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Législation communautaire en vigueur

Structure analytique

Document 398D0490

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[ 08.60 - Aides accordées par les États et autres subventions ]


398D0490
98/490/CE: Décision de la Commission du 20 mai 1998 concernant les aides accordées par la France au groupe Crédit Lyonnais [notifiée sous le numéro C(1998) 1454] (Le texte en langue française est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE)
Journal officiel n° L 221 du 08/08/1998 p. 0028 - 0080



Texte:

DÉCISION DE LA COMMISSION du 20 mai 1998 concernant les aides accordées par la France au groupe Crédit Lyonnais [notifiée sous le numéro C(1998) 1454] (Le texte en langue française est le seul faisant foi.) (Texte présentant de l'intérêt pour l'EEE) (98/490/CE)
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté européenne, et notamment ses articles 92 et 93,
vu l'accord sur l'Espace économique européen, et notamment ses articles 61 et 62,
après avoir mis, conformément aux articles susmentionnés, les intéressés en demeure de présenter leurs observations (1),
considérant ce qui suit:

1. INTRODUCTION
Le Crédit Lyonnais (ci-après CL) est un groupe financier public actif dans le domaine bancaire. Il a rencontré des difficultés importantes depuis 1992, qui ont conduit l'État à lui accorder en 1994 des aides sous forme d'une augmentation de capital et de la mise en place d'une structure de défaisance destinée à accueillir environ 40 milliards de francs d'actifs immobiliers. En 1995 d'autres actifs ont été cantonnés dans la défaisance pour un montant total d'environ 190 milliards de francs (2), dont les pertes étaient couvertes par la garantie de l'État. Ces mesures ont fait l'objet de la décision 95/547/CE de la Commission qui, le 26 juillet 1995, a décidé d'approuver sous conditions les aides d'État en question, pourvu que le coût net pour l'État ne dépasse pas 45 milliards de francs français (3). À la suite de la dégradation de la situation financière du CL, les autorités françaises ont présenté en septembre 1996 des aides d'urgence pour un montant de presque 4 milliards de francs afin d'éviter des conséquences négatives majeures. Le 25 septembre 1996 la Commission a décidé d'approuver les aides d'urgence et en même temps d'ouvrir la procédure (4) à l'égard des autres mesures préconisées en faveur du CL pour permettre son redressement, et dans ce cadre d'examiner la compatibilité de toute mesure de restructuration en faveur du CL, sur la base de tous les éléments pertinents - y compris ceux qui ont fondé la décision 95/547/CE et les obligations que celle-ci a imposées à la France - ainsi que tout nouvel élément de fait, y inclus le non-respect de certaines conditions, les nouvelles mesures proposées et les contreparties supplémentaires.
Le même jour, le Commissaire Van Miert a envoyé un courrier au Ministre Arthuis l'informant des difficultés inévitables liées à l'examen du nouveau plan de restructuration de la banque, compte tenu du montant extrêmement élevé d'aides déjà autorisé par la Commission, et qu'il n'était dès lors pas possible de préjuger de la décision finale sur ce dossier. Les autorités françaises ont répondu à la lettre de notification d'ouverture de la procédure au titre de l'article 93 paragraphe 2 du traité notamment par les courriers suivants:
- du 8 novembre 1996, par lequel ont été transmises une analyse du premier plan de redressement, les comptes consolidés du CL et du Consortium de Réalisations (ci-après CDR) en juin 1996, une note sur les systèmes de gestion et de contrôle interne du CL et une note sur l'opération de titrisation partielle du prêt à l'Établissement Public de Financement et de Restructuration (ci-après EPFR);
- du 23 mai 1997, par lequel a été transmis, entre autres, le projet de rapport annuel du CL pour l'exercice 1996;
- du 31 juillet 1997, par lequel les autorités françaises ont soumis le plan de restructuration de la banque demandé par la Commission lors de l'ouverture de la présente procédure.
D'autres courriers ont été adressés par le Commissaire Van Miert aux autorités françaises, notamment le 25 juin 1997, leur exprimant la préoccupation de la Commission pour le retard dans la transmission du nouveau plan de restructuration de la banque, et le 16 octobre 1997, et précisant les principes sur lesquels la Commission se baserait pour prendre une décision. Le 31 mars 1998 le Ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, M. Strauss-Kahn, a adressé un courrier au Commissaire Van Miert, l'informant de dispositions nouvelles que le gouvernement français était prêt à prendre en vue d'une approbation conditionnelle des aides au Crédit Lyonnais. Le 2 avril 1998, M. Van Miert, après avoir obtenu l'approbation de la Commission, a adressé à M. Strauss-Kahn une lettre présentant des conditions permettant selon la Commission de considérer les aides en question comme compatibles avec l'intérêt commun. Le 6 avril, en complément de cette lettre, M. Van Miert a adressé à M. Strauss-Kahn un courrier l'informant des raisons pour lesquelles les engagements soumis dans le courrier de ce dernier du 31 mars ne pouvaient être considérés comme suffisants par la Commission en vue d'une décision positive. Le 24 avril, M. Strauss-Kahn a adressé un nouveau courrier à M. Van Miert réitérant la position des autorités françaises, soulignant la contrainte de viabilité de la banque et contestant le montant des aides calculé par la Commission. Le 4 mai 1998, M. Strauss-Kahn a adressé au Commissaire Van Miert un nouveau courrier proposant des contreparties supplémentaires pour compenser les effets distorsifs des aides. Dans trois courriers séparés du 13 mai 1998 adressés à M. Van Miert, M. Strauss-Kahn a présenté l'ensemble des engagements des autorités françaises.
Dans l'évaluation du plan de restructuration du CL, la Commission a décidé de s'appuyer pour son analyse sur le conseil d'une banque d'affaires de renommée internationale, Lehman Brothers (ci-après la banque conseil de la Commission), qui a été chargée d'examiner le plan de restructuration présenté par les autorités françaises, en ce qui concerne la viabilité de la banque, et de proposer les modifications qu'elle aurait jugées nécessaires. Il a aussi été demandé à la banque conseil de la Commission d'évaluer les nouvelles contreparties proposées par les autorités françaises, ainsi que d'en examiner de supplémentaires si nécessaire. Suite à la soumission à la Commission du plan de restructuration de la banque fin juillet 1997 et après une analyse approfondie et détaillée, la banque conseil de la Commission a rendu son rapport en novembre 1997, rapport qui revêt un caractère confidentiel. Les autorités françaises et le Crédit Lyonnais ont pu consulter ce rapport et n'ont pas contesté ses principales conclusions.
Le Commissaire Van Miert a informé oralement la Commission de l'état d'avancement du dossier dans ses réunions des 25 novembre 1997, 28 janvier, 25 février, 18 mars, 31 mars et 6 mai 1998.
La Commission a par ailleurs consulté un groupe de «sages», anciens hauts dirigeants de banques centrales, pour discuter les différents problèmes liés au dossier et les questions liées aux conséquences qu'aurait pu avoir la défaillance d'une banque de taille majeure.
Les commentaires des tiers sont présentés dans la section 5.
Les mesures sous examen dans la présente décision au titre de l'augmentation des aides approuvées par la Commission dans ses décisions 95/547/CE et du 25 septembre 1996 comprennent:
- les pertes supplémentaires du Consortium de Réalisation (CDR) prises en charge par l'État par le mécanisme du prêt participatif de l'Établissement Public de Financement et de Restructuration (EPFR) au CDR;
- les coûts de portage et pertes supplémentaires de l'EPFR, y inclus la «neutralisation» du prêt du CL à l'EPFR de 1997 à 2014;
- l'abandon de l'obligation à coupon-zéro prévue dans le plan d'affaires de 1995 et la décision 95/547/CE, dont les revenus actualisés avaient été pris en déduction des aides approuvées;
- un certain nombre de mesures susceptibles de comporter des éléments d'aide supplémentaires, en particulier une possible augmentation de capital.

