Le Premier ministre,
Sur le rapport de la ministre de l'emploi et de la solidarité, du ministre de l'intérieur et du ministre des affaires étrangères,
Vu le code du travail, notamment son article L. 341-9 ;
Vu l'ordonnance no 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;
Vu la loi no 86-1290 du 23 décembre 1986 modifiée tendant à favoriser l'investissement locatif, l'accession à la propriété de logements sociaux et le développement de l'offre foncière, notamment son article 25 ;
Le Conseil d'Etat (section sociale) entendu,
Décrète :
Art. 1er. - Le titre de séjour dont doit justifier un ressortissant étranger pour formuler une demande de regroupement familial est soit une carte de séjour temporaire d'une durée de validité d'un an, soit une carte de résident, soit un récépissé de demande de renouvellement de l'un de ces titres.
Art. 2. - Le séjour régulier en France d'au moins un an mentionné au I de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée doit avoir été accompli sous couvert des titres mentionnés à l'article 1er du présent décret ou des documents suivants :
- carte de séjour temporaire d'une durée de validité inférieure à un an ;
- autorisation provisoire de séjour ;
- récépissé de demande de titre de séjour ou de demande de renouvellement de titre de séjour ;
- récépissé constatant le dépôt d'une demande de statut de réfugié ou d'une demande d'admission au bénéfice de l'asile.
Art. 3. - La demande de regroupement familial comporte la liste de tous les membres de la famille désignés au premier alinéa du I de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée.
L'âge des enfants pouvant bénéficier du regroupement familial est apprécié à la date du dépôt de la demande.
Art. 4. - Dans le cas où le regroupement sollicité n'est que partiel, la demande comporte en outre :
1o L'exposé des motifs, tenant notamment à la santé ou à la scolarité du ou des enfants ou aux conditions de logement de la famille, qui justifient, au regard de l'intérêt du ou des enfants, que le regroupement familial ne soit pas demandé pour l'ensemble de la famille ;
2o La liste de ceux des membres de la famille pour lesquels le regroupement familial est demandé.
Art. 5. - La demande de regroupement familial est formulée sur un imprimé dont le modèle est établi par arrêté conjoint du ministre chargé de l'intégration et du ministre de l'intérieur.
Elle comporte l'engagement du demandeur :
- de permettre aux agents de l'Office des migrations internationales l'entrée dans le logement prévu pour accueillir la famille aux fins de vérification des conditions de logement, ou, si le logement n'est pas encore disponible, de les mettre en mesure de procéder à cette vérification sur pièces ;
- de verser à l'Office des migrations internationales la redevance forfaitaire mentionnée à l'article 16 du présent décret ;
- de participer, ainsi que sa famille, aux réunions d'information et aux entretiens d'accueil organisés par l'Office des migrations internationales et les services sociaux spécialisés pour faciliter l'installation de la famille.
Art. 6. - A l'appui de sa demande de regroupement, le ressortissant étranger présente les originaux des pièces suivantes :
1o Les pièces justificatives de l'état civil des membres de la famille : l'acte de mariage et les actes de naissance des enfants du couple comportant l'établissement du lien de filiation ;
2o Le titre de séjour sous le couvert duquel l'étranger réside en France, ou le récépissé de demande de renouvellement du titre de séjour ;
3o Les justificatifs de ressources mentionnés à l'article 8 du présent décret, accompagnés du dernier avis d'imposition sur le revenu en possession du demandeur, dès lors que sa durée de présence en France lui permet de produire un tel document ;
4o Les documents relatifs au logement prévu pour l'accueil de la famille tels que : titre de propriété, bail de location, promesse de vente, ou tout autre document de nature à établir que le demandeur disposera d'un logement à la date qu'il précise. Ces documents doivent mentionner les caractéristiques du logement au regard des conditions posées à l'article 9 du présent décret et la date à laquelle le logement sera disponible.
