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Législation communautaire en vigueur

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Document 399D0268

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[ 08.60 - Aides accordées par les États et autres subventions ]


399D0268
1999/268/CE: Décision de la Commission du 20 janvier 1999 concernant l'acquisition de terres en vertu de la loi sur les compensations [notifiée sous le numéro C(1999) 42] (Le texte en langue allemande est le seul faisant foi.)
Journal officiel n° L 107 du 24/04/1999 p. 0021 - 0048



Texte:


DÉCISION DE LA COMMISSION
du 20 janvier 1999
concernant l'acquisition de terres en vertu de la loi sur les compensations
[notifiée sous le numéro C(1999) 42]
(Le texte en langue allemande est le seul faisant foi.)
(1999/268/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 93, paragraphe 2, premier alinéa,
après avoir invité les intéressés à présenter leurs observations conformément audit article et vu ces observations,
considérant ce qui suit:
I
Par décision du 18 mars 1998, la Commission a ouvert la procédure d'examen selon l'article 93, paragraphe 2, du traité à l'encontre de l'acquisition de terres en vertu de la loi sur les compensations (ci-après dénommée "EALG") [lettre SG(98) D/2532 du 30 mars 1998].
Dans cette lettre, la Commission invitait l'Allemagne à présenter ses observations dans le délai de un mois à compter de sa réception. Selon la procédure de l'article 93, paragraphe 2, les autres États membres et autres intéressés ont également été informés des faits et invités à présenter leurs observations par la publication de la lettre de mise en demeure au Journal officiel des Communautés européennes(1)
La Commission a ouvert la procédure d'examen parce qu'elle n'a pas pu acquérir la certitude que la base juridique en vigueur depuis 1994 excluait l'application de mesures à considérer comme incompatibles avec le marché commun.
La Commission a posé la question de la délimitation des mesures en cause pour déterminer s'il s'agit d'aides au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité, d'une part, ou d'autres mesures destinées à compenser des expropriations n'ayant pas d'incidence sur la réglementation des aides, d'autre part. Si la Commission a reconnu la possibilité d'accorder des compensations aux personnes dites "réinstallées", l'octroi de compensations de ce type aux personnes dites "nouvellement installées" et à certaines personnes morales l'a amenée à formuler des doutes.
En ce qui concerne les mesures qualifiées d'aides, la Commission a, par ailleurs, des doutes quant au respect des plafonds d'intensité d'aide pour l'acquisition de terrains agricoles [conformément à l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité, 35 % pour les superficies agricoles des zones non défavorisées].
De plus, la procédure d'examen a pour objet d'établir si, et dans quelle mesure, les dispositions prévues constituent une discrimination incompatible, en particulier, avec l'article 6 et les articles 52 et suivants du traité au détriment des citoyens de l'Allemagne de l'Ouest ou d'autres citoyens de la Communauté.
Par lettre du 29 mai 1998, l'Allemagne a fait parvenir ses observations à la Commission (voir partie II). D'autres États membres n'ont pas formulé d'observations, mais des centaines d'intéressés l'ont fait (voir partie III). L'Allemagne a, par la suite, fait parvenir des observations complémentaires par lettres du 22 octobre 1998 et du 16 décembre 1998 ainsi que dans une réunion en date du 18 décembre 1998.
II
L'Allemagne a formulé l'avis suivant au sujet de la communication de la Commission, relative à l'ouverture de la procédure d'examen.
1. Applicabilité des articles 92, 93 et 94 du traité
L'Allemagne estime que l'acquisition de terres ne relève pas des règles en matière d'aides visées aux articles 92, 93 et 94 du traité, car il s'agit là d'un régime qui, du point de vue temporel, aurait dû être adopté par la République démocratique allemande (ci-après dénommée "RDA") et dont le contenu concerne le règlement de questions patrimoniales pendantes qui, par sa nature de mesure générale, ne relève pas des dispositions du traité en matière d'aides. L'Allemagne poursuit son argumentation de la façon suivante.
La réglementation en matière d'acquisition de terres visée à l'EALG fait partie du processus de reconversion, déjà entamé par la RDA, du régime de la propriété foncière agricole ou sylvicole pour l'adapter à l'ordre juridique de la République fédérale d'Allemagne (ci-après dénommée "RFA") et constitue, de ce fait, une mesure générale issue de circonstances historiques uniques. Ses préalables juridiques et ses orientations de fond étaient déjà inscrits dans le premier traité d'État de la RDA et le traité d'unification.
1.1. Traité d'État du 18 mai 1990
La base essentielle de l'union monétaire, économique et sociale créée par le traité d'État du 18 mai 1990 (traité sur la création d'une union monétaire, économique et sociale entre la République fédérale d'Allemagne et la République démocratique allemande) résidait dans la création d'un régime de droit privé de la propriété. Dans le traité, les deux parties déclarent adhérer à l'ordre libéral, démocratique, fédéral et social ainsi qu'à l'État de droit (article 2, paragraphe 1, première phrase) et à la propriété privée (article 1er, paragraphe 3). La RDA s'engage formellement à organiser le droit de la République démocratique allemande selon les principes de l'ordre susmentionné (protocole commun sur les lignes directrices, A.I, point 1). Par le traité d'État, la RDA a ainsi pris l'engagement de créer, pour la "propriété du peuple", un régime de la propriété inspiré des principes de l'État de droit et de l'économie privée.
1.2. Déclaration commune du 15 juin 1990
Les questions patrimoniales pendantes posaient cependant des problèmes particuliers et les parties contractantes sont convenues, avant la ratification du traité d'État le 15 juin 1990, de faire une déclaration commune sur le règlement des questions patrimoniales pendantes. En raison même de l'objectif du régime envisagé, il devait en découler une réduction régionale de la sphère d'action sur le territoire de la RDA, réduction qui, la RDA n'ayant jamais fait partie du marché commun, n'était pas redevable de l'application des critères du traité CE, même dans le cas du règlement de questions patrimoniales pendantes. Il ne s'agissait pas davantage de l'adaptation des entreprises au début de transformation de la situation concurrentielle, mais de mesures indispensables à prendre dans le cadre de la restructuration de la propriété sur un arrière-plan de décennies de préjudices personnels subis par les intéressés. Par conséquent, l'objectif de la mesure ne présentait aucun lien avec les missions de la Communauté au sens du traité CE. L'objet de la mesure envisagée, circonscrit au règlement des questions patrimoniales pendantes, est précisé dans le préambule de la déclaration commune: "La division de l'Allemagne, les flux migratoires d'est en ouest qu'elle a entraînés et les ordres juridiques différents dans les deux États allemands ont donné lieu à de nombreux problèmes patrimoniaux qui concernent beaucoup de citoyens de la République démocratique allemande et de la République fédérale d'Allemagne.
Pour résoudre les questions patrimoniales qui se posent, les deux gouvernements conviennent qu'il y a lieu de mettre en place un pacte social de compensation des différents intérêts. La sécurité juridique et le caractère unique du droit ainsi que le droit à la propriété sont les principes auxquels se tiendront les gouvernements de la République démocratique allemande et de la République fédérale d'Allemagne dans la solution des problèmes patrimoniaux qui se posent. C'est la seule manière d'assurer une paix juridique durable dans l'Allemagne de demain."
En ce qui concerne les entreprises industrielles ou commerciales, c'est la RDA elle-même qui a créé la base juridique du rétablissement de la structure de la propriété privée: la loi sur la privatisation et la réorganisation du patrimoine d'État (Treuhandgesetz) du 17 juin 1990 institue le mandat de privatisation des entreprises. Cependant, les bases de la restructuration de la propriété ne concernent que les entreprises industrielles ou commerciales. La transformation des entreprises d'État en sociétés de capitaux appartenant à l'Office fiduciaire ouvrait la possibilité pour chacun de se rendre acquéreur auprès de celui-ci selon les principes de l'économie de marché. Immédiatement après - encore à l'époque de l'indépendance de la RDA - le processus de privatisation des entreprises industrielles ou autres a commencé. Des difficultés particulières ont surgi dans le cas de la restructuration du patrimoine d'État de nature agricole ou sylvicole. Si, comme dans le cas des entreprises, la loi prescrit, en principe, la privatisation de ce patrimoine, elle l'assortit de conditions restrictives, prévoyant en particulier que la privatisation et la réorganisation du patrimoine d'État de type agricole ou sylvicole doivent tenir compte des spécificités économiques, écologiques, structurelles et de propriété (article 1er, paragraphe l, première phrase, et paragraphe 6 de la loi sur la privatisation).
Eu égard aux spécificités du territoire de la réforme foncière, les deux gouvernements sont convenus, lors des négociations débouchant sur la déclaration commune, qu'une paix juridique durable ne pourrait être instaurée que si l'on tenait dûment compte des divergences d'intérêts et des tensions potentielles entre les exploitants actuels et les anciens propriétaires. Par conséquent, le préambule de la déclaration commune précise qu'il y a lieu de conclure un pacte social de compensation. En matière agricole, ce pacte a été fondé sur le principe de la non-restitution des terres aux anciens propriétaires, d'une part, et de l'impossibilité d'une option de propriété unilatérale en faveur des CPA (coopératives de production agricole), d'autre part. Dans le cadre du pacte social de compensation, il s'agissait donc de déterminer qui et dans quelles conditions allait pouvoir acquérir l'ancien territoire de la réforme foncière de propriété du peuple. La RDA avait un énorme intérêt à convenir d'une telle déclaration, car elle n'avait pu déceler aucune possibilité d'effectuer une révision des expropriations réalisées entre 1945 et 1949 (point 1 de la déclaration commune) et entendait ainsi préserver les chances de ses citoyens à l'égard de l'utilisation des terres. De plus, la RDA était également tenue de résoudre ces problèmes liés à la propriété, dans l'optique de la création d'une structure de la propriété de droit privé (point 13 de la déclaration commune). Toutefois, en raison du déroulement du processus d'unification, le temps a manqué à la RDA, de sorte que les questions patrimoniales restaient toujours sans solution.
1.3. Traité d'unification du 31 août 1990
Le traité d'unification a également vu le jour à l'époque de l'indépendance de la RDA et échappe donc au domaine d'application du traité CE. Lors des pourparlers aboutissant à la conclusion du traité, la RDA a maintenu avec opiniâtreté le point de vue qu'elle avait exprimé dans la déclaration commune.
Les questions patrimoniales n'étant toujours pas résolues, la déclaration commune est devenue partie intégrante du traité d'unification (article 41 du traité). Ce n 'est que le législateur de l'Allemagne unifiée qui a pu réaliser l'objectif du pacte social de compensation en faisant adopter le régime d'acquisition de terres prévu par l'EALG. Le législateur de l'Allemagne unifiée avait donc à rattraper un retard d'exécution d'un travail de réglementation que la RDA était dans l'impossibilité d'accomplir. Les positions juridiques relatives au territoire adhérent établies dans la déclaration commune et confirmées par la conclusion du traité d'unification avec la RDA souveraine prolongent leurs effets dans le contexte de cette réglementation. Le programme d'acquisition de terres reprend - surtout à l'initiative des nouveaux Länder - des dispositions du traité d'unification favorisant les intérêts des citoyens de la RDA que protège la clause de sauvegarde de l'article 44 de celui-ci. Dans une résolution du 19 décembre 1996, le Bundesrat a expressément réaffirmé, dans le contexte de la compensation d'intérêts prévue par le pacte social pour les questions patrimoniales pendantes, que la déclaration commune est un élément faisant partie intégrante du traité d'unification dont le respect peut être revendiqué par les nouveaux Länder devant la Cour constitutionnelle fédérale (BR-Drs. 871/96).
Selon des précisions supplémentaires sur la genèse de la mesure fournies par l'Allemagne, il apparaît qu'une réglementation modifiée n'englobant pas dans le régime d'acquisition de terres les personnes nouvellement installées résidentes sur place le 3 octobre 1990 et les personnes morales n'aurait jamais pu réunir de majorité parlementaire. Cela aurait eu pour conséquence de laisser sans solution pendant une durée imprévisible la question de la propriété des terres soumises à réforme foncière, car il aurait fallu recommencer le processus politique de formation de l'opinion, ce qui signifiait pour l'Allemagne un nouveau déchirement politique.
2. Compensation de dommages subis
L'Allemagne insiste sur la notion de dommage au sens large et explique qu'il s'agissait, en fait, de rétablir les bases d'une activité économique exercée de manière responsable. Le rétablissement aussi étendu que possible de la propriété privée et de structures de propriété équilibrées, auxquelles aucun pays ne peut renoncer, doit être compris comme une réparation d'un dommage au sens large, d'autant qu'elle est notamment motivée par les impératifs de l'intégration interne, sans parler de la stabilité politique.
L'Allemagne poursuit en affirmant que la conception de la Commission à l'égard de la compensation des préjudices manque d'envergure et ne tient pas davantage compte des particularités de la transformation et de l'intégration d'une partie d'un pays à économie d'État dans un cadre façonné par l'économie de marché.
Enfin, l'Allemagne souligne que, de plus, une réflexion axée sur des cas particuliers est irréalisable dans la pratique et risque de mettre sérieusement en péril la paix juridique dans les nouveaux Länder. D'autre part, la procédure de la preuve individuelle du dommage entraînerait la transmission d'une infinité de notifications particulières.
3. Droit d'acquisition des personnes nouvellement installées qui, à la date de référence, n'étaient pas encore en âge d'exercer une profession ou de travailler
Cette catégorie de personnes nouvellement installées appelle les observations suivantes de la part de l'Allemagne.
Ce cas n'est concevable qu'en des circonstances très particulières et ne revêt pas d'importance dans la pratique. En effet, outre l'obligation de résidence au 3 octobre 1990, le législateur a imposé la condition prévoyant que au 1er octobre 1996, l'ayant droit doit s'être installé dans une nouvelle exploitation (notion de personne nouvellement installée) et doit avoir pris à bail à long terme des terres données en location par la Treuhand (Office fiduciaire). Par ailleurs, l'octroi d'un bail à long terme était subordonné à la condition de l'exploitation en faire-valoir direct des superficies en liaison avec une qualification professionnelle appropriée à la gestion.
Dans l'hypothèse formulée par la Commission, la personne nouvellement installée n'aurait pas dû être, en 1990, en âge d'exercer une profession ou de travailler, aurait dû obtenir une qualification professionnelle entre 1990 et 1996, aurait dû s'installer ensuite dans une exploitation agricole et décrocher immédiatement un contrat de bail à long terme au 1er octobre 1996. Dans la très grande majorité des cas, les personnes nouvellement installées ont obtenu leur qualification professionnelle à l'époque de la RDA, avant 1990, et travaillaient en qualité d'employés ou d'ouvriers dans une CPA (coopérative de production agricole) ou un VEG (bien de propriété de l'État). Il n'existe cependant pas de statistique à cet égard.
4. Personnes morales ne comptant pas de personnes réinstallées
Toujours selon l'Allemagne, la possibilité d'acquisition par des personnes morales ne comptant pas de personnes réinstallées parmi les associés n'a actuellement aucune portée pratique: il n'y a d'abord guère d'entreprises ayant succédé à une CPA ne comptant pas parmi ses membres de personnes remplissant les critères applicables à une personne réinstallée. Si, par le passé, tel avait néanmoins été le cas (exceptionnel), les détails de la lettre de la Commission qui ont transpiré et, en tout état de cause, la publication de la lettre au Journal officiel des Communautés européennes ont eu pour effet d'amener les personnes morales à régulariser la situation.
5. Renoncer à une perception possible
En ce qui concerne le fait de renoncer à une perception possible, l'Allemagne est partie d'une base initiale de 3 milliards de marks allemands en faisant cependant remarquer qu'il est à prévoir que "la baisse de la valeur vénale relativisera ce montant". Aucune autre précision n'est fournie en la matière.
6. Distorsion de la concurrence et risque d'atteinte au commerce communautaire
À ce propos, les considérations suivantes sont formulées.
L'aide à l'acquisition n'influence pas la situation concurrentielle et de marché de l'exploitation en cause par rapport à ses concurrents, puisque celle-ci ne peut acquérir que des terres affermées qu'elle cultive déjà. Dans l'hypothèse de l'acquisition par des capitaux empruntés, la comparaison entre le coût des intérêts à acquitter et les fermages actuels fait apparaître un résultat neutre, de sorte que la structure de la production ainsi que celle des prix de l'exploitation restent inchangées. Il s'ensuit que l'acquisition de terres n'affecte pas le comportement de marché des exploitations agricoles; le niveau des prix et les marges ne s'en ressentent pas.
Le régime d'acquisition de terres n'ayant donc aucun effet de distorsion de concurrence, le commerce communautaire ne risque pas d'être menacé.
Il peut en résulter tout au plus une amélioration de la stabilité à long terme des exploitations, car les terres acquises échappent à l'incertitude inhérente à la prolongation nécessaire des contrats de bail. Il n'en découle cependant pas une amélioration de la position concurrentielle par rapport aux autres exploitations. En revanche, la quote-part de propriété des terres exploitées est augmentée. Dans l'ancien territoire de la RFA, la quote part de propriété des exploitations agricoles est de 51,8 %; dans les nouveaux Länder, ce taux n'atteint que 8,9 %. Le régime d'acquisition de terres vise à contribuer à réaliser une proportion entre terres affermées et terres en propriété comparable à celle des structures des anciens Länder. À titre complémentaire, on peut ajouter que, en raison des limitations du droit à disposer (inscription au livre foncier en faveur de la BVVG en cas de transfert, interdiction d'aliénation pendant vingt ans), les terres ne peuvent jouer qu'un rôle limité en tant que capitaux de garantie et servent avant tout à cautionner le prix d'achat. Cependant, une meilleure structure patrimoniale par rapport à une exploitation affermée au sens strict peut faciliter l'accès à d'autres emprunts sous forme de crédit personnel.
7. Dérogation prévue à l'article 92, paragraphe 2, point c), du traité
Dans ce contexte, l'Allemagne fait remarquer ce qui suit:
Il est vrai que l'état de fait de la "compensation des désavantages économiques causés par la division" se rattache à la scission du pays. Celle-ci n'est cependant pas le résultat de circonstances naturelles compliquant ou empêchant les relations entre la partie occidentale et la partie orientale du pays, mais repose sur des "contingences politiques" [Cour de justice, Recueil 1960, p. 343 et suivantes) (415) ad article 92, paragraphe 2, point c) du traité]. Eu égard à la réalité des faits, dans la formulation de la clause de la division, la notion de "division" n'est pas à considérer simplement comme la mise en place effective de la frontière, comme une barrière artificiellement créée, mais elle est davantage l'expression du contexte politique global qu'engendrent le tracé de la frontière et l'introduction d'un système économique dirigiste. Le verrouillage de l'ancienne RDA et la création d'une éBeBeconomie d'État centralisée étaient indissolublement liés et sont à considérer comme un processus homogène. Par conséquent, il n'est pas possible d'imputer la cause des handicaps économiques que connaissent les nouveaux Länder à la claustration matérielle, d'une part, et au système économique réglementé par l'État, d'autre part.
L'argument avancé par la Commission, selon lequel les difficultés économiques actuelles des nouveaux Länder ne sont pas dues à la division, mais à la suppression de la division, n'aurait de validité que si les causes du dénuement économique des Länder de l'est de l'Allemagne disparaissaient sans laisser de traces une fois la division surmontée et si les problèmes actuels étaient imputables à de nouvelles circonstances n'ayant rien à voir avec l'ancien cloisonnement de l'ancienne RDA ni avec son système économique dirigiste. Il est incontestable que les carences du système économique dirigiste ont survécu à la suppression de la RDA. La réalisation de l'unification allemande et l'introduction connexe de l'économie de marché en Allemagne de l'Est ne sont pas des événements ayant interrompu l'enchaînement de causalité: ils ont simplement accentué la visibilité des préjudices économiques et n'en restent pas moins déterminés par la division.
Tous les cas envisagés par le régime d'acquisition de terres comportent des préjudices. Ceux-ci sont mieux définis ci-dessus. Tous ces préjudices sont des conséquences directes de la division et résultent de ce fait de "l'accident". Le législateur était donc autorisé à éliminer ces conséquences en vue de contribuer à supprimer le décalage et à atteindre un niveau comparable à celui de l'ouest du pays.
8. Dérogation prévue à l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité
L'Allemagne n'invoque pas l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité. La réparation d'une situation d'injustice du passé ne peut pas être considérée comme une aide normale destinée à favoriser le développement économique d'une région, mais plutôt, à la rigueur, comme une aide sectorielle, à examiner, le cas échéant, dans l'optique de l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité.
9. Dérogation prévue à l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité
Dans le contexte de l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité, le gouvernement fédéral communique ce qui suit à la Commission.
Les limites tracées par le législateur allemand (50 % de parts de propriété au maximum, indice de rendement compris entre 600000 et 800000) devraient faire en sorte que l'acquisition à des conditions préférentielles conduise à un rapport équilibré entre superficies prises à bail et terres en propriété. À cet égard, l'acquisition de terres est également de nature, compte tenu du droit d'acquisition accordé aux fermiers, à éviter les déséquilibres structurels des exploitations agricoles dans les nouveaux Länder.
Pour apprécier, en l'occurrence, l'objet de la vente, il convient de considérer, du point de vue du régime des aides, que les superficies cédées de manière préférentielle sont soumises à d'importantes restrictions du droit d'aliénation, et notamment à une interdiction d'aliénation de vingt ans et à l'obligation d'exploitation en faire-valoir direct de même durée. De plus, da BVVG dispose d'un droit de résiliation au cas où, pendant la durée de l'interdiction d'aliénation, les terres seraient affectées à la construction et acquerraient de ce fait une plus grande valeur.
Dans le cas de l'acquisition par l'acheteur d'une terre qu'il prend déjà à bail pour une longue durée, rien ne change donc dans un premier temps en ce qui concerne:
- la structure, le volume ou l'intensité de la production,
- la trésorerie et la rentabilité (pour un taux d'intérêt de 7 %, la charge relative à l'emprunt de capitaux correspond environ à 5 marks allemands par point foncier).
Pour l'agriculteur, l'avantage réside uniquement dans le fait d'obtenir, au terme d'une période de vingt ans, une terre agricole libre de restrictions du droit d'aliénation, ayant une valeur vénale correspondante, qui ne peut être pleinement engagée qu'après ce délai. Ces terres ne permettent pas à l'acheteur bénéficiaire de réaliser le prix pouvant être normalement obtenu sur le marché foncier.
L'avantage doit donc se calculer de la manière suivante.
La valeur vénale rapportée aux 4300 points de rendement était, en 1996, d'environ 6298 marks allemands par hectare. La différence de valeur par rapport au prix EALG (3010 Marks allemands par hectare) s'élève à 3288 par hectare. Cependant, ce n'est qu'au bout de vingt ans que l'acheteur peut réaliser cette "plus-value". Si l'on part de l'hypothèse que les valeurs réelles ne changeront pas au cours des vingt prochaines années, la différence de valeur, corrigée des intérêts échus depuis la date de l'achat (i = 5 %), s'élève à 1240 marks allemands par hectare. Cette valeur correspondrait à l'avantage obtenu au moment de l'achat. Le taux instantané de l'aide au moment de l'achat s'élève donc à 29,2 %.
On arrive à un résultat comparable en répondant à la question de savoir à quelles conditions le bénéficiaire de l'aide pourrait obtenir "l'effet avantageux", c'est-à-dire l'augmentation de sa part de patrimoine foncier aux conditions actuelles du marché. En l'occurrence, il convient également de tenir compte du fait que les terres sont soumises à une interdiction d'aliénation de vingt ans, que l'avantage associé à l'aide n'est donc réalisable qu'au terme de vingt ans et que l'acheteur ne peut pas tirer de bénéfices issus de la spéculation. Par rapport à la valeur vénale d'une terre libre de restrictions du droit d'aliénation, la valeur d'une telle parcelle doit être assortie de réductions. Comme il n'y a pas de marché pour ce type de parcelles, il faut calculer une valeur vénale théorique et la comparer au prix préférentiel.
Dans les conditions indiquées, un agriculteur en activité n'est disposé à payer qu'un prix d'achat qui corresponde à la valeur de rendement de la parcelle, car l'agriculteur ne peut obtenir la parcelle qu'en vue de l'exploitation (il est même soumis à l'obligation de présenter un plan d'exploitation à l'office de privatisation).
L'agriculteur fixera donc le prix d'achat déterminant pour lui à la valeur actuelle du bail à long terme - capitalisé sur une période de vingt ans -, puisque la valeur actuelle du bail à ferme correspond à la valeur de rendement dans les conditions de production agricole. Pour un fermage de 5 marks allemands par point foncier, la valeur actuelle du bail ainsi calculé s'élève à 2804 marks allemands par hectare (i = 5 %). Les restrictions du droit d'aliénation disparaissant après vingt ans, l'agriculteur sera prêt à payer plus pour cet avantage. Cet avantage, corrigé des intérêts échus depuis la date d'achat, doit donc être imputé à la valeur vénale du bail à ferme (voir ci-dessus). Il en résulte un prix de marché théorique de 4044 marks allemands par hectare que l'agriculteur serait prêt à payer aux conditions du marché pour la parcelle soumise à l'interdiction d'aliénation. Par rapport au prix bonifié de 3010 marks allemands par hectare, le taux instantané de l'aide s'établit à 25,6 %.
Par ailleurs, il est rappelé que la portée d'un avantage en liaison avec la privatisation de terres jadis propriété du peuple ne peut être calculée purement et simplement par une comparaison avec des prix de marché formés dans des conditions tout à fait différentes.
10. De la limitation des possibilités d'acquisition aux personnes résidant sur place au 3 octobre 1990
À cet égard, les autorités allemandes ont déclaré ce qui suit.
- Le fait de limiter le réaménagement des structures sociales et de propriété dans le cadre de l'EALG à la région du territoire adhérent crée une relation directe avec les anciens habitants de la RDA ayant des liens avec cette région, d'une part, et avec les anciens propriétaires, d'autre part. En fixant la date du 3 octobre 1990, le législateur a voulu faire en sorte que les personnes intéressées, ou les familles de celles-ci, qui avaient vécu et travaillé pendant des décennies RDA, puissent participer au pacte social de compensation à conclure entre elles et les anciens propriétaires. En définissant les modalités du pacte social de compensation et les conditions d'acquisition qui en résulteraient, le législateur ne pouvait pas ne pas établir un lien avec la situation existant dans le territoire adhérent au 3 octobre 1990.
- C'est aussi en raison de la nécessité contraignante d'assurer une large continuité sociale que le développement de l'agriculture et de la sylviculture, qui est l'objectif du régime d'acquisition de terres, doit accorder une place particulière aux acquéreurs - dans la mesure où il ne s'agit pas des anciens propriétaires - qui résidaient déjà depuis longtemps dans la région. La restructuration de l'agriculture de la RDA modelée par les CPA ne pouvait pas faire abstraction des conséquences sociales. Avec la fin brutale du système de la RDA, la menace de démantèlement non coordonné des structures sociales devenait réelle. Seule une adaptation progressive aux nouvelles conditions permet de réussir le processus de reconversion. De l'avis du législateur, ce principe s'appliquait également à la question de savoir quels seraient les bénéficiaires du régime de restructuration des terres. Il fallait donc créer une possibilité d'acquisition permettant aux anciens citoyens de la RDA de s'insérer dans de nouvelles structures sociales, dans le cadre de leurs relations particulières avec la région. Pour ces raisons, le législateur était également autorisé à assurer la participation au processus de restructuration des personnes nouvellement installées, pour ce qui concerne les terres devenues propriété de l'État de la RDA.
- Les autorités allemandes déclarent en outre que, si la date du 3 octobre n'avait pas été fixée, compte tenu du décalage entre les prix des superficies (surtout forestières) à l'intérieur aussi bien qu'à l'extérieur de l'Allemagne, les forêts d'Allemagne de l'Est auraient probablement été bradées rapidement et sans aucune coordination, sans que les Allemands de l'Est eux-mêmes puissent y participer de manière appréciable.
III
Après la publication de la communication correspondante(2), la Commission a reçu des remarques et des commentaires de centaines d'associations, d'entreprises ou de particuliers intéressés, et ce, en provenance aussi bien des États membres (notamment la France, le Royaume-Uni, l'Allemagne et la Belgique) que de pays extérieurs à la Communauté (entre autres, les États-Unis d'Amérique, le Canada, l'Argentine et le Brésil).
En dehors des remarques formulées par l'Allemagne exposées ci-dessus, aucun autre État membre n'a fait parvenir de commentaire.
Après expiration du délai fixé dans la communication susmentionnée, les commentaires et remarques ont été transmis aux autorités allemandes(3).
Pour l'essentiel, leur contenu peut être résumé comme suit.
En ce qui concerne les remarques portant directement sur les questions soulevées par la procédure, deux tendances différentes ont pu être constatées.
Un certain nombre d'intéressés(4) estiment que - pour autant que les dispositions en matière de concurrence soient applicables - les mesures en cause sont à considérer comme compatibles avec le marché commun. Les intéressés restants partagent les doutes exprimés par la Commission dans la communication, les confirment, voire déclarent que la Commission n'est pas allée assez loin. Dans la mesure où des éléments d'aide sont présents, ils les considèrent comme incompatibles avec le marché commun.
1. Applicabilité des articles 92, 93 et 94 du traité
Certains intéressés commencent par faire remarquer que l'Allemagne, par sa lettre du 25 janvier 1995 ainsi que par ses avis ultérieurs sur le droit à compensation des successeurs des CPA et des personnes nouvellement installées, a elle-même fait savoir que l'EALG était visée par les dispositions sur le contrôle des aides des articles 92, 93 et 94 du traité. Selon leurs déclarations, l'applicabilité de ces articles ne fait aucun doute.
En revanche, un des intéressés affirme que, en raison du processus d'unification sans précédent dans l'histoire, l'acquisition de terres ne relève pas du domaine d'application des règles du traité.
Tous les autres intéressés ne mettent pas en doute l'applicabilité des dispositions en cause ou l'acceptent implicitement.
