J.O. Numéro 44 du 21 Février 1998
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Texte paru au JORF/LD page 02755
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Décision nos 97-2113/2119/2146/2154/ 2234/2235/2242/2243 du 20 février 1998
NOR : CSCX9800474S
AN, PARIS (2e CIRCONSCRIPTION)
M. BENOIT BRASILIER, M. BERNARD RAQUIN, Mme LYNE COHEN-SOLAL, M. YVES FREMION-DANET, M. ROMAIN CAZAUMAYOU, M. CHRISTIAN LANÇON
Le Conseil constitutionnel,
Vu 1o les requêtes no 97-2113 et no 97-2146 présentées par M. Benoît Brasilier, demeurant à Paris (6e arrondissement), enregistrées les 27 mai et 5 juin 1997 au secrétariat général du Conseil constitutionnel, tendant la première à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 25 mai 1997 dans la 2e circonscription de Paris pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale et la deuxième à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans cette même circonscription les 25 mai et 1er juin 1997 ;
Vu le mémoire en réplique présenté par M. Brasilier, enregistré comme ci-dessous le 6 août 1997 ;
Vu les observations complémentaires présentées par M. Brasilier, enregistrées comme ci-dessus le 26 janvier 1998 ;
Vu 2o les requêtes no 97-2119 et no 97-2154 présentées par M. Bernard Raquin, demeurant à Paris (5e arrondissement), enregistrées les 30 mai, 6 et 9 juin 1997 au secrétariat général du Conseil constitutionnel, tendant la première à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 25 mai 1997 dans la 2e circonscription de Paris pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale et la deuxième à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans cette même circonscription les 25 mai et 1er juin 1997 ;
Vu 3o la requête no 97-2234 présentée par Mme Lyne Cohen-Solal, demeurant à Paris (5e arrondissement), enregistrée le 12 juin 1997 au secrétariat général du Conseil constitutionnel, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 25 mai et 1er juin 1997 dans la 2e circonscription de Paris pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu les mémoires en défense et le rectificatif présentés par M. Jean Tiberi, député, enregistrés comme ci-dessus les 15 et 21 juillet 1997 ;
Vu le mémoire en réplique et son additif présentés par Mme Cohen-Solal, enregistrés comme ci-dessus les 17 novembre et 11 décembre 1997 ;
Vu les observations complémentaires présentées par M. Tiberi, enregistrées comme ci-dessus le 19 novembre 1997 ;
Vu les observations complémentaires présentées par M. Tiberi, enregistrées comme ci-dessus les 5 janvier et 6 février 1998 ;
Vu les observations complémentaires et les pièces rectificatives présentées par Mme Cohen-Solal, enregistrées comme ci-dessus les 11 février et 12 février 1998 ;
Vu les observations et les pièces complémentaires présentées par M. Tiberi, enregistrées comme ci-dessus les 12, 16, 18 et 19 février 1998 ;
Vu les observations et les pièces complémentaires présentées par Mme Cohen-Solal, enregistrées comme ci-dessus le 13 février 1998 ;
Vu la demande d'audition présentée par Mme Cohen-Solal ;
Vu 4o la requête no 97-2235 présentée par M. Yves Fremion-Danet, demeurant à Paris (5e arrondissement), enregistrée le 12 juin 1997 au secrétariat général du Conseil constitutionnel, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 25 mai et 1er juin 1997 dans la 2e circonscription de Paris pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu 5o la requête no 97-2242 présentée par M. Romain Cazaumayou, demeurant à Paris (10e arrondissement), enregistrée le 12 juin 1997 au secrétariat général du Conseil constitutionnel, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 25 mai et 1er juin 1997 dans la 2e circonscription de Paris pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu 6o la requête no 97-2243 présentée par M. Christian Lançon, demeurant à Paris (13e arrondissement), enregistrée le 12 juin 1997 au secrétariat général du Conseil constitutionnel, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 25 mai et 1er juin 1997 dans la 2e circonscription de Paris pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu la décision de la section chargée de l'instruction en date du 6 janvier 1998 ;
Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus les 12, 19 juin et 19 septembre 1997 ;
Vu les décisions de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques approuvant les comptes de campagne de M. Tiberi et de Mme Cohen-Solal, enregistrées comme ci-dessus le 5 novembre 1997 ;
Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