Outre ces pièces, devront être produits, le cas échéant :
- lorsqu'il s'agit d'un enfant adopté, la décision d'adoption sous réserve de la vérification ultérieure par le procureur de la République de la régularité de celle-ci lorsqu'elle a été prononcée à l'étranger ;
- lorsque le regroupement familial est demandé pour des enfants dont l'un des parents est décédé ou déchu de ses droits parentaux, l'acte de décès ou la décision de déchéance ;
- lorsque le regroupement familial est demandé pour un enfant mineur de dix-huit ans du demandeur ou de son conjoint, qui lui a été confié au titre de l'exercice de l'autorité parentale par décision d'une juridiction étrangère, cette décision, accompagnée du consentement de l'autre parent à la venue en France de cet enfant dans les formes prévues par la législation du pays de résidence ;
- lorsque la demande concerne le conjoint d'un étranger ressortissant d'un Etat dont la loi autorise la polygamie, une déclaration sur l'honneur du demandeur certifiant que le regroupement familial ne créera pas une situation de polygamie sur le territoire français.
Toutes les pièces et documents doivent être accompagnés, le cas échéant, de leur traduction en langue française par un traducteur interprète agréé près une cour d'appel.
Au vu du dossier complet, il est délivré sans délai une attestation de dépôt de dossier qui fait courir le délai de six mois prévu au cinquième alinéa du II de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée.
L'autorité diplomatique ou consulaire dans la circonscription de laquelle habite la famille du demandeur est immédiatement informée du dépôt de la demande par le service qui a reçu la demande.
Art. 7. - Le ressortissant étranger présente sa demande personnellement dans le département du lieu de résidence prévu pour l'accueil de la famille auprès du service de l'Etat désigné par le préfet. Dans certains départements, la réception des demandes est confiée aux services de l'Office des migrations internationales par un arrêté conjoint du ministre chargé de l'intégration et du ministre de l'intérieur. Dans ce cas, le préfet territorialement compétent ou, à Paris, le préfet de police est immédiatement informé du dépôt de la demande.
L'Office des migrations internationales vérifie si les conditions de ressources et de logement mentionnées aux 1o et 2o du deuxième alinéa du I de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée sont remplies.
Art. 8. - Les ressources du demandeur sont appréciées par référence à la moyenne du salaire minimum de croissance sur une durée de douze mois ; lorsque la moyenne n'est pas atteinte, une décision favorable peut être prise en tenant compte de l'évolution de la situation de l'intéressé quant à la stabilité de son emploi et à ses revenus y compris après le dépôt de la demande.
Les ressources du conjoint sont également prises en compte dans l'appréciation des ressources mentionnées au premier alinéa qui alimenteront de manière stable le budget de la famille.
Le demandeur salarié produit son contrat de travail, quelle qu'en soit la nature, ou, à défaut, une attestation d'activité de son employeur. Il joint les bulletins de paie afférents à la période des douze mois précédant le dépôt de sa demande, qu'il est en mesure de produire.
L'Office des migrations internationales peut saisir, en tant que de besoin, la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle compétente d'une demande d'enquête sur l'emploi qui procure au demandeur tout ou partie des ressources dont il fait état.
Les revenus non salariaux sont établis par tous moyens.
Art. 9. - Le logement dont disposera la famille doit :
1o Présenter une superficie habitable globale au moins égale à 16 mètres carrés pour un ménage sans enfant ou deux personnes, augmentée de 9 mètres carrés par personne jusqu'à huit personnes et de 5 mètres carrés par personne supplémentaire au-delà de huit personnes ;
2o Répondre aux autres conditions minimales de confort et d'habitabilité fixées en application de l'article 25 de la loi du 23 décembre 1986 susvisée.
Lorsque le demandeur ne dispose pas encore du logement au moment de la demande, la vérification est opérée au vu des documents établis et signés par le propriétaire ou le vendeur et le demandeur mentionnant la date de disponibilité, ainsi que la superficie et l'ensemble des caractéristiques permettant d'apprécier le confort et l'habitabilité du logement conformément aux conditions mentionnées ci-dessus.
Art. 10. - A l'issue des vérifications sur les ressources et le logement, l'Office des migrations internationales transmet au maire de la commune où doit résider la famille copie de la demande de regroupement familial, accompagnée des résultats de l'enquête.
Dès réception de l'avis motivé du maire sur les conditions de ressources et de logement ou, à défaut d'avis, à l'expiration du délai de deux mois prévu au quatrième alinéa du II de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée, l'office transmet le dossier au service de l'Etat désigné par le préfet, qui instruit le dossier.
Dans le cas où le demandeur était, au moment de la demande, titulaire d'un récépissé de renouvellement d'un titre de séjour, le préfet vérifie que le titre de séjour a été délivré avant de prendre sa décision.
La décision portant sur la demande de regroupement familial est notifiée par le préfet au requérant.