Plusieurs intéressés, qu'ils soient pour ou contre la compatibilité, ont indiqué que le programme d'acquisition de terres - contrairement à l'intention première du législateur - n'a été incorporé dans l'EALG que dans un deuxième temps. Comme il ressort de la genèse de la loi, celle-ci avait pour but de favoriser une large accession à la propriété pour les personnes physiques. En particulier, il a été précisé à cet égard que le gouvernement fédéral n'était pas fondé à soutenir qu'il s'agissait "dans la situation historique sans précédent de l'unification allemande, d'une mesure générale visant à créer un régime de la propriété conforme à l'ordre juridique de la République fédérale d'Allemagne". Cette tournure visait encore une fois à brouiller la notion d'existence d'aide au sens de l'article 92, paragraphe l, du traité, car le projet même du gouvernement d'une loi sur les dédommagements et les compensations (EALG) du 31 mars 1993 - document du Bundesrat 244/1993 du 16 avril 1993 - ne comportait absolument pas de programme d'acquisition de terres. Selon cette optique, "le traité d'unification n'a donné au législateur allemand aucun mandat" de mettre également en place un pacte social de compensation d'intérêts différents dans le secteur agricole ou sylvicole à l'aide d'un programme d'acquisition de terres. En fait, celui-ci n'a pas été inséré dans le projet de loi à l'initiative du gouvernement fédéral, mais y a été introduit pour la première fois par les groupes parlementaires de la coalition CDU/CSU et FDP, après la première lecture de la loi le 13 mai 1993 (document du Bundesrat 12/4887; rapport sténographique de la 158e séance de la 12e législature du 13 mai 1993). Cette initiative parlementaire n'avait d'ailleurs pas pour objet "de mettre également en place un pacte social de compensation d'intérêts différents dans le secteur agricole ou sylvicole", mais visait uniquement dans un premier temps à instituer un "programme d'acquisition de terres" en faveur des victimes des expropriations ou ayants droit à une compensation à des fins de réparation.
Ce n'est qu'après que le projet fut rejeté deux fois par le Bundesrat et examiné deux fois par la commission de conciliation que le programme d'acquisition de terres initialement conçu pour réparer les dommages subis par les victimes des expropriations a été "monnayé" pour être transformé en un programme de lotissement en faveur de personnes n'ayant pas droit à réparation (personnes nouvellement installées et "successeurs de CPA").
La totalité de la documentation législative remontant à la période 1991-1994 ne mentionne nulle part la motivation actuellement alléguée par l'Allemagne pour justifier le programme d'acquisition de terres.
2. Compensation de dommages subis
2.1. Personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution
Aucun des intéressés ne met substantiellement en doute la nécessité et la faculté d'accorder, en droit allemand, une compensation aux personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitutions(5). Certains ont encore accentué le caractère de compensation de l'EALG à l'égard de cette catégorie de bénéficiaires. Tel est également le cas d'une partie importante des intéressés qui s'appuient sur les arguments de l'Allemagne. Ils admettent que "l'EALG n'accorde qu'une réparation ou une compensation insuffisante aux expropriés".
2.2. Personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution,
L'attention de la Commission a été attirée sur le fait que, d'après la loi allemande, "la simple dégradation du patrimoine" n'est pas considérée comme un dommage qui autorise la personne concernée à acquérir à des conditions de faveur des terres agricoles ou sylvicoles en vertu de l'article 3 de l'EALG : en effet, les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution(6) se sont vu restituer leur ancienne propriété. Par conséquent, de par la loi, elles sont exclues a priori de l'acquisition préférentielle de terres agricoles ou sylvicoles, à une seule exception près. Selon l'article 3, paragraphe 2, deuxième partie de la troisième phrase, les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution n'ont la possibilité d'acquérir des terres agricoles ou sylvicoles à des conditions préférentielles que si elles n'ont pas pu faire valoir le droit à restitution que leur confère la loi sur le patrimoine en raison de l'existence d'une des causes d'exclusion visées aux articles 4 et 5 de la loi sur le patrimoine. Si tel est le cas, il n'y a eu aucune restitution. Par conséquent, les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution se trouveraient exceptionnellement dans la même situation que celles qui ne bénéficient pas d'un droit à restitution et auxquelles aucune propriété n'a été restituée. Dans ces cas, il est évident que la propriété (non restituée) n'a pu subir aucune dégradation du patrimoine.
En revanche, si une personne réinstallée bénéficiant d'un droit à restitution s'est vu restituer son ancienne propriété, l'hypothèse d'un dommage (résiduel) du patrimoine (pour cause de dégradation) est exclue en droit allemand. C'est la raison pour laquelle les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution n'ont pas été favorisées, du fait de la loi même, par la disposition contestée de l'article 3 de l'EALG.
Cela ne ressort pas seulement de la disposition de l'article 3, paragraphe 2, deuxième partie de la troisième phrase, de l'EALG, mais aussi de l'article 349, paragraphe 3, de la loi sur la péréquation des charges. Selon celui-ci, en cas de restitution d'un bien économique dérobé, il est présumé que "même en cas de dégradation considérable du patrimoine de la propriété restituée" le dommage subi est intégralement compensé. Par conséquent, selon la loi allemande, il ne subsisterait, dans ce cas, plus aucun "dommage résiduel" qu'il faudrait compenser. Il s'ensuit que cette catégorie de personnes est exclue du droit d'acquérir des terres agricoles ou sylvicoles à des conditions préférentielles, conformément à l'article 3 de l'EALG. De plus, de par la nature des choses, il n'est pas possible de compenser légalement la perte d'un inventaire agricole par l'acquisition préférentielle de terres. Par ailleurs, il a été allégué que, dans le cas des personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution, la compensation de la perte de patrimoine a déjà atteint un multiple de la valeur, d'importantes aides à l'adaptation ayant été octroyées tous les ans depuis 1990. Cette affirmation n'a cependant pas été justifiée avec plus de précision.
Certaines personnes réinstallées (les "exploitants issus de la réforme foncière" n'ont pas été englobées dans la catégorie des ayants à droit à une compensation, car elles n'ont jamais eu l'entière jouissance de leur terre (celle-ci ne pouvait être ni vendue, ni transmise par héritage, ni hypothéquée). Le droit à restitution leur a donc été nié en vertu de la jurisprudence des cours suprêmes.
2.3. Personnes réinstallées résidentes sur place
Certains intéressés estiment qu'il n'est pas admissible que l'Allemagne fasse droit aux revendications de compensation de dommages d'inventaire subis par les personnes réinstallées résidentes sur place(7). Dans leur cas, il ne peut être question de l'argument selon lequel, souvent, "les équipements qui ont dû être apportés aux CPA n'ont pas été restitués dans leur intégralité". En effet, en l'occurrence, pour apprécier les éléments d'aide contenus dans la loi allemande, la situation juridique déterminante est celle qui découle de l'article 44, point 1, de la loi portant adaptation de l'agriculture, qui dispose que les personnes réinstallées résidentes sur place sont en droit d'obtenir l'indemnisation intégrale de la valeur des apports d'équipement. C'est ce que vient de décider la Cour constitutionnelle fédérale dans son arrêt du 22/4/1998 - 1 BvR 2146/94 et 2189/94 -, comme il ressort d'un article de la Frankfurter Allgemeine Zeitung du 6 mai 1998, page 19.
Cependant, si les personnes réinstallées résidentes sur place étaient en droit d'obtenir l'indemnisation intégrale de la valeur des apports d'équipement, il faudrait en déduire qu'une indemnisation intégrale des équipements apportés aux CPA a eu ou aurait dû avoir lieu de droit, procédure qui devrait pouvoir être appliquée même sur le plan pratique, vu que les successeurs des CPA possèdent généralement des capitaux suffisants - auxquels l'octroi de subventions généreuses provenant de la Communauté depuis 1990 n'est pas étranger - pour faire droit aux revendications des personnes réinstallées résidentes sur place en matière d'indemnisation des apports d'équipements. Par conséquent, étant donné la situation législative allemande, la Commission n'est pas fondée à affirmer que "souvent, les équipements qui ont dû être apportés aux CPA n'ont pas été restitués dans leur intégralité" ni à nier, dans cette optique, les éléments d'aide contenus dans les conditions préférentielles accordées aux personnes réinstallées résidentes sur place.
En revanche, la référence faite par la Commission, dans sa décision d'ouverture de la procédures(8) à l'arrêt de la Cour constitutionnelle fédérale du 21 mai 1996 dans Europäische Grundrechte-Zeitschrift 1996, page 332, s'applique complètement à cette catégorie de personnes réinstallées résidentes sur place. Dans la procédure en question, le gouvernement fédéral allemand a lui-même fait valoir devant la Cour constitutionnelle fédérale que l'article 3 de l'EALG comporte "un programme d'aide autonome ayant pour objet de structurer l'agriculture et la sylviculture dans les nouveaux Länder" et n'a pas pour objet d'instaurer une réparation.
Un des intéressés fait cependant remarquer à ce sujet que la propriété des anciens agriculteurs individuels dans la RDA a été réduite à une coquille vide par le droit de jouissance légalement illimité accordé aux CPA. Il serait opportun que ce type de restriction, qui a frappé tous les citoyens de la RDA, soit compensé, du moins en partie, par le programme d'acquisition de terres à prix réduit pour une catégorie de personnes ayant travaillé dans l'agriculture.
2.4. Personnes nouvellement installées
Un des intéressés a fait remarquer qu'il serait profondément discriminatoire que les 800 à 1000 personnes nouvellement installées(9), censées se voir attribuer environ un dixième des terres à privatiser et n'ayant pas eu, tout comme les autres ayants droit, la possibilité d'acquérir un patrimoine et d'exercer une profession autonome en raison de l'orientation économique et sociale du système communiste, fassent l'objet, dans le cadre de l'EALG, d'un traitement moins favorable que les autres ayants droit. Les difficultés que rencontrent les personnes nouvellement installées pour créer des exploitations sont sans commune mesure avec celles de toutes les autres catégories de personnes, car les premières n'ont pas eu la possibilité, contrairement à d'autres citoyens de la Communauté, de se constituer un capital au cours des quarante dernières années et qu'elles ne pouvaient pas, comme les autres ayants droit, disposer, sous forme de capital risque, de parties de l'ancienne propriété qui leur a été restituée. De même, cette catégorie de personnes n'a pas pu disposer d'un capital de démarrage comparable à celui qui a été attribué aux personnes réinstallées à la suite de la liquidation des biens prescrite par la loi d'adaptation de l'agriculture sur la base de l'utilisation de leurs propriétés par les CPA. Il n'est pas admissible de réserver aux personnes nouvellement installées un traitement différent de celui des autres ayants droit.
À l'opposé, d'autres intéressés estiment qu'il n'y a pas de raison de réserver aux personnes nouvellement installées un meilleur traitement qu'à tous les autres chefs d'entreprise des nouveaux Länder qui ont créé un établissement industriel depuis l'unification.
2.5. Personnes morales
Tout d'abord il est souligné d'une manière générale que, contrairement à la plupart des citoyens de l'ancienne RDA, les personnes morales n'ont pas subi de dommage à titre individuel et que, en tout était de cause, elles relèvent du dernier degré du "classement des personnes concernées".
Plus particulièrement, l'attention de la Commission a été attirée sur le fait que, en ce qui concerne la question de la délimitation entre compensation et aide dans le cas des personnes morales dont un membre est une personne réinstallée bénéficiant d'un droit à restitution ou une personne réinstallée résidente sur place, les considérations entrant en ligne de compte sont, mutatis mutandis, celles qui ont été formulées à l'égard de ces deux catégories de personnes.
Les remarques de la Commission dans la décision sur l'ouverture de la procédure(10), selon lesquelles, dans le cas des personnes morales comptant parmi leurs membres des personnes réinstallées, il n'y aurait pas aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité, ont été critiquées de plusieurs côtés au motif qu'une telle disposition est une invitation aux abus. En effet, les dispositions en matière d'aide risquent d'être éludées par les personnes morales accueillant a posteriori des personnes réinstallées pour obtenir des avantages auxquels elles n'auraient pas droit. Il a donc été proposé que l'on fixe une date de référence à laquelle la société doit exister ou la personne réinstallée doit être affiliée à la personne morale. Comme alternative, il a été proposé que soit fixé un quorum minimal relatif à l'affiliation de ces personnes réinstallées. Si la part de celles-ci est totalement insignifiante au sein de la personne morale, c'est porter atteinte au principe de la proportionnalité que de considérer comme lésée l'ensemble de la personne morale et de la faire bénéficier des conditions préférentielles.
D'autres exigent en revanche que seule la personne réinstallée concernée puisse bénéficier, en qualité de coassocié, du droit d'acquisition et que seul son nom soit inscrit au registre foncier, à l'exclusion de la société (personne morale). Dans ce cas, la société ne serait même pas autorisée à bénéficier de l'aide à titre indirect.
3. Droit d'acquisition des personnes nouvellement installées qui, à la date de référence, n'étaient pas encore en âge d'exercer une profession ou de travailler
Un des intéressés a fait valoir à cet égard que, parmi les ayants droit, ne se trouvaient pratiquement que des personnes qui, en 1990, étaient majeures et possédaient une expérience suffisante pour gérer une exploitation agricole. En effet, l'acquisition de terres était assortie de la condition que l'acquéreur bénéficiaire ait pris à bail pour une longue durée, au 1er octobre 1996, une exploitation agricole donnée en location par la BVVG (société de valorisation et de gestion des terres), pour autant qu'il ne s'agisse pas d'une personne expropriée dans le cadre du régime d'occupation soviétique, c'est-à-dire d'un ancien propriétaire. Selon les directives arrêtées par la Treuhand après concertation avec le service fédéral des baux à ferme, l'affermage de superficies agricoles n'était concevable qu'à l'égard de personnes présentant un projet d'exploitation agricole valable.
La loi prescrivant l'exploitation en faire-valoir direct, seules les personnes disposant de suffisamment d'expérience et de connaissances en matière d'agriculture et de gestion pouvaient accéder à la prise à bail et donc, finalement, à l'acquisition selon l'EALG. Il n'est pas à exclure que quelques personnes (le nombre a été estimé de dix à quinze pour l'ensemble des cinq nouveaux Länder) aient pu remplir la condition relative à la résidence dans la RDA au 3 octobre 1990, sans appartenir à la catégorie des anciens propriétaires ni à celle des exploitants travaillant selon les critères de la RDA.
Le nombre de personnes qui avaient déjà leur domicile fixe dans la RDA au 3 octobre 1990 sans en être ressortissantes semble tel que l'on peut le négliger dans le cadre de la procédure d'examen.
4. Distorsion de la concurrence et risque d'atteinte au commerce communautaire
Un seul des intéressés a critiqué les considérations formulées par la Commission au sujet de cette question en précisant que la vente de terres à des conditions préférentielles n'améliore pas la position concurrentielle de l'acquéreur bénéficiaire. L'acquisition de terres agricoles ou sylvicoles à des conditions préférentielles ne permet pas aux exploitations de se constituer un capital de garantie à des conditions plus favorables que leurs concurrents. En effet, si les exploitations disposaient de capitaux propres et les transféraient en valeur foncière, leur capital de garantie n'augmenterait pas. Étant donné, cependant, que en raison de la situation précaire des revenus agricoles, la majeure partie des exploitations doit recourir au crédit pour acheter des terres, les charges d'investissement inévitables rétrécissent encore le peu de liquidité des exploitations en affaiblissant ainsi la position concurrentielle des bénéficiaires, dans la mesure où ils sont économiquement actifs dans l'agriculture.
De surcroît, les banques hésitent à accorder des crédits pour les terres achetées, celles-ci faisant l'objet d'une interdiction de vente pendant vingt ans inscrite au livre foncier. De ce fait, les terres acquises n'offrent pas de sûreté supplémentaire pour la constitution de capitaux.
La fixation du prix d'acquisition préférentiel s'est inspirée de la valeur de rendement des terres indiquée dans le Document Bohl, arrêté le 16 novembre 1992 sous la direction des services de la chancellerie fédérale. Par souci de simplification, l'EALG a adopté le triple de la valeur unitaire (initialement fondée sur la valeur de rendement en 1935).
Il ressort de ce qui précède que l'acquisition de terres à des conditions préférentielles n'entraîne nullement une réduction des charges relatives aux moyens de production ni ne permet aux bénéficiaires de présenter une offre plus avantageuse de produits agricoles sur le marché.
De toutes façons, le marché des terres agricoles n'est pas tributaire des possibilités de rendement. En Allemagne et dans presque tous les États membres, le niveau des prix des terres n'est pas lié aux possibilités de rendement. Dans presque toutes les régions de la Communauté, l'achat de terres agricoles, considéré sous l'angle des coûts de production, débouche sur un renchérissement de la production ayant une influence négative sur la concurrence.
Les coûts de production agricoles sont déterminés par les fermages et non par les prix d'achat des terres. Il est incontestable que les exploitations agricoles dont les exploitants ont pu, grâce à leur esprit d'économie, acquérir des terres au cours de décennies voire, souvent, de siècles, disposent d'une plus grande stabilité et d'une plus grande sécurité.
Cependant cet argument ne s'applique pas aux exploitations en voie de constitution dans les nouveaux Länder, qui doivent déjà faire face à des coûts de crédit très élevés, ni, encore moins, au présent problème de l'acquisition de terres à des conditions préférentielles.
À cela s'ajoute le fait qu'à l'intérieur de la Communauté, les prix des terres varient fortement d'un État membre et d'une région à l'autre et qu'ils n'ont aucun rapport avec les possibilités de revenu.
Le niveau de la triple valeur unitaire constituant le prix auquel les bénéficiaires de l'EALG peuvent acheter les terres est plus élevé que la valeur vénale qu'atteignent en moyenne les terres en France, en Espagne, au Pays de Galles et en Écosse. Les plaintes des associations de propriétaires fonciers appartenant à ces États membres peuvent donc être réfutées en faisant valoir que le prix du terrain est plus avantageux chez eux. D'autre part, dans tous les États membres, à l'exception de l'Allemagne de l'Ouest, le montant des fermages, déterminants pour la concurrence agricole, est pratiquement comparable à celui des nouveaux Länder.
Par ailleurs, un autre intéressé a fait remarquer que l'acquisition de terres à des conditions préférentielles a pour effet d'améliorer la position concurrentielle des bénéficiaires. Selon lui, les terres à acquérir à des conditions préférentielles servent également de capital de garantie, puisque l'annotation de la limitation d'aliéner auprès de la BVVG est généralement peu efficace ou finit par être levée. De plus, rien ne s'oppose au recours à des créances venant à un rang postérieur.
5. Dérogation prévue à l'article 92, paragraphe 2, point c), du traité
Aucun des intéressés n'a contesté les doutes émis par la Commission à l'égard de l'applicabilité de la dérogation prévue à l'article 92, paragraphe 2, point c), du traité au programme d'acquisition de terres. Un des intéressés estime que l'Allemagne n'a pas été en mesure d'avancer d'argument contraire convaincant, et ce, notamment en ce qui concerne l'argument de la Commission faisant valoir que les dispositions mises en cause ne trouvent pas leur origine dans la division de l'Allemagne, mais sont dues à la suppression de celle-ci. Cet argument ne peut pas davantage être réfuté par l'Allemagne en faisant remarquer que "les carences du système économique dirigiste ont survécu à la suppression de la RDA" ni, encore moins, en ajoutant que "l'introduction connexe de l'économie de marché en Allemagne de l'Est" est déterminée par la division, qui justifie, de ce fait, les conditions préférentielles en cause.
L' "accident" de la division appartient au passé depuis 1990, ce qui légitime l'argument selon lequel la suppression de la division est à l'origine des conditions préférentielles accordées aux fermiers pour qu'ils puissent désormais exploiter, selon les critères de l'économie privée, d'immenses superficies agricoles en vue de se constituer un patrimoine. On ne voit vraiment pas pourquoi - même en faisant appel à la division - il faudrait encore leur faciliter l'accession à la propriété.
6. Dérogation prévue à l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité
Dans ce contexte, il est à noter que pas une seule des réactions reçues n'indique que la mesure en cause est à considérer comme une aide destinée à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave sous-emploi, au sens de l'article 92, paragraphe 3, point a).
7. Dérogation prévue à l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité
7.1. Développement de certaines activités ou de certaines régions économiques/intérêt commun
À cet égard, il a été fait remarquer que l'Allemagne ne peut pas alléguer que "les exploitations agricoles des nouveaux Länder accusent un déséquilibre structurel en matière de propriété foncière, car la grande majorité (91,1 %) cultive des terres prises à bail". En effet, cette circonstance est due au fait que - contrairement à d'autres intéressés, et notamment les plaignants - les bénéficiaires se sont trouvés devant des superficies à prendre à bail beaucoup trop grandes. Par ailleurs, des baux à long terme portant sur de grandes superficies agricoles sont également de nature à garantir les investissements et à assurer la stabilité des emplois dans une mesure tout à fait suffisante. L'acquisition à des conditions préférentielles aurait pu conduire "à un rapport équilibré entre les superficies prises à bail et les terres en propriété", si l'on examinait isolément les successeurs des CPA. Cependant, lorsque l'on considère l'ensemble de la structure agricole des nouveaux Länder, il ne peut absolument plus être question d'un rapport équilibré de la répartition de la propriété foncière agricole ou sylvicole entre les catégories intéressées.
7.2. Intensité de l'aide dans le cas de superficies agricoles ne se situant pas dans une zone défavorisée
Un des intéressés a souligné que les restrictions légales grevant l'acquisition des terres agricoles exerçaient une influence négative sur leur valeur vénale par comparaison avec l'acquisition de superficies agricoles sur le marché libre.
Ainsi, en application du règlement sur l'acquisition de terres, les contrats d'achat sont régulièrement assortis d'interdictions d'aliéner ou de disposer, de clauses prévoyant le reversement d'éventuelles plus-values et de droits de résiliation s'étendant sur une période de vingt ans à compter de la conclusion du contrat d'achat.
En matière d'estimation de la valeur des superficies agricoles, il est généralement admis que ces lourdes restrictions et charges de nature juridique déterminent durablement la fixation du prix du terrain. Par conséquent, toute comparaison entre le prix d'acquisition préférentiel dans le cadre du programme d'acquisition de terres, correspondant au triple de la valeur unitaire, avec des procédures d'achat de superficies agricoles "exemptes de charges" sur le marché libre n'est pas admissible.
Une détermination de la valeur vénale effective de ces superficies agricoles tenant compte des restrictions de disposer dont elles sont affectées aboutit généralement à une intensité d'aide inférieure à 35 %, même en présence d'un prix d'achat préférentiel du triple de la valeur unitaire.
À l'issue de ces considérations, l'intéressé admet cependant que, dans certains cas, on peut s'attendre à une intensité de plus de 35 %.
D'autres intéressés accusent l'Allemagne d'avoir calculé de manière incorrecte l'intensité des aides. Ils réfutent la tentative ("d'abaisser" la préférence, pour parvenir à une intensité prétendue de l'aide de 29,2 % seulement au moment de l'achat, eu égard au fait que, pour la Commission, une intensité d'aide de 35 % est justifiée dans les zones non défavorisées. En effet, celui qui veut acquérir des terres en qualité de preneur à bail de longue durée, notamment dans le but de garantir des crédits, n'est pas "gêné" par l'interdiction d'aliénation limitée dans le temps, puisque, de toutes façons, il n'a ni l'intention ni le besoin de vendre. Dans certains cas, il a été fait état d'intensités d'aide pouvant dépasser 70 %.
7.3. Date de référence du 3 octobre 1990 - Discrimination
Un des intéressés fait remarquer qu'il ressort de la genèse de la loi ainsi que des considérations qui l'ont précédée, émises sous la direction des services de la chancellerie fédérale, que le gouvernement fédéral s'efforçait, avec l'appui du Parlement, de limiter l'acquisition préférentielle de terres aux personnes résidentes dans la RDA. Les anciens citoyens de la République fédérale d'Allemagne, dans la mesure où ils n'appartenaient pas à la catégorie des personnes expropriées sous l'occupation soviétique ou par la RDA, ou qui ne disposaient pas de propriétés foncières dans la RDA en ont été exclus. Ils ont fait l'objet du même traitement que les autres citoyens de la Communauté.
La Commission n'est pas autorisée à "exclure du bénéfice" de la loi les personnes nouvellement installées. Au cours des quarante dernières années, celles-ci n'ont pas eu la possibilité, contrairement à d'autres citoyens de la Communautée, de se constituer un capital.
En revanche, d'autres intéressés défendent une autre position. Souvent, ceux-ci se plaignent de la non-proportionnalité de la mesure par rapport au préjudice subi, ce qu'ils considèrent comme une discrimination: tant les catégories des anciens propriétaires bénéficiant ou non d'un droit à restitution (en qualité de personnes réinstallées ou de personnes n'exploitant pas en faire-valoir direct) que celles des personnes réinstallées résidentes ont subi des dommages. Ils conviennent toutefois qu'il est difficile de chiffrer avec exactitude le montant du préjudice subi par les différents groupes, surtout dans le cas des personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution et des personnes réinstallées résidentes, chez lesquelles la dégradation du patrimoine ou l'absence de possibilités de développement sont à considérer comme un préjudice. Si l'on veut cependant établir un rapport entre les différents préjudices et mettre en place une échelle de valeurs, il est incontestable que, comparativement, le préjudice le plus grand est celui qu'ont subi les personnes expropriées ne bénéficiant pas de droit à restitution, alors qu'en revanche, les personnes réinstallées résidentes, qui n'ont jamais été expropriées, sont celles qui ont le moins souffert.
Cela étant hors de doute, on peut se préoccuper du fait que, dans le contexte de l'octroi des aides, les avantages censés compenser les dommages subis aient été classés dans l'ordre inverse. Selon l'EALG, les personnes réinstallées résidentes, c'est-à-dire celles qui n'ont jamais été expropriées et pour lesquelles le préjudice se réduit à l'absence de possibilités de développement, bénéficient d'un droit de préemption et du droit d'acquérir 600000 indices de rendement. Les anciens propriétaires non exploitants, qui ont partiellement dû renoncer à reprendre l'exploitation parce que les résidents "étaient déjà là", ne se sont vu attribuer, en revanche, que le droit "d'acquérir les restes" et celui d'obtenir 300000 indices de rendement. Ceux qui ont subi les plus grands dommages et qui, de ce fait, étaient en droit de se voir accorder la compensation la plus élevée ont obtenu, comparativement, le dédommagement le plus faible - du moins, s'ils étaient en même temps preneurs à bail - et ceux dont les préjudices étaient comparativement les moins étendus ont bénéficié de l'indemnisation la plus importante.
Il y a un déséquilibre dans le fait que les personnes ayant subi des dommages relativement faibles ont bénéficié d'une compensation plus élevée que les personnes plus gravement lésées.
Certains reprochent au législateur un arbitraire d'État: selon le programme d'acquisition de terres, n'est pas autorisé à en bénéficier l'ancien citoyen de la RDA qui, en raison des répressions et des troubles de 1989, a fui son pays pour ne revenir dans sa région d'origine qu'après le 3 octobre 1990, bien qu'il eût peut-être passé auparavant toute sa vie dans la RDA. D'autre part, est autorisé à bénéficier de la loi celui qui, quittant le territoire de l'ancienne République fédérale d'Allemagne, s'est transféré "juste à temps" sur celui de l'ancienne RDA, avant le 3 octobre 1990. Dans le cas du signataire, cela signifie qu'il s'est trouvé dans l'impossibilité d'agrandir son exploitation existante pour lui conférer une dimension économiquement viable, et ce, même pas sur la base de la valeur vénale, parce que toutes les superficies limitrophes ont été aliénées à des prix préférentiels en vertu de l'EALG.
Les autres intéressés qualifient la mesure en cause de discriminatoire et invoquent une infraction aux articles 52, 6 et 40, paragraphe 3, du traité. Ils se rallient expressément aux doutes exprimés par la Commission dans la communication. Certains font remarquer que l'Allemagne tente en vain de justifier l'inégalité de traitement incontestable à l'égard d'autres citoyens de l'Allemagne de l'Ouest ou de la Communauté par "les circonstances existant dans la RDA". Dans ce cas aussi, on semble oublier que l'EALG n'est entrée en vigueur que cinq années après l'unification de l'Allemagne, lorsqu'il n'y avait plus aucune raison de droit ou de fait de discriminer d'autres citoyens de l'Allemagne de l'Ouest ou de la Communauté par rapport aux successeurs des CPA et des personnes nouvellement installées.
Dans ce contexte aussi, l'Allemagne se défend en faisant simplement allusion sans fondement toutefois, à la "mise en place du pacte social de compensation" et à de prétendues "raisons impératives d'assurer la continuité sociale" en matière de développement de l'agriculture et de la sylviculture. À cela les intéressés concernés répondent que les conditions préférentielles accordées aux successeurs des CPA sont arbitraires, socialement déséquilibrées et profondément injustes, de sorte que l'allusion de l'Allemagne à un pacte social de compensation présumée ne doit pas être confondue avec la constatation que l'acquisition de terres à des conditions préférentielles débouche effectivement sur un tel résultat.
C'est précisément dans ce sens que va la remarque de l'Allemagne selon laquelle, lors de la restructuration de l'organisation agricole de la RDA marquée par les CPA, "il n'aurait pas fallu négliger les conséquences sociales". Ce que, dans ce contexte, l'on qualifie de "démantèlement non coordonné des structures sociales existantes" se traduit en fait par la perte effectivement subie de plusieurs centaines de milliers d'emplois dans l'agriculture, perte qui n'aurait de toutes façons pas pu être évitée. Même l'octroi de conditions préférentielles aux successeurs des CPA et aux personnes nouvellement installées lors de l'adjudication de contrats d'affermage ou de l'acquisition de propriétéBes n'a pas réussi à l'éviter.
Par conséquent, le traitement préférentiel en cause n'a absolument aucun rapport avec la préservation des "structures sociales existantes", promise par l'Allemagne. Au contraire, l'exode massif de main-d'oeuvre agricole dépendant des CPA a révélé la vacuité de ce prétexte. Et l'argumentation du gouvernement fédéral, selon laquelle celui-ci entendait créer des possibilités d'acquisition "permettant aux anciens citoyens de la RDA de s'insérer dans de nouvelles structures sociales, dans le contexte de leurs liens particuliers avec la région", a dû paraître bien hypocrite aux intéressés vivant encore aujourd'hui dans les nouveaux Länder, mais qui n'ont pas bénéficié de conditions préférentielles comparables. Car, dans ce contexte également, le gouvernement fédéral n'a pas pensé "aux hommes" des nouveaux Länder - et donc à ces intéressés -, mais visait exclusivement les quelque 3000 successeurs de CPA. C'est effectivement "pour ces raisons" que le législateur n'a pas créé de pacte social.
Par ailleurs, l'attention de la Commission a été expressément attirée sur le fait que, en tout état de cause, en 1996, la très grande majorité des contrats de bail de longue durée avaient été conclus avec des ressortissants de l'Allemagne de l'Est. La plupart des Allemands de l'Ouest et des autres citoyens de la Communauté ne remplissant pas cette condition, il est exclu pour cette catégorie de participer au programme d'acquisition de terres, même en l'absence de la fixation de la date de référence du 3 octobre 1990. Par conséquent, la date de référence du 3 octobre 1990 se révèle inutile.
IV
Par lettre du 22 octobre 1998, l'Allemagne a exprimé l'avis suivant au sujet des commentaires formulés par les intéressés:
1. Personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution
Contrairement aux observations des plaignants ainsi qu'aux affirmations d'autres intéressés, les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution et les personnes réinstallées résidentes sur place qui peuvent redisposer librement des terres apportées à la CPA par leur intermédiaire sont des ayants droit au sens de l'article 3, paragraphe 2, première phrase, de l'EALG.