2. RAPPEL

2.1 Les aides au Crédit Lyonnais de 1994 et 1995
Après près de cinq ans de forte croissance, le CL a enregistré des résultats négatifs en 1992 (1,8 milliard de francs français) et en 1993 (6,9 milliards de francs français). Les pertes très élevées par rapport aux fonds propres auraient fait descendre le ratio de solvabilité du CL (c'est-à-dire le rapport entre les fonds propres de la banque et ses actifs, pondérés par leur risque) au-dessous du niveau minimal réglementaire de 8 %, si les autorités françaises, à l'invitation de l'autorité de surveillance du système bancaire français (la Commission Bancaire), n'avaient pas pris en 1994 de mesures de soutien financier de la banque, notamment une augmentation du capital de 4,9 milliards de francs et la prise en charge par l'État des risques attachés à environ 42,7 milliards de francs français d'actifs immobiliers non performants transférés dans une société spécifique de cantonnement (Omnium Immobilier de Gestion, OIG). Au début de 1995, comme il est apparu que le CL était en train d'enregistrer des pertes supplémentaires qui auraient mis en cause la solvabilité de la banque, l'État français a mis en place un nouveau plan de redressement, avec la création d'une autre structure spécifique dite de défaisance, composée d'une part du CDR, un consortium de cantonnement destiné à reprendre les actifs compromis du CL, dont ceux qui avaient déjà été transférés à l'OIG, et d'autre part d'une société holding (SPBI) chargée d'assurer le financement de la défaisance et contrôlée par les principaux actionnaires du CL (État, Thomson-CSF, CDC). Le CDR est une filiale à 100 %, non consolidée, du CL. La SPBI a par la suite (loi du 28. 11. 1995) été transformée en un établissement public administratif, l'EPFR, ce qui lui a permis de bénéficier de la garantie illimitée de l'État sur la totalité des risques et des coûts liés aux engagements transférés au CDR, coûts de portage inclus. La mise en place de ce mécanisme a permis de limiter la perte comptable du CL pour 1994 à 12,1 milliards de francs français.
Selon le plan communiqué par les autorités françaises et approuvé par la décision 95/547/CE, le CDR a acheté presque 190 milliards de francs d'actifs de francs français du CL, dont ceux cantonnés en 1994, auxquels sont attachés 55 milliards de francs de passifs. La valeur nette des actifs cantonnés se chiffrait, sur cette base, à environ 135 milliards de francs français. Tous les actifs concernés devaient être cédés ou liquidés. Au moins 50 % de ces mêmes actifs devaient être cédés en trois ans, et 80 % des actifs devaient être cédés dans les cinq ans si les conditions de marché le permettaient. S'agissant des filiales bancaires transférées au CDR, la partie saine de ces banques devait être soit cédée à des tiers, soit reprise avant le 31 décembre 1995 par le CL, de sorte qu'à la fin de l'exercice 1995 aucune structure bancaire active ne demeure plus au sein du CDR.
Pour lui permettre d'acheter les actifs au CL, le CDR reçoit un «prêt participatif» de 135 milliards de francs de la part de l'EPFR, pouvant être augmenté à 145 milliards de francs français par une tranche supplémentaire de 10 milliards de francs. Ce dernier se finance auprès du CL à travers un emprunt (non participatif) à concurrence d'un montant maximal de 145 milliards de francs. Avec cet emprunt, l'EPFR a pu octroyer le prêt participatif de 135 milliards de francs au CDR et aurait dû être en mesure d'acheter des obligations coupon-zéro à long terme pour un montant d'environ 10 milliards de francs. Cette opération obligataire aurait dû permettre à l'EPFR de dégager un produit initialement estimé en 1995 à environ 35 milliards de francs à la fin de 2014, pour lui permettre d'absorber le solde des pertes qui seront alors constatées dans le CDR.
Le prêt du CL à l'EPFR ainsi que le prêt de l'EPFR au CDR ont pour échéance le 31 décembre 2014. Le prêt du CL sera remboursé par anticipation au fur et à mesure des cessions d'actifs, à hauteur des montants encaissés, à condition toutefois que les remboursements du CDR à l'EPFR soient supérieurs à la charge annuelle de paiement des intérêts du prêt du CL. Le taux d'intérêt annuel applicable avait initialement été fixé à 7 % en 1995 et à 85 % du taux du marché monétaire (TMM) à partir de 1996. Le prêt participatif octroyé au CDR fait l'objet d'un amortissement partiel à l'issue de chaque exercice: l'EPFR reçoit un remboursement d'un montant égal à celui des cessions intervenues dans l'année et, si des moins-values sont constatées sur les cessions, il déclare un abandon de créance (sous forme d'appel de garantie) à hauteur des pertes enregistrées par le CDR.
Par le mécanisme du prêt participatif les pertes du CDR sont à la charge de l'EPFR, donc en dernier ressort de l'État, jusqu'au montant maximal de 135 milliards de francs. Toutefois, la garantie de l'État n'a pas été plafonnée par le Parlement, qui s'est prononcé dans la loi du 28 novembre 1995 sur la création de l'EPFR, et a donc un caractère de facto illimité, y compris dans l'hypothèse extrême où la défaisance réaliserait des pertes d'un montant total supérieur au montant du prêt participatif. Le CL dispose ainsi de la couverture de l'État pour le remboursement de son prêt à l'EPFR, ce qui permet au CDR de n'être consolidé ni prudentiellement ni comptablement au sein du groupe CL. Ce mécanisme a permis au CL d'enregistrer des provisions et des pertes réduites et de respecter le ratio réglementaire de solvabilité. Le schéma suivant en présente les éléments fondamentaux.
En contrepartie, l'EPFR bénéficie du produit d'une clause de retour à meilleure fortune sur le CL. Ainsi il reçoit une contribution de 34 % du résultat net consolidé du CL, part du Groupe (avant prise en compte de cette contribution et de la dotation de l'exercice au fonds pour risques bancaires généraux et avant l'impôt français sur les sociétés) augmentée de 26 % de la fraction dudit résultat excédant 4 % des capitaux propres consolidés, part du Groupe.

