Paris, le 4 novembre 1998.
La ministre de l'emploi et de la solidarité, le ministre de l'intérieur, le ministre des affaires étrangères et le ministre délégué à la coopération et à la francophonie à Mesdames et Messieurs les ambassadeurs de France au Maroc, au Mali et au Sénégal, Mesdames et Messieurs les préfets de région, Mesdames et Messieurs les préfets de département, Mesdames les directrices et Messieurs les directeurs départementaux du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle, Monsieur le préfet de police, Monsieur le directeur de l'Office des migrations internationales, Monsieur le directeur général de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, Monsieur le directeur général du Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles
Références :
Circulaire NOR : INTD9700104C du 24 juin 1997 ;
Circulaire NOR : MESN9820174C du 19 janvier 1998.
La présente instruction a pour objectif de compléter le dispositif d'aide au retour et à la réinsertion mis en place par la circulaire du 19 janvier 1998 par la mise en oeuvre d'un contrat de réinsertion dans le pays d'origine (CRPO). Elle concerne les ressortissants des pays avec lesquels a été engagée une concertation concernant le codéveloppement lié aux flux migratoires et qui ont fait l'objet d'un refus de séjour après examen de leur situation en application de la circulaire du ministre de l'intérieur du 24 juin 1997.
Le bénéfice du CRPO entraîne le bénéfice de l'aide à la réinsertion prévue dans la circulaire du 19 janvier 1998.
Le dispositif prévu par cette circulaire concerne les demandes déposées avant le 31 décembre 1999.
1. Définition
Le contrat de réinsertion dans le pays d'origine (CRPO) permet un retour volontaire des personnes non régularisées et invitées à quitter la France, dans le respect de leur dignité, et conformément aux lois de la République.
A travers la possibilité d'accéder à l'aide au projet et la possibilité de circulation, le CRPO s'inscrit dans le cadre de la nouvelle politique de codéveloppement que le Gouvernement souhaite promouvoir avec les pays partenaires.
Le contrat de réinsertion dans le pays d'origine lie le bénéficiaire et l'Office des migrations internationales.
La personne signataire du contrat s'engage à retourner volontairement dans son pays d'origine à une date déterminée, au terme d'une période de préparation à la réinsertion. Cette période de préparation en France peut être éventuellement complétée par une formation dans le pays d'origine.
Ayant pris acte de cette volonté de retour, l'Office des migrations internationales (OMI) s'engage à prendre en charge l'accompagnement, le suivi et la formation de la personne en France durant la phase de préparation à la réinsertion, et éventuellement dans le pays d'origine, pendant un temps déterminé et en lien avec les autorités de ce pays.
Au vu de la réinsertion effective dans le pays d'origine, dûment constatée par l'OMI, le bénéficiaire du CRPO pourra obtenir un visa lui permettant la circulation entre son pays d'origine et la France.
L'Etat du pays d'origine collabore à l'ensemble du dispositif. Ses services sont sollicités pour la mise en oeuvre des formations dans le pays d'origine.
2. Bénéficiaires du CRPO
A la date de la signature de la présente circulaire, le CRPO concerne les ressortissants maliens, marocains ou sénégalais invités à quitter la France ou faisant l'objet d'un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière après réexamen de leur situation au regard du séjour dans le cadre de la circulaire du ministère de l'intérieur du 24 juin 1997, et après que l'OMI ait émis un avis favorable.
3. Mise en oeuvre du CRPO
L'accès au CRPO
L'accès au CRPO nécessite une phase d'accueil par l'OMI qui ne peut excéder quinze jours. Durant cette phase, le candidat n'a pas droit à l'APS.
A l'issue de cette phase, l'OMI statue sur la candidature en concertation avec l'association chargée de l'accompagnement et du suivi du candidat après examen de ses aptitudes et de l'orientation envisagée.
En cas de refus de la part de l'OMI, la personne bénéficie des dispositions d'aide au retour de la circulaire du 19 janvier 1998.
Le CRPO dont la durée n'excède pas douze semaines comprend :
- une première phase de formation générale durant deux à quatre semaines (information sur la situation socio-économique et institutionnelle du pays d'origine, contexte juridique, démarche de projet, éléments financiers et budgétaires, présentation des dispositifs d'aide au projet ; module d'évaluation et de bilan professionnel) ;
- une seconde phase (six à huit semaines) de formation professionnalisante avec des périodes d'immersion en milieu de travail (stages en entreprise), adaptées au profil du bénéficiaire et au secteur d'activité choisi (bâtiment, commerce, restauration, transport, petite réparation, mécanique, confection, nettoyage, agriculture...).
Dans quelques cas, lorsque le signataire du CRPO possède une compétence particulière et un projet immédiatement réalisable, des formations courtes (trois à six mois) et plus spécialisées pourront être envisagées dans le cadre de l'offre de formation professionnelle disponible au niveau régional.
Au terme de cette première période, et à la date prévue dans le CRPO, la personne retourne dans son pays d'origine, selon les modalités prévues dans la circulaire du 19 janvier 1998.