Le renvoi à l'article 3, paragraphe 2, troisième phrase, première partie, de l'EALG, faisant valoir que les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution ne seraient autorisées à acquérir des terres agricoles ou sylvicoles à des conditions préférentielles que si elles ne sont pas à même de faire exécuter le droit à restitution que leur confère la loi sur le patrimoine en raison de l'existence d'un fait générateur d'exclusion visé aux articles 4 et 5 de la loi en cause, n'est pas pertinent. Rien que la formulation de l'article 3, paragraphe 2, troisième phrase, de l'EALG, disposant que "On entend également par personnes réinstallées au sens de la première phrase ..." prouve que cette disposition ne définit pas de manière exhaustive la catégorie des personnes réinstallées. Elle se limite à préciser que les catégories de personnes qui y sont citées, pour lesquelles une restitution du bien exproprié est impossible pour des raisons diverses, comptent également parmi les personnes réinstallées pouvant bénéficier des conditions préférentielles.
Selon la volonté du législateur, sont justement à considérer comme personnes réinstallées au sens de l'article 3, paragraphe 2, première phrase, de l'EALG les personnes ayant récupéré leur ancienne propriété à la suite d'une restitution et les anciens membres d'une CPA qui exploitent eux-mêmes la terre. Dans le cas contraire, un très grand nombre de personnes réinstallées résidentes sur place ayant pris à bail une partie considérable des terres de la BVVG (société de valorisation et de gestion des terres) seraient exclues du régime d'acquisition de terres.
Pour être autorisé à acheter en qualité de personne réinstallée au sens de l'article 3, paragraphe 2, en liaison avec le paragraphe 1, de l'EALG, il suffit que l'intéressé ait repris une exploitation agricole et ait étendu, au cours de cette réinstallation, l'exploitation aux terres visées à l'article 3, paragraphe 1, de l'EALG.
De plus - contrairement à ce que prétendent certains - la capacité d'acquérir des terres au titre de l'article 3 de l'EALG n'est pas annulée par d'autres lois allemandes (loi sur la péréquation des charges, loi portant adaptation de l'agriculture).
Ce n'est que dans la perspective d'une demande en restitution/compensation de péréquation de charges que l'article 349, paragraphe 3, de la loi sur la péréquation des charges simule une compensation entière des dommages à charge de l'ayant droit, alors qu'en réalité celui-ci ne récupère pas d'exploitation en activité. Cette fiction est exclusivement motivée par des raisons de technique juridique ouvrant le droit de demander la restitution. Or, la demande en restitution de la péréquation des charges est toujours limitée à la valeur effective des objets à restituer.
La péréquation des charges est une réglementation concernant des cas de rigueur et ne constitue pas, au même titre que les dispositions réglant les questions patrimoniales pendantes dans le traité d'unification, une compensation totale des dommages subis au sens, par exemple, du droit civil ou d'une indemnité pour cause d'expropriation selon l'article 14, paragraphe 3, de la loi fondamentale.
Par conséquent, la péréquation des charges n'exclut nullement l'application de réglementations reposant sur une autre base juridique, telles que, en l'occurrence, celle du régime de la propriété.
Par ailleurs, constatant que, conformément à l'article 44, point 1, de la loi portant adaptation de l'agriculture, les anciens membres de CPA sont en droit d'obtenir l'indemnisation intégrale de la valeur de leurs apports d'équipement, les plaignants en déduisent qu'il faut, "de droit" partir du principe que les apports d'équipement dans les CPA ont fait l'objet d'une indemnisation totale. Ce faisant, ils assimilent le droit à une prestation à son exécution. Il est cependant bien connu que, dans de nombreux cas, les apports d'équipement dans les CPA n'ont pas fait l'objet d'une indemnisation complète.
2. Compensation de la perte de patrimoine
Nombre de réactions citent le fait que les exploitations agricoles des nouveaux Länder bénéficient depuis 1990 "d'aides annuelles à l'adaptation d'un montant tellement élevé que la compensation de la perte de patrimoine a déjà atteint un multiple de la valeur".
Cette affirmation repose sur des bases erronées: s'il est vrai que, depuis 1990, des moyens considérables sont mis à la disposition des exploitations agricoles des nouveaux Länder, ces moyens n'étaient pas destinés à compenser les pertes de patrimoine subies par les exploitations ou leurs propriétaires avant l'instauration de l'unité allemande. En fait, avec l'introduction de l'union économique, monétaire et sociale, l'adoption du régime des organisations de marché de la Communauté européenne et le rapprochement du niveau des prix agricoles avec celui de l'ancien territoire fédéral, les prix à la production dans les nouveaux Länder, qui, au temps de la RDA, étaient fixés par l'État, ont connu une baisse considérable. Bien qu'en même temps les prix des facteurs de production aient également régressé, leur baisse était loin de compenser, ne serait-ce qu'approximativement, les pertes de revenu, de sorte que la majorité des exploitations n'étaient pas en mesure de faire face à leurs obligations de paiement. C'est pour compenser ces handicaps que des aides à l'adaptation ont été octroyées, aides qui ont été notifiées à la Commission et approuvées par elle.
3. Discrimination
En ce qui concerne la question de l'existence d'une discrimination relevant du droit communautaire, l'Allemagne soutient que, même si un ancien propriétaire avait - dans un cas particulier hypothétique - été effectivement lésé par rapport à un autre ayant droit à l'acquisition de terres lors de la prise à bail et de l'acquisition subséquente de terres agricoles ou lors de la vente de superficies sylvicoles, la nationalité n'aurait eu aucune importance. La concurrence s'exerce exclusivement entre anciens citoyens de la RDA. La fixation d'une date de référence (le 3 octobre 1990) pour l'application du régime d'acquisition de terres est objectivement justifiée. Par rapport aux citoyens de la RDA, les citoyens de l'Ouest disposaient de chances remarquables d'orienter leur parcours professionnel en fonction de leurs aspirations et aptitudes personnelles, ce qui engendrait également la possibilité d'acquérir du patrimoine. Or, si l'on faisait participer à l'acquisition de terres des Allemands de l'Ouest (ou des ressortissants d'autres États membres) qui n'ont pas été affectés personnellement par la division de l'Allemagne, on leur offrirait la possibilité de placer avantageusement dans les nouveaux Länder le capital acquis dans l'Ouest (dans le cas présent, sous forme de l'acquisition d'une exploitation sylvicole à titre accessoire). Ce faisant, on priverait des citoyens de la RDA, qui ont eu infiniment moins de chances d'acquérir un patrimoine personnel, de la possibilité de se constituer un nouveau capital d'exploitation (et non un capital privé). L'exclusion de tout modèle de placement de capitaux a été une préoccupation politique majeure lors de l'élaboration du pacte social de compensation.
De plus, le fait que ne sont autorisées à participer à l'acquisition de terres que les personnes ayant été directement affectées par la division de l'Allemagne montre que l'objectif de la création de nouvelles structures de propriété, en vue de libérer ainsi des forces économiques et sociales, et le principe de la compensation des handicaps subis dans la RDA ne sont nullement contradictoires.
Le programme d'acquisition de terres ne comporte pas d'inégalité de traitement arbitraire à l'égard des Allemands de l'Ouest et des citoyens de la Communauté. Le législateur à l'origine de l'EALG était tenu, dans son travail de conception du pacte social de compensation et de définition connexe des conditions applicables à l'acquisition de terres, de se référer à la situation existant le 3 octobre 1990 sur le territoire adhérent. Pour réaliser l'unité interne et pour garantir la paix juridique, il était indispensable d'accorder également le droit d'acquérir des terres à des conditions préférentielles aux exploitants résidents sur place à cette date. Cela permettait en même temps de faire en sorte que seules pouvaient prendre part à l'acquisition de terres des personnes qui avaient été individuellement et directement affectées par la division de l'Allemagne.
V
En ouvrant la procédure d'examen, la Commission a constaté que le programme d'acquisition de terres n'a pas été notifié en tant que régime d'aide au sens de l'article 93, paragraphe 3, du traité. Cette disposition prévoit que les aides d'État doivent être notifiées à la Commission dès le stade de projet. L'infraction à la disposition susmentionnée a pour conséquence que l'aide, pour autant qu'elle soit établie, doit être considérée comme illégale.
Les autorités allemandes ont cependant fait valoir que l'article 93, paragraphe 3 du traité, ainsi que les autres dispositions du traité concernant les aides ne sont pas applicables. À cela la Commission répond ce qui suit: avec l'adhésion de la RDA à la République fédérale d'Allemagne le 3 octobre 1990, le traité CE devient également effectif sur le territoire de l'ancienne RDA. De ce fait, à partir de cette date, les prescriptions en matière de concurrence s'appliquent de manière uniforme aussi bien dans l'ouest que dans la partie orientale de l'Allemagne.
La partie de l'EALG (loi sur les dédommagements et les compensations) contenant le programme d'acquisition de terres est entrée en vigueur le 1er décembre 1994(11). Par conséquent, la date d'entrée en vigueur de la partie correspondante de l'EALG est postérieure au 3 octobre 1990, donc à un moment où le traité CE était applicable sur tout le territoire allemand. Il s'ensuit que l'EALG relève de l'article 93, paragraphe 3 du traité, aussi bien que des autres dispositions relatives à l'octroi d'aides.
À titre conservatoire, la Commission remarque encore ce qui suit: l'Allemagne a fait valoir que, avant le 3 octobre 1990, l'adoption de la mesure en cause représentait pour elle une obligation non seulement politique, mais aussi juridique. Nombre d'intéressés à la procédure ont réfuté cet argument en affirmant qu'à l'origine le programme d'acquisition de terres ne faisait même pas partie de l'initiative législative sur l'EALG et que, par ailleurs, la documentation législative correspondante ne mentionne nulle part une obligation juridique de ce type.
Il n'y a pas lieu d'approfondir cette question, qui n'a d'ailleurs aucune incidence sur la présente décision: même si effectivement le gouvernement fédéral avait pris, avant la date du 3 octobre 1990 qu'il mentionne, l'engagement non seulement politique, mais aussi juridique, d'adopter à une date ultérieure (c'est-à-dire après que le traité CE eut pris effet sur le territoire des nouveaux Länder) des mesures d'aide bien déterminées applicables dans les nouveaux Länder, il aurait dû notifier la mesure à la Commission, conformément à l'article 93, paragraphe 3, avant de prendre cet engagement, parce que, depuis 1958, l'Allemagne est tenue au respect du traité. Il est cependant incontestable que cette notification n'a jamais eu lieu.
Par conséquent, le programme d'acquisition de terres est illégal, pour autant qu'il comporte des éléments d'aide.
VI
L'illégalité d'une aide ne préjuge pas de la compatibilité de cette aide avec le marché commun conformément à l'article 92 du traité, lequel a été déclaré applicable à l'agriculture, ainsi que les articles 93 et 94, par l'intermédiaire de l'article 42. Cette question sera examinée ultérieurement. Dans un premier temps, il convient de clarifier dans quelle mesure le programme d'acquisition de terres comporte des mesures qui ne réunissent pas les conditions de l'article 92, paragraphe 1, du traité et qui échappent ainsi à la détermination de leur compatibilité ou incompatibilité avec le marché commun.
Tel peut notamment être le cas lorsqu'un État se limite à restituer à un opérateur économique ce qu'auparavant il lui avait retiré (en violation du droit). L'exemple typique est représenté, en l'occurrence, par l'indemnisation du dommage (en nature ou en espèces) subi par l'opérateur à la suite d'une expropriation ou d'une action analogue. En ouvrant la procédure, la Commission a indiqué clairement que, dans la mesure où le montant du dédommagement n'est pas supérieur au préjudice subi par l'opérateur économique à la suite des interventions en cause, il ne peut pas être question d'une action consistant à favoriser les bénéficiaires au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité. Dans ce cas, il n'y aura donc pas d'aide. Dans ce contexte, la Commission constate d'abord que ce principe n'a été mis en cause ni par l'Allemagne ni par les autres intéressés.
Par la même occasion, la Commission avait expressément précisé que l'ordonnancement de l'acquisition de terres à des conditions préférentielles était tel qu'il donnait lieu à une présomption de l'existence d'une aide.
Or, dans ce contexte, la Commission constate qu'absolument aucun des intéressés, que ce soit l'Allemagne ou les autres personnes concernées, n'a contesté l'hypothèse de la présomption de l'existence d'une aide.
Par conséquent, la Commission estime qu'il n'y a aucun motif de modifier son point de vue à cet égard. La Commission continue donc à partir du principe de l'existence d'une aide, à moins que la preuve ne soit faite qu'il s'agisse là exclusivement d'une mesure destinée à compenser des dommages résultant d'expropriations ou d'actions analogues.
Le critère retenu à cet égard par la Commission est le droit national, donc, dans le cas présent, le droit allemand. Par conséquent, il faut que soit apportée à la Commission la preuve incontestable que le droit national commun reconnaît aux différentes catégories de personnes évoquées dans le programme d'acquisition de terres la qualité et la capacité d'obtenir une compensation. Ces catégories de personnes sont par principe au nombre de cinq.
1. Les personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution
Les personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution sont les anciens propriétaires d'exploitations agricoles qui ont été expropriés entre 1945 et 1949(12). En règle générale, il s'agissait d'exploitations dont la taille atteignait au moins 100 hectares.
Jusqu'à présent, cette catégorie de personnes n'a pas récupéré les exploitations. Leur dommage est au moins égal à la valeur des actifs de ces exploitations expropriées.
En ouvrant la procédure, la Commission avait fait remarquer que, pour cette catégorie de personnes, l'avantage accordé prévoit qu'elles "n'ont que le droit de racheter à des conditions préférentielles une partie des terres".
Aucun des intéressés, que ce soit l'Allemagne ou les autres personnes concernées, ne l'a mis en doute. De même, la conclusion qui en a été tirée, précisant que "l'avantage accordé est donc bien inférieur à la valeur de la propriété dont ils ont été dépossédés"(13), n'a été mise en cause par aucun des intéressés susmentionnés.
En l'absence d'observations contradictoires ou d'autres points de repère, la Commission n'a aucune raison de s'écarter de son point de vue initial. Elle avait établi clairement que ces compensations ne faisaient que refléter les principes de droit en matière de protection de la propriété communs à tous les États membres.
Pour ces raisons, la Commission constate que, dans le cas des personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution, les éléments d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe l, du traité ne sont pas réunis.
2. Les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution
Les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution sont les personnes dépossédées après 1949 et qui ont un droit à restitution en vertu de la loi sur le patrimoine.
Dans le cas de cette catégorie, la loi fait une distinction entre les personnes dont le droit à restitution est réalisable et celles pour lesquelles ce droit ne peut pas se traduire dans la réalité.
En ce qui concerne les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution qui n'est pas réalisable, il va de soi qu'une personne expropriée bénéficiant d'un droit à restitution qu'elle n'est cependant pas en mesure de réaliser se trouve pratiquement dans la même situation qu'une personne ne bénéficiant pas d'un droit à restitution. Pour les besoins du présent examen, la personne réinstallée bénéficiant d'un droit à restitution non réalisable est donc à assimiler à une personne réinstallée ne bénéficiant pas d'un droit à restitution.
Il ressort de ce qui précède que les conclusions exposées au point 1 ci-dessus sont applicables à la sous-catégorie spécifique des personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution.
Pour ce qui est du bien-fondé du droit d'acquisition des autres personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution, c'est-à-dire celles dont ce droit est réalisable, il est apparu une divergence de vues entre les autorités allemandes et la majeure partie des intéressés à la procédure, les unes affirmant l'existence de ce bien-fondé, les autres la contestant. Le différend porte sur l'interprétation du droit national, au sujet de laquelle aucune des deux parties n'a mentionné de jurisprudence émanant des tribunaux supérieurs. En l'occurrence, la Commission n'a pas à se prononcer sur l'interprétation du droit national.
Cependant, étant donné que les autorités allemandes partent du principe du bien-fondé du droit d'acquisition, on ne peut exclure qu'en fait, cette catégorie de personnes puisse effectivement tirer profit de l'achat de terres à des conditions préférentielles.
Dans ce cas, l'existence d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité, n'est nullement exclue. Dans le contexte de cette sous-catégorie spécifique de personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution, il faut examiner le cas particulier, car la Commission ne dispose d'aucun point de repère lui permettant d'établir avec certitude que, dans tous les cas, l'avantage chiffré produit par l'acquisition de terres à des conditions préférentielles en liaison avec le droit à restitution (réalisé) est (toujours) égal ou inférieur au préjudice provoqué par l'expropriation (ou le dommage d'inventaire).
Ce résultat n'est pas affecté par les "importantes aides à l'adaptation" accordées aux exploitations agricoles des nouveaux Länder depuis 1990 et qu'évoquent les intéressés ayant réagi à la procédure d'examen. Ces aides ne sont pas destinées à compenser les pertes de patrimoine subies par les bénéficiaires avant l'unification et n'entrent donc pas en considération. Dans la mesure où ce qui précède révèle l'existence d'éléments constitutifs d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité la question d'une éventuelle compatibilité de l'aide avec le marché commun n'a pas encore été abordée. Elle fera l'objet des chapitres suivants.
3. Les personnes nouvellement installées
Les personnes nouvellement installées sont des personnes qui, jusqu'au moment du changement, travaillaient dans des CPA ou dans des exploitations collectives (VEG) et ne possédaient pas d'exploitations agricoles auparavant, mais qui se sont actuellement établies dans une nouvelle exploitation agricole.
Ces personnes n'ont jamais été expropriées. Du temps de la RDA, elles étaient simplement dans l'impossibilité de constituer une propriété agricole ou sylvicole. Les autorités allemandes parlent à ce propos de "possibilités perdues"(14).
Par conséquent, selon le droit allemand, cette catégorie de personnes ne peut bénéficier d'un dédommagement pécuniaire(15).
Cet état de choses est incontesté.
À ce propos, en ouvrant la procédure, la Commission avait fait remarquer ce qui suit: "Dans ce contexte, la Commission constate tout d'abord que ces possibilités auraient été par presque tous les citoyens de la RDA - tant que celle-ci appliquait le système de l'économie planifiée communiste - quel qu'ait été le secteur dans lequel ils exerçaient leurs activités.
(...)
En prenant en considération la notion de préjudice telle qu'elle apparaît dans la jurisprudence susmentionnée, la Commission ne peut nullement exclure qu'il y ait des aides au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité."
Après avoir analysé les observations et les commentaires de tous les intéressés, la Commission n'a pas de raison d'abandonner son point de vue actuel. Aucun des intéressés n'a été en mesure de faire valoir que, pour ce type de "dommages", le droit allemand prévoie une obligation de compensation. Il est vrai que le rétablissement de la propriété privée et de structures équilibrées de la propriété pourrait être considéré comme la réparation au sens large d'un dommage. Le droit allemand ne considère cependant pas qu'une telle action doive obligatoirement être financée par des fonds publics, ce qui semble d'ailleurs impossible à réaliser dans la pratique. Dans le cas contraire, tous les opérateurs des autres secteurs économiques devraient bénéficier d'une "indemnisation" parce qu'ils ont été empêchés d'exercer librement une activité économique pendant quarante ans.
C'est pourquoi il n'est pas possible de se rallier à l'avis selon lequel les considérations exprimées par la Commission au sujet de la compensation du préjudice manquent d'envergure et ne tiennent pas compte des spécificités de la transformation et de l'intégration dans un contexte d'économie de marché d'une partie du pays ayant une structure d'économie étatisée.
La Commission confirme son appréciation selon laquelle la vente subventionnée de terres agricoles ou sylvicoles aux personnes nouvellement installées concernant un secteur particulier de l'économie constitue, en tant que mesure sélective, une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité. La question de la compatibilité de cette mesure avec le marché commun sera examinée au cours des chapitres suivants.
Les considérations exposées ci-dessus s'appliquent naturellement à plus forte raison à deux sous-catégories de personnes nouvellement installées, à savoir, celles qui, en provenance de l'Ouest, se sont établies en Allemagne de l'Est peu avant la date du 3 octobre 1990 (et qui n'ont jamais été empêchées de constituer des propriétés agricoles ou sylvicoles) et celles qui, à la date de référence, n'étaient pas encore en âge d'exercer une profession ou de travailler (par exemple, les jeunes en âge de scolarité).
4. Les personnes réinstallées résidentes sur place
Les personnes réinstallées résidentes sur place sont les propriétaires de terres agricoles qui ont repris leurs terres aux CPA et qui ont réinstallé leur exploitation. L'Allemagne a fait valoir que, pour cette catégorie de personnes, le préjudice réside dans le fait qu'elles aussi, en règle générale, ont eu à subir de graves dégradations de la valeur de leurs exploitations initiales, qui n'ont pas été compensées en argent. Par ailleurs, souvent, il n'y a pas eu de remboursement complet des équipements apportés à la coopérative de production agricole.
En se référant à la jurisprudence de la Cour constitutionnelle allemande, des intéressés ont objecté que l'ordre juridique allemand prévoit déjà un droit à l'indemnisation des dommages d'inventaire, ce que l'Allemagne n'a pas nié. Celle-ci allègue cependant que le droit à une prestation ne peut pas être assimilé à son exécution. La Commission partage cette conviction.
L'Allemagne n'a néanmoins pas avancé de faits laissant présager que, dans les cas types, le droit en question ne trouve pas d'exécution. De l'avis de la Commission, on peut davantage s'attendre que, dans un État de droit tel que l'Allemagne, l'administration respecte scrupuleusement les lois dans les cas types.
Faute d'indications contraires, la Commission est donc amenée à supposer que, dans les cas types, une compensation est accordée pour les dommages d'inventaire. Elle admet cependant qu'il peut en être autrement dans des cas particuliers, en raison d'un dédommagement soit inexistant soit insuffisant. En définitive, la Commission part donc du principe que - dans la mesure où les dommages d'inventaire concernent le cas type - une compensation est assurée en vertu de la loi portant adaptation de l'agriculture, de sorte que les effets de la présente mesure ne se situent pas en deçà des dommages causés par la perte ou la destruction de l'inventaire, mais excèdent, au contraire, le seuil d'endommagement. Dans cette hypothèse, l'existence d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe l, du traité serait à envisager, toujours sur la base du cas type. Il ne faut cependant pas perdre de vue le cas particulier, ce qui se justifie d'autant plus que l'on peut se trouver en présence de dégradations du patrimoine.
Dans une telle situation, il faut procéder à des calculs exacts concernant le cas particulier. Comme les détériorations (dommages d'inventaire/dommages du patrimoine) peuvent se produire aussi bien de manière cumulative qu'alternée et que les avantages peuvent être cumulés (loi portant adaptation de l'agriculture/loi sur les dédommagements et compensations), il y a lieu d'effectuer un calcul concernant le cas particulier pour établir si l'ensemble des avantages est inférieur ou non aux dommages totaux. En fonction du résultat obtenu, on se trouverait en présence d'une simple compensation ou d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité. La question de la compatibilité d'une aide éventuelle avec le marché commun serait à examiner séparément.
5. Les personnes morales
Les personnes morales peuvent également bénéficier de l'acquisition de terres à prix réduit, pour autant qu'elles remplissent certaines conditions fixées par le législateur, à savoir que 75 % du capital doivent être détenus par des personnes résidentes sur place au 3 octobre 1990.
Des intéressés ont fait valoir que - contrairement à la majeure partie des citoyens de l'ancienne RDA - les personnes morales n'ont subi aucun préjudice à titre individuel, ce que l'Allemagne n'a pas contesté.
Si, et dans la mesure où, les personnes morales favorisées n'ont pas été victimes d'expropriations ou d'actions assimilables à une expropriation, il convient de partir du principe - conformément à l'hypothèse exposée ci-dessus - qu'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité, n'est pas à exclure a priori. C'est ce que la Commission a souligné expressément au sujet de cette catégorie de bénéficiaires lors de l'ouverture de la procédure d'examen(16).
La Commission est cependant d'avis - en dépit de toutes les appréhensions relatives à des abus éventuels - que, dans des conditions bien déterminées et clairement définies, les éléments d'une aide puissent ne pas être réunis, bien que la personne morale non lésée participe à l'achat de terres à prix réduit. Tel peut être, par exemple, le cas lorsqu'une personne réinstallée ne bénéficiant pas d'un droit à restitution ou une personne résidente sur place qui peut lui être assimilée (à savoir, une personne réinstallée bénéficiant d'un droit à restitution qui n'est pas réalisable) décide qu'elle va laisser la personne morale dont elle fait partie acquérir à prix réduit les terres qui lui reviennent.
Le fait qu'une personne réinstallée ne bénéficiant pas d'un droit à restitution ou une personne résidente sur place pouvant lui être assimilée fasse inscrire au registre foncier le nom de la personne morale à laquelle elle appartient au lieu du sien n'a pas d'incidence en droit communautaire (intermédiation d'achat).
La Commission a pris connaissance avec une attention particulière des nombreuses observations émises par les intéressés indiquant qu'un régime de ce type constitue une invitation à abuser des dispositions en matière d'aide ou à les éluder. En premier lieu, il convient de répéter ici qu'en l'occurrence l'analyse porte exclusivement sur la délimitation entre compensation et aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité et qu'il ne s'agit pas de constater la compatibilité avec le marché commun.
En ce qui concerne les appréhensions à l'égard des abus, la Commission constate ce qui suit: il n'y a absence d'aide que si, et dans la mesure où, une double acquisition par l'associé de la personne morale est à exclure avec certitude. Dans ce contexte, on entend par double acquisition le fait que l'achat puisse être effectué aussi bien par l'associé que par la personne morale. Si tel était le cas, la Commission ne peut en aucun cas exclure une aide pour ce qui concerne la personne morale. En revanche, si la double acquisition est exclue, la personne morale ne disposerait pas d'un volume d'acquisition maximal-plus étendu (en moyenne 140 ha au maximum) que celui qui reviendrait à son associé (s'il était autorisé à acheter).
Compte tenu de ces conditions, la Commission estime qu'il n'est pas indispensable de fixer une date de référence à laquelle la société doit avoir été constituée ou à laquelle la personne résidente sur place doit être affiliée à la personne morale, comme les intéressés l'ont exigé. Il faudra néanmoins que les autorités allemandes fassent parvenir chaque année à la Commission un rapport attestant le respect des conditions susmentionnées.
Eu égard aux conditions mentionnées ci-dessus, la Commission juge sans fondement les objections des intéressés selon lesquelles, en cas de participation totalement insignifiante à la personne morale, il y aurait une atteinte au principe de la proportionnalité, parce que l'ensemble de la personne morale serait considérée comme lésée et bénéficierait ainsi de l'aide.
Comme il a déjà été exposé ci-dessus, la Commission ne part en aucune manière automatiquement du principe d'un préjudice subi par la personne morale (dans le sens d'une expropriation ou d'une action équivalente). De surcroît, la personne morale ne peut pas acquérir plus de terres que les personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution (ou les personnes assimilées) en qualité d'associés. Pour le reste, la Commission renvoie à la règle des 75 % prescrite par la loi.
Pour finir, il est rappelé que, d'après le modèle décrit ci-dessus, l'existence d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité, en faveur de la personne morale ne peut être exclue avec une certitude suffisante que dans les cas et dans la seule mesure où la personne morale compte parmi ses associés au moins une personne réinstallée ne bénéficiant pas d'un droit à restitution (ou une personne réinstallée bénéficiant d'un droit à restitution non réalisable) détenant les parts de capital prescrites par la loi.
Dans le cas des autres associés visés aux points 2, 3 et 4, la Commission ne peut pas exclure et peut même présumer, pour les raisons qui y sont exposées, l'existence d'une aide en faveur de la personne morale. Dans ces cas, la compatibilité de la mesure avec le marché commun reste à établir.
À titre de conclusion relative aux problèmes soulevés dans le présent chapitre, la Commission peut exclure avec certitude l'existence d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité, uniquement pour les personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution, pour les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution qui peuvent leur être assimilées et pour les personnes morales comptant parmi leurs associés au moins une des personnes susmentionnées. Il n'en va de même pour aucun des autres bénéficiaires.
Dans la mesure où, dans ces conditions, une aide ne peut pas être exclue, les dispositions applicables sont les dispositions en matière de concurrence (articles 92, 93 et 94 du traité).
L'article 92, paragraphe 1, du traité, interdit en principe toutes les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État, sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres.
Comme cela a été précisé lors de l'ouverture de la procédure(17), l'existence d'une aide se mesure à l'avantage qu'elle apporte à son bénéficiaire et non aux objectifs et considérations de politique économique des États membres. L'Allemagne met en doute les avantages apportés par le programme d'acquisition de terres.
Conformément à la communication de la Commission concernant les éléments d'aide contenus dans des ventes de terrains et de bâtiments par les pouvoirs publics(18), la Commission peut partir du principe que les aliénations de terrains sont assorties d'une aide si celles-ci:
a) n'ont pas été conclues dans le cadre d'une procédure d'offre ouverte et inconditionnelle prévoyant la vente au plus offrant ou à l'unique offrant
ou si
b) en l'absence d'une telle procédure, elles n'ont pas été effectuées au moins à la valeur du marché déterminée par des experts indépendants.
Dans le cas présent, la Commission penche plutôt en faveur de l'hypothèse de l'existence d'un avantage résultant du programme d'acquisition de terres.
II est certainement exact que le bénéficiaire pouvait déjà disposer précédemment des terres en question en sa qualité de preneur à bail, mais, en l'occurrence, la propriété vient s'ajouter à la détention. Le simple droit de détenir est à mettre en parallèle avec la propriété qui repose sur un droit plus solide, dévolu au preneur à bail.
Le propriétaire n'a pas seulement davantage de droits que le détenteur, sa position est meilleure, notamment sur le plan économique. Si le programme d'acquisition de terres n'était assorti d'aucun traitement préférentiel, les intéressés et les acheteurs de ces terres se feraient rares. Or, le programme d'acquisition de terres a suscité un intérêt extrêmement vif.
Le gouvernement fédéral lui-même a admis dans ses observations que les terres acquises peuvent servir de capital social. De plus, elles peuvent aussi faciliter l'accès à des capitaux supplémentaires dus aux tiers.