ORGANIGRAMME DE LA STRUCTURE DE DÉFAISANCE
>DEBUT DE GRAPHIQUE>
Recapitalisation ÉTAT Dotations budgétaires
CRÉDIT LYONNAIS Prêt 135 milliards FRF EPFR Tranche supplémentaire 10 mrd FRF pour le coupon zéro Prêt 145 mrd Pertes Filiale à 100 % CDR canton Apport d'actifs nets 135 mrd F DÉFAISANCE
>FIN DE GRAPHIQUE>
Le plan de restructuration du CL présenté à la Commission en 1995 portait sur plusieurs mesures de recentrage stratégique, de cession de filiales, de réduction des coûts, de maîtrise et contrôle des risques. Ces mesures auraient dû permettre au CL d'afficher des résultats positifs à partir de 1995. À la fin de 1999, le CL aurait dû afficher une rentabilité sur les fonds propres de 12,4 %. La contribution du CL aux coûts de la structure de cantonnement au titre de la clause aurait dû être au total de FRF 6 136 millions en valeur nominale sur la période 1995-1999.

2.2 La décision 95/547/CE
Par sa décision 95/547/CE, la Commission a approuvé sous conditions les aides octroyées par l'État français au CL au cours des années 1994 et 1995 en les considérant comme compatibles avec le marché commun sur la base de l'article 92 paragraphe 3 lettre c) du traité CE et notamment avec les lignes directrices communautaires pour les aides d'État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté (5). Le texte du dispositif de la décision adressée à la France est repris ci-dessous:
«Article premier
L'aide contenue dans le plan de redressement du Crédit Lyonnais sous forme d'une augmentation de capital de FRF 4,9 milliards, de la prise en charge des risques et des coûts liés aux actifs transférés à la structure de cantonnement (jusqu'à un montant maximal de FRF 135 milliards), et des avantages fiscaux inhérents à la clause d'un retour à meilleure fortune, opération dont le coût global net pour l'État, compte tenu de rentrées pour l'État, est estimé à un maximum de FRF 45 milliards, est déclarée compatible avec le marché commun et avec l'accord EEE en vertu de l'article 92 paragraphe 3 point c) du traité CE et de l'article 61 paragraphe 3 point c) de l'accord EEE.
Article 2
L'autorisation des aides visées à l'article 1er est subordonnée au respect par la France des conditions et engagements suivants:
a) assurer la mise en oeuvre de toutes les mesures de redressement et toutes les dispositions prévues pour le système décrit à l'article 1er;
b) ne pas modifier les conditions prévues dans le plan de redressement sauf accord préalable de la Commission. En tout cas, la clause de retour à meilleure fortune ne peut être cédée au plus tôt qu'au moment de la privatisation du Crédit Lyonnais, et seulement au prix de marché; ce prix sera vérifié par des expertises indépendantes;
c) assurer la réduction de la capacité commerciale du Crédit Lyonnais, vu l'importance des coûts du système pour l'État globalement estimés à FRF 45 milliards, par une réduction d'au moins 35 % de sa présence commerciale à l'étranger, y compris du réseau bancaire européen, d'ici fin 1998 selon les engagements pris par la France dans sa lettre du 18 juillet 1995. Si cet objectif ne pouvait être réalisé dans le délai prévu sans provoquer la constatation de pertes importantes et conduire l'actionnaire de référence à apporter un nouveau soutien financier, notamment pour assurer le respect du ratio européen de solvabilité, la Commission s'engage à examiner la possibilité de prolonger, le cas échéant, ce délai. Si les coûts du système, estimés à FRF 45 milliards, sont dépassés, il y a lieu de réexaminer l'importance de la réduction de la présence commerciale du Crédit Lyonnais, telle qu'acceptée par la lettre mentionnée ci-avant;
d) supprimer la possibilité pour le Crédit Lyonnais de bénéficier d'un report des déficits fiscaux pour le montant de la perte fiscale de 1994 couverte par l'augmentation de capital de FRF 4,9 milliards;
e) supprimer la possibilité pour le Crédit Lyonnais de racheter des actifs industriels et commerciaux cantonnés, sauf au prix auquel l'actif a été transféré au CDR, ou au prix de marché si celui-ci est supérieur au prix du transfert de l'actif au CDR, et en tout cas dans la limite globale de FRF 5 milliards;
f) exclure tout intéressement du Crédit Lyonnais aux produits des réalisations du CDR;
g) réaliser la séparation entre le CDR et le Crédit Lyonnais, en ce qui concerne leurs dirigeants, la gestion, ainsi que le système de contrôle et de surveillance de la gestion des actifs cantonnés;
h) assurer l'indépendance des comités de direction des actifs cantonnés à l'égard du Crédit Lyonnais;
i) éliminer toute possibilité de report des déficits fiscaux résiduels au titre des années antérieures à 1995 pour le Crédit Lyonnais si, au moment de la privatisation, la clause de retour à meilleure fortune fait l'objet d'une cession;
j) veiller à ce que le Crédit Lyonnais affecte le produit des cessions à la restructuration des actifs et des activités non performantes;
k) veiller à ce que le Crédit Lyonnais verse à la SPBI les sommes du prélèvement en vertu de la clause d'un retour à meilleure fortune;
l) verser à la SPBI les produits de la privatisation du Crédit Lyonnais, notamment ceux qui dérivent de la vente des actions détenues au présent par la SPBI, et de proposer au Parlement de verser à la SPBI les produits de la privatisation de la partie résiduelle des actions.
Article 3
La Commission a tenu compte de l'affirmation des autorités françaises selon laquelle l'objectif de la privatisation est clairement assigné au Crédit Lyonnais et le redressement attendu devrait lui permettre d'être prêt à une privatisation à l'horizon de cinq ans. Ainsi un report de la privatisation au-delà de cinq ans devra faire l'objet d'une communication à la Commission.
Article 4
Les autorités françaises collaborent pleinement au contrôle de la présente décision et soumettent à la Commission tous les six mois à partir du 1er mars 1995 les documents suivants:
a) un rapport détaillé sur l'application du plan, ainsi que les rapports présentés au Parlement;
b) les bilans, les comptes de résultats et les rapports des administrateurs des sociétés parties à l'opération de défaisance, à savoir OIG, CDR, SPBI, ainsi que le Crédit Lyonnais;
c) une liste des actifs cantonnés liquidés ou vendus, avec indication des prix de vente, des noms des acquéreurs, des noms des banques auxquelles les mandats de vente ont été confiés;
d) une liste détaillée des abandons de créances du CDR à valoir sur le prêt participatif octroyé par SPBI;
e) une liste détaillée des actifs bancaires cédés par le Crédit Lyonnais hors du canton, avec une évaluation, basée sur des critères objectifs et vérifiables, de la réduction des moyens de sa présence commerciale à l'étranger;
f) des comptes détaillés sur les contributions du Crédit Lyonnais au canton sous forme de prélèvement ou de dividendes.
La Commission pourra demander l'évaluation de ces documents et de la mise en place du plan par des "audits" spécialisés.
Article 5
La République française est destinataire de la présente décision.»
En complément de ce dispositif, il y a lieu de signaler que dans sa lettre du 18 juillet 1995, la France s'est engagée à amener le CL à réduire sa présence commerciale hors de France en Europe de 50 % en termes de bilan, pour la fin 1998, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 2 point c) de la décision 95/547/CE.