Elle est accueillie par la représentation de l'OMI dans le pays d'origine qui prend éventuellement en charge une formation complémentaire organisée avec les structures compétentes du pays d'origine pendant une durée maximum de trois mois.
La personne signataire d'un CRPO est également éligible aux dispositifs d'aide aux projets, notamment le programme Développement local/migrants, lorsqu'elle présente un projet valide.
Pendant toute la période en France, un accompagnement et un suivi sont assurés par une association relais, conventionnée avec l'OMI.
Les associations relais sont choisies pour leur bonne connaissance des populations concernées, leur capacité à accompagner une démarche d'élaboration de projet, leurs liens avec le pays d'origine et la volonté d'inscrire leur action dans la perspective plus large du codéveloppement. Elles sont en relation avec les personnes à chaque étape de la période de préparation. Elles expliquent la démarche aux intéressés, les aident à faire un bilan de leurs compétences et à élaborer un projet de réinsertion professionnelle. Elles orientent les bénéficiaires du CRPO vers des formations professionnalisantes adaptées.
4. Statut du bénéficiaire d'un CRPO
Durant la période de préparation à la réinsertion, les bénéficiaires du CRPO doivent pouvoir effectuer leur formation dans un cadre propice à l'élaboration d'un projet de retour, assurant une rémunération et une couverture sociale, sans être pour autant installés dans une situation pérenne.
A. - Statut des personnes au regard du droit au séjour :
Au vu du contrat, la préfecture délivre aux personnes invitées à quitter la France une autorisation provisoire de séjour de trois mois assortie d'une autorisation provisoire de travail portant la mention « stagiaire professionnel », renouvelée si nécessaire, pour couvrir le temps de la préparation à la réinsertion ;
A l'issue de la période de préparation, l'étranger regagne son pays d'origine. En cas de non-exécution de ce départ volontaire, il perd tous les droits afférents au CRPO. Un arrêté de reconduite à la frontière est pris en application de l'article 22 (I, 6o) de l'ordonnance du 2 novembre 1945 ;
L'étranger, à qui a déjà été notifié un arrêté de reconduite à la frontière pourra demander le bénéfice d'un CRPO. Dans le cas où sa demande aura été acceptée, il sera placé sous un régime d'assignation à résidence avec autorisation provisoire de travail portant la mention « stagiaire professionnel » ;
Le cas échéant, le préfet qui a signé l'arrêté d'assignation à résidence délivre à l'étranger suivant une préparation à la réinsertion dans un département limitrophe de celui où il est assigné un sauf-conduit valable pour la durée prévue de cette préparation.
B. - Statut social des bénéficiaires du CRPO :
Le signataire d'un CRPO est pris en charge au titre de stagiaire de la formation professionnelle sans pour autant être inscrit comme demandeur d'emploi. A ce titre, il bénéficie d'une rémunération et d'une couverture sociale.
Cette rémunération (2 002 FF) correspond au niveau minimal accordé à toute personne entrant dans un dispositif de formation professionnelle.
5. Opérateurs de la mise en oeuvre du CRPO
L'Office des migrations internationales coordonne pour l'Etat l'ensemble du dispositif :
Il finance le dispositif d'accueil et d'accompagnement et signe les conventions avec les associations relais, dont il évalue et accompagne l'intervention ;
Il signe le CRPO avec le bénéficiaire ;
Il finance les formations et signe les conventions de formation avec les organismes enregistrés comme organisme de formation ;
Il définit, avec l'association relais et l'intéressé, l'orientation dans les formations professionnalisantes en tenant compte des besoins des pays d'origine ;
Il organise matériellement, au terme de la période de préparation à la réinsertion, le retour du bénéficiaire du CRPO conformément à la circulaire du 19 janvier 1998 et l'accueille dans les pays d'origine ;
Il finance le cas échéant une formation complémentaire dans le pays d'origine en collaboration avec les services compétents du pays concerné.
Les associations relais accompagnent le bénéficiaire du CRPO tout au long de la période de préparation à la réinsertion :
Elles assurent une sensibilisation et une information des personnes invitées à quitter la France, susceptibles de rentrer dans le cadre d'un CRPO ;
Elles organisent un ensemble de rencontres individuelles ou collectives qui permettent aux bénéficiaires du CRPO de préparer un projet professionnel adapté à leurs compétences, mais également à la situation du pays d'origine ;
Elles contribuent, avec l'OMI, à orienter le bénéficiaire du CRPO vers une formation professionnalisante adaptée ;
Elles assurent le suivi pendant les périodes de formation et la coordination avec les organismes de formation.
Les associations relais peuvent également assurer elles-mêmes certaines formations si elles sont enregistrées comme organisme de formation.
Elles bénéficient de conventions spécifiques, signées avec l'Office des migrations internationales, pour accomplir toutes ces tâches et pour inscrire leur action dans le cadre plus large de l'aide au projet et de la politique de codéveloppement.
Les préfectures :
Elles délivrent les autorisations provisoires de séjour ou procèdent aux assignations à résidence, avec autorisation de travail portant la mention « stagiaire professionnel » ;
Elles veillent au bon fonctionnement du dispositif en animant des comités de suivi départementaux regroupant des représentants des différents services de l'Etat concernés, de l'OMI, du FAS et des associations relais.