Cela conforte la Commission dans l'opinion qu'elle avait formulée lors de l'ouverture de la procédure d'examen(19), selon laquelle l'acquisition à prix réduit de terres agricoles et sylvicoles permet aux ayants droit de constituer un capital d'exploitation et de ce fait aussi un capital social. La Commission maintient son avis.
Par ailleurs, la référence aux charges pesant sur les terrains acquis (notamment l'interdiction d'aliéner pendant vingt ans) ne modifie en rien la constatation de l'existence fondamentale d'une aide.
Ce type de clause appliqué, dans d'autres contextes, aux aides aux investissements ou aux achats de terres à prix réduit n'est pas inconnu pour la Commission.
L'objet d'une telle clause antispéculative est justement d'empêcher que l'avantage acquis ne soit immédiatement monnayé. L'agriculteur ou le sylviculteur est censé exploiter les terres qu'il a acquises à des conditions préférentielles pour assurer ainsi ses moyens d'existence et n'a pas à en retirer des gains spéculatifs. Or, l'existence d'une telle clause antispéculative est précisément un indice du fait que le programme d'acquisition de terres est assorti d'un avantage économique. Le niveau (l'intensité) de cet avantage sera examiné plus loin.
Un des intéressés est d'avis que les terres acquises en plus n'offrent pas de garantie supplémentaire lors de la constitution de capital, car les banques "hésitent" à proposer des crédits pour les superficies achetées.
Voilà encore un argument auquel la Commission ne peut souscrire. Il est certain que l'interdiction d'aliéner inscrite au registre foncier constitue une contrainte. Celle-ci est cependant limitée dans le temps. Le terrain exempt de charges peut être grevé comme tous les autres. D'autre part, comme un des autres intéressés l'a fait remarquer à juste titre, rien ne s'oppose au recours à des créances venant à un rang postérieur, même pendant les vingt années d'interdiction de vente (en dépit de l'annotation de la limitation d'aliéner auprès de la BVVG qui est généralement peu efficace ou finit par être levée), ce que l'Allemagne n'a pas davantage mis en doute.
Dans la mesure où l'examen effectué jusqu'à présent a révélé l'existence d'aides, celles-ci faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. Selon l'article 92, paragraphe l, du traité, il suffit qu'elles menacent de fausser la concurrence.
La distorsion de la concurrence ou, du moins, la menace de distorsion résulte de la meilleure situation économique dans laquelle se trouvent les acquéreurs des terres à prix réduit par comparaison avec leurs concurrents qui n'ont pas pu bénéficier d'un soutien analogue.
À cela, l'Allemagne répond que dans "l'hypothèse" de l'acquisition par des capitaux empruntés, la comparaison entre le coût des intérêts à acquitter et les fermages actuels fait apparaître un "résultat neutre", de sorte que la structure de la production ainsi que celle des coûts d'exploitation restent inchangées.
Cet argument n'est pas convaincant, parce qu'il se limite à envisager une des différentes hypothèses d'acquisition. De nombreux intéressés ont fait remarquer que les bénéficiaires (en particulier, les successeurs de CPA) peuvent être tout à fait à même d'acquitter le prix d'achat au moyen de leurs propres ressources. Le recours au crédit n'est donc aucunement incontournable dans tous les cas.
De plus, il convient de souligner que le "résultat neutre" n'a été ni démontré ni avancé pour chaque cas particulier, de sorte que l'existence d'une influence sur la structure des coûts d'exploitation n'est nullement exclue.
La Commission ne peut pas adhérer à l'appréciation selon laquelle le niveau des prix et la marge ne changent pas. Il en va de même de l'affirmation prétendant qu'il est exclu que l'acquisition de terres à des conditions préférentielles permette à l'exploitation d'engager des dépenses moindres pour les facteurs de production et de présenter ainsi sur le marché une offre de produits agricoles plus avantageuse.
Un des intéressés a fait valoir que "dans presque toutes les régions de l'Union, l'achat de terres agricoles débouche sur un renchérissement de la production ayant une influence négative sur la concurrence". Si, par cette affirmation, l'intéressé entend soutenir sérieusement que l'achat de terres à prix réduit en Allemagne de l'Est - et c'est uniquement de cela qu'il s'agit en l'occurrence - affaiblit la position concurrentielle des exploitations intéressées, on ne peut que se poser la question de savoir pourquoi les exploitations en cause participent au programme d'acquisition de terres.
Par ailleurs, l'argument selon lequel le niveau de la triple valeur unitaire constituant le prix auquel les bénéficiaires de l'EALG peuvent acheter les terres est plus élevé que la valeur vénale qu'atteignent en moyenne les terres en France, en Espagne, au pays de Galles et en Écosse n'est pas pertinent.
Les dispositions en matière de surveillance des aides partent de la situation réelle de l'économie dans les différents États membres et les différentes régions de la Communauté. Le droit de la concurrence ne peut avoir pour objet et pour but d'uniformiser la diversité objective des conditions de concurrence et d'établir une similitude absolue(20).
En ouvrant la procédure, la Commission a exprimé l'avis qu'il y a lieu de supposer une atteinte du marché communautaire lorsque le bénéficiaire de la subvention se trouve en concurrence avec des entreprises d'autres États membres. En ce qui concerne l'acquisition privilégiée de terres prévue par la loi, il existe, selon la Commission, un effet sur d'autres États membres qui s'accentue en raison de la taille et du volume d'activité principalement pour les entreprises ayant succédé aux CPA. Par contre, les entreprises étrangères sont exclues de ces avantages et sont, de ce fait, défavorisées par rapport aux bénéficiaires.
À ce sujet, il convient de souligner qu'une aide comparativement faible n'exclut pas nécessairement que les échanges entre États membres puissent subir un préjudice.
Les observations formulées jusqu'à présent n'amènent pas la Commission à renoncer à cette position.
Il s'ensuit que le programme d'acquisition de terres répond aux critères relevant de l'article 92, paragraphe 1, du traité, à l'exception des mesures prévues en faveur des personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution, des personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution qui peuvent leur être assimilées et des personnes morales comptant parmi leurs associés les personnes susmentionnées.
VII
Certaines dérogations ou exonérations peuvent cependant être prévues dans le contexte de l'incompatibilité de principe avec le marché commun en vertu de l'article 92, paragraphe l, du traité.
1. Exemption en vertu de l'article 92, paragraphe 2, point c), du traité
Conformément à l'article 92, paragraphe 2, point c), du traité, les aides octroyées à l'économie de certaines régions de la République fédérale d'Allemagne affectées par la division de l'Allemagne sont compatibles avec le marché commun dans la mesure où elles sont nécessaires pour compenser les désavantages économiques causés par cette division.
Dans ce contexte, en ouvrant la procédure d'examen la Commission a fait valoir qu'aussi bien la lettre que l'esprit de l'article 92, paragraphe 2, point c), du traité, ne visaient que les conséquences directes de la division de l'Allemagne, mais non la compensation étendue pour la mauvaise situation économique dans les nouveaux Länder. En outre, on ne trouve pas le lien de causalité nécessaire entre la division et les désavantages économiques, étant donné que les entreprises de l'ancienne RDA sont touchées non par la division, mais, au contraire, par la suppression de la division. Les déficits économiques sont dus au système d'économie planifiée communiste appliqué et ne sont pas imputables à la division de l'Allemagne.
L'absence de capital d'exploitation et de capital social trouve son fondement dans la structure de propriété socialiste de la RDA et n'est pas une conséquence de la division de l'Allemagne.
L'Allemagne est d'avis que le verrouillage de l'ancienne RDA et la création d'une économie centrale d'État sont indissolublement liés et sont à considérer comme un processus homogène. Il est toutefois incontestable que les insuffisances du système économique dirigiste ont eu des prolongements s'étendant au-delà de l'existence de la RDA. Les handicaps économiques restent conditionnés par la division, mais sont englobés dans toutes les catégories de désavantages prévues par le programme d'acquisition de terres.
À cela il convient d'objecter, en premier lieu, que la disposition en cause est à interpréter au sens strict. Elle ne constitue qu'une dérogation au principe de l'interdiction des aides énoncé au paragraphe 1 de l'article 92.
Avant l'unification allemande, le contenu normatif de cette disposition était limité aux territoires de l'ancienne République fédérale d'Allemagne situés près de la frontière intérieure (Zonenrandgebiete et Berlin-Ouest), défavorisés à la suite de la division de l'Allemagne. Si tant est que la disposition reste applicable, son maintien après l'unification allemande ne serait plus justifié que par l'inclusion des territoires de l'ancienne RDA se trouvant à proximité de cette zone frontalière.
En aucun cas, on ne peut l'invoquer pour justifier une extension à la totalitée du territoire de l'ancienne RDA. Or, le présent programme d'acquisition de terres a justement pour objet la vente subventionnée par l'État de terres sur la totalité du territoire de l'ancienne RDA.
De plus, la Commission fait remarquer que l'existence d'un lien contraignant de cause à effet entre la division de l'Allemagne et les handicaps sur la totalité du territoire de l'ancienne RDA n'est pas démontrée. Il est certain que la division a fait surgir des difficultés, notamment dans le domaine des infrastructures (solution de continuité) et des marchés (cloisonnement), difficultés que, entre-temps, l'on peut considérer comme surmontées. Les problèmes économiques que connaît encore aujourd'hui l'ancienne RDA sont des séquelles directes du régime politique et économique précédent (et non de la division de l'Allemagne) ou, à la rigueur, des conséquences de la suppression de cette division, car, en réalité, ils sont dus à d'autres causes économiques survenues ultérieurement.
Pour ces raisons, la Commission s'en tient à la pratique qui a toujours été la sienne, selon laquelle l'article 92, paragraphe 2, point c), ne peut pas être applicable sur la totalité du territoire de l'ancienne RDA(21).
2. Exemption en vertu de l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité
Aux termes de l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité, sont compatibles avec le marché commun les aides destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas par rapport à l'ensemble de la Communauté. Comme l'indiquait déjà la communication portant ouverture de la procédure(22), cette disposition régit uniquement les aides régionales en faveur de régions particulièrement défavorisées de la Communauté. Ces mesures doivent s'appliquer dans le cadre de programmes vastes et ciblés de politique régionale et ont normalement pour objet la création d'emplois et l'aide aux nouveaux investissements englobant tous les secteurs.
À cet égard, la Commission s'en tient à sa constatation selon laquelle l'existence de cette composante de l'aide relevant de la politique régionale n'a pas été démontrée. Pour le moment, le programme d'acquisition de terres se limite à régler le futur régime de la propriété de superficies jadis "propriété du peuple" dans l'ensemble de l'ex-RDA. Une amélioration de la structure économique régionale n'a pas été démontrée.
De plus, il n'existe pas de lien entre le programme d'acquisition de terres et les conditions économiques générales susmentionnées concernant les entreprises bénéficiaires.
La question de savoir dans quelle mesure l'acquisition de terres à des conditions préférentielles par les personnes nouvellement installées et les entreprises ayant succédé aux CPA est de nature à améliorer le niveau de vie ou la situation du marché de l'emploi dans les nouveaux Länder est restée sans réponse. Or, la vocation fondamentale de l'aide pour atteindre cet objectif constitue la condition justificative au sens de l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité.
Pour ces raisons, les éléments constitutifs d'une dérogation ne peuvent être invoqués ici, ce qui n'a d'ailleurs été fait ni par les autorités allemandes ni par d'autres intéressés.
3. Exemption en vertu de l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité
Conformément à l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité, les aides d'État destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques peuvent être approuvées quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun.
L'article 92, paragraphe 3, point c), est notamment applicable lorsque l'aide en question permet de remédier aux faiblesses structurelles desdites activités ou régions économiques.
La situation juridique déterminante à la date de l'entrée en vigueur de l'EALG permettait en principe à la Commission, en vertu de l'article 35, paragraphe l, en liaison avec l'article 12, paragraphe 5(23), du règlement (CEE) n° 2328/91 du Conseil du l5 juillet 1991 concernant l'amélioration de l'efficacité des structures de l'agriculture(24), de considérer en principe comme compatibles avec le marché commun et d'autoriser les aides à l'achat de terres à titre d'aides aux investissements(25), pour autant que l'intensité de l'aide ne dépassât pas 35 % [75 % dans les zones défavorisées(26).
En ce qui concerne les mesures forestières en général, l'article 8, paragraphe 2, du règlement (CEE) no 2080/82 du Conseil du 30 juin 1992 instituant un régime communautaire d'aides aux mesures forestières en agriculture dispose que les États membres peuvent prendre des mesures d'aide supplémentaires dont les conditions de modalité d'octroi s'écartent de celles qui y sont prévues ou dont le montant excède les plafonds qui y sont prévus, sous réserve que ces mesures soient prises en conformité avec les articles 92, 93 et 94 du traité. Dans ce domaine, c'est une pratique courante de la Commission de ne pas soulever d'objection à l'égard d'aides aux investissements pouvant atteindre 100 % des coûts éligibles de la mesure(27). Elle fait cependant remarquer dès à présent, à titre préventif, que cette politique pourrait changer sous peu.
En l'occurrence, la vente à prix réduit de terres sylvicoles doit être considérée comme "une condition(s) de modalité d'octroi s'écartant de celles qui y sont prévues".
Les aides d'État - quelle que soit leur nature - ne peuvent cependant pas bénéficier d'une exemption au titre du paragraphe 3 de l'article 92 du traité, si et dans la mesure où elles sont discriminatoires et violent le traité.
Par conséquent, avant de se demander si les règles spécifiques de la Commission mentionnées ci-dessus ont été prises en compte lors de la définition de l'acquisition à prix réduit de terres agricoles ou sylvicoles, la Commission doit examiner la question prioritaire de savoir si elles ont un effet discriminatoire au sens des dispositions du traité CE.
3.1. Discrimination
En ouvrant la procédure, la Commission avait exprimé des doutes quant à la compatibilité avec certains articles du traité (notamment les articles 52 et 6) de la condition relative à la résidence sur place des personnes nouvellement installées ou de 75 % des détenteurs de parts des personnes morales à la date de référence du 3 octobre 1990. Dans ce contexte, elle avait rappelé que les articles 52 à 58 prévoient la suppression des restrictions à la liberté d'établissement. Cela s'applique à la fondation ou la construction d'entreprises, d'établissements principaux et de succursales ou de filiales. Selon la jurisprudence constante de la Cour de justice des Communautés européennes(28), la notion de liberté d'établissement peut également couvrir l'acquisition de biens immobiliers pour la réalisation de l'objectif économique(29). En mentionnant les "restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un État membre dans le territoire d'un autre État membre", la disposition fait clairement référence à la nationalité(30) et interdit toute discrimination à ce titre. L'interdiction de toute discrimination ne porte pas seulement sur les discriminations directes, mais concerne aussi les discriminations dissimulées. Il y a discrimination dissimulée fondée sur la nationalité lorsque "le critère de distinction appliqué aboutit au même résultat que l'application d'une discrimination fondée sur la nationalité"(31), c'est-à-dire lorsque la distinction ne se fonde certes pas directement sur la nationalité, mais sur des critères ayant pour caractéristique que seuls les nationaux ou, à l'inverse, seuls les étrangers peuvent y satisfaire (par exemple, en cas d'exigences en matière de lieu d'origine ou de résidence).
L'article 54, paragraphe 3, point h), du traité, dispose que la Commission s'assure que les conditions d'établissement ne sont pas faussées par des aides accordées par les États membres. En application de cette disposition et par son programme général pour la suppression des restrictions à la liberté d'établissement de 1962(32), le Conseil a prévu que les dispositions législatives, réglementaires ou administratives ou les pratiques administratives qui gênent exclusivement ou principalement ou subordonnent à certaines conditions l'accès ou l'exercice d'une activité non salariée par des étrangers sont à éliminer. Parmi ces dispositions ou pratiques figurent également les aides d'État directes ou indirectes, telles que l'octroi de subventions à l'acquisition de terres.
L'interdiction des restrictions à la liberté d'établissement visée aux articles 52 à 58 a notamment pour objet de réserver aux entreprises en cause le même traitement qu'aux entreprises ayant leur siège dans l'État d'accueil. Or, le régime en cause prévoit que seuls les résidents sur place peuvent bénéficier des mesures visées à l'article 3, paragraphe 2, de la loi sur les compensations. Pour pouvoir bénéficier de ce régime, les sociétés n'ayant pas leur siège dans les nouveaux Länder auraient dû transférer celui-ci dans ces régions ou les personnes physiques auraient dû y déplacer leur résidence principale, ce qui, pour les personnes physiques et morales des autres États membres était pratiquement impossible à la date du 3 octobre 1990 à cause de circonstances politiques et économiques. De ce fait, la loi favorise les personnes physiques et morales des nouveaux Länder par rapport à celles qui n'ont pas de siège ou de résidence en Allemagne et est donc de nature à constituer une infraction à l'interdiction de discrimination prévue par les articles 52 à 58(33).
S'il est vrai que, de jure, il était possible à tous les citoyens de la Communauté de prouver que leur résidence principale était située sur le territoire de l'ancienne RDA le 3 octobre 1990, cette condition n'était remplie de facto, quasi exclusivement, que par des citoyens allemands, dont la résidence antérieure était notamment située dans les nouveaux Länder.
Dès lors, cette condition produit un effet d'exclusion à l'égard des personnes ne satisfaisant pas au critère selon lequel la résidence (principale) doit être située sur le territoire de l'ancienne RDA.
Il est vrai qu'en se référant à la jurisprudence en la matière, la Commission(34) a admis que des critères de distinction tels que le lieu de résidence ne constituent pas, dans leurs répercussions effectives, de discrimination indirecte prohibée fondée sur la nationalité lorsque ces critères (et, de ce fait, le traitement différencié) sont objectivement justifiés.
Le critère de distinction "résidence sur place au 3 octobre 1990" ne peut se justifier que s'il est à la fois nécessaire et propre à réaliser l'objectif poursuivi par le législateur. Une mesure n'est pas nécessaire si l'objectif fixé par le législateur peut également être atteint par la mise en oeuvre d'une disposition plus légère, c'est-à-dire moins contraignante, de même nature.
Selon les termes du gouvernement fédéral, "en fixant la date du 3 octobre 1990, le législateur a voulu faire en sorte que les personnes intéressées, ou les familles de celles-ci, qui avaient vécu et travaillé pendant des décennies dans la RDA, puissent participer au pacte social de compensation à conclure entre elles et les anciens propriétaires."
L'objectif était donc de faire bénéficier du programme les personnes intéressées ou les familles de celles-ci qui avaient vécu et travaillé pendant des décennies dans la RDA.
Les autorités allemandes justifient cette manière de procéder par "la nécessité contraignante d'assurer une large continuité sociale". Il fallait parvenir à mettre en place "un pacte de compensation sociale". Une attention particulière devait être accordée aux "acquéreurs qui résidaient depuis longtemps déjà dans la région". Le législateur est "autorisé à assurer la participation au processus de restructuration des personnes nouvellement installées pour ce qui concerne les terres devenues propriété de l'État de la RDA".
À cet égard, la Commission souligne expressément qu'elle admet sans réserve l'objectif que les mesures poursuivent. L'adaptation des structures de la propriété de l'Allemagne de l'Est au nouveau système économique est un objectif tout à fait légitime du législateur allemand. En fait, la plupart des États membres ont mis en oeuvre des réformes foncières permettant aux agriculteurs d'acquérir les terres qu'ils exploitaient. La Commission respecte l'intention de tenir compte d'un tel attachement à la terre.
Cependant, pour atteindre cet objectif, il n'aurait pas été nécessaire de fixer la date de référence du 3 octobre 1990 pour la résidence sur place. En effet, ces personnes nouvellement installées ou ces personnes morales auraient été autorisées, en vertu de l'article 3, paragraphe 1, de la loi sur les compensations, à participer au programme d'acquisition de terres si, au 1er octobre 1996, elles avaient pris à bail à long terme des terres jadis propriété du peuple et à privatiser par la Treuhandanstalt.(35)
Au cours de cette procédure d'examen, des intéressés ont expressément attiré l'attention de la Commission sur le fait que la très grande majorité des contrats de bail à long terme ont été conclus avec des allemands de l'Est. Toutes les questions soulevées en matière de discrimination ont suscité de la part de l'Allemagne une réaction détaillée et résolue, mais cette dernière affirmation n'a pas fait l'objet d'un démenti, ni, encore moins, d'une contestation motivée.
Il ressort clairement de cela que la réalisation de l'objectif fixé par le législateur (à savoir, la participation des Allemands de l'Est au programme d'acquisition de terres) n'aurait pratiquement pas été mise en péril par la non-fixation de la date de référence au 3 octobre 1990.
Par conséquent, dans la mesure où l'acquisition de terres agricoles ou sylvicoles reste liée à la date de référence du 3 octobre 1990, la Commission estime que cette disposition n'est pas nécessaire et, partant, ne se justifie pas.
Dans la mesure où la disposition concernant la résidence sur place ne coïncide pas avec la condition relative à un bail à long terme(36), il y a lieu de préciser ce qui suit:
Selon la jurisprudence constante de la Cour de justice, une discrimination interdite par le traité existe lorsqu'un traitement différent est réservé à des objets comparables ou lorsqu'un même traitement est réservé à des objets différents(37).
L'égalité et l'inégalité de traitement sont à justifier par des motifs objectifs découlant impérativement des faits correspondants.
La Commission a déjà souligné que, à ses yeux, l'adaptation des structures de la propriété au nouveau système économique constitue un objectif totalement légitime.
Adapter les structures de la propriété en offrant à ceux qui exploitent déjà les terres à privatiser une possibilité d'acquisition privilégiée pourrait représenter une mesure justifiable - en principe - compte tenu de l'existence du lien objectif étroit (preneur à bail - futur propriétaire).
Cependant, la date du 3 octobre 1990 n'est pas liée à l'existence d'un bail à terme (de longue durée).
À la lumière de ce qui précède, l'exclusion - de facto et a priori - d'autres citoyens de la Communauté ne peut pas se justifier.
Il ressort clairement des considérations relatives aux personnes nouvellement installées(38) qu'un traitement inégalitaire fondé sur les dommages subis est tout aussi injustifiable : comme des intéressés l'ont fait remarquer avec raison, les personnes nouvellement installées n'ont jamais été expropriées, au même titre que leurs concurrents dans les autres États membres, ce que la Commission avait déjà établi en ouvrant la procédure(39).
Pour ces motifs, la Commission ne peut souscrire au grief qu'un des intéressés avait formulé à son égard et selon lequel elle voulait "exclure du bénéfice" de la loi les personnes nouvellement installées. La Commission s'efforce uniquement de veiller à l'application du traité CE. En définitive, la Commission s'en tient à la constatation de l'existence d'une discrimination enfreignant les articles 52 à 58 du traité en raison du traitement inégalitaire injustifié réservé à des catégories d'intéressés fondamentalement identiques [les candidats acheteurs d'Allemagne (de l'Est) des autres États membres] dans l'accès à l'acquisition de terres à des conditions préférentielles.
Cette discrimination indirecte viole également l'article 6 du traité(40).
En ce qui concerne l'article 40, paragraphe 3, du traité, la Commission n'a pas fondamentalement exclu l'existence d'une infraction(41).
L'Allemagne a réfuté cette affirmation en faisant remarquer, à juste titre, que s'il est vrai que les dispositions en cause s'adressent aussi aux États membres, elles ne sont applicables que pour autant qu'elles concernent les organisations communes de marché.
Il est effectivement exact que le programme d'acquisition de terres est une mesure nationale. Il ne s'agit pas de la mise en oeuvre d'une organisation commune de marché(42) de sorte que le programme en cause n'est pas couvert par le champ d'application de l'article 40, paragraphe 3. Cette question n'a pas donné lieu à d'autres observations dûment étayées.
Pour les raisons exposées ci-dessus, il est inutile d'approfondir les nombreuses remarques formulées par certains intéressés selon lesquelles les bénéficiaires du programme d'acquisition de terres sont en premier lieu les entreprises ayant succédé aux CPA, ce qui a été jugé "arbitraire, socialement déséquilibré et profondément injuste". Pour les mêmes raisons, la Commission s'abstient également de tout commentaire relatif au grief affirmant qu'une très grande disparité règne à l'intérieur même du groupe des bénéficiaires, le programme prévoyant pour les personnes comparativement le moins affectées des compensations plus élevées que pour celles qui ont subi de plus graves dommages à la suite des expropriations. Toujours pour les mêmes raisons, la Commission ne donne pas suite aux reproches qui ont été formulés à l'égard du gouvernement fédéral, et que celui-ci n'a pas contestés, affirmant que la mesure litigieuse n'est nullement de nature à préserver les "structures sociales existantes" et que le gouvernement fédéral n'avait pas du tout pensé "aux hommes" des nouveaux Länder, mais visait exclusivement les quelque 3000 successeurs de CPA.
En définitive, la Commission constate que les aides liées à la condition relative à la résidence sur place au 3 octobre 1990 (personnes nouvellement installées et personnes morales) violent les articles 6 et 52 à 58 du traité CE et que, de ce fait, elles ne sont pas compatibles avec le marché commun au sens des articles 92, 93 et 94 du traité.
Pour ce qui est, finalement, de la date butoir du 1er octobre 1996, la Commission note qu'elle n'a, en l'absence de plaintes de la part des intéressés, pas fait l'objet de commentaires de la part des autorités allemandes.
3.2. Intensité des aides
À titre subsidiaire, la Commission fait remarquer qu'elle n'a pas pu acquérir une certitude suffisante quant au fait que le programme d'aide se conforme dans tous les cas aux plafonds d'intensité des aides fixés par elle.
À elle seule, la méthode de calcul présentée par l'Allemagne (voir le chapitre II, point 9) aboutit à un taux d'aide de 29,2 % pour l'Allemagne de l'Est. Même si la Commission admettait entièrement le bien-fondé de cette méthode, il ne s'agirait encore que de valeurs moyennes.
Les données transmises à la Commission par les autorités allemandes dans la lettre du 25 juillet 1997 montrent cependant sans équivoque des intervalles de fluctuation pouvant atteindre + 8,7 % vers le haut (taux moyens pour le Land de Brandebourg) et -7,8 % vers le bas (pour le Land de Mecklembourg-Poméranie occidentale) par rapport à la moyenne, suivant les Länder. Avec un tel intervalle de fluctuation des valeurs moyennes concernant les différents Länder, on ne peut que craindre, sur la base de la méthode de calcul communiquée par les autorités allemandes, un dépassement de la limite de 35 % dans les zones non défavorisées de certains Länder de la RFA. Ces valeurs n'étant à leur tour que des valeurs moyennes - qui s'appliquent aux différents Länder - il se peut que, toujours en partant de l'application de la méthode de calcul récemment transmise, la limite de 35 % soit très sensiblement dépassée dans certains cas particuliers.
D'autre part, la Commission exprime de très sérieux doutes à l'égard du caractère justifié des méthodes de calcul que les autorités allemandes lui ont fait parvenir. Certes, la Commission reconnaît expressément que les contraintes auxquelles sont soumises les superficies agricoles en question (interdiction d'aliénation sur vingt ans, droit de résiliation en cas de conversion en terrain à bâtir) sont de nature à peser quelque peu sur la valeur vénale de ces terres. Les méthodes de calcul communiquées par l'Allemagne sont cependant entachées par le fait qu'elles partent de l'hypothèse que l'achat de terres à prix réduit ne présente aucune "plus-value" pour l'agriculteur au cours de la durée de l'interdiction d'aliéner portant sur vingt ans. Comme certains intéressés l'ont cependant fait remarquer à juste titre, l'interdiction d'aliéner limitée dans le temps ne "gêne" généralement pas le preneur d'un bail de longue durée. En raison de l'existence de contrats de bail de longue durée, le preneur à bail type n'a de toutes façons pas l'intention ni la nécessité de vendre pendant cette durée.
De l'avis de la Commission, il serait donc plus correct de retenir, par principe, l'équivalent subvention de 55,5 % en moyenne, éventuellement corrigé d'un coefficient moyen de vente ou de résiliation, que les autorités allemandes ont expressément indiqué dans la lettre susmentionnée. Ce coefficient de vente ou de résiliation (c'est-à-dire le nombre moyen de ventes de terres agricoles ou de conversions en terrain à bâtir au cours de vingt ans) n'a pas été communiqué par les autorités allemandes.
La Commission n'a donc aucun point de repère pour vérifier que les équivalents subventions explicitement mentionnés par les autorités allemandes pour les différents Länder (Brandebourg: 64,2 %; Saxe: 61,9 %; Saxe-Anhalt: 61,3 %; Thuringe: 59,4 %; Mecklembourg-Poméranie occidentale: 47,7 %) respectent la limite de 35 % fixée par la Commission. C'est là une autre raison pour laquelle le programme d'acquisition de terres ne peut pas, à cet égard(43), être considéré comme compatible avec la politique de la Commission en matière de fixation de plafonds d'intensité d'aide telle qu'elle a été décrite.
Pour ces raisons, la Commission ne peut pas accorder d'exemption au titre de l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité.
Le régime d'aide en cause n'ayant pas davantage pour objet de réaliser un des autres objectifs fixés par l'article 92, paragraphes 2(44) et 3, du traité, la Commission se voit contrainte d'arriver à la conclusion que la mesure ne peut pas être considérée comme compatible avec le marché commun.
VIII
En conclusion, la Commission constate que l'Allemagne, en tant qu'État membre, a mis en application le régime d'aide en infraction à l'article 93, paragraphe 3, du traité.
Toute aide accordée en violation du droit doit, en principe, faire l'objet d'une demande en restitution au bénéficiaire, afin de rétablir la situation économique telle qu'elle était avant l'octroi de l'aide mise en cause. Le remboursement s'effectue selon les dispositions et procédures du droit allemand, y compris les intérêts calculés, à compter de la date d'octroi, sur la base du taux de référence pris en compte lors de l'appréciation des régimes d'aide régionaux.
Il s'ensuit que l'Allemagne doit récupérer les aides octroyées au titre du programme d'acquisition de terres, qui étaient liées à la condition relative à la résidence sur place au 3 octobre 1990, ainsi que celles qui dépassent les intensités d'aides maximales de 35 % pour les terres agricoles en zones non défavorisées aux termes du règlement (CE) no 950/97. Dans un délai de deux mois à partir de la notification de la présente décision, l'Allemagne communique à la Commission les mesures qu'elle aura prises pour s'y conformer,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier
Le programme d'acquisition de terres visé à l'article 3 de la loi sur les compensations ne contient pas d'aides, dans la mesure où ses dispositions ne portent que sur des compensations faisant suite à des expropriations ou à des actions assimilables à une expropriation mises en oeuvre dans le cadre du régime d'occupation soviétique et où les avantages accordés sont équivalents ou inférieurs aux dommages pécuniaires causés par ces interventions.