2.3 Les aides d'urgence
Fin septembre 1996, les autorités françaises ont soumis à la Commission des aides supplémentaires en faveur du CL, pour un montant de près de 4 milliards de francs français. Afin de prévenir des pertes importantes pour le Crédit Lyonnais et la dégradation de sa notation, ce qui aurait pu avoir pour effet des conséquences négatives pour d'autres établissements financiers, les autorités françaises ont affirmé que des mesures d'aide supplémentaires étaient nécessaires, notamment:
- des aides urgentes visant à préserver la situation de liquidité et celle de solvabilité de l'établissement et qui portent sur 1995 et 1996;
- des aides à la restructuration, destinées à conforter le redressement du Crédit Lyonnais au-delà de 1996 et qui ne seront pas mises en place avant la décision finale de la Commission à leur égard.
Les mesures envisagées consistaient en la modification des conditions attachées au prêt du Crédit Lyonnais à l'EPFR, afin de «neutraliser le poids du passé dans les comptes du CL». En fait, face aux résultats moins bons que prévu sur les autres activités, le système de rémunération du prêt faisait, selon les autorités françaises, peser sur le Crédit Lyonnais une charge nette de 3 milliards en 1996, 2,7 milliards en 1997 et 2,5 milliards de francs en 1998, calculée en tenant compte de la différence entre le taux du prêt à l'EPFR (85 % du TMM) et le taux moyen pondéré de refinancement du Crédit Lyonnais sur les passifs auxquels est adossé ce prêt.
Dans un premier temps et au 25 septembre 1996 ces mesures devaient être mises en place pour les années 1995 (rétroactivement, par incorporation d'un produit exceptionnel en 1996) et 1996. Ensuite et sous réserve de la décision finale de la Commission, elles pourraient éventuellement être introduites pour toute la durée du prêt du CL à l'EPFR, sous forme d'aide à la restructuration.
Les modifications envisagées visaient à compenser totalement le Crédit Lyonnais de la charge dudit prêt. Ainsi, il était prévu que le taux de rémunération sur le prêt soit tel qu'il compense le coût de la collecte par le CL des fonds nécessaires à financer le prêt. Par conséquent, les autorités françaises ont décidé d'augmenter le taux de rémunération de 7 % à 7,45 % en 1995 et de 85 % du TMM à 5,84 % en 1996. En particulier, pour 1996 les autorités françaises ne se limitaient pas à annuler la bonification d'intérêt de 15 % sur le taux du prêt originaire afin que le CL soit rémunéré à hauteur du TMM, mais elles envisageaient aussi d'augmenter le taux du prêt au-delà du TMM d'un pourcentage apte à compenser le coût de refinancement plus élevé du CL afférent à ses passifs de long terme. Cette augmentation par rapport au TMM était de l'ordre de 2 %. Ces modifications pour 1995 et 1996 auraient pour effet de donner au CL un avantage de 3 560 millions de francs, qui devait être suffisant pour prévenir toute difficulté de liquidité et de confiance pour la banque en 1996.
Comme les autorités françaises l'ont admis, une partie du plan approuvé par la Commission en 1995 n'a jamais été mise en place. Il s'agit notamment de la partie de 10 milliards de francs français du prêt de 145 milliards de francs du CL à l'EPFR, devant permettre à ce dernier de souscrire des obligations coupon-zéro à long terme qui lui auraient permis de dégager un produit de 35 milliards de francs en 2014 en valeur nominale, soit 7,8 milliards de francs en valeur actualisée. Les autorités françaises envisageaient donc de supprimer cette partie du plan. Comme pour les autres mesures décrites ci-dessus, cette modification était d'abord mise en place le 25 septembre 1996 et pour l'année 1996, sous forme d'une suspension de l'opération. Ensuite et selon la décision finale de la Commission, cette modification serait envisagée par les autorités françaises pour les années suivantes, sous forme d'aide à la restructuration.
La mise en place de l'opération concernant le coupon-zéro aurait eu pour conséquence d'alourdir encore les pertes du CL mentionnées ci-dessus, en lui imposant une charge annuelle de portage d'encours supplémentaire de 10 milliards de francs, à un taux de rémunération ne couvrant pas son coût de refinancement.
Les autorités françaises ont aussi affirmé, lors de la soumission de leur demande sur les aides d'urgence, que ces aides n'étaient pas suffisantes pour soutenir le redressement définitif du CL, car le nouveau plan social ainsi que l'abandon de l'activité de banque de détail hors de France, prévu dans les mesures présentées, comportaient des provisions et des moins-values importantes sur plusieurs filiales non ou insuffisamment performantes (environ 6,5 milliards de francs français de moins-value). Pour cette raison, les autorités françaises envisageaient de procéder à une injection en capital, probablement au moment de l'arrêté des comptes 1996, «pour un montant supérieur à ces moins-values». La Commission avait en 1996 estimé le montant possible de cette opération supplémentaire à 8-10 milliards de francs.
Le 26 septembre 1996, la Commission a donc décidé d'approuver les aides d'urgence et d'ouvrir la procédure à l'égard des autres mesures en faveur du CL. Elle a annoncé que, dans le cadre de cette procédure, elle examinerait la compatibilité de toute mesure de restructuration en faveur du CL, sur la base de tous les éléments pertinents - y compris ceux qui avaient fondé la décision 95/547/CE et les obligations que celle-ci a imposées à la France - ainsi que tout nouvel élément de fait - y inclus le non-respect de certaines conditions, les nouvelles mesures proposées et les contreparties supplémentaires.
Il convient par ailleurs de souligner que l'approbation des aides d'urgence pour 1995 et 1996 ne préjugeait en rien de la présente décision, de sorte que les obligations de la France et du CL afférentes à la mise en place de l'obligation de coupon-zéro et au financement du prêt à l'EPFR, telles que définies dans la décision 95/547/CE, restaient inchangées à compter du 1er janvier 1997.

2.4 Contexte de l'examen des aides supplémentaires à la restructuration en faveur du Crédit Lyonnais
Dans l'examen des aides supplémentaires en faveur du CL, la Commission prend en compte le fait qu'elle a déjà approuvé les aides octroyées par la France au CL en 1994 et 1995 en les considérant comme compatibles avec le marché commun sur la base de l'article 92 paragraphe 3 point c) du traité CE et notamment avec les lignes directrices communautaires pour les aides d'État au sauvetage et à la restructuration des entreprises en difficulté (6).
Comme affirmé dans ces lignes directrices, «les aides d'État à la restructuration posent des problèmes particuliers en matière de concurrence, étant donné qu'elles peuvent aboutir à transférer une part inéquitable de la charge d'une adaptation structurelle et des problèmes sociaux et industriels qui en découlent à d'autres producteurs qui ne bénéficient pas d'une aide ainsi qu'à d'autres États membres. Le principe général devrait donc être de n'autoriser une aide à la restructuration que dans les cas où l'on peut démontrer qu'il est dans l'intérêt de la Communauté qu'elle le soit». Ainsi, «les aides à la restructuration ne devraient normalement être nécessaires qu'une fois».
La Commission constate qu'au montant considérable des aides acceptées en 1995 s'ajoutent maintenant des aides d'une ampleur inédite. Dans la décision d'ouverture de la procédure en septembre 1996, la Commission avait noté que ces considérations mènent inéluctablement à la conclusion que de telles aides supplémentaires ne peuvent être considérées comme compatibles avec les règles en matière d'aides d'État du traité CE que si de sérieuses et importantes contreparties sont fournies. Ces contreparties devraient se situer aussi bien en France que hors de France, dans le domaine de la banque de détail comme dans les autres domaines d'activité du CL. L'appréciation par la Commission de la compatibilité des aides supplémentaires sera également fonction de leur montant additionnel par rapport au montant approuvé en 1995. Par conséquent, la Commission doit veiller à ce que ces aides ne soient pas déclarées compatibles, si elles le sont, sans une contribution particulièrement importante du CL, qui tienne compte du contexte dans lequel les autorités françaises ont présenté à la Commission ces mesures d'aides, de l'ampleur des aides supplémentaires par rapport au montant de 45 milliards autorisé par la décision 95/547/CE, et de la récidive de ces aides. Elle s'assurera en particulier que le CL fournisse des contreparties proportionnées au caractère exceptionnel et à l'ampleur des aides qui lui ont été octroyées. De telles contreparties ne devront pas se limiter à des activités qui ne rentrent plus dans les priorités stratégiques de la banque, mais devront concerner aussi les activités de la banque dont la cession pourra compenser les dommages causés par les aides aux concurrents et tout ce qui n'est pas strictement nécessaire à la viabilité du métier de base du CL.