Considérant que les requêtes no 97-2113 et 97-2119, dirigées contre les résultats du premier tour du scrutin, sont irrecevables dans la mesure où le scrutin a été suivi d'un second tour ; que les autres requêtes susvisées sont dirigées contre les opérations électorales qui se sont déroulées les 25 mai et 1er juin 1997 dans la 2e circonscription de Paris et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer pour une seule décision ;
Sur l'existence d'une manoeuvre dans l'élaboration des listes électorales du 5e arrondissement :
Considérant qu'il résulte de l'article L. 25 du code électoral que les décisions de la commission administrative chargée de la révision des listes électorales ne peuvent être contestées par les électeurs intéressés ou par le préfet que devant le tribunal d'instance, sous le contrôle éventuel de la Cour de cassation ; qu'ainsi, il n'appartient pas au Conseil constitutionnel, juge de l'élection, de se prononcer sur la régularité des inscriptions sur la liste électorale, sauf dans le cas où il y a eu une manoeuvre susceptible de porter atteinte à la sincérité du scrutin ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'enquête diligentée par le Conseil constitutionnel, que, dans le 5e arrondissement de Paris, un nombre important d'électeurs sont domiciliés dans des logements sociaux de la ville de Paris, alors qu'ils sont inconnus des organismes gestionnaires de ces immeubles ; que, dans certains cas, il s'avère que ces personnes résident en réalité dans des logements de la ville de Paris situés dans d'autres arrondissements ; qu'il résulte également de l'instruction que des électeurs sont domiciliés dans des bâtiments inexistants ou insusceptibles d'accueillir le nombre d'électeurs inscrits et qu'un nombre anormal d'électeurs est domicilié dans les appartements de la mairie du 5e arrondissement ; que les particularités qui s'attachent aux changements de domicile dans les grandes villes ne suffisent pas à expliquer toutes ces constatations ; qu'au surplus, l'instruction a révelé que des certificats d'hébergement de complaisance avaient été établis par des personnes liées au candidat élu ; que ces constatations ne sont explicables, pour beaucoup d'entre elles, qu'en raison des agissements ou de l'inaction d'organismes liés à la mairie de Paris ou à celle du 5e arrondissement, ou encore en raison du comportement de personnes liées ou apparentées au candidat élu ;
Considérant qu'il résulte en outre de l'instruction que plusieurs centaines de cartes d'électeurs ne sont pas parvenues à leurs destinataires, alors pourtant que ces derniers n'ont pas indiqué de changement de domicile lorsqu'ils les ont retirées ;
Considérant que le cumul de ces faits, graves et répétés, au sein du même arrondissement, est de nature à accréditer l'existence d'une manoeuvre dans les conditions d'établissement de la liste électorale ;
Considérant, toutefois, qu'il résulte de l'instruction que le nombre des électeurs dont l'inscription peut être suspectée de fraude et qui ont voté au second tour du scrutin est sensiblement inférieur à l'écart des voix entre les candidats à ce tour, qui est de 2 725 voix ; que la manoeuvre en cause, aussi condamnable soit-elle, n'a pu dès lors inverser le résultat du scrutin ;
Sur les irrégularités dans l'usage des procurations et des cartes électorales :
Considérant que le grief tiré de ce que des personnes âgées auraient été démarchées par des agents de la ville de Paris pour leur faire signer des procurations n'est assorti d'aucun commencement de preuve ;
Considérant que Mme Cohen-Solal soutient que 1 233 procurations ont été utilisées pour le second tour de scrutin, alors qu'en additionnant les procurations données pour le seul second tour, celles valables pour les deux tours et celles de longue durée, le nombre des procurations émises n'était que de 1 130 ; que, toutefois, il ressort de l'examen du registre des procurations établi par la mairie du 5e arrondissement que 1 245 procurations pouvaient être valablement utilisées pour le second tour ; que, par suite, le grief tiré de ce que le nombre de procurations utilisées a été supérieur au nombre de procurations émises doit être écarté ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 73 du code électoral : « Chaque mandataire ne peut disposer de plus de deux procurations, dont une seule établie en France. Si ces limites ne sont pas respectées, la ou les procurations qui ont été dressées les premières sont seules valables ; la ou les autres sont nulles de plein droit » ; que Mme Cohen-Solal soutient que ces dispositions ont été méconnues dans huit cas ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que, dans trois de ces cas, l'une au moins des procurations a été établie hors de France ; que, dans trois autres cas, le mandataire n'était titulaire que d'une seule procuration ; que, dans les deux derniers cas, si deux procurations ont effectivement été dressées en France au profit du même mandataire, l'une de ces deux procurations n'a pas été validée et a été déclarée nulle de plein droit lors de sa réception à la mairie ; que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance de l'article L. 73 du code électoral doit être écarté ;
