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Législation communautaire en vigueur

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Document 399D0088

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[ 08.60 - Aides accordées par les États et autres subventions ]


399D0088
1999/88/CE: Décision de la Commission du 14 juillet 1998 relative à l'aide d'État octroyée à Porcelanas del Norte S.A.L. (Ponsal)/Comercial Europea de Porcelanas S.A.L. (Comepor) [notifiée sous le numéro C(1998) 2364] (Le texte en langue espagnole est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)
Journal officiel n° L 029 du 03/02/1999 p. 0028 - 0033



Texte:

DÉCISION DE LA COMMISSION du 14 juillet 1998 relative à l'aide d'État octroyée à Porcelanas del Norte S.A.L. (Ponsal)/Comercial Europea de Porcelanas S.A.L. (Comepor) [notifiée sous le numéro C(1998) 2364] (Le texte en langue espagnole est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (1999/88/CE)

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment son article 93, paragraphe 2, premier alinéa,
après avoir mis les intéressés en demeure, conformément audit article, de présenter leurs observations,
considérant ce qui suit:

I
Le 30 avril 1997, la Commission, qui avait été saisie de différentes plaintes depuis 1995 et avait adressé à l'Espagne un avis motivé le 30 avril 1996, a décidé d'ouvrir la procédure prévue à l'article 93, paragraphe 2, à l'encontre de l'aide octroyée à Porcelanas del Norte S.A.L. (Ponsal).
La société Ponsal, qui fabrique de la porcelaine, de la vaisselle de table et des objets de décoration en céramique, a été créée à Pampelune (Navarre) en 1957. Ses difficultés financières remontent au milieu des années 1980. En 1994, l'entreprise a élaboré un plan de restructuration visant à remédier à la situation, qui prévoyait, en particulier, de transférer l'entreprise vers la banlieue de Pampelune et de moderniser ses installations en achetant de nouvelles machines.
Dans le cadre de ce processus de restructuration, Ponsal a reçu des aides considérables du gouvernement de Navarre qui n'ont toutefois pas été notifiées à la Commission. D'après une série d'articles de presse présentés par les plaignants, ces aides ont consisté en une garantie bancaire (d'un montant de 1,2 milliard de pesetas espagnoles), en une subvention pour création d'emplois (d'un montant de 100 millions de pesetas espagnoles), en une prime de 20 % pour des investissements en capital fixe et en un abandon de créances (de 3,1 milliards de pesetas espagnoles) correspondant à des arriérés d'impôts et de cotisations sociales dus par l'entreprise à l'État espagnol.
Au mois de mars 1995, en réponse à une première demande de renseignements, les autorités espagnoles ont confirmé par écrit que le gouvernement de Navarre avait bien accordé une aide à Ponsal pour en soutenir la restructuration. Cependant, cette aide avait été octroyée sur la base de la «Ley Foral» 1/1985 du 4 mars 1985, prévoyant l'octroi d'aides à l'assainissement et au redressement d'entreprises en difficulté et antérieure à l'adhésion de l'Espagne à la Communauté européenne. Le régime d'aides avait été notifié à la Commission le 15 mars et le 14 mai 1986 en tant qu'aide existante et n'avait fait l'objet d'aucune objection de la part de la Commission.
La Commission qui n'avait pas les moyens d'établir si cette aide se basait effectivement sur un régime d'aides existant a décidé, le 30 avril 1996, au vu des réticences manifestées par les autorités espagnoles à répondre à ses demandes de renseignements complémentaires, de leur demander d'apporter la preuve que l'aide octroyée à Ponsal l'avait été sur la base d'un régime existant.
Dans leur réponse du mois de juillet 1996, celles-ci ont réussi à apporter les preuves demandées. Mais, parmi les différentes aides incriminées par les plaignants, seule la garantie de 1,2 milliard de pesetas espagnoles était couverte par les dispositions de la «Ley Foral» 1/1985. Les autres ne pouvaient se justifier dans le cadre de ce régime.
