fait qu'ils devront être indépendants des participants au concours.
S'agissant des marchés visés au livre II du code des marchés publics, les règles énoncées aux articles 83 et 83-I s'appliquent seules à la désignation des membres du jury. En conséquence, leur désignation est assurée :
- par le ministre, pour les administrations centrales de l'Etat ;
- par le préfet, pour les services déconcentrés de l'Etat ;
- selon les règles propres à chaque établissement pour les établissements publics.
S'agissant des marchés visés au livre III du code des marchés publics, les règles énoncées aux articles 279 et 279-I s'appliquent seules à la désignation des membres du jury. En conséquence, il est recommandé que leur désignation soit assurée par les assemblées délibérantes des collectivités locales et de leurs établissements publics à l'occasion de chaque concours de maîtrise d'oeuvre. La désignation des élus relève obligatoirement des assemblées délibérantes ; en revanche, celle des autres membres du jury (maîtres d'oeuvre, personnalités compétentes) est effectuée par le président du jury.
B. - Sélection des candidats
Les critères clairs et non discriminatoires pour la sélection des participants aux concours doivent être mentionnés dans l'avis d'appel public à la concurrence. Le jury rend un avis motivé à partir de ces critères. Aucun candidat ne peut être éliminé sur la base d'un critère qui n'aurait pas été préalablement annoncé.
La sélection des candidats admis à remettre une prestation implique l'examen du respect des obligations fiscales et sociales et des compétences professionnelles de ces derniers et suppose bien entendu qu'ils soient identifiés. Après établissement de l'avis du jury sur les candidatures, les maîtres de l'ouvrage organiseront les concours en veillant à assurer les conditions d'un strict respect de l'anonymat des projets.
C. - Appréciation des prestations
Dispositions relatives à l'anonymat
Les critères d'appréciation des prestations doivent figurer dans l'avis d'appel public à la concurrence, qui précisera en outre que l'avis rendu par le jury ne lie pas le maître d'ouvrage.
Les collectivités publiques doivent mettre en oeuvre une procédure spécifique de réception et d'examen des projets qui permette d'assurer le respect de cette règle. L'organisation pratique de cette procédure pourrait s'inspirer des principes suivants :
1. Chaque service ou collectivité désigne une ou deux personnes (appelées dans la suite du texte secrétariat du concours) chargées de recevoir les prestations, puis de mettre en oeuvre la procédure permettant d'assurer le respect de l'anonymat. La confidentialité implique que le secrétariat du concours devra être à même d'exercer sa mission dans des conditions rigoureuses d'indépendance.
2. Les prestations des concurrents sont transmises par envoi recommandé avec avis de réception ou remises contre récépissé au secrétariat du concours.
3. Les prestations sont reçues et enregistrées par le secrétariat du concours. Elles se présentent en deux parties :
- des documents nominatifs, signés par le candidat ou le cas échéant par les membres du groupement :
- la lettre de transmission ;
- l'acte d'engagement du marché sur lequel est portée la proposition d'honoraires du candidat à laquelle peut être annexée une décomposition de ce prix ;
- des documents qui sont présentés sous une forme anonyme : les pièces écrites et graphiques décrivant le projet tel que demandé dans le règlement de consultation. Le règlement du concours devra prévoir que toute violation relevée par le jury de la règle de l'anonymat par un candidat entraînera son élimination pour non-conformité et en conséquence le non-paiement de l'indemnité prévue dans l'avis d'appel public à la concurrence.
4. Après réception des prestations, le secrétariat du concours recense et numérote les pièces remises par les concurrents. Il affecte aux pièces nominatives et à chaque pièce du dossier de prestation du candidat un code (lettre ou numéro par exemple) : il est préférable de ne pas choisir un code correspondant à l'ordre d'arrivée ou d'enregistrement. Le secrétariat du concours garde la lettre du candidat dans les conditions permettant d'en assurer la confidentialité (coffre-fort réservé à cet usage par exemple) et transmet ensuite les dossiers ainsi codés pour analyse aux services du maître d'ouvrage qui seront chargés de présenter les projets au jury.
5. Tous les projets sont ensuite transmis au jury avec la seule mention du code d'identification et analysés par le jury de manière anonyme.
6. Le jury se prononce sur la conformité des projets au règlement de consultation. Il procède à un classement et rend un avis motivé sur les critères figurant à l'avis d'appel public à la concurrence qui retrace en particulier les questions que s'est posées le jury sur la compréhension et la pertinence des projets.
7. L'anonymat des projets n'est levé par le secrétariat du concours qu'après signature par tous les membres du jury du procès-verbal de la séance et de l'avis motivé.
D. - Désignation des lauréats et négociation du contrat
L'autorité compétente décide du ou des lauréats du concours. Elle engage les négociations avec tous les lauréats. Ces négociations doivent être conduites en respectant le principe d'égalité de traitement des candidats et de transparence de la procédure.
L'attribution du marché est prononcée dans les conditions prévues aux articles 108 ter et 314 ter du code des marchés publics.