Considérant qu'aux termes de l'article R. 25 du code électoral : « Les cartes électorales sont distribuées au domicile des électeurs, par les soins du maire. Cette distribution doit être achevée en toute hypothèse trois jours avant le jour du scrutin. Les cartes qui n'ont pu être remises à leur titulaire font retour à la mairie. Elles y sont conservées à la disposition des intéressés jusqu'au jour du scrutin inclus, si la mairie se trouve constituer dans la commune l'unique bureau de vote. Dans les communes où existent plusieurs bureaux de vote, elles sont remises le jour du scrutin au bureau de vote intéressé et y sont tenues à la disposition de leur titulaire. Dans l'un et l'autre cas, elles ne peuvent être délivrées à l'électeur que sur le vu de pièces d'identité ou après authentification de son identité par deux témoins inscrits sur les listes du même bureau de vote » ; qu'il résulte de l'instruction qu'un certain nombre des cartes retournées à la mairie du 5e arrondissement ont pu être retirées par leurs destinataires dans les locaux de cette mairie ; qu'en outre, le retrait de plusieurs cartes a parfois été effectué par une seule personne ; que, si elles contreviennent aux dispositions précitées, il ne résulte pas de l'instruction que ces pratiques, au demeurant courantes dans les mairies d'arrondissement de Paris, soient constitutives d'une fraude ; que, si Mme Cohen-Solal soutient que la régularité de l'inscription sur la liste électorale des électeurs qui ont pu retirer leur carte à la mairie et qui avaient changé d'adresse n'a pas été contrôlée par la commission chargée de réviser les listes électorales, cette allégation n'est pas corroborée par les pièces du dossier ; qu'il ressort au contraire de la comparaison du registre des retraits de cartes tenu par la mairie du 5e arrondissement et du registre des radiations de la liste électorale opérées au début du mois de janvier 1998 par la commission compétente que, dans nombre de cas, les électeurs qui étaient venus retirer leur carte en mairie ont été par la suite radiés de la liste électorale ; que, dans ces conditions, ces irrégularités, pour blâmables qu'elles soient, n'ont pas été de nature à modifier le résultat du scrutin ;
Sur les irrégularités de la campagne électorale :
Considérant que le grief tiré de ce qu'auraient été tenus, pendant la campagne électorale précédant le premier tour, des propos diffamatoires destinés à discréditer le « Parti humaniste » n'est assorti d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
Considérant que, s'il est allégué qu'entre les deux tours de scrutin, des personnels municipaux auraient téléphoné ou envoyé des lettres aux électeurs qui s'étaient abstenus lors du premier tour du scrutin, le concours d'agents municipaux à la campagne de M. Tiberi n'est pas établi ;
Considérant que la mention « Jean Tiberi député de Paris vous souhaite la bienvenue », figurant sur un panneau lumineux situé à l'intérieur de la mairie du 5e arrondissement, ne saurait être regardée comme l'utilisation à des fins de propagande électorale d'un élément du mobilier urbain ;
Considérant qu'il est soutenu que M. Tiberi aurait exercé des pressions de nature à influencer les électeurs ; qu'en particulier des logements sociaux auraient été attribués la veille du second tour du scrutin par le maire de Paris ; que, cependant, Mme Cohen-Solal ne donne qu'un exemple isolé, qui ne suffit pas à établir la réalité de la pression alléguée ;
Considérant, enfin, que, si Mme Cohen-Solal dénonce la distribution et l'affichage, constatés par huissier le 31 mai, d'une nouvelle liste de personnes soutenant la candidature de M. Tiberi, ainsi que de tracts nouveaux comportant des imputations calomnieuses et diffamatoires à l'encontre des partisans de la liste adverse, les tracts en cause, qui se bornaient à appeler à voter pour M. Tiberi et à dénoncer le programme de la candidate socialiste, ne comportaient pas d'éléments nouveaux et n'ont pas excédé les limites de la polémique électorale ; que le caractère massif de leur distribution n'est pas établi ;