De plus, la Commission découvrait dans cette réponse qu'il existait plusieurs sociétés ayant un lien avec Ponsal et avec l'aide qui était censée avoir été octroyée à cette entreprise [d'abord Ponsal, ensuite Comercial Europea de Porcelanas S.A.L. (Comepor)] et ne voyait pas très clairement, dans ce contexte, pourquoi la raison sociale de l'entreprise avait été modifiée.
Aussi, par lettre du 26 juillet 1996, les autorités espagnoles ont-elles été invitées de nouveau à commenter les incohérences entourant Ponsal.
Dans leur réponse du 10 octobre 1996, les autorités espagnoles confirment que pour surmonter les difficultés économiques de Ponsal, le plan de restructuration de 1994 prévoyait également l'ouverture d'une procédure de cessation de paiements, qui a été menée conformément au droit espagnol de la faillite, et dans le cadre de laquelle les créanciers publics de Ponsal, le gouvernement de Navarre et la sécurité sociale avaient consenti à un abandon de créances de 3,1 milliards de pesetas espagnoles sur les 4,35 milliards dus par l'entreprise aux autorités publiques. Ponsal une fois liquidée, une nouvelle entreprise a été créée, Comepor, qui a repris les activités de Ponsal.
Les autorités espagnoles signalent en outre que, dans le contexte du transfert des installations de l'entreprise du centre vers la périphérie de Pampelune, de nouvelles aides ont été accordées à la nouvelle entreprise Comepor, à savoir une prime à l'investissement de 570 millions de pesetas espagnoles couvrant 20 % du montant total des nouveaux investissements, et une subvention de 500 000 pesetas espagnoles par poste de travail créé (jusqu'à concurrence de 250 emplois).
Selon les autorités espagnoles, cette nouvelle aide, dont la Commission n'avait pas jusque-là eu connaissance, ne devait pas être notifiée puisqu'elle ressortissait à un autre régime d'aides existant, la loi du 23 juin 1982, dont l'objectif est d'encourager l'investissement. Ce régime d'aides a été communiqué à la Commission lors de l'adhésion de l'Espagne à la Communauté aux mois de mars et de mai 1986, et la Commission n'avait jamais formulé la moindre objection à cet égard jusque-là.
Entre-temps, la Commission a reçu une série d'articles de presse selon lesquels Comepor aurait bénéficié d'une autre aide de 750 millions de pesetas espagnoles.
La Commission a procédé à un examen détaillé de tous les renseignements fournis par les autorités espagnoles pour vérifier la compatibilité de ces aides d'État avec la réglementation communautaire en la matière. Elle est parvenue à la conclusion que, pour la majeure partie d'entre elles, les aides citées par les autorités espagnoles étaient effectivement couvertes par des régimes existants.
Toutefois, la Commission a considéré qu'en accordant une subvention de 500 000 pesetas espagnoles par poste de travail créé, subvention qui était censée se baser sur le régime de juin 1982 d'encouragement des investissements, lequel en plafonnait le montant à 400 000 pesetas espagnoles, les autorités de Navarre avaient dépassé les limites fixées par ledit régime.
Par ailleurs, la mise en oeuvre de la procédure de cessation de paiements de Ponsal et, notamment, l'abandon de créances publiques pour un montant de 3,1 milliards, inspirait de vives réserves à la Commission. On ne pouvait exclure que la procédure de liquidation ait eu pour seul objectif de permettre de lancer de nouveaux projets industriels grâce à de nouvelles aides et aux actifs de l'entreprise antérieure (non viable).
Enfin, les autorités espagnoles n'ont pas notifié ces aides, de même qu'elles n'ont pas donné d'explications sur la nouvelle aide de 750 millions de pesetas espagnoles dont aurait bénéficié l'entreprise selon la presse.
Par conséquent, le 30 avril 1997, la Commission a décidé d'ouvrir la procédure prévue à l'article 93, paragraphe 2, concernant les interventions suivantes:
a) les 3,1 milliards de pesetas espagnoles dont les autorités publiques renonçaient à réclamer le remboursement dans le cadre de la procédure de cessation de paiements;
b) les primes à l'investissement pour la création de postes de travail, dans la mesure où elles dépassaient le plafond fixé dans le régime d'aides navarrais de juin 1982
et
c) l'aide supplémentaire de 750 millions de pesetas espagnoles qui n'avait fait l'objet d'aucune communication officielle des autorités espagnoles à la Commission.