Les directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle procèdent aux appels d'offres pour les formations générales et professionnelles en France. Elles agréent ces formations et notifient les décisions d'agrément aux organismes de formation ainsi qu'au CNASEA.
Les organismes de formation, qui ont conventionné avec l'OMI, font établir par les stagiaires les demandes d'admission au bénéfice de la rémunération de stagiaire de la formation professionnelle et adressent ces demandes au CNASEA dès le premier jour de la formation.
L'Association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) s'est engagée à fournir un appui technique, au niveau national, à l'ingénierie de formation. Elle peut également être sollicitée pour la mise en place de formations dans le pays d'origine, notamment dans le cadre d'accords de coopération.
Le ministère de l'emploi et de la solidarité (délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle) assure le financement de la rémunération des stagiaires telle qu'elle est prévue au paragraphe 4 B de la présente circulaire (chapitre 43-04, article 26).
Le Centre national pour l'aménagement des structures des exploitations agricoles assure le paiement de la rémunération des stagiaires.
Le GIP-International fait bénéficier l'OMI de son expérience et de ses contacts pour le montage de formations dans les pays d'origine.
6. Rôle de la mission interministérielle au codéveloppement
et aux migrations internationales
Elle assure, en lien avec la DPM, l'OMI, la DGEFP, la DLPAJ, le suivi du dispositif.
Elle organise, en relation avec l'OMI, des réunions d'échanges et d'évaluation avec les responsables des associations relais en charge du suivi des CRPO.
Elle intervient, à la demande des préfectures, dans l'animation des comités de suivi départementaux.
Elle veille, en lien avec le MAE, au bon fonctionnement du partenariat avec les pays d'origine.
7. Déroulement des interventions pour un bénéficiaire du CRPO
a) L'association relais sensibilise, accueille et présente le CRPO au bénéficiaire potentiel.
b) L'OMI reçoit le candidat au CRPO et instruit le dossier en saisissant immédiatement la préfecture concernée pour avis sur la délivrance d'une APS ou l'édiction d'une assignation à résidence. Cet avis de la préfecture, relatif à l'ordre public et à la vérification de l'identité du candidat, doit être donné dans un délai maximum de dix jours.
c) Le contrat de réinsertion dans le pays d'origine est signé par l'intéressé et par le représentant de l'OMI ainsi qu'un avenant déterminant la date et les modalités d'entrée dans la phase de formation générale ou de formation professionnalisante. Le bénéficiaire a le statut de stagiaire de la formation professionnelle à compter de sa première mise en stage.
d) La préfecture délivre l'autorisation provisoire de séjour ou édicte l'assignation à résidence sans délai sur présentation par l'intéressé du CRPO signé par les parties.
e) Dès l'inscription dans un organisme de formation, le stagiaire établit une demande d'admission au bénéfice de la rémunération prévue au paragraphe 4 B. Cette demande est envoyée après certification par l'organisme au CNASEA. Après décision du CNASEA, il est procédé au paiement mensuel de la rémunération et le stagiaire bénéficie d'une couverture sociale conformément aux textes en vigueur.
f) Lors de la phase de préparation générale, le stagiaire participe à un module d'évaluation et bénéficie d'un bilan professionnel.
g) L'orientation dans les modules de formation professionnalisante est définie dans un second avenant au CRPO, communiqué pour information à la préfecture qui procède, si nécessaire, à un renouvellement de l'autorisation provisoire de séjour.
h) Un mois avant la date du départ, un bilan final de la phase préparatoire permet l'organisation de la formation complémentaire dans le pays d'origine et l'organisation matérielle du retour.
i) Les personnes faisant l'objet d'un arrêté préfectoral d'assignation à résidence doivent se présenter avant leur départ à la préfecture afin de s'en voir notifiée l'abrogation, qui prendra effet le jour de leur départ.
Dans ce cas, l'OMI informe la DICILEC qu'elle aura à constater le départ effectif de l'intéressé afin que la préfecture soit en mesure de faire cesser tout effet à l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière.
j) Dans le pays d'origine, la délégation de l'OMI sur place assure l'accueil du bénéficiaire du CRPO et son orientation éventuelle vers une formation complémentaire.
k) Au terme de six mois, l'OMI effectue un bilan et émet, au vu d'une réinsertion effective dans le pays d'origine, une recommandation pour l'obtention d'un visa permettant au bénéficiaire la circulation entre son pays d'origine et la France.
8. Modalités de mise en oeuvre du dispositif
Cette circulaire est applicable à la date de publication au Journal officiel.
L'OMI signe avec les associations relais compétentes des conventions de mise en oeuvre du CRPO.
Les directions départementales du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle lancent un appel d'offres pour les formations générales en s'inspirant du cahier des charges joint en annexe. Une proposition de cahier des charges concernant les formations professionnelles sera transmise ultérieurement.
Un bilan de la mise en oeuvre du dispositif sera régulièrement effectué au sein de l'instance de pilotage nationale, en présence de représentants des préfectures concernées.