Sur l'organisation et le déroulement des opérations de vote :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 55 du code électoral : « Les bulletins de vote déposés par les candidats ou les listes, en application de l'article L. 58, ainsi que ceux adressés au maire par la commission de propagande sont placés, dans chaque bureau, à la disposition des électeurs, sous la responsabilité du président du bureau de vote. Les candidats désirant faire assurer ce dépôt par le maire doivent lui remettre les bulletins au plus tard à midi, la veille du scrutin. Les bulletins peuvent être remis directement par les candidats ou par les listes au président du bureau. » ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence, lors du premier tour du scrutin, des bulletins de vote de certains candidats dans les bureaux de vote ait été imputable aux services de la mairie du 5e arrondissement ou à la commission de propagande ; qu'il résulte au contraire de l'instruction que les candidats en cause, M. Raquin et M. Brasilier, ont omis de fournir à la date limite fixée par les dispositions précitées leurs bulletins de vote à la mairie ; que, par suite, celle-ci était dans l'impossibilité de procéder au dépôt de leurs bulletins dans les bureaux de vote ;
Considérant que, s'il est allégué que, lors du second tour du scrutin, des moyens de transport municipaux ont été mis à la disposition des personnes âgées des foyers gérés par la ville de Paris pour leur permettre d'aller voter, ce fait ne constitue pas, par lui-même, un moyen de pression de nature à fausser la sincérité du scrutin ;
Considérant que, s'il résulte de l'instruction que, lors du second tour du scrutin, l'un des électeurs du bureau de vote no 9 du 5e arrondissement a déclaré avoir subi des pressions de la part de collaborateurs du maire de cet arrrondissement pour aller voter, un tel incident, qui n'est d'ailleurs pas mentionné au procès-verbal et qui concerne un électeur qui n'a pas pris part au vote, est resté isolé ; que la preuve de l'exercice d'autres pressions sur les électeurs le jour du scrutin n'est pas apportée par la requérante ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 65 du code électoral : « Dès la clôture du scrutin, il est procédé au dénombrement des émargements. Ensuite, le dépouillement se déroule de la manière suivante : l'urne est ouverte et le nombre des enveloppes est vérifié... Les enveloppes contenant les bulletins sont regroupées par paquets de 100. Ces paquets sont introduits dans des enveloppes spécialement réservées à cet effet. Dès l'introduction d'un paquet de 100 bulletins, l'enveloppe est cachetée et y sont apposées les signatures du président du bureau de vote et d'au moins deux assesseurs représentant, sauf liste ou candidat unique, des listes ou des candidats différents. » ; qu'il ressort de l'examen du procès-verbal du bureau de vote no 21 du 6e arrondissement que ces prescriptions n'y ont pas été respectées ; qu'en particulier le décompte des émargements et le décompte des bulletins ont été effectués simultanément ; que, toutefois, cette irrégularité est sans incidence sur la sincérité du scrutin, dès lors qu'il n'est pas établi qu'elle aurait eu pour effet de favoriser des fraudes ou des erreurs de calcul ; que, s'il est allégué que, dans ce bureau de vote, la liste d'émargements comporte, en marge du nom d'un même électeur, des signatures présentant des différences qui établiraient que le vote n'a pas été effectué par la même personne aux deux tours du scrutin, il résulte de l'examen de la liste que les différences alléguées ne sont pas probantes ;
Considérant que le grief tiré de ce que des irrégularités analogues dans les émargements auraient été commises dans d'autres bureaux de vote n'est pas étayé par les pièces du dossier ; qu'au demeurant aucune réclamation relative aux conditions d'émargement des électeurs n'a été portée sur les procès-verbaux des bureaux de vote en cause ; qu'il n'est pas non plus établi que, dans certains bureaux de vote, des personnes auraient pu voter sans présenter une pièce d'identité, ni que des personnes auraient accompagné dans l'isoloir des électeurs âgés, ni que certains présidents de bureaux de vote se seraient opposés à des inscriptions au procès-verbal ;
Considérant que les griefs tirés de ce que des surcharges n'auraient pas été paraphées sur les procès-verbaux de dépouillement des bureaux de vote et de ce que le tableau de recensement des résultats serait illisible et non paraphé ne sont pas établis ;