II
Par lettre du 1er juillet 1997, les autorités espagnoles ont répondu à la décision de la Commission d'ouvrir la procédure prévue à l'article 93, paragraphe 2.
Dans leur réponse, elles signalent tout d'abord que les nouvelles installations sont situées dans la localité de Cordovilla, qui se trouve elle-même dans la commune (municipio) de la Cendea de Galar, dont la carte espagnole des aides à finalité régionale, acceptée par les autorités espagnoles par lettre du 26 septembre 1995, montre qu'elle se situe dans une zone de l'objectif 2.
Elles poursuivent en soulignant une fois de plus la situation financière dramatique de Ponsal avant l'élaboration du plan de restructuration et affirment qu'avant la mise en oeuvre de la procédure de cessation de paiements, les actifs de Ponsal se chiffraient à 1,72 milliard de pesetas espagnoles tandis que son passif s'élevait à 5,091 milliards.
Selon elles, la procédure de cessation de paiements prévoyant que les autorités publiques renoncent à des créances d'un montant de 3,1 milliards de pesetas espagnoles était la seule forme de liquidation d'entreprises prévue par la législation espagnole qui permettait:
- d'intégrer les travailleurs de Ponsal dans la nouvelle entreprise Comepor,
- de vendre les actifs de l'entreprise liquidée à un prix raisonnable correspondant à leur valeur réelle
et
- de rembourser au moins partiellement les créanciers publics qui autrement n'auraient rien obtenu du tout.
Mais les autorités espagnoles n'ont pas fourni de calcul comparatif sur le coût des différentes formes de liquidation pour étayer leur argumentation.
Pour ce qui est de la subvention de 500 000 pesetas espagnoles par poste de travail créé, elles indiquent que le montant de la subvention par poste de travail créé prévu dans la «Ley Foral» de juin 1982 a été modifié à deux reprises. Il a d'abord été porté à 750 000 pesetas espagnoles par la «Ley Foral» 6/1985 d'avril 1985, avant d'être ramené à 500 000 pesetas espagnoles par la «Ley Foral» 15/1986 de novembre 1986. Elles signalent que toutes ces lois constituant des aides existantes, elles n'ont pas été notifiées à la Commission puisqu'il n'y avait pas lieu de le faire.
Quant aux 750 millions de pesetas espagnoles d'aide nouvelle, il s'agit, affirment-elles, d'un prêt accordé à la nouvelle entreprise Comepor par la société publique «Navarra de Financiación y Control S.A.» (Nafinco). Le prêt a été accordé aux conditions du marché (taux d'intérêt: 6,86 %) avec des garanties (Comepor offrant en garantie ses propres actions). L'aide est apparue nécessaire pour maintenir l'entreprise en activité parce que le programme de restructuration de 1994 avait échoué et qu'elle continuait à afficher des pertes.
Enfin, les autorités espagnoles font valoir que, à la suite de l'échec de la première restructuration, la logique voulait que l'on mette au point un deuxième plan de restructuration qui, sitôt parachevé, devait être présenté à la Commission. En tout état de cause, cette nouvelle restructuration aurait exigé une aide d'État supplémentaire qui aurait fait l'objet d'une notification préalable à la Commission.

III
Par lettre du 21 octobre 1997, la Commission a transmis aux autorités espagnoles les observations que des tiers (le bureau de liaison de l'industrie de la céramique du marché commun, Cérame-UNIE, et un concurrent espagnol de Ponsal) lui avaient fait parvenir après la publication, au Journal officiel des Communautés européennes du 9 août 1997, de l'avis d'ouverture de la procédure, afin qu'elles puissent les commenter.
a) Cérame-UNIE insiste tout particulièrement sur les répercussions négatives de l'aide sur le secteur, caractérisé par d'énormes surcapacités. De nombreuses entreprises du secteur ayant investi dans la restructuration de leurs processus de production et de distribution au cours des dix dernières années ont souffert de la concurrence déloyale de Ponsal/Comepor qui, au lieu de mettre en oeuvre de véritables mesures de restructuration, a d'abord tenté de faire front à l'aide des subventions publiques grâce auxquelles elle était en mesure de vendre ses produits en dessous du prix du marché.
b) Le concurrent espagnol commence par contester l'argument des autorités espagnoles selon lequel les aides octroyées à Ponsal/Comepor étaient basées sur des régimes existants et conteste le point de vue des autorités espagnoles en la matière. Il affirme en outre que la prime à l'investissement accordée à Comepor lors du transfert de l'entreprise n'aurait pas dû lui être accordée, puisque les nouvelles installations n'étaient pas situées dans une zone défavorisée au sens des dispositions de l'article 92, paragraphe 3. Il insiste par ailleurs sur la situation financière difficile dans laquelle il s'est lui-même trouvé plongé en conséquence de l'aide accordée à Ponsal/Comepor, qui a pu de ce fait pratiquer une politique de prix déloyale avec laquelle il ne pouvait rivaliser puisqu'il ne recevait, lui, aucune aide d'État.