3. DESCRIPTION DU CRÉDIT LYONNAIS ET DE SES PERFORMANCES RÉCENTES
>EMPLACEMENT TABLE>
Le CL est un groupe bancaire actif dans les différents domaines de l'intermédiation financière, notamment la banque commerciale de détail et de gros, la banque de marché, la gestion des fonds pour compte de tiers, le crédit-bail, l'affacturage et l'assurance. Le Crédit Lyonnais comptait un effectif de 50 789 personnes à la fin de 1997, dont un peu moins des deux tiers en France. Le total du bilan du CL à la fin de 1997 se chiffrait à 1 499 milliards de francs, dont 692 milliards relatifs à l'activité en France (46,2 %) et 474 milliards de francs en Europe hors France (32 %). Après le rachat de la participation détenue par Thomson en décembre 1996, l'État français possédait 78,05 % du capital et 96,01 % des droits de vote du CL (y compris les actions détenues par l'EPFR). La Caisse des dépôts et Consignations, qui est un établissement financier spécialisé public, possédait 3,7 % du capital et 3,99 % des droits de vote. Le reste du capital (18,25 %) consistait en des certificats d'investissements sans droit de vote cotés en bourse. L'organisation des métiers et le nombre de ses implantations en France et à l'étranger à la fin de 1997, ainsi que la distribution géographique de quelques éléments financiers clés du Crédit Lyonnais, sont repris dans le tableau suivant.
>EMPLACEMENT TABLE>
Les activités du CL sont organisées par métiers et regroupées au sein d'un certain nombre de directions, à savoir celles des affaires françaises (DCAF), des affaires européennes hors de France (DCAE), des autres affaires internationales hors d'Europe (DCAI), des marchés de capitaux (DCMC), de la gestion et des relations avec les investisseurs institutionnels (DGRI), de l'ingénierie financière et des financements d'actifs et de projets (IFAP) et divers. La DCAF est la principale division du groupe puisqu'elle contribue à près de la moitié des revenus consolidés du CL et à un tiers de son résultat net (hors ajustements de holding et intergroupe). Le tableau suivant (n° 3) retrace la contribution de chaque direction à certains agrégats financiers du groupe pour l'an 1996.
Le tableau 3 montre que les activités européennes généraient en 1996 un résultat net très modeste par rapport aux engagements pondérés et aux capitaux alloués, alors que c'est le contraire qui est vrai pour les autres activités internationales. Les activités françaises, pour leur part, produisaient des revenus bruts substantiels mais ne se soldaient pas par un résultat net aussi élevé, notamment en raison des frais généraux et du niveau élevé des risques et des pertes sur actifs. Cette situation a sensiblement évolué en 1997 (Cf. ci-après).
Depuis l'octroi des premières aides en 1994, le CL a entrepris une restructuration importante de son organisation et de l'ensemble de ses activités. La restructuration a concerné les aspects stratégiques, opérationnels et financiers.
Le CL a abandonné l'aspiration de devenir une banque universelle à l'échelle mondiale. Tout en maintenant cet objectif en France, où le CL est à la fois banque des particuliers, banque des PME, banque des grandes entreprises et des institutionnels, banque-assurance, banque d'affaires et banque de marché, dans le reste du monde le CL a réduit sa présence commerciale, sous la contrainte de la décision 95/547/CE, en cédant des filiales bancaires étrangères spécialisées dans les opérations de détail, en Europe (CLBN, Credito Bergamasco, Woodchester), en Amérique latine (Banco Frances e Brasileiro) et en Afrique. Depuis le 1er janvier 1995, les cessions à l'international ont concerné 17,9 % des actifs dans ce domaine, ce qui correspond à environ 171,2 milliards de francs français dont 136,1 milliards en Europe en 35,2 milliards dans le reste du monde (principalement en Amérique latine). En revanche, il a maintenu et réorganisé ses activités de banque de gros et de marché de capitaux dans le monde entier. Il a aussi mis en place des alliances avec des partenaires spécialisés, ayant un rôle prééminent sur leurs propres marchés (notamment avec Allianz en assurance dommages et Cetelem en France dans le crédit à la consommation).
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Du point de vue opérationnel, deux lignes d'action principales ont été poursuivies. Tout d'abord, le portefeuille a été assaini, ayant bénéficié du transfert au CDR de 190 milliards de francs d'actifs en grande partie non performants, ainsi que de la mise en place d'outils de maîtrise, de gestion et de contrôle des risques plus efficaces et de systèmes de gestion et de contrôle interne adaptés. Le ratio de couverture des créances douteuses par des provisions a été rehaussé à 65 % en 1997. En deuxième lieu, un effort important a été réalisé dans la réduction des frais généraux. Des plans sociaux successifs ont permis de réduire le personnel de 59 323 personnes en 1995 à 50 789 en 1997 et son coût global de 20,6 milliards à 19,8 milliards de francs sur la période. La réduction du nombre d'employés se chiffre (7) à 14,4 % par rapport à 1995, soit une réduction très supérieure, y compris à périmètre d'activité constant, à celle consentie par ses principaux concurrents français. Une nouvelle baisse des effectifs est prévisible en 1998 dans le cadre de l'achèvement du troisième plan social qui porte sur des réductions d'effectifs de 5 000 personnes (sur 1996-1998). Des actions dans le sens de la fidélisation de la clientèle et de la défense du produit net bancaire (PNB) ont été entreprises pour enrayer la baisse du produit net bancaire constatée en 1996.
La restructuration sur le plan financier a été plus lente. Par rapport au plan présenté à la Commission en 1995, le CL n'a pas pu respecter les objectifs qu'il s'était fixés, pour plusieurs raisons. Du côté du passif, le CL a continué à supporter la charge de ses passifs à long terme contractés il y a plusieurs années et dont les conditions de taux sont devenues de plus en plus lourdes par rapport à la diminution progressive des taux de marché. La notation du CL est restée à des niveaux particulièrement bas et handicapants par rapport à la stratégie poursuivie par la banque. En dépit de la récente amélioration de sa performance opérationnelle, la notation des emprunts du CL assignée par les agences de notation internationales est actuellement BBB+ (Standard & Poor's) et A3 (Moody's), ce qui correspond à une capacité de remboursement suffisante mais avec une grande sensibilité aux aléas économiques (8). Une telle notation se compare avec les notations de AA-/Aa3 pour la Société Générale et A+/Aa3 de la BNP, soit les deux banques françaises privées, de taille à peu près comparable à celle du CL, et avec les notations normalement plus élevées des autres banques publiques. Une notation dans l'échelon AAA-A- (S& P) ou Aaa-A3 (Moody's) est normalement une condition confortant la viabilité à long terme d'une banque, afin notamment qu'elle puisse se financer dans des conditions concurrentielles sur les marchés. Cette notation reflète également la faible capitalisation du CL par rapport aux métiers exercés et à l'extension de ses activités qui sont soumises aux aléas économiques dans le monde entier. Le coefficient de solvabilité est passé de 8,4 en 1995 à 9,3 % (en 1997) et son noyau dur («tier one») de 4,4 à 4,8 %. Bien que ces ratios soient normalement tout à fait suffisants pour une banque moyenne, ils restent en deçà de ce que les marchés demandent normalement pour des banques qui prétendent poursuivre une stratégie élargie comme celle du CL. En janvier 1998, l'agence Moody's a placé toutes les notes du CL sous surveillance en raison de son exposition sur l'Asie et des incertitudes liées à l'approbation du plan d'aides par la Commission.