Sur les griefs relatifs aux comptes de campagne :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 52-8 du code électoral : « Les dons consentis par une personne physique dûment identifiée pour le financement de la campagne d'un ou plusieurs candidats lors des mêmes élections ne peuvent excéder 30 000 F. Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués. Tout don de plus de 1 000 F consenti à un candidat en vue de sa campagne doit être versé par chèque » ; qu'aux termes de l'article L. 52-12 du même code : « Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, hors celle de la campagne officielle, par lui-même ou pour son compte, au cours de la période mentionnée à l'article L. 52-4. Sont réputées faites pour son compte les dépenses exposées directement au profit du candidat, et avec l'accord de celui-ci, par les partis et groupements politiques qui ont été créés en vue de lui apporter leur soutien ou qui lui apportent leur soutien. Le candidat estime et inclut, en recettes et en dépenses, les avantages directs ou indirects, les prestations de services et dons en nature dont il a bénéficié. Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit » ;
En ce qui concerne le compte de campagne de M. Tiberi :
Considérant que, si Mme Cohen-Solal fait valoir que ne figurent pas dans le compte de M. Tiberi des dépenses relatives aux réunions, réceptions et déplacements intervenus dans le cadre de sa campagne, elle n'apporte aucune précision quant à l'émission de ces dépenses ; que, contrairement à ce qui est allégué, la dépense engagée par le candidat pour mobiliser les électeurs qui s'étaient abstenus au premier tour n'a pas été sous-évaluée ; que des factures téléphoniques d'un montant de 13 809 F ont été réglées par le candidat ; que, par suite, il n'y a pas lieu de modifier le montant des dépenses de campagne de M. Tiberi tel qu'il a été fixé par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques ;
En ce qui concerne le compte de Mme Cohen-Solal :
Considérant qu'il ressort de l'examen du compte de campagne de Mme Cohen-Solal que tous les dons de personnes physiques d'un montant supérieur à 1 000 F ont été versés par chèque ; que, par suite, les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral n'ont pas été méconnues ;
Considérant que, si Mme Cohen-Solal, pour acquitter les dépenses engagées pour sa campagne électorale, a contracté un emprunt bancaire d'un montant de 170 000 F, dont le remboursement est prévu au 31 décembre 1998, elle n'a pas, ce faisant, eu égard aux garanties présentées par un emprunt auprès d'un établissement bancaire, mis le juge de l'élection dans l'impossibilité de s'assurer du respect de la législation sur le financement des campagnes électorales, laquelle impose, en particulier, que la somme correspondant au montant de l'emprunt sera effectivement acquittée par la candidate et non par un tiers ;
Considérant que, contrairement à ce qui est allégué par M. Tiberi, Mme Cohen-Solal a tenu une seule réunion à la Maison de la mutualité, le jeudi 29 mai 1997 ; que les frais correspondant à la location de cette salle figurent dans le compte de campagne de l'intéressée ; que, si la candidate a bénéficié d'une remise de 3 900 F pour la location de cette salle, cette remise était justifiée, conformément aux pratiques tarifaires de l'organisme gestionnaire, par le fait que la location de la salle avait été décidée le mardi 27 mai et que la salle n'était pas réservée le 29 mai ;
Considérant que les frais correspondant à la duplication et à la diffusion de la lettre adressée le 20 mai 1997 par Mme Cohen-Solal à l'ensemble des architectes de la circonscription ont été intégrés dans le compte de campagne de l'intéressée ; que le coût correspondant aux droits de reproduction d'une caricature réalisée par un dessinateur connu et utilisée par la candidate sur l'un de ses tracts n'avait pas à être pris en compte, alors qu'il s'agissait d'un dessin offert par l'intéressé à Mme Cohen-Solal ; que les articles de presse qui, dans les semaines précédant le scrutin, ont mis en cause les pratiques électorales de la mairie de Paris, et en particulier celles du 5e arrondissement, ne constituent pas des dépenses électorales effectuées au profit de Mme Cohen-Solal ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de modifier le montant des dépenses de campagne de Mme Cohen-Solal fixé par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de procéder à l'audition demandée, que les requêtes doivent être rejetées,
Décide :
Art. 1er. - Les requêtes de MM. Benoît Brasilier, Bernard Raquin, Mme Lyne Cohen-Solal, MM. Yves Fremion-Danet, Romain Cazaumayou et Christian Lançon sont rejetées.
Art. 2. - Il n'y a lieu de prononcer l'inéligibilité ni de M. Tiberi ni de Mme Cohen-Solal.
Art. 3. - La présente décision sera notifiée au président de l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 février 1998, où siégeaient : MM. Roland Dumas, président, Georges Abadie, Michel Ameller, Jean Cabannes, Maurice Faure, Yves Guéna, Alain Lancelot, Mme Noëlle Lenoir et M. Jacques Robert.
Le président,
Roland Dumas