J.O. Numéro 220 du 23 Septembre 1998       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 14539

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Délibération no 98-041 du 28 avril 1998 portant recommandation sur l'utilisation des systèmes de vote par codes-barres dans le cadre d'élections par correspondance pour les élections professionnelles


NOR : CNIX9803005X


La Commission nationale de l'Informatique et des Libertés,
Vu la convention no 108 du 28 janvier 1981 du Conseil de l'Europe pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel ;
Vu le code électoral ;
Vu le code de la sécurité sociale, et notamment les articles L. 911-1 et suivants et R. 641-13 à R. 641-28 ;
Vu la loi no 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, et notamment son article 29 ;
Vu le décret no 78-774 du 17 juillet 1978 modifié pris pour l'application de la loi no 78-17 du 6 janvier 1978 susvisée ;
Après avoir entendu M. Bouchet (Hubert) en son rapport et Mme Pitrat (Charlotte-Marie) en ses observations ;
Considérant que divers organismes recourent, dans le souci de faciliter l'expression du vote et les opérations matérielles de dépouillement, à des systèmes de dépouillement automatique des bulletins ; que tel est le cas pour certaines élections professionnelles par correspondance, lorsque le nombre d'électeurs est élevé ;
Considérant que ces systèmes reposent sur le décompte automatique de bulletins qui comportent des données codées - généralement des codes-barres - permettant l'identification de l'électeur et des données codées exprimant son choix ; que le recours à de tels systèmes nécessite la mise en oeuvre de traitements automatisés d'informations nominatives, au sens de l'article 5 de la loi du 6 janvier 1978, qu'il s'agisse du fichier informatique des électeurs, du traitement automatisé des résultats ou de la constitution de la liste d'émargement ;
Considérant que le recours aux systèmes de vote par codes-barres et de dépouillement automatique des votes ne peut être admis que si le secret du vote, la sincérité des opérations électorales, la surveillance effective du scrutin et le contrôle a posteriori par le juge de l'élection garantissent le principe de la liberté du scrutin,
Recommande :

I. - Organisation des élections
Le recours à un système de dépouillement automatique des votes par lecture de codes-barres doit être expressément mentionné dans le protocole d'accord préélectoral conclu entre les organisations syndicales sous le contrôle de la direction de l'organisme. Lorsque l'organisme relève des articles L. 911-1 ou R. 641-13 et suivants du code de la sécurité sociale, le protocole établi par la direction de l'organisme doit mentionner le recours à un système de dépouillement automatique des votes.
Ce protocole doit notamment préciser les conditions techniques de mise en oeuvre du système, les dispositions prises pour garantir le secret du vote et la sincérité des opérations électorales, les modalités pratiques d'acheminement des documents de vote (routage) et les critères généraux de détermination des votes blancs ou nuls.
A cet effet, il importe que toutes dispositions soient prises afin de permettre aux représentants du corps électoral d'assurer une surveillance effective de l'ensemble des opérations électorales et, en particulier, de la préparation du scrutin, du dépouillement et de l'émargement.
En cas de recours à un prestataire extérieur, une copie du cahier des charges doit être jointe au protocole.
Un expert informatique figurant sur la liste établie par la Cour de cassation ou sur les listes établies par les cours d'appel peut être chargé par la direction de l'organisme de vérifier préalablement à l'élection que le système informatique qui sera utilisé respecte les dispositions énumérées ci-après et s'en assurer le jour du dépouillement. Dans le cas où il est recouru à un tel expert, mention doit en être faite dans le protocole.
En outre, la commission électorale, le cas échéant assistée d'un huissier de justice, devra être présente, assistée de l'éventuel expert informatique, lors des opérations de dépouillement et d'émargement, afin de dresser un rapport sur le déroulement du scrutin, auquel seront joints le rapport de vérification préalable et, le cas échéant, les observations de l'expert susmentionné.