Malgré ces difficultés du côté du passif, c'est du côté de l'actif que viennent les principales difficultés du CL, en raison du retard des remboursements du prêt à l'EPFR qui pèse sur son exploitation, mais aussi de la baisse de ses parts de marché en 1995-96 (enrayée en 1997) et de la conjoncture défavorable ces années-là, qui explique l'insuffisance de PNB et de résultats ayant motivé les aides de sauvetage approuvées par la Commission en 1996.
Du côté de l'actif, on notera également que le rendement du portefeuille des créances a dû subir une réduction à la suite de la baisse des taux de marché, mais aussi de la concurrence plus forte liée à la désintermédiation sur les niveaux plus sophistiqués des marchés financiers, du progrès technologique et de l'intégration des marchés. La diminution du produit d'intérêts (intérêts perçus moins intérêts payés) a été progressivement compensée par l'augmentation des commissions sur titres et sur gestion d'actifs de tiers. Le prêt à l'EPFR est resté à un montant nominal élevé (plus de 100 milliards de francs français) et sa rémunération plus basse que celle des taux de marché (85 % du TMM) a pesé sur les comptes de la banque, ce qui a conduit à l'octroi de l'aide d'urgence en 1996.
L'analyse financière et opérationnelle du CL sur la période 1994-1997 peut être illustrée à partir du tableau 4.
Il convient de souligner que les comptes du CL en 1995 et 1996 incluent la «neutralisation» du prêt à l'EPFR. De même, les comptes de 1997 ont été établis par la banque sur une base hypothétique d'approbation par la Commission de la «neutralisation» du prêt. Après l'annonce de ces résultats le 19 mars 1998, la Commission a fait savoir, par une déclaration du Commissaire Van Miert, que l'inclusion dans les résultats de la banque de l'aide afférente à la neutralisation en 1997 du prêt à l'EPFR était prématurée et n'avait pas été approuvée à ce stade, qu'elle ne saurait préjuger de la présente décision et qu'elle était donc, conformément aux règles applicables en matière d'aides d'État, à ce stade illégale. Sans ces aides en 1997, d'un montant supérieur à 3 milliards de francs, la banque aurait enregistré un résultat négatif. Nonobstant cette réserve, et tels qu'ils sont présentés, ces résultats sont comparables à ceux de 1996 et 1995 qui comprenaient des aides similaires et donnent des indications importantes sur l'évolution de l'activité du CL.
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Ce tableau montre qu'après une très sensible baisse en 1995, le Produit Net Bancaire de la banque a été stabilisé en 1996 et a connu une sensible reprise en 1997. La sensible hausse du PNB en 1997 s'explique, d'une part, par une augmentation significative des commissions (+11,5 % à périmètre constant) en raison de la bonne activité sur les marchés financiers en 1997. Elles composent désormais 33,8 % du PNB du CL et ont augmenté dans toutes les grandes activités de la banque, en France (où les commissions passent de 6,6 à 7,1 milliards de francs) et à l'international. D'autre part, l'activité de prêt a été soutenue en 1997: l'encours de prêt a crû en Europe (+11 % à périmètre comparable) et dans le reste du monde (+7,6 %). La hausse sur l'Europe s'explique par la forte progression des prêts de la BfG et un effet de change sur la livre sterling (+20 %). Le chiffre sur le reste du monde comprend un effet «dollar» (+14 %). Les opérations de marché de capitaux et des autres filiales étrangères, notamment aux États-Unis d'Amérique et en Asie, ont fourni un apport positif important à la banque.
Selon la banque, les parts de marché du CL en France, après la chute enregistrée en 1995-1996, se sont stabilisées, que ce soit la distribution de crédits ou la collecte de ressources.
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La banque commerciale en France a enregistré en 1997 une amélioration rapide de sa rentabilité: le PNB France reste stable en raison de la légère baisse de l'encours de prêts à la clientèle (-2,6 % hors opération de titrisation) et de l'érosion des marges de taux (marge d'intermédiation taux débiteurs vs taux créditeurs) mais le contrôle des frais généraux sur l'activité en France, qui baissent de 1,4 %, est un facteur favorable, ainsi que la baisse des provisions due à un meilleur contrôle des risques. Le niveau de provisions des activités de banque commerciale en France a considérablement baissé de 1996 à 1997, passant de 3,7 milliards de francs, soit environ 1 % des actifs pondérés, à moins de 2 milliards de francs, permettant une amélioration du résultat (le résultat avant impôt augmente de 2 milliards de francs).
Les frais généraux ont sur l'ensemble du groupe subi une baisse importante depuis 1995, suite notamment à la réduction du nombre et des coûts globaux du personnel. Le coefficient d'exploitation a ainsi été ramené de 84,7 à 76 %. Toutefois, il reste particulièrement élevé en France (environ 82 %), niveau à comparer avec celui des principaux concurrents français de la banque (environ 70-72 %). En revanche, les frais généraux ont augmenté très sensiblement en 1997 sur l'international. De sorte que, globalement, le coefficient d'exploitation (ratio frais généraux sur PNB) baisse lentement malgré la hausse du PNB. C'est beaucoup mieux que ce qui était prévu pour 1997 dans le plan (80 %), mais le Crédit Lyonnais est encore loin du ratio des principaux concurrents et de l'objectif qu'il s'est fixé (coefficient de 70 % en l'an 2000).
Les provisions ont atteint un montant total de plus de 8 milliards de francs en 1997, soit deux fois plus que prévu. Cette hausse s'explique principalement par la provision exceptionnelle de 3 milliards de francs passée sur l'Asie. Par rapport à 1996, les provisions (hors Asie) sont en diminution, passant de 5,7 à 5,1 milliards de francs. Elles sont néanmoins supérieures de 1 milliard à ce qui était prévu dans le plan et ont augmenté à périmètre constant, en raison notamment d'une importante provision pour risque-pays à hauteur de 900 millions de francs en 1997 (en complément d'une provision de 333 millions de francs déjà passée en 1996).
Le résultat net de la banque a augmenté très sensiblement en 1997 mais est difficile à interpréter en raison de l'importance des éléments exceptionnels non récurrents (neutralisation du prêt EPFR, provision Asie, plus-values de cession). Le ratio de solvabilité («ratio Cooke»), compte tenu de l'amélioration des résultats (effet positif sur le numérateur, après affectation du résultat) et de la stabilité des actifs pondérés (dénominateur du ratio), augmente sensiblement, passant de 4,6 à 4,8 % (tier one) et de 8,7 à 9,3 % (ratio de solvabilité).
Les résultats aujourd'hui connus montrent que le redressement du CL reste encore fragile et sa rentabilité insuffisante pour rémunérer les fonds propres au niveau qu'attendrait normalement un actionnaire privé. Sans les aides d'urgence approuvées par la Commission en 1996, les résultats de la banque seraient demeurés négatifs. On rappellera aussi que, sans la neutralisation du prêt (anticipée et à ce stade, conformément aux règles applicables en matière d'aides d'État, illégale), le CL aurait encore en 1997 enregistré des pertes.
La Commission ne peut donc sur cette seule base conclure que l'évolution récente de l'activité de la banque démontre qu'elle a retrouvé la profitabilité et la viabilité. Il importe pour cela d'examiner le plan de restructuration présenté par les autorités en juillet 1998 (Cf. ci-après).