IV
Par lettre du 21 novembre 1997, les autorités espagnoles ont répondu aux observations des tiers.
En réponse aux observations de Cérame-UNIE, elles contestent formellement que l'aide à Ponsal/Comepor ait pu avoir des répercussions négatives sur le marché européen de la céramique. Les exportations de Ponsal/Comepor ne représentaient que 0,004 % du montant total des exportations intracommunautaires et n'intéressaient que les articles de bas de gamme, c'est-à-dire un segment du marché sur lequel l'entreprise n'était pas en concurrence avec les autres producteurs de l'Union européenne mais uniquement avec des fabricants extracommunautaires.
Quant aux allégations du concurrent espagnol, elles répondent qu'il ne pouvait y avoir aucun lien entre les problèmes économiques du concurrent et l'aide accordée à Ponsal/Comepor. Les problèmes en question s'étaient déjà manifestés en 1992/1993, alors que Ponsal/Comepor n'a pas reçu d'aides avant 1994. De plus, le concurrent intervient sur un secteur du marché (porcelaine pour l'hôtellerie) différent de celui de Ponsal (porcelaine de maison).

V
Après un nouvel échange de correspondance et une série de réunions bilatérales, les autorités espagnoles ont présenté, par lettre du 8 avril 1998, un exposé détaillé (assorti d'une abondante documentation à l'appui de leurs différentes allégations) de la situation financière de l'entreprise et des différentes mesures visées par la procédure ouverte par la Commission sur la base de l'article 93, paragraphe 2.
En premier lieu, elles confirment que le plan de restructuration de 1994 a totalement échoué et qu'il ne s'agit plus désormais de tenter une deuxième restructuration à la différence de ce qui avait été envisagé à l'origine, mais de liquider totalement l'entreprise qui ne peut plus être redressée. La liquidation doit avoir lieu conformément au droit espagnol de la faillite applicable en pareil cas. Aucune aide nouvelle ne doit être accordée pour faciliter le processus de liquidation ou la vente éventuelle des actifs de l'entreprise.
Quant à l'abandon de 3,1 milliards de pesetas espagnoles de créances publiques dans le cadre de la procédure de cessation de paiements de Ponsal en 1994/1995, les autorités espagnoles signalent d'abord puis démontrent, documents à l'appui, qu'elles ont agi dans le plein respect du droit espagnol de la faillite. Elles font également valoir, une fois de plus, que, de toutes les formes de liquidation prévues par la législation espagnole, c'était la seule qui permettait aux créanciers publics d'obtenir le remboursement d'au moins une partie de leurs créances (1,2 milliard de pesetas espagnoles sur un total de 4,3 milliards), qui autrement n'auraient pu être récupérées. À titre de preuve, elles montrent les résultats financiers que les créanciers publics auraient enregistrés s'ils avaient opté pour les autres solutions offertes par la législation espagnole. Ainsi, dans le cadre d'une procédure de faillite, les créanciers n'auraient-ils touché tout au plus que 600 millions de pesetas espagnoles, parce que, conformément à la législation espagnole régissant la faillite, les créances des travailleurs, d'un montant de 1 milliard de pesetas espagnoles, auraient eu rang prioritaire, le coût de la procédure de faillite dépassant pour sa part les 200 millions. Dans le cas d'une simple liquidation des actifs de l'entreprise en dehors de toute procédure de faillite, il n'y aurait pas eu de contrôle détaillé de la vente des actifs de l'entreprise et l'expérience démontre que, dans ce cas, le produit obtenu est très inférieur à celui que donne une procédure de liquidation normale.
Pour ce qui est de la subvention de 500 000 pesetas espagnoles par nouveau poste de travail, les autorités espagnoles fournissent des copies des deux actes juridiques portant modification de la base juridique de ces subventions, à savoir la «Ley Foral» de 1982. Ces textes confirment que le montant de l'aide par poste de travail créé a d'abord été porté à 750 000 pesetas espagnoles par la «Ley Foral» 6/1985 d'avril 1985, avant d'être ramené à 500 000 pesetas espagnoles par la «Ley Foral» 15/1986 de novembre 1986. Les deux actes font référence au texte de base initial de 1982 auquel ils n'apportent aucune autre modification.
Pour ce qui est de la nouvelle aide de 750 millions de pesetas espagnoles, les autorités espagnoles réitèrent qu'il s'agit d'un prêt accordé à la nouvelle entreprise Comepor par la société publique «Navarra de Financiación y Control S.A.» (Nafinco). Le prêt accordé aux conditions du marché (taux d'intérêt: 6,86 %) avec des garanties (Comepor offrant en garantie ses propres actions) devait faciliter le processus de restructuration et permettre à l'entreprise de poursuivre ses activités malgré ses difficultés financières. Elles admettent cependant dans la même lettre du 8 avril 1998 que ces garanties n'étaient pas suffisantes puisque les pertes permanentes de l'entreprise ôtaient toute valeur à ses actions.