Article 2
Les aides sont compatibles avec le marché commun dans la mesure où elles ne sont pas liées à la condition de la résidence sur place au 3 octobre 1990 et dans la mesure où elles respectent les intensités d'aides maximales de 35 % pour les terres agricoles en zones non défavorisées aux termes du règlement (CE) no 950/97.
Les aides liées à la condition de la résidence sur place au 3 octobre 1990 ainsi que celles qui dépassent les intensités d'aides maximales de 35 % pour les terres agricoles en zones non défavorisées aux termes du règlement (CE) no 950/97 ne sont pas compatibles avec le marché commun.
L'Allemagne est tenue de supprimer les aides mentionnées au deuxième alinéa et ne peut plus les accorder à l'avenir.

Article 3
L'Allemagne récupère, dans un délai de deux mois, les aides incompatibles avec le marché commun qu'elle a octroyées conformément à l'article 2, deuxième phrase. Le remboursement s'effectue selon les dispositions et procédures du droit allemand, y compris les intérêts calculés, à compter de la date d'octroi, sur la base du taux de référence pris en compte lors de l'appréciation des régimes d'aide régionaux.

Article 4
Dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la présente décision, l'Allemagne communique à la Commission les mesures prises pour s'y conformer.

Article 5
La République fédérale d'Allemagne est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 20 janvier 1999.

Par la Commission
Franz FISCHLER
Membre de la Commission

(1) JO C 215 du 10.7.1998, p. 7.
(2) JO C 215 du 10.7.1998, p. 7.
(3) Lettre n° VI/32143 du 19.8.1998.
(4) Un centième environ des réactions reçues.
(5) Voir la définition figurant au J0 C 215 du 10.7.1998, p. 9. Les personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution ont d'anciens propriétaires d'exploitations agricoles qui ont été expropriés entre 1945 et 1949.
(6) Voir la définition figurant au J0 C 215 du 10.7.1998, p. 9. Les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution ont été expropriées après 1949 et ont un droit à restitution qui leur est conféré par la loi sur le patrimoine.
(7) Voir la définition figurant au J0 C 215 du 10.7.1998, p. 9,
(8) JO C 215 du 10.7.1998, p. 14.
(9) Voir la définition figurant au J0 C 215 du 10.7.1998, p. 10.
(10) JO C 215 du 10.7.1998, p. 12.
(11) BGBl. I p. 2624.
(12) Y compris les "anciens propriétaires".
(13) J0 C 215 du 10.7.1998, p. 12, partie 111.1
(14) J0 C 215 du 10.7.1998, p. 13, partie 111.5
(15) J0 C 215 du 10.7.1998, p. 10, partie 11.2
(16) JO C 215 du 10.7.1998, p. 12.
(17) JO C 215 du 10.7.1998, p. 17.
(18) JO C 209 du 10.7.1997, p. 3.
(19) JO C 215 du 10.7.1998, p. 13.
(20) Affaires 6/69 et 11/69, Banque de France, Recueil 1969 - p. 523 et suivantes.
(21) Voir SG(94) D/5981, p. 2 (communications Tetteau/Bavière); décision du 14 février .1992 ("Potsdamer Platz"), J0 L 263 du 9.9.1992, p. 15; 0pel-Eisenach (J0 C 43 du 16.2.1993, p. 14); Carl-Zeiss-Jena (J0 C 97 du 6.4.1993, p. 7); Rhône-Poulenc Rhotex (J0 C 210 du 4.8.1993, p. 11 ); SST-Garngesellschaft (J0 L 114 du 5.5.1994, p. 21 ); Volkswagen I (J0 L 385 du 31.12.1994, p. 1 ) et Deggendorf (J0 L 386 du 31.12.1994, p. 13)
(22) JO C 215 du 10.7.1998, p. 15.
(23) Actuellement article 12, paragraphe 2, point a), du règlement (CE) no 950/97.
(24) Voir les aides N 682197, N 156/97, N 797/96 et N 940/96.
(25) Voir les critères exposés dans la communication de la Commission de 1979 - point 18 1) de l'annexe (J0 C 31 du 3.2.1979) -
(26) Dans les nouveaux Länder, seule la moitié environ de la superficie totale est classée zone défavorisée; cf articles 2 et 3 de la directive 751268/CEE (actuellement annexe du règlement (CE) no 950/97.
(27) Cf. les aides n°s N 567/97, N 752/96, N 750196, N 646/96 et N 153/96
(28) Affaire 305/87, Commission contre République hellénique, Recueil 1989, p.1461 et suivantes.
(29) Programme général pour la suppression des restrictions à (a liberté d'établissement de 1962, J0 2 du 15.1.962, p.36/62
(30) En ce qui concerne les personnes morales, selon l'article 58, la nationalité d'une société est à déterminer en fonction des dispositions législatives d'un État membre qui sont à la base de sa constitution ainsi qu'en fonction de son siège statutaire et de son administration centrale
(31) Arrêt du 23 février 1994, affaire C-419/92/Scholz contre 0pera Universitaria, Recueil 1994, p. I-505, point 7 des motifs; arrêt du 23 mai 1996, affaire C-237/94 0'Flynn, Recueil 1996, p. I-2617, point 17 des motifs.
(32) J0 2 du 15.1.1962, p. 36/62
(33) Affaire C-107/94, Asscher, Recueil 1996, p. I-3089 et suivantes, point 36 des motifs et suivants.
(34) Arrët du 23 mai 1996, affaire C-237/94 0'Flynn, Recueil 1996, p. I-2617, points 20 et 21 des motifs; arrët du 12 septembre 1996 affaire C-2194, Commission contre Royaume de Belgique, Recueil 1996, p. I-4307, point 20 des motifs
(35) A l'exception de l'acquisition de superficies forestières par des personnes nouvellement installées, conformément à l'article 3, paragraphe 8, point b), de la loi sur les compensations
(36) Article 3, paragraphe 8 et suivantes de la loi sur les compensations
(37) Voir, par exemple, pour la première catégorie : Fédération charbonnière de la Belgique/Haute Autorité, affaires 8/55 et 9/55, Recueil 1955/56, p. 297 et suivantes, 3et 331 et suivantes.; Société des Fonderies de Pont-à-Mousson, affaire 14/59, Recueil 1958/59, p. 465 et suivantes.; Kühlhaus-Zentrum, affaire 79/77, Recueil 1978, p. .611 et suivantes, et, pour la deuxième catégorie : Italie/Commission, affaire 13/63, Recueil 1963, p. 357 et suivantes.; Milac, affaire 8/78 Recueil 1978 p. 1721 et suivantes.; ridania, affaire 230/78, Recueil 1979, p. 2749 ss.; Wagner, affaire 8/82, Recueil 1983, p. 371 sc.
(38) Voir chapitre VI point 3; conformément à l'article 3, paragraphe 8, point b) de la loi sur les compensations, les personnes morales ne peuvent pas acquérir de terres.
(39) J0 C 215 du 10.7.1998, p. 18, chapitre IV point 5 (avant-dernier paragraphe).
(40) J0 C 215 du 10.7.1998, p. 17 et autres renvois
(41) JO C 215 du 10.7.1998, p. 17.
(42) Cf. CJCE-Graff, affaire C-351/92 Recueil 199 i, I-3361, 3379; CJCE -Klensch e.a./Luxembourg, affaires 201/85 et 202/85, Recueil 1986, 3477.
(43) Les plafonds d'intensité pour les zones défavorisées (75 %) et pour les aides à l'acquisition de superficies forestières (100 %) sont manifestement respectés
(44) A l'inclusion du point b) du paragraphe 2 de l'article 92 qui prévoit une dérogation pour les événements extraordinaires autres que les calamités naturelles