4. ANALYSE DE L'AVANCEMENT DE LA MISE EN OEUVRE DES MESURES PRÉVUES DANS LA DÉCISION 95/547/CE
Dans sa décision 95/547/CE, la Commission a soumis les aides à une série de conditions, dont la mise en oeuvre est examinée ci-dessous. Les conditions les plus importantes sont:
a) la mise en oeuvre intégrale du plan de restructuration présenté à la Commission;
b) la réduction de la présence commerciale de la banque hors de France de 35 % en termes de bilan;
c) la mise en place du prêt EPFR et de l'obligation à coupon-zéro;
d) le paiement de la clause de retour à meilleure fortune;
e) le versement des dividendes du CL à l'État actionnaire;
f) l'utilisation des produits de cessions à des fins de restructuration;
g) la suppression des déficits fiscaux reportables relatifs aux aides.

a) La mise en oeuvre du plan de restructuration présenté à la Commission
Depuis l'approbation par la Commission en juillet 1995 du plan d'aides en faveur du CL, y compris le protocole d'accord entre l'État et le CL du 5 avril 1995, concernant la structure de défaisance, les autorités françaises ont communiqué à la Commission plusieurs avenants audit protocole, dont certains pour se conformer à la décision 95/547/CE (séparation CL-CDR) et à la décision de la Commission de septembre 1996 (aide d'urgence). Il convient de rappeler ici l'avenant n° 9 du 6 mai 1997 qui a adapté les modalités de remboursement du prêt participatif par le CDR à l'EPFR en supprimant l'obligation pour le CDR de rembourser par anticipation chaque année à l'EPFR une somme correspondant aux sommes encaissées des actifs sous déduction des sommes mises à la disposition des sociétés contrôlées, des frais de fonctionnement et des intérêts reconnus à l'EPFR. Depuis la date de l'avenant, le CDR doit soumettre chaque année à l'EPFR un plan pluriannuel de financement et de trésorerie, et dans ce cadre, le CDR rembourse par anticipation à l'EPFR, le 30 juin, un montant égal à l'estimation de sa trésorerie disponible à cette date sous déduction de 1/6e des produits de cession prévus par le budget de l'année en cours.
Le même avenant a instauré un système de garantie de l'EPFR au CDR afin de faciliter l'obtention de financements externes par le CDR, dans la limite de 10 milliards de francs français. Le montant des tirages additionnels au titre du crédit de l'EPFR auxquels peut procéder le CDR à partir du 1er janvier 1998 et à concurrence d'un montant total de 10 milliards de francs français est réduit du montant des garanties existant à la date de chaque tirage. Ces modifications reflètent les besoins accrus de trésorerie du CDR qui ont contribué aux retards des remboursements du prêt participatif et, par voie de conséquence, du prêt du CL à l'EPFR.
Le 16 décembre 1997, les autorités françaises ont informé la Commission de la réforme du fonctionnement et des structures de contrôle du CDR présentée devant la Commission des finances de l'Assemblée Nationale par le Ministre Strauss-Kahn. Selon les autorités françaises, cette réforme était nécessaire pour remédier aux défauts du dispositif précédent, notamment:
- un objectif exclusivement liquidatif et un calendrier impératif;
- un manque de responsabilisation du CDR;
- une multiplication des instances et des procédures de contrôle;
- des interférences politiques;
- des incertitudes sur le traitement judiciaire des dossiers.
La réforme est fondée sur trois principes: une gestion indépendante et responsable, un contrôle rigoureux et efficace et un État impartial et soucieux de justice. Dans la pratique, cela veut dire que:
- la gestion des actifs, dans le souci de les valoriser au mieux et d'optimiser le résultat financier pour l'État, ne sera plus exclusivement liquidative;
- le CDR sera seul responsable des processus de cession, dans le cadre d'une stratégie proposée chaque année, avec l'introduction d'un dispositif d'intéressement aux résultats;
- le contrôle interne sera renforcé avec la transformation du CDR en société à conseil de surveillance et directoire, l'intégration des fonctions du comité consultatif de contrôle dans le conseil de surveillance, la création d'une direction des risques et une simplification du dispositif comptable interne et des structures sociales intermédiaires;
- l'EPFR exercera vis-à-vis du CDR les prérogatives de l'État actionnaire, avec mission de contrôle pour laquelle il pourra éventuellement faire appel à des experts extérieurs;
- les interférences politiques sont bannies et la justice sera systématiquement saisie et ses moyens seront renforcés à cette fin.
La Commission soutient le principe d'une gestion soucieuse de la défense des intérêts patrimoniaux de l'État, qui doit avoir pour effet de minimiser les aides consenties par l'État au CL par l'intermédiaire de la défaisance. La Commission note que les opérations du CDR au cours des exercices 1996 et 1997 se sont déjà éloignées d'une optique liquidative et qu'en particulier le CDR a procédé à des abandons de créances ou à des recapitalisations, ainsi qu'accordé des garanties nouvelles à ses filiales ou à leurs repreneurs, dans des conditions susceptibles d'inclure l'octroi d'aides d'État aux bénéficiaires de ces opérations. La Commission souligne que l'abandon de cette logique liquidative rend plus improbable le respect du calendrier (indicatif) initial qui prévoyait un objectif de cession de 80 % des actifs cantonnés au terme de 5 ans (c'est-à-dire en l'an 2000). Les avantages que les autorités déclarent retirer d'une telle gestion non liquidative doivent être évalués au regard de l'augmentation des coûts de portage liée à la prolongation du cantonnement d'un certain nombre d'actifs. Les autorités n'ont pas apporté d'éléments justificatifs sur ce point, qui démontreraient qu'elles minimisent ainsi les aides.
La Commission rappelle que les ressources du CDR sont des ressources d'État au sens de l'article 92 du traité, non seulement parce que le CDR est la filiale à 100 % d'une entreprise publique, mais aussi parce qu'il est financé par un prêt participatif garanti par l'État et que ses pertes sont à la charge de l'État. La Commission note que ces opérations ne bénéficient d'aucune dérogation les exemptant des obligations découlant des articles 92 et 93 du traité, et en particulier que les autorités françaises et le CDR ne sauraient être exemptés de ces obligations en vertu de la décision 95/547/CE ni de la présente décision. Il convient en particulier de noter que les opérations du CDR à l'égard de ses filiales ne sont réputées inclure aucun élément d'aide que si elles se conforment au principe dit de «l'investisseur privé en économie de marché» et que toute injection de fonds (ou abandon de créances) est conforme à ce principe. La Commission considère, dans sa communication aux États membres (9) relative aux principes à appliquer pour déterminer si une intervention publique est à considérer comme une aide, que des injections en capital au sein d'entreprises publiques contiennent des éléments d'aides d'État si, dans des circonstances analogues, un investisseur privé n'aurait pas, compte tenu de la rémunération attendue de l'apport de fonds, procédé à l'injection de capital en question. Dans un courrier du 16 octobre 1997 adressé au Ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, le Commissaire Karel Van Miert a rappelé que, les opérations du CDR comportant une recapitalisation de ses actifs, une vente à prix négatif ou un effacement de dettes étaient susceptibles d'inclure des aides et devraient être notifiés à la Commission. De même, les cessions des actifs du CDR ne respectant pas des procédures d'appels d'offres ouverts et transparents doivent également être notifiées à la Commission. Seules les opérations indiscutablement en deçà du seuil de minimes d'aide de 100 000 écus sont exemptées de cette obligation.
Les autres volets de la mise en oeuvre du plan de restructuration présenté à la Commission en 1995 sont examinés ci-après.