VI
La procédure ouverte en vertu de l'article 93, paragraphe 2, a permis de clarifier la situation de Ponsal et les circonstances dans lesquelles l'entreprise a bénéficié d'interventions financières publiques. Cela permet de tirer une série de conclusions sur les mesures à l'encontre desquelles cette procédure a été ouverte. Ces conclusions sont les suivantes
a) Pour ce qui est de l'abandon de créances de 3,1 milliards de pesetas espagnoles dans le cadre de la liquidation de Ponsal, les autorités espagnoles ont démontré qu'il ne constitue pas une aide d'État au sens de l'article 92, paragraphe 1, du traité. Les études comparatives de coûts fournies par les autorités espagnoles confirment que le choix de toute autre forme de liquidation prévue par la législation espagnole aurait entraîné des pertes supérieures. En outre, les autorités espagnoles ont démontré que le droit espagnol de la faillite avait été pleinement respecté.
b) La subvention de 500 000 pesetas espagnoles par poste de travail créé constitue indubitablement une aide au sens des dispositions de l'article 92, paragraphe 1, du traité. Cependant, les autorités espagnoles ont démontré que ces paiements avaient été effectués sur la base de régimes d'aides en vigueur selon les dispositions de l'article 93, paragraphe 1, du traité et qu'il n'y avait par conséquent pas lieu de les notifier en vertu du paragraphe 3 du même article. Les modifications de la «Ley Foral» de 1982 - à savoir la «Ley Foral» 6/1985 d'avril 1985 et la «Ley Foral» l5/1986 de novembre 1986, toutes deux présentées par lesdites autorités - faisaient référence aux textes antérieurs respectifs. Le régime portant le plafond de la subvention à 750 000 pesetas espagnoles par poste de travail créé était antérieur à l'adhésion de l'Espagne à la Communauté, et, de ce fait, était une aide existante. La «Ley Foral» ramenant le plafond à 500 000 pesetas espagnoles n'était pas non plus soumise à l'obligation de notification, puisqu'elle visait uniquement à réduire le montant d'une subvention déjà existante et, par conséquent, autorisée, sans modifier quant au fond le régime d'aides initial de 1982.
c) Pour ce qui est du prêt de 750 millions de pesetas espagnoles, il convient de signaler que cette intervention constitue une aide d'État conformément aux dispositions de l'article 92, paragraphe 1, du traité. Bien que le prêt ait été accordé aux conditions du marché pour ce qui est du taux d'intérêt, il ne s'accompagnait pas de garanties suffisantes. La valeur de la garantie - à savoir celle des actions de Comepor - était nulle comme le reconnaissent les autorités espagnoles elles-mêmes. Par conséquent, si l'on applique le principe de l'investisseur privé, force est de conclure qu'aucune banque privée n'aurait octroyé ce prêt à une entreprise dans la situation de Comepor dans les conditions dans lesquelles il a été accordé par les autorités publiques.
L'aide est susceptible de fausser la concurrence et d'affecter le commerce entre les États membres. Il existe un important courant d'échanges de marchandises dans le secteur de la vaisselle de table entre l'Espagne et les autres États membres. Selon les données fournies par Eurostat, en 1996, l'Espagne a exporté 7 131 tonnes de produits de ce secteur à destination d'autres États membres, pour un montant de 28,7 millions d'écus, et a importé 8 239 tonnes, pour un montant de 26,8 millions d'écus. En 1997, les exportations de l'Espagne se sont chiffrées à 6 986 tonnes, pour un montant de 29 millions d'écus, et ses importations à 9 072 tonnes, pour un montant de 35,1 millions d'écus. Comepor, bien qu'elle détienne une part de marché relativement limitée, participe à ces échanges. Les réactions des tiers le démontrent. Ainsi, l'aide accordée à Comepor a sans aucun doute favorisé l'entreprise dans le marché commun aux dépens des autres concurrents qui ne bénéficient pas d'aide publique.
Comme l'aide ne reposait sur aucun régime d'aides autorisé, elle aurait dû être notifiée individuellement conformément aux dispositions de l'article 93, paragraphe 3, du traité. L'Espagne a manqué à cette obligation. Du point de vue formel, l'aide a donc été accordée de manière illégale.
Par ailleurs, il ne convient pas d'appliquer, dans le cas présent, les dérogations prévues à l'article 92, paragraphe 2, du traité compte tenu des caractéristiques de l'aide et dès lors que rien n'a été fait pour satisfaire aux conditions permettant l'application de ces dérogations.
Il convient, en outre, de signaler que Comepor n'est pas située dans une zone pouvant bénéficier des aides à finalité régionale en vertu de l'article 92, paragraphe 3, point a), du traité.
Par ailleurs, le prêt ne vise pas non plus à faciliter le développement économique d'une zone défavorisée en vertu de l'article 92, paragraphe 3, point c), mais à aider une entreprise en difficulté à poursuivre ses activités dans le secteur.
Enfin, l'aide ne réunit pas les conditions requises pour l'application de la dérogation prévue à l'article 92, paragraphe 3, point c), du traité, en liaison avec les «Lignes directrices communautaires pour les aides d'État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté» (1).
Pour ce qui est de la classification du prêt de 750 millions de pesetas espagnoles comme aide au sauvetage, il convient de relever qu'au moment de l'obtention du prêt, Comepor était indubitablement une entreprise en crise, incapable de se redresser par ses propres moyens. Conformément aux lignes directrices précitées, les aides au sauvetage peuvent consister en aides de trésorerie prenant la forme de garanties de crédits ou de crédits remboursables portant un taux équivalent à celui du marché (point 3.1 des lignes directrices). Le crédit de 750 millions de pesetas espagnoles, à un taux d'intérêt conforme aux conditions du marché, satisfait à ces critères. Les autorités espagnoles, toutefois, n'ont pas apporté la preuve que lors de l'octroi de ce crédit un lien existait entre ce crédit et les mesures de restructuration envisagées, condition indispensable, aux termes du point 3.1 des lignes directrices, pour qu'une aide au sauvetage puisse être autorisée. La procédure a en effet permis de montrer que l'aide avait pour seul objectif de maintenir le «statu quo» et de retarder l'inévitable; ce faisant, l'aide a contribué à reporter les problèmes industriels et sociaux en suspens sur d'autres producteurs plus efficaces et d'autres États membres, au lieu de renforcer un processus de restructuration qui aurait dû être engagé au moment de l'octroi de l'aide au sauvetage.
Dans le cadre de la procédure, les autorités espagnoles n'ont pas pu démontrer que le prêt qu'elles avaient accordé satisfaisait à toutes ces exigences. Par conséquent, le prêt ne répondant pas aux critères exposés ne peut être autorisé.
Ce prêt de 750 millions de pesetas espagnoles accordé à Comepor ne peut pas non plus être qualifié d'aide à la restructuration puisqu'il n'était absolument pas lié aux mesures de restructuration prévues dans le plan de restructuration de 1994 et qu'il a été versé précisément parce que cette restructuration avait complètement échoué et que les difficultés financières de l'entreprise persistaient. Il convient, en outre, de ne pas perdre de vue que les autorités espagnoles ont admis qu'il était impossible de rétablir la viabilité de l'entreprise.
En outre, l'aide est susceptible de fausser indûment la concurrence. Selon les informations dont dispose la Commission (Panorama de l'industrie communautaire 1997), l'industrie de la céramique souffre de surcapacités et a enregistré une chute importante de la consommation en 1992 et 1993 (de 3,2 % par an) que les années suivantes n'ont pas permis de compenser. De ce fait, l'écart important entre la capacité de production (en valeur: 15 163 millions d'écus en 1993) et la demande (en valeur: 12 834 millions d'écus en 1993) enregistré par le passé n'est pas appelé à diminuer à l'avenir (d'après les prévisions pour 1998, la production est évaluée à 19 470 millions d'écus et la consommation à 15 650 millions d'écus). Dans cette perspective, le prêt accordé à Comepor est susceptible de causer un préjudice grave à ses concurrents.
Compte tenu de tous ces facteurs, la Commission est forcée de conclure que le prêt de 750 millions de pesetas espagnoles accordé par le gouvernement de Navarre à Comepor constitue une aide qui ne peut bénéficier d'aucune des dérogations prévues à l'article 92, paragraphe 3.