Ce n'est que dans la perspective d'une demande en restitution/compensation de péréquation de charges que l'article 349, paragraphe 3, de la loi sur la péréquation des charges simule une compensation entière des dommages à charge de l'ayant droit, alors qu'en réalité celui-ci ne récupère pas d'exploitation en activité. Cette fiction est exclusivement motivée par des raisons de technique juridique ouvrant le droit de demander la restitution. Or, la demande en restitution de la péréquation des charges est toujours limitée à la valeur effective des objets à restituer.
La péréquation des charges est une réglementation concernant des cas de rigueur et ne constitue pas, au même titre que les dispositions réglant les questions patrimoniales pendantes dans le traité d'unification, une compensation totale des dommages subis au sens, par exemple, du droit civil ou d'une indemnité pour cause d'expropriation selon l'article 14, paragraphe 3, de la loi fondamentale.
Par conséquent, la péréquation des charges n'exclut nullement l'application de réglementations reposant sur une autre base juridique, telles que, en l'occurrence, celle du régime de la propriété.
Par ailleurs, constatant que, conformément à l'article 44, point 1, de la loi portant adaptation de l'agriculture, les anciens membres de CPA sont en droit d'obtenir l'indemnisation intégrale de la valeur de leurs apports d'équipement, les plaignants en déduisent qu'il faut, "de droit" partir du principe que les apports d'équipement dans les CPA ont fait l'objet d'une indemnisation totale. Ce faisant, ils assimilent le droit à une prestation à son exécution. Il est cependant bien connu que, dans de nombreux cas, les apports d'équipement dans les CPA n'ont pas fait l'objet d'une indemnisation complète.
2. Compensation de la perte de patrimoine
Nombre de réactions citent le fait que les exploitations agricoles des nouveaux Länder bénéficient depuis 1990 "d'aides annuelles à l'adaptation d'un montant tellement élevé que la compensation de la perte de patrimoine a déjà atteint un multiple de la valeur".
Cette affirmation repose sur des bases erronées: s'il est vrai que, depuis 1990, des moyens considérables sont mis à la disposition des exploitations agricoles des nouveaux Länder, ces moyens n'étaient pas destinés à compenser les pertes de patrimoine subies par les exploitations ou leurs propriétaires avant l'instauration de l'unité allemande. En fait, avec l'introduction de l'union économique, monétaire et sociale, l'adoption du régime des organisations de marché de la Communauté européenne et le rapprochement du niveau des prix agricoles avec celui de l'ancien territoire fédéral, les prix à la production dans les nouveaux Länder, qui, au temps de la RDA, étaient fixés par l'État, ont connu une baisse considérable. Bien qu'en même temps les prix des facteurs de production aient également régressé, leur baisse était loin de compenser, ne serait-ce qu'approximativement, les pertes de revenu, de sorte que la majorité des exploitations n'étaient pas en mesure de faire face à leurs obligations de paiement. C'est pour compenser ces handicaps que des aides à l'adaptation ont été octroyées, aides qui ont été notifiées à la Commission et approuvées par elle.
3. Discrimination
En ce qui concerne la question de l'existence d'une discrimination relevant du droit communautaire, l'Allemagne soutient que, même si un ancien propriétaire avait - dans un cas particulier hypothétique - été effectivement lésé par rapport à un autre ayant droit à l'acquisition de terres lors de la prise à bail et de l'acquisition subséquente de terres agricoles ou lors de la vente de superficies sylvicoles, la nationalité n'aurait eu aucune importance. La concurrence s'exerce exclusivement entre anciens citoyens de la RDA. La fixation d'une date de référence (le 3 octobre 1990) pour l'application du régime d'acquisition de terres est objectivement justifiée. Par rapport aux citoyens de la RDA, les citoyens de l'Ouest disposaient de chances remarquables d'orienter leur parcours professionnel en fonction de leurs aspirations et aptitudes personnelles, ce qui engendrait également la possibilité d'acquérir du patrimoine. Or, si l'on faisait participer à l'acquisition de terres des Allemands de l'Ouest (ou des ressortissants d'autres États membres) qui n'ont pas été affectés personnellement par la division de l'Allemagne, on leur offrirait la possibilité de placer avantageusement dans les nouveaux Länder le capital acquis dans l'Ouest (dans le cas présent, sous forme de l'acquisition d'une exploitation sylvicole à titre accessoire). Ce faisant, on priverait des citoyens de la RDA, qui ont eu infiniment moins de chances d'acquérir un patrimoine personnel, de la possibilité de se constituer un nouveau capital d'exploitation (et non un capital privé). L'exclusion de tout modèle de placement de capitaux a été une préoccupation politique majeure lors de l'élaboration du pacte social de compensation.
De plus, le fait que ne sont autorisées à participer à l'acquisition de terres que les personnes ayant été directement affectées par la division de l'Allemagne montre que l'objectif de la création de nouvelles structures de propriété, en vue de libérer ainsi des forces économiques et sociales, et le principe de la compensation des handicaps subis dans la RDA ne sont nullement contradictoires.
Le programme d'acquisition de terres ne comporte pas d'inégalité de traitement arbitraire à l'égard des Allemands de l'Ouest et des citoyens de la Communauté. Le législateur à l'origine de l'EALG était tenu, dans son travail de conception du pacte social de compensation et de définition connexe des conditions applicables à l'acquisition de terres, de se référer à la situation existant le 3 octobre 1990 sur le territoire adhérent. Pour réaliser l'unité interne et pour garantir la paix juridique, il était indispensable d'accorder également le droit d'acquérir des terres à des conditions préférentielles aux exploitants résidents sur place à cette date. Cela permettait en même temps de faire en sorte que seules pouvaient prendre part à l'acquisition de terres des personnes qui avaient été individuellement et directement affectées par la division de l'Allemagne.
V
En ouvrant la procédure d'examen, la Commission a constaté que le programme d'acquisition de terres n'a pas été notifié en tant que régime d'aide au sens de l'article 93, paragraphe 3, du traité. Cette disposition prévoit que les aides d'État doivent être notifiées à la Commission dès le stade de projet. L'infraction à la disposition susmentionnée a pour conséquence que l'aide, pour autant qu'elle soit établie, doit être considérée comme illégale.
Les autorités allemandes ont cependant fait valoir que l'article 93, paragraphe 3 du traité, ainsi que les autres dispositions du traité concernant les aides ne sont pas applicables. À cela la Commission répond ce qui suit: avec l'adhésion de la RDA à la République fédérale d'Allemagne le 3 octobre 1990, le traité CE devient également effectif sur le territoire de l'ancienne RDA. De ce fait, à partir de cette date, les prescriptions en matière de concurrence s'appliquent de manière uniforme aussi bien dans l'ouest que dans la partie orientale de l'Allemagne.
La partie de l'EALG (loi sur les dédommagements et les compensations) contenant le programme d'acquisition de terres est entrée en vigueur le 1er décembre 1994(11). Par conséquent, la date d'entrée en vigueur de la partie correspondante de l'EALG est postérieure au 3 octobre 1990, donc à un moment où le traité CE était applicable sur tout le territoire allemand. Il s'ensuit que l'EALG relève de l'article 93, paragraphe 3 du traité, aussi bien que des autres dispositions relatives à l'octroi d'aides.
À titre conservatoire, la Commission remarque encore ce qui suit: l'Allemagne a fait valoir que, avant le 3 octobre 1990, l'adoption de la mesure en cause représentait pour elle une obligation non seulement politique, mais aussi juridique. Nombre d'intéressés à la procédure ont réfuté cet argument en affirmant qu'à l'origine le programme d'acquisition de terres ne faisait même pas partie de l'initiative législative sur l'EALG et que, par ailleurs, la documentation législative correspondante ne mentionne nulle part une obligation juridique de ce type.
Il n'y a pas lieu d'approfondir cette question, qui n'a d'ailleurs aucune incidence sur la présente décision: même si effectivement le gouvernement fédéral avait pris, avant la date du 3 octobre 1990 qu'il mentionne, l'engagement non seulement politique, mais aussi juridique, d'adopter à une date ultérieure (c'est-à-dire après que le traité CE eut pris effet sur le territoire des nouveaux Länder) des mesures d'aide bien déterminées applicables dans les nouveaux Länder, il aurait dû notifier la mesure à la Commission, conformément à l'article 93, paragraphe 3, avant de prendre cet engagement, parce que, depuis 1958, l'Allemagne est tenue au respect du traité. Il est cependant incontestable que cette notification n'a jamais eu lieu.
Par conséquent, le programme d'acquisition de terres est illégal, pour autant qu'il comporte des éléments d'aide.
VI
L'illégalité d'une aide ne préjuge pas de la compatibilité de cette aide avec le marché commun conformément à l'article 92 du traité, lequel a été déclaré applicable à l'agriculture, ainsi que les articles 93 et 94, par l'intermédiaire de l'article 42. Cette question sera examinée ultérieurement. Dans un premier temps, il convient de clarifier dans quelle mesure le programme d'acquisition de terres comporte des mesures qui ne réunissent pas les conditions de l'article 92, paragraphe 1, du traité et qui échappent ainsi à la détermination de leur compatibilité ou incompatibilité avec le marché commun.
Tel peut notamment être le cas lorsqu'un État se limite à restituer à un opérateur économique ce qu'auparavant il lui avait retiré (en violation du droit). L'exemple typique est représenté, en l'occurrence, par l'indemnisation du dommage (en nature ou en espèces) subi par l'opérateur à la suite d'une expropriation ou d'une action analogue. En ouvrant la procédure, la Commission a indiqué clairement que, dans la mesure où le montant du dédommagement n'est pas supérieur au préjudice subi par l'opérateur économique à la suite des interventions en cause, il ne peut pas être question d'une action consistant à favoriser les bénéficiaires au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité. Dans ce cas, il n'y aura donc pas d'aide. Dans ce contexte, la Commission constate d'abord que ce principe n'a été mis en cause ni par l'Allemagne ni par les autres intéressés.
Par la même occasion, la Commission avait expressément précisé que l'ordonnancement de l'acquisition de terres à des conditions préférentielles était tel qu'il donnait lieu à une présomption de l'existence d'une aide.
Or, dans ce contexte, la Commission constate qu'absolument aucun des intéressés, que ce soit l'Allemagne ou les autres personnes concernées, n'a contesté l'hypothèse de la présomption de l'existence d'une aide.
Par conséquent, la Commission estime qu'il n'y a aucun motif de modifier son point de vue à cet égard. La Commission continue donc à partir du principe de l'existence d'une aide, à moins que la preuve ne soit faite qu'il s'agisse là exclusivement d'une mesure destinée à compenser des dommages résultant d'expropriations ou d'actions analogues.
Le critère retenu à cet égard par la Commission est le droit national, donc, dans le cas présent, le droit allemand. Par conséquent, il faut que soit apportée à la Commission la preuve incontestable que le droit national commun reconnaît aux différentes catégories de personnes évoquées dans le programme d'acquisition de terres la qualité et la capacité d'obtenir une compensation. Ces catégories de personnes sont par principe au nombre de cinq.
1. Les personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution
Les personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution sont les anciens propriétaires d'exploitations agricoles qui ont été expropriés entre 1945 et 1949(12). En règle générale, il s'agissait d'exploitations dont la taille atteignait au moins 100 hectares.
Jusqu'à présent, cette catégorie de personnes n'a pas récupéré les exploitations. Leur dommage est au moins égal à la valeur des actifs de ces exploitations expropriées.
En ouvrant la procédure, la Commission avait fait remarquer que, pour cette catégorie de personnes, l'avantage accordé prévoit qu'elles "n'ont que le droit de racheter à des conditions préférentielles une partie des terres".
Aucun des intéressés, que ce soit l'Allemagne ou les autres personnes concernées, ne l'a mis en doute. De même, la conclusion qui en a été tirée, précisant que "l'avantage accordé est donc bien inférieur à la valeur de la propriété dont ils ont été dépossédés"(13), n'a été mise en cause par aucun des intéressés susmentionnés.
En l'absence d'observations contradictoires ou d'autres points de repère, la Commission n'a aucune raison de s'écarter de son point de vue initial. Elle avait établi clairement que ces compensations ne faisaient que refléter les principes de droit en matière de protection de la propriété communs à tous les États membres.
Pour ces raisons, la Commission constate que, dans le cas des personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution, les éléments d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe l, du traité ne sont pas réunis.
2. Les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution
Les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution sont les personnes dépossédées après 1949 et qui ont un droit à restitution en vertu de la loi sur le patrimoine.
Dans le cas de cette catégorie, la loi fait une distinction entre les personnes dont le droit à restitution est réalisable et celles pour lesquelles ce droit ne peut pas se traduire dans la réalité.
En ce qui concerne les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution qui n'est pas réalisable, il va de soi qu'une personne expropriée bénéficiant d'un droit à restitution qu'elle n'est cependant pas en mesure de réaliser se trouve pratiquement dans la même situation qu'une personne ne bénéficiant pas d'un droit à restitution. Pour les besoins du présent examen, la personne réinstallée bénéficiant d'un droit à restitution non réalisable est donc à assimiler à une personne réinstallée ne bénéficiant pas d'un droit à restitution.
Il ressort de ce qui précède que les conclusions exposées au point 1 ci-dessus sont applicables à la sous-catégorie spécifique des personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution.
Pour ce qui est du bien-fondé du droit d'acquisition des autres personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution, c'est-à-dire celles dont ce droit est réalisable, il est apparu une divergence de vues entre les autorités allemandes et la majeure partie des intéressés à la procédure, les unes affirmant l'existence de ce bien-fondé, les autres la contestant. Le différend porte sur l'interprétation du droit national, au sujet de laquelle aucune des deux parties n'a mentionné de jurisprudence émanant des tribunaux supérieurs. En l'occurrence, la Commission n'a pas à se prononcer sur l'interprétation du droit national.
Cependant, étant donné que les autorités allemandes partent du principe du bien-fondé du droit d'acquisition, on ne peut exclure qu'en fait, cette catégorie de personnes puisse effectivement tirer profit de l'achat de terres à des conditions préférentielles.
Dans ce cas, l'existence d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité, n'est nullement exclue. Dans le contexte de cette sous-catégorie spécifique de personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution, il faut examiner le cas particulier, car la Commission ne dispose d'aucun point de repère lui permettant d'établir avec certitude que, dans tous les cas, l'avantage chiffré produit par l'acquisition de terres à des conditions préférentielles en liaison avec le droit à restitution (réalisé) est (toujours) égal ou inférieur au préjudice provoqué par l'expropriation (ou le dommage d'inventaire).
Ce résultat n'est pas affecté par les "importantes aides à l'adaptation" accordées aux exploitations agricoles des nouveaux Länder depuis 1990 et qu'évoquent les intéressés ayant réagi à la procédure d'examen. Ces aides ne sont pas destinées à compenser les pertes de patrimoine subies par les bénéficiaires avant l'unification et n'entrent donc pas en considération. Dans la mesure où ce qui précède révèle l'existence d'éléments constitutifs d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité la question d'une éventuelle compatibilité de l'aide avec le marché commun n'a pas encore été abordée. Elle fera l'objet des chapitres suivants.
3. Les personnes nouvellement installées
Les personnes nouvellement installées sont des personnes qui, jusqu'au moment du changement, travaillaient dans des CPA ou dans des exploitations collectives (VEG) et ne possédaient pas d'exploitations agricoles auparavant, mais qui se sont actuellement établies dans une nouvelle exploitation agricole.
Ces personnes n'ont jamais été expropriées. Du temps de la RDA, elles étaient simplement dans l'impossibilité de constituer une propriété agricole ou sylvicole. Les autorités allemandes parlent à ce propos de "possibilités perdues"(14).
Par conséquent, selon le droit allemand, cette catégorie de personnes ne peut bénéficier d'un dédommagement pécuniaire(15).
Cet état de choses est incontesté.
À ce propos, en ouvrant la procédure, la Commission avait fait remarquer ce qui suit:
"Dans ce contexte, la Commission constate tout d'abord que ces possibilités auraient été par presque tous les citoyens de la RDA - tant que celle-ci appliquait le système de l'économie planifiée communiste - quel qu'ait été le secteur dans lequel ils exerçaient leurs activités.
(...)
En prenant en considération la notion de préjudice telle qu'elle apparaît dans la jurisprudence susmentionnée, la Commission ne peut nullement exclure qu'il y ait des aides au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité."
Après avoir analysé les observations et les commentaires de tous les intéressés, la Commission n'a pas de raison d'abandonner son point de vue actuel. Aucun des intéressés n'a été en mesure de faire valoir que, pour ce type de "dommages", le droit allemand prévoie une obligation de compensation. Il est vrai que le rétablissement de la propriété privée et de structures équilibrées de la propriété pourrait être considéré comme la réparation au sens large d'un dommage. Le droit allemand ne considère cependant pas qu'une telle action doive obligatoirement être financée par des fonds publics, ce qui semble d'ailleurs impossible à réaliser dans la pratique. Dans le cas contraire, tous les opérateurs des autres secteurs économiques devraient bénéficier d'une "indemnisation" parce qu'ils ont été empêchés d'exercer librement une activité économique pendant quarante ans.
C'est pourquoi il n'est pas possible de se rallier à l'avis selon lequel les considérations exprimées par la Commission au sujet de la compensation du préjudice manquent d'envergure et ne tiennent pas compte des spécificités de la transformation et de l'intégration dans un contexte d'économie de marché d'une partie du pays ayant une structure d'économie étatisée.
La Commission confirme son appréciation selon laquelle la vente subventionnée de terres agricoles ou sylvicoles aux personnes nouvellement installées concernant un secteur particulier de l'économie constitue, en tant que mesure sélective, une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité. La question de la compatibilité de cette mesure avec le marché commun sera examinée au cours des chapitres suivants.
Les considérations exposées ci-dessus s'appliquent naturellement à plus forte raison à deux sous-catégories de personnes nouvellement installées, à savoir, celles qui, en provenance de l'Ouest, se sont établies en Allemagne de l'Est peu avant la date du 3 octobre 1990 (et qui n'ont jamais été empêchées de constituer des propriétés agricoles ou sylvicoles) et celles qui, à la date de référence, n'étaient pas encore en âge d'exercer une profession ou de travailler (par exemple, les jeunes en âge de scolarité).
4. Les personnes réinstallées résidentes sur place
Les personnes réinstallées résidentes sur place sont les propriétaires de terres agricoles qui ont repris leurs terres aux CPA et qui ont réinstallé leur exploitation. L'Allemagne a fait valoir que, pour cette catégorie de personnes, le préjudice réside dans le fait qu'elles aussi, en règle générale, ont eu à subir de graves dégradations de la valeur de leurs exploitations initiales, qui n'ont pas été compensées en argent. Par ailleurs, souvent, il n'y a pas eu de remboursement complet des équipements apportés à la coopérative de production agricole.
En se référant à la jurisprudence de la Cour constitutionnelle allemande, des intéressés ont objecté que l'ordre juridique allemand prévoit déjà un droit à l'indemnisation des dommages d'inventaire, ce que l'Allemagne n'a pas nié. Celle-ci allègue cependant que le droit à une prestation ne peut pas être assimilé à son exécution. La Commission partage cette conviction.
L'Allemagne n'a néanmoins pas avancé de faits laissant présager que, dans les cas types, le droit en question ne trouve pas d'exécution. De l'avis de la Commission, on peut davantage s'attendre que, dans un État de droit tel que l'Allemagne, l'administration respecte scrupuleusement les lois dans les cas types.
Faute d'indications contraires, la Commission est donc amenée à supposer que, dans les cas types, une compensation est accordée pour les dommages d'inventaire. Elle admet cependant qu'il peut en être autrement dans des cas particuliers, en raison d'un dédommagement soit inexistant soit insuffisant. En définitive, la Commission part donc du principe que - dans la mesure où les dommages d'inventaire concernent le cas type - une compensation est assurée en vertu de la loi portant adaptation de l'agriculture, de sorte que les effets de la présente mesure ne se situent pas en deçà des dommages causés par la perte ou la destruction de l'inventaire, mais excèdent, au contraire, le seuil d'endommagement. Dans cette hypothèse, l'existence d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe l, du traité serait à envisager, toujours sur la base du cas type. Il ne faut cependant pas perdre de vue le cas particulier, ce qui se justifie d'autant plus que l'on peut se trouver en présence de dégradations du patrimoine.Dans une telle situation, il faut procéder à des calculs exacts concernant le cas particulier. Comme les détériorations (dommages d'inventaire/dommages du patrimoine) peuvent se produire aussi bien de manière cumulative qu'alternée et que les avantages peuvent être cumulés (loi portant adaptation de l'agriculture/loi sur les dédommagements et compensations), il y a lieu d'effectuer un calcul concernant le cas particulier pour établir si l'ensemble des avantages est inférieur ou non aux dommages totaux. En fonction du résultat obtenu, on se trouverait en présence d'une simple compensation ou d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité. La question de la compatibilité d'une aide éventuelle avec le marché commun serait à examiner séparément.
5. Les personnes morales
Les personnes morales peuvent également bénéficier de l'acquisition de terres à prix réduit, pour autant qu'elles remplissent certaines conditions fixées par le législateur, à savoir que 75 % du capital doivent être détenus par des personnes résidentes sur place au 3 octobre 1990.
Des intéressés ont fait valoir que - contrairement à la majeure partie des citoyens de l'ancienne RDA - les personnes morales n'ont subi aucun préjudice à titre individuel, ce que l'Allemagne n'a pas contesté.
Si, et dans la mesure où, les personnes morales favorisées n'ont pas été victimes d'expropriations ou d'actions assimilables à une expropriation, il convient de partir du principe - conformément à l'hypothèse exposée ci-dessus - qu'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité, n'est pas à exclure a priori. C'est ce que la Commission a souligné expressément au sujet de cette catégorie de bénéficiaires lors de l'ouverture de la procédure d'examen(16).
La Commission est cependant d'avis - en dépit de toutes les appréhensions relatives à des abus éventuels - que, dans des conditions bien déterminées et clairement définies, les éléments d'une aide puissent ne pas être réunis, bien que la personne morale non lésée participe à l'achat de terres à prix réduit. Tel peut être, par exemple, le cas lorsqu'une personne réinstallée ne bénéficiant pas d'un droit à restitution ou une personne résidente sur place qui peut lui être assimilée (à savoir, une personne réinstallée bénéficiant d'un droit à restitution qui n'est pas réalisable) décide qu'elle va laisser la personne morale dont elle fait partie acquérir à prix réduit les terres qui lui reviennent.
Le fait qu'une personne réinstallée ne bénéficiant pas d'un droit à restitution ou une personne résidente sur place pouvant lui être assimilée fasse inscrire au registre foncier le nom de la personne morale à laquelle elle appartient au lieu du sien n'a pas d'incidence en droit communautaire (intermédiation d'achat).
La Commission a pris connaissance avec une attention particulière des nombreuses observations émises par les intéressés indiquant qu'un régime de ce type constitue une invitation à abuser des dispositions en matière d'aide ou à les éluder. En premier lieu, il convient de répéter ici qu'en l'occurrence l'analyse porte exclusivement sur la délimitation entre compensation et aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité et qu'il ne s'agit pas de constater la compatibilité avec le marché commun.
En ce qui concerne les appréhensions à l'égard des abus, la Commission constate ce qui suit: il n'y a absence d'aide que si, et dans la mesure où, une double acquisition par l'associé de la personne morale est à exclure avec certitude. Dans ce contexte, on entend par double acquisition le fait que l'achat puisse être effectué aussi bien par l'associé que par la personne morale. Si tel était le cas, la Commission ne peut en aucun cas exclure une aide pour ce qui concerne la personne morale. En revanche, si la double acquisition est exclue, la personne morale ne disposerait pas d'un volume d'acquisition maximalplus étendu (en moyenne 140 ha au maximum) que celui qui reviendrait à son associé (s'il était autorisé à acheter).
Compte tenu de ces conditions, la Commission estime qu'il n'est pas indispensable de fixer une date de référence à laquelle la société doit avoir été constituée ou à laquelle la personne résidente sur place doit être affiliée à la personne morale, comme les intéressés l'ont exigé. Il faudra néanmoins que les autorités allemandes fassent parvenir chaque année à la Commission un rapport attestant le respect des conditions susmentionnées.
Eu égard aux conditions mentionnées ci-dessus, la Commission juge sans fondement les objections des intéressés selon lesquelles, en cas de participation totalement insignifiante à la personne morale, il y aurait une atteinte au principe de la proportionnalité, parce que l'ensemble de la personne morale serait considérée comme lésée et bénéficierait ainsi de l'aide.
Comme il a déjà été exposé ci-dessus, la Commission ne part en aucune manière automatiquement du principe d'un préjudice subi par la personne morale (dans le sens d'une expropriation ou d'une action équivalente). De surcroît, la personne morale ne peut pas acquérir plus de terres que les personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution (ou les personnes assimilées) en qualité d'associés. Pour le reste, la Commission renvoie à la règle des 75 % prescrite par la loi.
Pour finir, il est rappelé que, d'après le modèle décrit ci-dessus, l'existence d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité, en faveur de la personne morale ne peut être exclue avec une certitude suffisante que dans les cas et dans la seule mesure où la personne morale compte parmi ses associés au moins une personne réinstallée ne bénéficiant pas d'un droit à restitution (ou une personne réinstallée bénéficiant d'un droit à restitution non réalisable) détenant les parts de capital prescrites par la loi.
Dans le cas des autres associés visés aux points 2, 3 et 4, la Commission ne peut pas exclure et peut même présumer, pour les raisons qui y sont exposées, l'existence d'une aide en faveur de la personne morale. Dans ces cas, la compatibilité de la mesure avec le marché commun reste à établir.
À titre de conclusion relative aux problèmes soulevés dans le présent chapitre, la Commission peut exclure avec certitude l'existence d'une aide au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité, uniquement pour les personnes réinstallées ne bénéBeficiant pas d'un droit à restitution, pour les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution qui peuvent leur être assimilées et pour les personnes morales comptant parmi leurs associés au moins une des personnes susmentionnées. Il n'en va de même pour aucun des autres bénéeficiaires.
Dans la mesure où, dans ces conditions, une aide ne peut pas être exclue, les dispositions applicables sont les dispositions en matière de concurrence (articles 92, 93 et 94 du traité).
L'article 92, paragraphe 1, du traité, interdit en principe toutes les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État, sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres.
Comme cela a été précisé lors de l'ouverture de la procédure(17), l'existence d'une aide se mesure à l'avantage qu'elle apporte à son bénéficiaire et non aux objectifs et considérations de politique économique des États membres. L'Allemagne met en doute les avantages apportés par le programme d'acquisition de terres.
Conformément à la communication de la Commission concernant les éléments d'aide contenus dans des ventes de terrains et de bâtiments par les pouvoirs publics(18), la Commission peut partir du principe que les aliénations de terrains sont assorties d'une aide si celles-ci:
a) n'ont pas été conclues dans le cadre d'une procédure d'offre ouverte et inconditionnelle prévoyant la vente au plus offrant ou à l'unique offrant
ou si
b) en l'absence d'une telle procédure, elles n'ont pas été effectuées au moins à la valeur du marché déterminée par des experts indépendants.
Dans le cas présent, la Commission penche plutôt en faveur de l'hypothèse de l'existence d'un avantage résultant du programme d'acquisition de terres.
II est certainement exact que le bénéficiaire pouvait déjà disposer précédemment des terres en question en sa qualité de preneur à bail, mais, en l'occurrence, la propriété vient s'ajouter à la détention. Le simple droit de détenir est à mettre en parallèle avec la propriété qui repose sur un droit plus solide, dévolu au preneur à bail.
Le propriétaire n'a pas seulement davantage de droits que le détenteur, sa position est meilleure, notamment sur le plan économique. Si le programme d'acquisition de terres n'était assorti d'aucun traitement préférentiel, les intéressés et les acheteurs de ces terres se feraient rares. Or, le programme d'acquisition de terres a suscité un intérêt extrêmement vif.
Le gouvernement fédéral lui-même a admis dans ses observations que les terres acquises peuvent servir de capital social. De plus, elles peuvent aussi faciliter l'accès à des capitaux supplémentaires dus aux tiers.
Cela conforte la Commission dans l'opinion qu'elle avait formulée lors de l'ouverture de la procédure d'examen(19), selon laquelle l'acquisition à prix réduit de terres agricoles et sylvicoles permet aux ayants droit de constituer un capital d'exploitation et de ce fait aussi un capital social. La Commission maintient son avis.
Par ailleurs, la référence aux charges pesant sur les terrains acquis (notamment l'interdiction d'aliéner pendant vingt ans) ne modifie en rien la constatation de l'existence fondamentale d'une aide.
Ce type de clause appliqué, dans d'autres contextes, aux aides aux investissements ou aux achats de terres à prix réduit n'est pas inconnu pour la Commission.
L'objet d'une telle clause antispéculative est justement d'empêcher que l'avantage acquis ne soit immédiatement monnayé. L'agriculteur ou le sylviculteur est censé exploiter les terres qu'il a acquises à des conditions préférentielles pour assurer ainsi ses moyens d'existence et n'a pas à en retirer des gains spéculatifs. Or, l'existence d'une telle clause antispéculative est précisément un indice du fait que le programme d'acquisition de terres est assorti d'un avantage économique. Le niveau (l'intensité) de cet avantage sera examiné plus loin.
