J.O. Numéro 159 du 11 Juillet 1998       J.O. disponibles       Alerte par mail       Lois,décrets       codes       AdmiNet

Texte paru au JORF/LD page 10694

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Ordonnance no 98-581 du 8 juillet 1998 portant actualisation et adaptation des règles relatives aux garanties de recouvrement et à la procédure contentieuse en matière d'impôts en Polynésie française


NOR : INTX9700172R


Le Président de la République,
Sur le rapport du Premier ministre, du ministre de l'intérieur et du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie,
Vu la Constitution, et notamment ses articles 38 et 74 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi organique no 96-312 du 12 avril 1996 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;
Vu la loi no 98-145 du 6 mars 1998 portant habilitation du Gouvernement à prendre, par ordonnances, les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du droit applicable outre-mer ;
Vu l'avis de l'assemblée de la Polynésie française en date du 9 avril 1998 ;
Vu l'avis du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en date du 30 juin 1998 ;
Le Conseil d'Etat entendu ;
Le conseil des ministres entendu,
Ordonne :
TITRE Ier
REGLES RELATIVES AUX GARANTIES
DE RECOUVREMENT DE L'IMPOT

Article 1er
I. - Le privilège du territoire de la Polynésie française en matière de contributions, droits et taxes de toute nature s'exerce, avant tout autre, sur les meubles et les effets mobiliers appartenant aux redevables en quelque lieu qu'ils se trouvent.
II. - Les dispositions du I ci-dessus sont applicables aux taxes communales assimilées aux contributions directes ; toutefois, le privilège créé au profit de ces taxes prend rang immédiatement après celui du territoire de la Polynésie française.
III. - Les privilèges prévus aux I et II ci-dessus sont étendus dans les mêmes conditions et au même rang que les droits en principal à l'ensemble des majorations et pénalités d'assiette et de recouvrement appliquées à ces droits.

Article 2
Pour le recouvrement des impositions de toute nature et amendes fiscales confié aux comptables publics, le territoire de la Polynésie française a une hypothèque légale sur tous les biens immeubles des redevables. Cette hypothèque prend rang à la date de son inscription au bureau des hypothèques. Elle ne peut être inscrite qu'à partir de la date de mise en recouvrement des impositions et pénalités y afférentes lorsque celles-ci résultent d'une procédure de redressement ou d'imposition d'office ou à partir de la date à laquelle le contribuable a encouru une majoration ou pénalité pour défaut de paiement.

Article 3
I. - Les dépositaires, détenteurs ou débiteurs de sommes appartenant ou devant revenir aux redevables d'impôts, de pénalités et de frais accessoires dont le recouvrement est garanti par le privilège du territoire de la Polynésie française sont tenus, sur la demande qui leur en est faite sous forme d'avis à tiers détenteur notifié par le comptable chargé du recouvrement, de verser, au lieu et place des redevables, les fonds qu'ils détiennent ou qu'ils doivent, à concurrence des sommes dues par ces redevables. Ces dispositions s'appliquent également aux gérants, administrateurs, directeurs ou liquidateurs de sociétés pour les impositions dues par celles-ci.
II. - L'avis à tiers détenteur a pour effet d'affecter, dès réception, les sommes dont le versement est ainsi demandé au paiement des impositions privilégiées, quelle que soit la date à laquelle les créances même conditionnelles ou à terme que le redevable possède à l'encontre du tiers détenteur deviennent effectivement exigibles.
Lorsqu'une personne est simultanément destinataire de plusieurs avis au nom du même débiteur, émanant des comptables chargés du recouvrement respectivement des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, elle doit, en cas d'insuffisance des fonds, exécuter ces avis en proportion de leurs montants respectifs.

Article 4
I. - Lorsque le recouvrement des impositions de toute nature et des pénalités fiscales dues par une société à responsabilité limitée a été rendu impossible par des manoeuvres frauduleuses ou l'inobservation répétée des diverses obligations fiscales, le ou les gérants majoritaires peuvent être rendus solidairement responsables avec cette société du paiement de ces impositions et pénalités.
A cette fin, le comptable chargé du recouvrement assigne le ou les gérants devant le président du tribunal de première instance du lieu du siège social.
Les voies de recours qui peuvent être exercées contre la décision du président du tribunal de première instance ne font pas obstacle à ce que le comptable prenne des mesures conservatoires en vue de préserver le recouvrement de la créance du territoire de la Polynésie française.
II. - Lorsque le dirigeant d'une société, d'une personne morale ou de tout autre groupement est responsable de manoeuvres frauduleuses ou de l'inobservation grave et répétée des obligations fiscales qui ont rendu impossible le recouvrement des impositions et des pénalités dues par la société, la personne morale ou le groupement, ce dirigeant peut, s'il n'est pas déjà tenu au paiement des dettes sociales en application d'une autre disposition, être déclaré solidairement responsable du paiement de ces impositions et pénalités par le président du tribunal de première instance dans les mêmes conditions que celles prévues au I ci-dessus. Cette disposition est applicable à toute personne exerçant en droit ou en fait, directement ou indirectement, la direction effective de la société, de la personne morale ou du groupement.
TITRE II
REGLES RELATIVES AU CONTENTIEUX DE L'IMPOT
Chapitre Ier
Le contentieux de l'assiette

Article 5

Les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés pour le compte du territoire de la Polynésie française relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir soit la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant de l'application d'une disposition législative ou réglementaire.
Sont instruites et jugées selon les règles du présent chapitre toutes actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice de droits à déduction, fondées sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure.
Lorsque cette non-conformité a été révélée par une décision juridictionnelle, l'action en restitution des sommes versées ou en paiement des droits à déduction non exercés ou l'action en réparation du préjudice subi ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la quatrième année précédant celle où la décision révélant la non-conformité est intervenue.

Article 6
Lorsque l'imposition a été établie selon la procédure forfaitaire ou d'évaluation administrative, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la réduction de l'imposition.

Article 7
Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition.

Article 8
En cas de contestation des pénalités appliquées à un contribuable au titre des impôts directs et des taxes assimilées, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration.

Article 9
En matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires ou de taxes assimilées, les décisions rendues par le président du gouvernement du territoire de la Polynésie française sur les réclamations contentieuses et qui ne donnent pas entière satisfaction aux intéressés peuvent être portées devant le tribunal administratif de Papeete.
Chapitre II
Le contentieux du recouvrement

Article 10
Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics doivent être adressées au trésorier-payeur général. Les contestations ne peuvent porter que :
- soit sur la régularité en la forme de l'acte ;
- soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt.
Les recours contre les décisions prises par le trésorier-payeur général sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article 9 ci-dessus.

Article 11
Lorsqu'une tierce personne, mise en cause en vertu de dispositions autres que celles du code des impôts directs du territoire de la Polynésie française, conteste son obligation d'acquitter la dette, le tribunal administratif de Papeete, lorsqu'il est compétent, attend pour statuer que la juridiction civile ait tranché la question de l'obligation.
TITRE III
DISPOSITIONS DIVERSES

Article 12

Les dispositions de la présente ordonnance ne sont pas applicables en matière de droits de douanes et de droits et taxes perçus comme en matière de douane.

Article 13
Le Premier ministre, le garde des sceaux, ministre de la justice, le ministre de l'intérieur, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, le secrétaire d'Etat à l'outre-mer et le secrétaire d'Etat au budget sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l'exécution de la présente ordonnance, qui sera publiée au Journal officiel de la République française.

Fait à Paris, le 8 juillet 1998.