VII
Lorsque l'aide est jugée incompatible avec le marché commun, la Commission exige de l'État membre en cause qu'il en réclame le remboursement au bénéficiaire (communication de la Commission du 24 novembre 1983 (2); voir également les arrêts de la Cour de justice des 12 juillet 1973 et 24 février 1987 dans les affaires 70/72 «Commission contre Allemagne» (3) et 310/85 «Deufil contre Commission» (4), respectivement). Comme c'est le cas des aides accordées à Comepor qui font l'objet de la présente décision, le montant de ces aides doit être remboursé. Cette exigence n'est en rien modifiée par le fait que Comepor est sur le point d'être liquidée et de disparaître du marché. La récupération de l'aide n'est pas jugée impossible puisque les actifs de Comepor seront vendus et que le produit de leur vente servira à rembourser les créanciers.
Le remboursement de l'aide doit se faire conformément à la législation espagnole, et notamment aux dispositions relatives au paiement des intérêts de retard dus à l'État, lesquels seront calculés à compter de la date d'octroi de l'aide [lettre de la Commission aux États membres SG(91) D/4577 du 4 mars 1991; voir également l'arrêt de la Cour de justice du 21 mars 1990 dans l'affaire C-142/87 «Belgique contre Commission» (5)].
Selon la jurisprudence de la Cour de justice, les dispositions mentionnées doivent être appliquées de manière à ne pas rendre pratiquement impossible la récupération exigée par le droit communautaire. Les difficultés procédurales ou autres concernant l'exécution de l'acte ne sauraient influer sur la légalité de celui-ci (6),
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:


Article premier
Le prêt de 750 millions de pesetas espagnoles accordé par la société publique «Navarra de Financiación y Control S.A» à Comercial Europa de Porcelanas S.A.L. est illégal, les autorités espagnoles ayant, en violation de l'article 93, paragraphe 3, manqué à leur obligation d'informer la Commission en temps utile de tout projet tendant à instituer ou à modifier des aides pour lui permettre de présenter ses observations.
L'aide est considérée comme incompatible avec le marché commun en application de l'article 92, paragraphe 1, du traité, car elle ne remplit aucune des conditions requises pour l'application des dérogations prévues à l'article 92, paragraphes 2 et 3, du traité.

Article 2
Les autorités espagnoles prennent toutes les mesures nécessaires pour annuler l'aide mentionnée à l'article 1er et récupérer son montant intégral, intérêts compris, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.
La récupération a lieu conformément aux procédures du droit national. Les sommes à récupérer incluent les intérêts produits à partir de la date à laquelle elles ont été mises à la disposition du bénéficiaire jusqu'à leur récupération effective. Les intérêts sont calculés sur la base du taux de référence utilisé pour le calcul de l'équivalent-subvention net des aides à finalité régionale accordées en Espagne.
Les présentes dispositions s'appliquent de manière à ne pas rendre pratiquement impossible la récupération exigée par le droit communautaire. Les difficultés procédurales ou autres concernant l'exécution de l'acte ne sauraient influer sur sa mise en oeuvre.

Article 3
Le gouvernement espagnol informe la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la date de la notification de la présente décision, des mesures prises pour s'y conformer.

Article 4
Le Royaume d'Espagne est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 14 juillet 1998.
Par la Commission
Karel VAN MIERT
Membre de la Commission

(1) JO C 368 du 23. 12. 1994, p. 12.
(2) JO C 318 du 24. 11. 1983, p. 3.
(3) Rec. 1973, p. 813.
(4) Rec. 1987, p. 901.
(5) Rec. 1990, p. I-959.
(6) Voir note en bas de page n° 5, points 58 à 63.


Fin du document


Structure analytique Document livré le: 08/05/1999


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