Un des intéressés est d'avis que les terres acquises en plus n'offrent pas de garantie supplémentaire lors de la constitution de capital, car les banques "hésitent" à proposer des crédits pour les superficies achetées.
Voilà encore un argument auquel la Commission ne peut souscrire. Il est certain que l'interdiction d'aliéner inscrite au registre foncier constitue une contrainte. Celle-ci est cependant limitée dans le temps. Le terrain exempt de charges peut être grevé comme tous les autres. D'autre part, comme un des autres intéressés l'a fait remarquer à juste titre, rien ne s'oppose au recours à des créances venant à un rang postérieur, même pendant les vingt années d'interdiction de vente (en dépit de l'annotation de la limitation d'aliéner auprès de la BVVG qui est généralement peu efficace ou finit par être levée), ce que l'Allemagne n'a pas davantage mis en doute.
Dans la mesure où l'examen effectué jusqu'à présent a révélé l'existence d'aides, celles-ci faussent ou menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions. Selon l'article 92, paragraphe l, du traité, il suffit qu'elles menacent de fausser la concurrence.
La distorsion de la concurrence ou, du moins, la menace de distorsion résulte de la meilleure situation économique dans laquelle se trouvent les acquéreurs des terres à prix réduit par comparaison avec leurs concurrents qui n'ont pas pu bénéficier d'un soutien analogue.
À cela, l'Allemagne répond que dans "l'hypothèse" de l'acquisition par des capitaux empruntés, la comparaison entre le coût des intérêts à acquitter et les fermages actuels fait apparaître un "résultat neutre", de sorte que la structure de la production ainsi que celle des coûts d'exploitation restent inchangées.
Cet argument n'est pas convaincant, parce qu'il se limite à envisager une des différentes hypothèses d'acquisition. De nombreux intéressés ont fait remarquer que les bénéficiaires (en particulier, les successeurs de CPA) peuvent être tout à fait à même d'acquitter le prix d'achat au moyen de leurs propres ressources. Le recours au crédit n'est donc aucunement incontournable dans tous les cas.
De plus, il convient de souligner que le "résultat neutre" n'a été ni démontré ni avancé pour chaque cas particulier, de sorte que l'existence d'une influence sur la structure des coûts d'exploitation n'est nullement exclue.
La Commission ne peut pas adhérer à l'appréciation selon laquelle le niveau des prix et la marge ne changent pas. Il en va de même de l'affirmation prétendant qu'il est exclu que l'acquisition de terres à des conditions préférentielles permette à l'exploitation d'engager des dépenses moindres pour les facteurs de production et de présenter ainsi sur le marché une offre de produits agricoles plus avantageuse.
Un des intéressés a fait valoir que "dans presque toutes les régions de l'Union, l'achat de terres agricoles débouche sur un renchérissement de la production ayant une influence négative sur la concurrence". Si, par cette affirmation, l'intéressé entend soutenir sérieusement que l'achat de terres à prix réduit en Allemagne de l'Est - et c'est uniquement de cela qu'il s'agit en l'occurrence - affaiblit la position concurrentielle des exploitations intéressées, on ne peut que se poser la question de savoir pourquoi les exploitations en cause participent au programme d'acquisition de terres.
Par ailleurs, l'argument selon lequel le niveau de la triple valeur unitaire constituant le prix auquel les bénéficiaires de l'EALG peuvent acheter les terres est plus élevé que la valeur vénale qu'atteignent en moyenne les terres en France, en Espagne, au pays de Galles et en Écosse n'est pas pertinent.
Les dispositions en matière de surveillance des aides partent de la situation réelle de l'économie dans les différents États membres et les différentes régions de la Communauté. Le droit de la concurrence ne peut avoir pour objet et pour but d'uniformiser la diversité objective des conditions de concurrence et d'établir une similitude absolue(20).
En ouvrant la procédure, la Commission a exprimé l'avis qu'il y a lieu de supposer une atteinte du marché communautaire lorsque le bénéficiaire de la subvention se trouve en concurrence avec des entreprises d'autres États membres. En ce qui concerne l'acquisition privilégiée de terres prévue par la loi, il existe, selon la Commission, un effet sur d'autres États membres qui s'accentue en raison de la taille et du volume d'activité principalement pour les entreprises ayant succédé aux CPA. Par contre, les entreprises étrangères sont exclues de ces avantages et sont, de ce fait, défavorisées par rapport aux bénéficiaires.
À ce sujet, il convient de souligner qu'une aide comparativement faible n'exclut pas nécessairement que les échanges entre États membres puissent subir un préjudice.
Les observations formulées jusqu'à présent n'amènent pas la Commission à renoncer à cette position.
Il s'ensuit que le programme d'acquisition de terres répond aux critères relevant de l'article 92, paragraphe 1, du traité, à l'exception des mesures prévues en faveur des personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitution, des personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution qui peuvent leur être assimilées et des personnes morales comptant parmi leurs associés les personnes susmentionnées.
VII
Certaines dérogations ou exonérations peuvent cependant être prévues dans le contexte de l'incompatibilité de principe avec le marché commun en vertu de l'article 92, paragraphe l, du traité.
1. Exemption en vertu de l'article 92, paragraphe 2, point c), du traité
Conformément à l'article 92, paragraphe 2, point c), du traité, les aides octroyées à l'économie de certaines régions de la République fédérale d'Allemagne affectées par la division de l'Allemagne sont compatibles avec le marché commun dans la mesure où elles sont nécessaires pour compenser les désavantages économiques causés par cette division.
Dans ce contexte, en ouvrant la procédure d'examen la Commission a fait valoir qu'aussi bien la lettre que l'esprit de l'article 92, paragraphe 2, point c), du traité, ne visaient que les conséquences directes de la division de l'Allemagne, mais non la compensation étendue pour la mauvaise situation économique dans les nouveaux Länder. En outre, on ne trouve pas le lien de causalité nécessaire entre la division et les désavantages économiques, étant donné que les entreprises de l'ancienne RDA sont touchées non par la division, mais, au contraire, par la suppression de la division. Les déficits économiques sont dus au système d'économie planifiée communiste appliqué et ne sont pas imputables à la division de l'Allemagne.
L'absence de capital d'exploitation et de capital social trouve son fondement dans la structure de propriété socialiste de la RDA et n'est pas une conséquence de la division de l'Allemagne.
L'Allemagne est d'avis que le verrouillage de l'ancienne RDA et la création d'une économie centrale d'État sont indissolublement liés et sont à considérer comme un processus homogène. Il est toutefois incontestable que les insuffisances du système économique dirigiste ont eu des prolongements s'étendant au-delà de l'existence de la RDA. Les handicaps économiques restent conditionnés par la division, mais sont englobés dans toutes les catégories de désavantages prévues par le programme d'acquisition de terres.
À cela il convient d'objecter, en premier lieu, que la disposition en cause est à interpréter au sens strict. Elle ne constitue qu'une dérogation au principe de l'interdiction des aides énoncé au paragraphe 1 de l'article 92.
Avant l'unification allemande, le contenu normatif de cette disposition était limité aux territoires de l'ancienne République fédérale d'Allemagne situés près de la frontière intérieure (Zonenrandgebiete et Berlin-Ouest), défavorisés à la suite de la division de l'Allemagne. Si tant est que la disposition reste applicable, son maintien après l'unification allemande ne serait plus justifié que par l'inclusion des territoires de l'ancienne RDA se trouvant à proximité de cette zone frontalière.
En aucun cas, on ne peut l'invoquer pour justifier une extension à la totalitée du territoire de l'ancienne RDA. Or, le présent programme d'acquisition de terres a justement pour objet la vente subventionnée par l'État de terres sur la totalité du territoire de l'ancienne RDA.
De plus, la Commission fait remarquer que l'existence d'un lien contraignant de cause à effet entre la division de l'Allemagne et les handicaps sur la totalité du territoire de l'ancienne RDA n'est pas démontrée. Il est certain que la division a fait surgir des difficultés, notamment dans le domaine des infrastructures (solution de continuité) et des marchés (cloisonnement), difficultés que, entre-temps, l'on peut considérer comme surmontées. Les problèmes économiques que connaît encore aujourd'hui l'ancienne RDA sont des séquelles directes du régime politique et économique précédent (et non de la division de l'Allemagne) ou, à la rigueur, des conséquences de la suppression de cette division, car, en réalité, ils sont dus à d'autres causes économiques survenues ultérieurement.
Pour ces raisons, la Commission s'en tient à la pratique qui a toujours été la sienne, selon laquelle l'article 92, paragraphe 2, point c), ne peut pas être applicable sur la totalité du territoire de l'ancienne RDA(21).
2. Exemption en vertu de l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité
Aux termes de l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité, sont compatibles avec le marché commun les aides destinées à favoriser le développement économique de régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas par rapport à l'ensemble de la Communauté. Comme l'indiquait déjà la communication portant ouverture de la procédure(22), cette disposition régit uniquement les aides régionales en faveur de régions particulièrement défavorisées de la Communauté. Ces mesures doivent s'appliquer dans le cadre de programmes vastes et ciblés de politique régionale et ont normalement pour objet la création d'emplois et l'aide aux nouveaux investissements englobant tous les secteurs.
À cet égard, la Commission s'en tient à sa constatation selon laquelle l'existence de cette composante de l'aide relevant de la politique régionale n'a pas été démontrée. Pour le moment, le programme d'acquisition de terres se limite à régler le futur régime de la propriété de superficies jadis "propriété du peuple" dans l'ensemble de l'ex-RDA. Une amélioration de la structure économique régionale n'a pas été démontrée.
De plus, il n'existe pas de lien entre le programme d'acquisition de terres et les conditions économiques générales susmentionnées concernant les entreprises bénéficiaires.
La question de savoir dans quelle mesure l'acquisition de terres à des conditions préférentielles par les personnes nouvellement installées et les entreprises ayant succédé aux CPA est de nature à améliorer le niveau de vie ou la situation du marché de l'emploi dans les nouveaux Länder est restée sans réponse. Or, la vocation fondamentale de l'aide pour atteindre cet objectif constitue la condition justificative au sens de l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité.
Pour ces raisons, les éléments constitutifs d'une dérogation ne peuvent être invoqués ici, ce qui n'a d'ailleurs été fait ni par les autorités allemandes ni par d'autres intéressés.
3. Exemption en vertu de l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité
Conformément à l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité, les aides d'État destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques peuvent être approuvées quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun.
L'article 92, paragraphe 3, point c), est notamment applicable lorsque l'aide en question permet de remédier aux faiblesses structurelles desdites activités ou régions économiques.
La situation juridique déterminante à la date de l'entrée en vigueur de l'EALG permettait en principe à la Commission, en vertu de l'article 35, paragraphe l, en liaison avec l'article 12, paragraphe 5(23), du règlement (CEE) n° 2328/91 du Conseil du l5 juillet 1991 concernant l'amélioration de l'efficacité des structures de l'agriculture(24), de considérer en principe comme compatibles avec le marché commun et d'autoriser les aides à l'achat de terres à titre d'aides aux investissements(25), pour autant que l'intensité de l'aide ne dépassât pas 35 % [75 % dans les zones défavorisées(26).
En ce qui concerne les mesures forestières en général, l'article 8, paragraphe 2, du règlement (CEE) n° 2080/82 du Conseil du 30 juin 1992 instituant un régime communautaire d'aides aux mesures forestières en agriculture dispose que les États membres peuvent prendre des mesures d'aide supplémentaires dont les conditions de modalité d'octroi s'écartent de celles qui y sont prévues ou dont le montant excède les plafonds qui y sont prévus, sous réserve que ces mesures soient prises en conformité avec les articles 92, 93 et 94 du traité. Dans ce domaine, c'est une pratique courante de la Commission de ne pas soulever d'objection à l'égard d'aides aux investissements pouvant atteindre 100 % des coûts éligibles de la mesure(27). Elle fait cependant remarquer dès à présent, à titre préventif, que cette politique pourrait changer sous peu.
En l'occurrence, la vente à prix réduit de terres sylvicoles doit être considérée comme "une condition(s) de modalité d'octroi s'écartant de celles qui y sont prévues".
Les aides d'État - quelle que soit leur nature - ne peuvent cependant pas bénéficier d'une exemption au titre du paragraphe 3 de l'article 92 du traité, si et dans la mesure où elles sont discriminatoires et violent le traité.
Par conséquent, avant de se demander si les règles spécifiques de la Commission mentionnées ci-dessus ont été prises en compte lors de la définition de l'acquisition à prix réduit de terres agricoles ou sylvicoles, la Commission doit examiner la question prioritaire de savoir si elles ont un effet discriminatoire au sens des dispositions du traité CE.
3.1. Discrimination
En ouvrant la procédure, la Commission avait exprimé des doutes quant à la compatibilité avec certains articles du traité (notamment les articles 52 et 6) de la condition relative à la résidence sur place des personnes nouvellement installées ou de 75 % des détenteurs de parts des personnes morales à la date de référence du 3 octobre 1990. Dans ce contexte, elle avait rappelé que les articles 52 à 58 prévoient la suppression des restrictions à la liberté d'établissement. Cela s'applique à la fondation ou la construction d'entreprises, d'établissements principaux et de succursales ou de filiales. Selon la jurisprudence constante de la Cour de justice des Communautés européennes(28), la notion de liberté d'établissement peut également couvrir l'acquisition de biens immobiliers pour la réalisation de l'objectif économique(29). En mentionnant les "restrictions à la liberté d'établissement des ressortissants d'un État membre dans le territoire d'un autre État membre", la disposition fait clairement référence à la nationalité(30) et interdit toute discrimination à ce titre. L'interdiction de toute discrimination ne porte pas seulement sur les discriminations directes, mais concerne aussi les discriminations dissimulées. Il y a discrimination dissimulée fondée sur la nationalité lorsque "le critère de distinction appliqué aboutit au même résultat que l'application d'une discrimination fondée sur la nationalité", c'est-à-dire lorsque la distinction ne se fonde certes pas directement sur la nationalité, mais sur des critères ayant pour caractéristique que seuls les nationaux ou, à l'inverse, seuls les étrangers peuvent y satisfaire (par exemple, en cas d'exigences en matière de lieu d'origine ou de résidence).
L'article 54, paragraphe 3, point h), du traité, dispose que la Commission s'assure que les conditions d'établissement ne sont pas faussées par des aides accordées par les États membres. En application de cette disposition et par son programme général pour la suppression des restrictions à la liberté d'établissement de 1962(31), le Conseil a prévu que les dispositions législatives, réglementaires ou administratives ou les pratiques administratives qui gênent exclusivement ou principalement ou subordonnent à certaines conditions l'accès ou l'exercice d'une activité non salariée par des étrangers sont à éliminer. Parmi ces dispositions ou pratiques figurent également les aides d'État directes ou indirectes, telles que l'octroi de subventions à l'acquisition de terres.
L'interdiction des restrictions à la liberté d'établissement visée aux articles 52 à 58 a notamment pour objet de réserver aux entreprises en cause le même traitement qu'aux entreprises ayant leur siège dans l'État d'accueil. Or, le régime en cause prévoit que seuls les résidents sur place peuvent bénéficier des mesures visées à l'article 3, paragraphe 2, de la loi sur les compensations. Pour pouvoir bénéficier de ce régime, les sociétés n'ayant pas leur siège dans les nouveaux Länder auraient dû transférer celui-ci dans ces régions ou les personnes physiques auraient dû y déplacer leur résidence principale, ce qui, pour les personnes physiques et morales des autres États membres était pratiquement impossible à la date du 3 octobre 1990 à cause de circonstances politiques et économiques. De ce fait, la loi favorise les personnes physiques et morales des nouveaux Länder par rapport à celles qui n'ont pas de siège ou de résidence en Allemagne et est donc de nature à constituer une infraction à l'interdiction de discrimination prévue par les articles 52 à 58(32).
S'il est vrai que, de jure, il était possible à tous les citoyens de la Communauté de prouver que leur résidence principale était située sur le territoire de l'ancienne RDA le 3 octobre 1990, cette condition n'était remplie de facto, quasi exclusivement, que par des citoyens allemands, dont la résidence antérieure était notamment située dans les nouveaux Länder.
Dès lors, cette condition produit un effet d'exclusion à l'égard des personnes ne satisfaisant pas au critère selon lequel la résidence (principale) doit être située sur le territoire de l'ancienne RDA.
Il est vrai qu'en se référant à la jurisprudence en la matière, la Commission a admis que des critères de distinction tels que le lieu de résidence ne constituent pas, dans leurs répercussions effectives, de discrimination indirecte prohibée fondée sur la nationalité lorsque ces critères (et, de ce fait, le traitement différencié) sont objectivement justifiés.
Le critère de distinction "résidence sur place au 3 octobre 1990" ne peut se justifier que s'il est à la fois nécessaire et propre à réaliser l'objectif poursuivi par le législateur. Une mesure n'est pas nécessaire si l'objectif fixé par le législateur peut également être atteint par la mise en oeuvre d'une disposition plus légère, c'est-à-dire moins contraignante, de même nature.
Selon les termes du gouvernement fédéral, "en fixant la date du 3 octobre 1990, le législateur a voulu faire en sorte que les personnes intéressées, ou les familles de celles-ci, qui avaient vécu et travaillé pendant des décennies dans la RDA, puissent participer au pacte social de compensation à conclure entre elles et les anciens propriétaires."
L'objectif était donc de faire bénéficier du programme les personnes intéressées ou les familles de celles-ci qui avaient vécu et travaillé pendant des décennies dans la RDA.
Les autorités allemandes justifient cette manière de procéder par "la nécessité contraignante d'assurer une large continuité sociale". Il fallait parvenir à mettre en place "un pacte de compensation sociale". Une attention particulière devait être accordée aux "acquéreurs qui résidaient depuis longtemps déjà dans la région". Le législateur est "autorisé à assurer la participation au processus de restructuration des personnes nouvellement installées pour ce qui concerne les terres devenues propriété de l'État de la RDA".
À cet égard, la Commission souligne expressément qu'elle admet sans réserve l'objectif que les mesures poursuivent. L'adaptation des structures de la propriété de l'Allemagne de l'Est au nouveau système économique est un objectif tout à fait légitime du législateur allemand. En fait, la plupart des États membres ont mis en oeuvre des réformes foncières permettant aux agriculteurs d'acquérir les terres qu'ils exploitaient. La Commission respecte l'intention de tenir compte d'un tel attachement à la terre.
Cependant, pour atteindre cet objectif, il n'aurait pas été nécessaire de fixer la date de référence du 3 octobre 1990 pour la résidence sur place. En effet, ces personnes nouvellement installées ou ces personnes morales auraient été autorisées, en vertu de l'article 3, paragraphe 1, de la loi sur les compensations, à participer au programme d'acquisition de terres si, au 1er octobre 1996, elles avaient pris à bail à long terme des terres jadis propriété du peuple et à privatiser par la Treuhandanstalt.
Au cours de cette procédure d'examen, des intéressés ont expressément attiré l'attention de la Commission sur le fait que la très grande majorité des contrats de bail à long terme ont été conclus avec des allemands de l'Est. Toutes les questions soulevées en matière de discrimination ont suscité de la part de l'Allemagne une réaction détaillée et résolue, mais cette dernière affirmation n'a pas fait l'objet d'un démenti, ni, encore moins, d'une contestation motivée.
Il ressort clairement de cela que la réalisation de l'objectif fixé par le législateur (à savoir, la participation des Allemands de l'Est au programme d'acquisition de terres) n'aurait pratiquement pas été mise en péril par la non-fixation de la date de référence au 3 octobre 1990.
Par conséquent, dans la mesure où l'acquisition de terres agricoles ou sylvicoles reste liée à la date de référence du 3 octobre 1990, la Commission estime que cette disposition n'est pas nécessaire et, partant, ne se justifie pas.
Dans la mesure où la disposition concernant la résidence sur place ne coïncide pas avec la condition relative à un bail à long terme36, il y a lieu de préciser ce qui suit:
Selon la jurisprudence constante de la Cour de justice, une discrimination interdite par le traité existe lorsqu'un traitement différent est réservé à des objets comparables ou lorsqu'un même traitement est réservé à des objets différents(33).
L'égalité et l'inégalité de traitement sont à justifier par des motifs objectifs découlant impérativement des faits correspondants.
La Commission a déjà souligné que, à ses yeux, l'adaptation des structures de la propriété au nouveau système économique constitue un objectif totalement légitime.
Adapter les structures de la propriété en offrant à ceux qui exploitent déjà les terres à privatiser une possibilité d'acquisition privilégiée pourrait représenter une mesure justifiable - en principe - compte tenu de l'existence du lien objectif étroit (preneur à bail - futur propriétaire).
Cependant, la date du 3 octobre 1990 n'est pas liée à l'existence d'un bail à terme (de longue durée).
À la lumière de ce qui précède, l'exclusion - de facto et a priori - d'autres citoyens de la Communauté ne peut pas se justifier.
Il ressort clairement des considérations relatives aux personnes nouvellement installées(34) qu'un traitement inégalitaire fondé sur les dommages subis est tout aussi injustifiable : comme des intéressés l'ont fait remarquer avec raison, les personnes nouvellement installées n'ont jamais été expropriées, au même titre que leurs concurrents dans les autres États membres, ce que la Commission avait déjà établi en ouvrant la procédure(35).
Pour ces motifs, la Commission ne peut souscrire au grief qu'un des intéressés avait formulé à son égard et selon lequel elle voulait "exclure du bénéfice" de la loi les personnes nouvellement installées. La Commission s'efforce uniquement de veiller à l'application du traité CE. En définitive, la Commission s'en tient à la constatation de l'existence d'une discrimination enfreignant les articles 52 à 58 du traité en raison du traitement inégalitaire injustifié réservé à des catégories d'intéressés fondamentalement identiques [les candidats acheteurs d'Allemagne (de l'Est) des autres États membres] dans l'accès à l'acquisition de terres à des conditions préférentielles.
Cette discrimination indirecte viole également l'article 6 du traité(36).
En ce qui concerne l'article 40, paragraphe 3, du traité, la Commission n'a pas fondamentalement exclu l'existence d'une infraction(37).
L'Allemagne a réfuté cette affirmation en faisant remarquer, à juste titre, que s'il est vrai que les dispositions en cause s'adressent aussi aux États membres, elles ne sont applicables que pour autant qu'elles concernent les organisations communes de marché.
Il est effectivement exact que le programme d'acquisition de terres est une mesure nationale. Il ne s'agit pas de la mise en oeuvre d'une organisation commune de marché(38) de sorte que le programme en cause n'est pas couvert par le champ d'application de l'article 40, paragraphe 3. Cette question n'a pas donné lieu à d'autres observations dûment étayées.
Pour les raisons exposées ci-dessus, il est inutile d'approfondir les nombreuses remarques formulées par certains intéressés selon lesquelles les bénéficiaires du programme d'acquisition de terres sont en premier lieu les entreprises ayant succédé aux CPA, ce qui a été jugé "arbitraire, socialement déséquilibré et profondément injuste". Pour les mêmes raisons, la Commission s'abstient également de tout commentaire relatif au grief affirmant qu'une très grande disparité règne à l'intérieur même du groupe des bénéficiaires, le programme prévoyant pour les personnes comparativement le moins affectées des compensations plus élevées que pour celles qui ont subi de plus graves dommages à la suite des expropriations. Toujours pour les mêmes raisons, la Commission ne donne pas suite aux reproches qui ont été formulés à l'égard du gouvernement fédéral, et que celui-ci n'a pas contestés, affirmant que la mesure litigieuse n'est nullement de nature à préserver les "structures sociales existantes" et que le gouvernement fédéral n'avait pas du tout pensé "aux hommes" des nouveaux Länder, mais visait exclusivement les quelque 3000 successeurs de CPA.
En définitive, la Commission constate que les aides liées à la condition relative à la résidence sur place au 3 octobre 1990 (personnes nouvellement installées et personnes morales) violent les articles 6 et 52 à 58 du traité CE et que, de ce fait, elles ne sont pas compatibles avec le marché commun au sens des articles 92, 93 et 94 du traité.
Pour ce qui est, finalement, de la date butoir du 1er octobre 1996, la Commission note qu'elle n'a, en l'absence de plaintes de la part des intéressés, pas fait l'objet de commentaires de la part des autorités allemandes.
3.2. Intensité des aides
À titre subsidiaire, la Commission fait remarquer qu'elle n'a pas pu acquérir une certitude suffisante quant au fait que le programme d'aide se conforme dans tous les cas aux plafonds d'intensité des aides fixés par elle.
À elle seule, la méthode de calcul présentée par l'Allemagne (voir le chapitre II, point 9) aboutit à un taux d'aide de 29,2 % pour l'Allemagne de l'Est. Même si la Commission admettait entièrement le bien-fondé de cette méthode, il ne s'agirait encore que de valeurs moyennes.
Les données transmises à la Commission par les autorités allemandes dans la lettre du 25 juillet 1997 montrent cependant sans équivoque des intervalles de fluctuation pouvant atteindre + 8,7 % vers le haut (taux moyens pour le Land de Brandebourg) et -7,8 % vers le bas (pour le Land de Mecklembourg-Poméranie occidentale) par rapport à la moyenne, suivant les Länder. Avec un tel intervalle de fluctuation des valeurs moyennes concernant les différents Länder, on ne peut que craindre, sur la base de la méthode de calcul communiquée par les autorités allemandes, un dépassement de la limite de 35 % dans les zones non défavorisées de certains Länder de la RFA. Ces valeurs n'étant à leur tour que des valeurs moyennes - qui s'appliquent aux différents Länder - il se peut que, toujours en partant de l'application de la méthode de calcul récemment transmise, la limite de 35 % soit très sensiblement dépassée dans certains cas particuliers.
D'autre part, la Commission exprime de très sérieux doutes à l'égard du caractère justifié des méthodes de calcul que les autorités allemandes lui ont fait parvenir. Certes, la Commission reconnaît expressément que les contraintes auxquelles sont soumises les superficies agricoles en question (interdiction d'aliénation sur vingt ans, droit de résiliation en cas de conversion en terrain à bâtir) sont de nature à peser quelque peu sur la valeur vénale de ces terres. Les méthodes de calcul communiquées par l'Allemagne sont cependant entachées par le fait qu'elles partent de l'hypothèse que l'achat de terres à prix réduit ne présente aucune "plus-value" pour l'agriculteur au cours de la durée de l'interdiction d'aliéner portant sur vingt ans. Comme certains intéressés l'ont cependant fait remarquer à juste titre, l'interdiction d'aliéner limitée dans le temps ne "gêne" généralement pas le preneur d'un bail de longue durée. En raison de l'existence de contrats de bail de longue durée, le preneur à bail type n'a de toutes façons pas l'intention ni la nécessité de vendre pendant cette durée.
De l'avis de la Commission, il serait donc plus correct de retenir, par principe, l'équivalent subvention de 55,5 % en moyenne, éventuellement corrigé d'un coefficient moyen de vente ou de résiliation, que les autorités allemandes ont expressément indiqué dans la lettre susmentionnée. Ce coefficient de vente ou de résiliation (c'est-à-dire le nombre moyen de ventes de terres agricoles ou de conversions en terrain à bâtir au cours de vingt ans) n'a pas été communiqué par les autorités allemandes.
La Commission n'a donc aucun point de repère pour vérifier que les équivalents subventions explicitement mentionnés par les autorités allemandes pour les différents Länder (Brandebourg: 64,2 %; Saxe: 61,9 %; Saxe-Anhalt: 61,3 %; Thuringe: 59,4 %; Mecklembourg-Poméranie occidentale: 47,7 %) respectent la limite de 35 % fixée par la Commission. C'est là une autre raison pour laquelle le programme d'acquisition de terres ne peut pas, à cet égard(39), être considéré comme compatible avec la politique de la Commission en matière de fixation de plafonds d'intensité d'aide telle qu'elle a été décrite.
Pour ces raisons, la Commission ne peut pas accorder d'exemption au titre de l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité.
Le régime d'aide en cause n'ayant pas davantage pour objet de réaliser un des autres objectifs fixés par l'article 92, paragraphes 2(40) et 3, du traité, la Commission se voit contrainte d'arriver à la conclusion que la mesure ne peut pas être considérée comme compatible avec le marché commun.
VIII
En conclusion, la Commission constate que l'Allemagne, en tant qu'État membre, a mis en application le régime d'aide en infraction à l'article 93, paragraphe 3, du traité.
Toute aide accordée en violation du droit doit, en principe, faire l'objet d'une demande en restitution au bénéficiaire, afin de rétablir la situation économique telle qu'elle était avant l'octroi de l'aide mise en cause. Le remboursement s'effectue selon les dispositions et procédures du droit allemand, y compris les intérêts calculés, à compter de la date d'octroi, sur la base du taux de référence pris en compte lors de l'appréciation des régimes d'aide régionaux.
Il s'ensuit que l'Allemagne doit récupérer les aides octroyées au titre du programme d'acquisition de terres, qui étaient liées à la condition relative à la résidence sur place au 3 octobre 1990, ainsi que celles qui dépassent les intensités d'aides maximales de 35 % pour les terres agricoles en zones non défavorisées aux termes du règlement (CE) n° 950/97. Dans un délai de deux mois à partir de la notification de la présente décision, l'Allemagne communique à la Commission les mesures qu'elle aura prises pour s'y conformer,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier
Le programme d'acquisition de terres visé à l'article 3 de la loi sur les compensations ne contient pas d'aides, dans la mesure où ses dispositions ne portent que sur des compensations faisant suite à des expropriations ou à des actions assimilables à une expropriation mises en oeuvre dans le cadre du régime d'occupation soviétique et où les avantages accordés sont équivalents ou inférieurs aux dommages pécuniaires causés par ces interventions.