L'absence de décision préfectorale dans le délai de six mois suivant la date de délivrance de l'attestation de dépôt du dossier vaut rejet de la demande de regroupement familial.
Lorsqu'une décision de refus est motivée par la non-conformité du logement aux normes de superficie, ou de confort et d'habitabilité, ou par le caractère non probant des pièces attestant de la disponibilité du logement à l'arrivée de la famille, le demandeur qui présente dans un délai de six mois suivant la notification du refus une nouvelle demande est alors dispensé de la production des pièces visées aux 1o, 2o et 3o du premier alinéa et au deuxième alinéa de l'article 6.
Art. 11. - Le préfet informe le maire, l'Office des migrations internationales et l'autorité diplomatique ou consulaire de la circonscription dans laquelle habite la famille du demandeur de sa décision et de la date à laquelle elle a été notifiée au demandeur.
Art. 12. - L'Office des migrations internationales est chargé d'effectuer le contrôle médical des membres de la famille pour lesquels est demandé le bénéfice du regroupement familial.
Les conditions dans lesquelles est passé l'examen médical sont fixées par arrêté conjoint du ministre chargé de l'intégration et du ministre chargé de la santé.
Art. 13. - L'Office des migrations internationales est chargé de la mise en oeuvre de la procédure d'introduction en France ou, exceptionnellement, de la procédure d'admission au séjour à partir du territoire national des familles des étrangers. Il est également chargé de leur accueil sous la responsabilité du préfet.
Art. 14. - Pour être admis sur le territoire français, les membres de la famille du ressortissant étranger doivent être munis du visa d'entrée délivré par l'autorité diplomatique et consulaire après réception de la décision du préfet.
La demande de visa doit être formulée dans un délai qui ne peut excéder six mois à compter de la notification au demandeur de la décision du préfet. L'entrée de la famille sur le territoire français doit intervenir dans un délai qui ne peut excéder trois mois à compter de la délivrance du visa. Au terme de ce délai, l'autorisation de regroupement familial est réputée caduque.
Art. 15. - Dans le cas où un étranger qui réside régulièrement en France dans les conditions prévues aux articles 1er et 2 du présent décret contracte mariage avec une personne de nationalité étrangère régulièrement autorisée à séjourner sur le territoire national sous couvert d'une carte de séjour temporaire d'une durée de validité d'un an, le bénéfice du droit au regroupement familial est accordé sans recours à la procédure d'introduction. Peuvent en bénéficier le conjoint et, le cas échéant, les enfants de moins de dix-huit ans de celui-ci résidant en France, sauf si l'un des motifs de refus ou d'exclusion mentionnés aux 1o et 2o du troisième alinéa du I de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée leur est opposé.
Art. 16. - La délivrance de l'autorisation de regroupement familial donne lieu au versement à l'Office des migrations internationales par le demandeur d'une redevance pour services rendus au titre de l'article 13 du présent décret dont le montant est fixé forfaitairement par arrêté conjoint du ministre chargé de l'intégration et du ministre chargé du budget.
Art. 17. - La délivrance des titres de séjour et, s'agissant des enfants mineurs, l'admission en France au titre du regroupement familial sont subordonnées à la production du certificat de contrôle médical délivré par l'Office des migrations internationales.
Le titre de séjour délivré aux membres de la famille autorisés à résider en France au titre du regroupement familial est, en application du III de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée, soit la carte de résident, soit la carte de séjour temporaire d'une durée d'un an selon que le ressortissant étranger qu'ils sont venus rejoindre est titulaire de l'un ou l'autre de ces titres.
La carte de séjour temporaire porte la mention « vie privée et familiale » ; elle permet l'exercice de toute activité professionnelle dans le cadre de la réglementation en vigueur.
Art. 18. - Le décret no 94-963 du 7 novembre 1994 relatif au regroupement familial des étrangers pris pour l'application du chapitre VI de l'ordonnance no 45-2658 du 2 novembre 1945 relative aux conditions d'entrée et de séjour en France des étrangers est abrogé.
Art. 19. - La ministre de l'emploi et de la solidarité, le ministre de l'intérieur, le ministre des affaires étrangères, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le secrétaire d'Etat à l'outre-mer, le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale et le secrétaire d'Etat au budget sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution du présent décret, qui sera publié au Journal officiel de la République française.
Fait à Paris, le 6 juillet 1999.