II. - Préparation du scrutin
1. Les fichiers nominatifs d'électeurs constitués aux fins d'établir la liste électorale, d'adresser le matériel de vote et de réaliser les émargements ne peuvent être utilisés qu'aux fins précitées et ne peuvent être divulgués sous peine des sanctions pénales encourues au titre des articles 226-17 et 226-21 du code pénal.
En cas de recours à un prestataire extérieur, celui-ci doit s'engager contractuellement à respecter ces dispositions, à restituer les fichiers dès la fin des opérations et s'engager à détruire toutes les copies totales ou partielles qu'il aurait été amené à effectuer sur quelque support que ce soit.
2. Le secret du vote doit être garanti par la mise en oeuvre de procédés rendant impossible l'établissement d'un lien entre le nom de l'électeur et l'expression de son vote. Il en résulte que :
- l'électeur ne doit être identifié sur la carte exprimant son vote que par un numéro spécifique généré de façon aléatoire, à l'exclusion de toute autre information. Ce numéro doit être modifié pour chaque scrutin ;
- le fichier de correspondance, établi pour permettre l'édition de la liste d'émargement, entre le nom des électeurs et les numéros qui leur sont attribués doit être conservé sous le contrôle de la commission électorale ;
- les documents de vote transmis par l'électeur doivent être conçus de façon que le numéro qui permet son identification et le sens du vote exprimé fassent l'objet de lectures distinctes de sorte qu'il soit impossible techniquement d'établir un lien entre ces deux informations ;
- les documents de vote transmis par l'électeur doivent l'être sous pli clos.
3. Toutes précautions utiles doivent être prises afin que les cartes de vote par correspondance ne subissent, lors de leur envoi par les électeurs, aucune altération de nature à empêcher la comptabilisation du vote ou à considérer le vote comme étant nul. Il en résulte que :
- l'envoi du matériel de vote aux électeurs doit être accompagné d'une note explicative détaillant de façon claire les modalités des opérations de vote et, en particulier, les critères de comptabilisation et de détermination des votes nuls ou blancs ;
- au cas où l'expression de vote serait matérialisée par l'apposition sur la carte de vote d'une étiquette comportant un code-barres identifiant le candidat, cette étiquette ne doit pouvoir être décollée sans être irrémédiablement altérée.

III. - Dépouillement
1. A l'issue des opérations de vote mais avant le dépouillement, un test doit être réalisé sur un lot aléatoire de bulletins, sous la conduite de la commission électorale.
2. Les opérations de dépouillement doivent être effectuées par un ordinateur isolé ou plusieurs ordinateurs reliés en réseau local, ces ordinateurs ne devant en aucun cas comporter le fichier nominatif des votants ni le ou les fichiers de correspondance entre le nom des électeurs et les numéros qui leur sont attribués aléatoirement.
3. Une solution de secours comportant notamment un dispositif complémentaire en cas de défaillance du système doit être prévue.
4. Le système doit comporter un dispositif technique rejetant tout bulletin déjà lu.
5. Le système automatisé doit être bloqué après le dépouillement de sorte qu'il soit impossible de reprendre ou de modifier les résultats après la décision de clôture du dépouillement prise par la commission électorale.
6. Les voix doivent être comptabilisées par lot de sorte que les expressions individuelles de vote ne puissent être isolées et rapprochées de l'identité du votant.

IV. - Emargement
Le rapprochement du fichier des numéros attribués aux électeurs et du fichier nominatif des électeurs, nécessaire pour l'établissement de la liste d'émargement, doit être réalisé en présence de la commission électorale assistée de l'éventuel expert informatique. La liste d'émargement ne comporte que l'identité des électeurs telle que prévue aux articles L. 18 et L. 19 du code électoral ou par le protocole, le cas échéant, l'identification du collège électoral, ainsi que la mention attestant la participation au vote, à l'exclusion de toute autre information.

V. - Contrôle a posteriori par le juge de l'élection
Tous les fichiers supports (copie des programmes source et exécutables, matériels de vote, fichiers d'émargement, de résultats, sauvegardes) doivent être conservés sous scellés jusqu'à l'épuisement des délais de recours contentieux. Cette conservation doit être assurée sous le contrôle de la commission électorale dans des conditions garantissant le secret du vote. Obligation doit être faite, le cas échéant, au prestataire de services de transférer l'ensemble de ces supports à la personne ou au tiers nommément désigné pour assurer la conservation des supports. Sauf action contentieuse née avant l'épuisement des délais de recours, il est procédé à la destruction de ces documents sous le contrôle de la commission électorale.


Le président,
J. Fauvet