Article 2
Les aides sont compatibles avec le marché commun dans la mesure où elles ne sont pas liées à la condition de la résidence sur place au 3 octobre 1990 et dans la mesure où elles respectent les intensités d'aides maximales de 35 % pour les terres agricoles en zones non défavorisées aux termes du règlement (CE) n° 950/97.
Les aides liées à la condition de la résidence sur place au 3 octobre 1990 ainsi que celles qui dépassent les intensités d'aides maximales de 35 % pour les terres agricoles en zones non défavorisées aux termes du règlement (CE) n° 950/97 ne sont pas compatibles avec le marché commun.
L'Allemagne est tenue de supprimer les aides mentionnées au deuxième alinéa et ne peut plus les accorder à l'avenir.

Article 3
L'Allemagne récupère, dans un délai de deux mois, les aides incompatibles avec le marché commun qu'elle a octroyées conformément à l'article 2, deuxième phrase. Le remboursement s'effectue selon les dispositions et procédures du droit allemand, y compris les intérêts calculés, à compter de la date d'octroi, sur la base du taux de référence pris en compte lors de l'appréciation des régimes d'aide régionaux.

Article 4
Dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la présente décision, l'Allemagne communique à la Commission les mesures prises pour s'y conformer.

Article 5
La République fédérale d'Allemagne est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 20 janvier 1999.

Par la Commission
Franz FISCHLER
Membre de la Commission

(1) JO C 215 du 10.7.1998, p. 7.
(2) JO C 215 du 10.7.1998, p. 7.
(3) Lettre n° VI/32143 du 19.8.1998.
(4) Un centième environ des réactions reçues.
(5) Voir la définition figurant au JO C 215 du 10.7.1998, p. 9. Les personnes réinstallées ne bénéficiant pas d'un droit à restitutions ont d'anciens propriétaires d'exploitations agricoles qui ont été expropriés entre 1945 et 1949.
(6) Voir la définition figurant au JO C 215 du 10.7.1998, p. 9. Les personnes réinstallées bénéficiant d'un droit à restitution ont été expropriées après 1949 et ont un droit à restitution qui leur est conféré par la loi sur le patrimoine.
(7) Voir la définition figurant au JO C 215 du 10.7.1998, p. 9,
(8) JO C 215 du 10.7.1998, p. 14.
(9) Voir la définition figurant au JO C 215 du 10.7.1998, p. 10.
(10) JO C 215 du 10.7.1998, p. 12.
(11) BGBl. I p. 2624.
(12) Y compris les "anciens propriétaires".
(13) JO C 215 du 10.7.1998, p. 12, partie III.1.
(14) JO C 215 du 10.7.1998, p. 13, partie III.5
(15) JO C 215 du 10.7.1998, p. 10, partie II.2.
(16) JO C 215 du 10.7.1998, p. 12.
(17) JO C 215 du 10.7.1998, p. 17.
(18) JO C 209 du 10.7.1997, p. 3.
(19) JO C 215 du 10.7.1998, p. 13.
(20) Affaires 6/69 et 11/69, Banque de France, Recueil 1969 - p. 523 et suivantes.
(21) Voir SG(94) D/5981, p. 2 (communications Tetteau/Bavière); décision du 14 février 1992 ("Potsdamer Platz"), JO L 263 du 9.9.1992, p. 15; Opel-Eisenach (JO C 43 du 16.2.1993, p. 14); Carl-Zeiss-Jena (JO C 97 du 6.4.1993, p. 7); Rhône-Poulenc Rhotex (JO C 210 du 4.8.1993, p. 11 ); SST-Garngesellschaft (JO L 114 du 5.5.1994, p. 21 ); Volkswagen I (JO L 385 du 31.12.1994, p. 1 ) et Deggendorf (JO L 386 du 31.12.1994, p. 13)
(22) JO C 215 du 10.7.1998, p. 15.
(23) Actuellement article 12, paragraphe 2, point a), du règlement (CE) n° 950/97.
(24) Voir les aides N 682/97, N 156/97, N 797/96 et N 940/96.
(25) Voir les critères exposés dans la communication de la Commission de 1979 - point 18 1) de l'annexe (JO C 31 du 3.2.1979) -
(26) Dans les nouveaux Länder, seule la moitié environ de la superficie totale est classée zone défavorisée; cf articles 2 et 3 de la directive 75/268/CEE (actuellement annexe du règlement (CE) n° 950/97].
(27) Cf. les aides n°s N 567/97, N 752/96, N 750/96, N 646/96 et N 153/96
(28) Affaire 305/87, Commission contre République hellénique, Recueil 1989, p. 1461 et suivantes.
(29) Programme général pour la suppression des restrictions à (a liberté d'établissement de 1962, JO 2 du 15.1.962, p.36/62)
(30) En ce qui concerne les personnes morales, selon l'article 58, la nationalité d'une société est à déterminer en fonction des dispositions législatives d'un État membre qui sont à la base de sa constitution ainsi qu'en fonction de son siège statutaire et de son administration centrale.
(31) Arrêt du 23 février 1994, affaire C-419/92/Scholz contre Opera Universitaria, Recueil 1994, p. I-505, point 7 des motifs; arrêt du 23 mai 1996, affaire C-237/94 O'Flynn, Recueil 1996, p. I-2617, point 17 des motifs.
(32) JO 2 du 15.1.1962, p. 36/62
(33) Affaire C-107/94, Asscher, Recueil 1996, p. I-3089 et suivantes, point 36 des motifs et suivants.
(34) Arrët du 23 mai 1996, affaire C-237/94 0'Flynn, Recueil 1996, p. I-2617, points 20 et 21 des motifs; arrët du 12 septemre 1996 affaire C-2194, Commission contre Royaume de Belgique, Recueil 1996, p. I-4307, point 20 des motifs
(35) A l'exception de l'acquisition de superficies forestières par des personnes nouvellement installées, conformément à l'article 3, paragraphe 8, point b), de la loi sur les compensations
(36) Article 3, paragraphe 8 et suivantes de la loi sur les compensations
(37) Voir, par exemple, pour la première catégorie : Fédération charbonnière de la Belgique/Haute Autorité, affaires 8/55 et 9/55, Recueil 1955/56, p. 297 et suivantes, 3et 331 et suivantes.; Société des Fonderies de Pont-à-Mousson, affaire 14/59, Recueil 1958/59, p. 465 et suivantes.; Kühlhaus-Zentrum, affaire 79/77, Recueil 1978, p...611 et suivantes, et, pour la deuxième catégorie : Italie/Commission, affaire 13/63, Recueil 1963, p. 357 et suivantes.; Milac, affaire 8/78 Recueil 1978 p. 1721 et suivantes.; ridania, affaire 230/78, Recueil 1979, p. 2749 ss.; Wagner, affaire 8/82, Recueil 1983, p. 371 sc.
(38) Voir chapitre VI point 3; conformément à l'article 3, paragraphe 8, point b) de la loi sur les compensations, les personnes morales ne peuvent pas acquérir de terres.
(39) JO C 215 du 10.7.1998, p. 18, chapitre IV point 5 (avant-dernier paragraphe).
(40) JO C 215 du 10.7.1998, p. 17 et autres renvois

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Structure analytique Document livré le: 15/01/2001


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