b) La réduction de la présence commerciale de la banque hors de France
Conformément aux engagements pris par la France dans la lettre de M. le Ministre Madelin du 18 juillet 1995, la décision 95/547/CE a demandé la réduction d'au moins 35 % de la présence commerciale du CL à l'étranger, y compris du réseau bancaire européen, d'ici fin 1998. Cette lettre indique que la réduction devra être appréciée en termes de bilan, et que la réduction à l'international selon le pourcentage ci-dessus représente une réduction de 50 % du réseau en Europe. On rappelle que la contribution des actifs internationaux au total de l'actif de la banque à la fin de 1994 se chiffre à 960 milliards de francs, alors que la contribution des actifs européens équivaut à 620 milliards de francs. Par conséquent, les 35 % des actifs internationaux correspondent à 336 milliards de francs, dont 310 milliards de francs français en Europe correspondant à 50 % des actifs européens du CL (hors de France).
Au 31 octobre 1997, le CL avait cédé des actifs pour une valeur de bilan au 1er janvier 1995 de 171,2 milliards de francs français, soit 17,9 % des actifs internationaux. Cette réduction est le résultat de cessions pour 136,1 milliards de francs en Europe et 35,2 milliards dans le reste du monde. La réduction en Europe correspond à 22 % des activités européennes. Par conséquent le CL doit encore céder, avant le 31 décembre 1998, presque 174 milliards de francs d'actifs européens pour accomplir cette obligation.

c) Mise en place du prêt à l'EPFR et de l'obligation à coupon-zéro
Afin d'acheter les 135 milliards de francs d'actifs nets des passifs transférés du CL dans la structure de défaisance, le CDR a reçu un prêt participatif de 145 milliards de francs de la part de l'EPFR (dont 10 milliards ont été convertis en garantie de l'EPFR sur des emprunts du CDR auprès de tiers). L'EPFR, quant à lui, s'est financé auprès du CL à travers un emprunt (non participatif) à concurrence de 145 milliards de francs. Les deux prêts arrivent à maturité le 31 décembre 2014. Le taux d'intérêt annuel applicable au prêt du CL à l'EPFR a initialement été fixé à 7 % en 1995, puis à 85 % du taux de marché monétaire (TMM) à partir de 1996 (10). La plus grande partie de ce prêt (135 milliards de francs) ayant permis le financement du transfert des actifs, le solde (10 milliards de francs) aurait dû être utilisé par l'EPFR afin d'acheter des obligations coupon-zéro pour le même montant, ce qui aurait dû lui permettre de dégager un produit de 35 milliards en valeur nominale en 2014, estimé par la Commission dans sa décision 95/547/CE à environ 8 milliards de francs en valeur actualisée.
Plusieurs modifications sont intervenues dans ce schéma. Le prêt du CL à l'EPFR a été mis en place, mais seulement la première partie portant sur 135 milliards de francs, ce qui n'a pas permis à l'EPFR la mise en place de l'obligation coupon-zéro. Puisque les revenus prévus pour l'EPFR du coupon-zéro avaient été calculés par la Commission en déduction des aides brutes au CL, le non-octroi par le CL de 10 milliards de francs de crédit à l'EPFR et la non-mise en place consécutive de l'obligation coupon-zéro constituent un coût supplémentaire pour l'État et une aide supplémentaire au CL, par rapport à celle qui avait été autorisée en 1995, pour un montant égal à la déduction d'environ 8 milliards de francs calculée en 1995. Une partie de cette aide, estimée à 400 millions de francs, afférente à la non-mise en place de l'obligation en 1995-96, a toutefois fait l'objet d'une approbation par la Commission lors de sa décision de septembre 1996 concernant les aides d'urgence en faveur du CL.
La même décision porte approbation d'autres aides d'urgence pour environ 3,5 milliards de francs, qui dérivaient de la modification par rehaussement du taux d'intérêt attaché au prêt du CL à l'EPFR pour les années 1995 (a posteriori) et 1996. Par ailleurs, la Commission avait décidé l'ouverture de la procédure sur l'extension d'une telle modification sur les années à venir.
Des avenants au protocole d'accord de 1995 entre l'État et le CL sont intervenus après sa signature, afin de modifier d'autres clauses approuvées par la Commission. Ainsi, en ce qui concerne le mécanisme de financement de la défaisance, le non-tirage de 10 milliards de francs par l'EPFR auprès du CL n'a pas donné lieu à une réduction du même montant du prêt participatif de l'EPFR au CDR, mais à la transformation de cette possibilité de tirage supplémentaire par le CDR en une garantie du même montant pour lui permettre d'emprunter directement à l'extérieur.
En outre, bien que l'état d'avancement des cessions du CDR soit en ligne avec l'objectif initial de cession de 80 % des actifs cantonnés en 5 ans et les 50 % en trois ans, la remontée des produits de cession à l'EPFR et donc le remboursement du prêt de CL ont été beaucoup plus lents et limités qu'initialement prévu, du fait que le CDR a conservé l'essentiel de ces produits de cession pour financer ses coûts d'exploitation, les coûts de portage de ses actifs (notamment le remboursement des passifs tiers) et soutenir sous diverses formes (par voie de recapitalisations, avances, abandons de créances) certains actifs cantonnés.
Le retard des remboursements ainsi que l'évolution inattendue des taux d'intérêt sont venus peser sur les comptes du CL. En effet, les actifs transférés au CDR étaient en partie financés par des passifs à long terme non transférés à la défaisance et contractés par la banque dans sa phase d'expansion (1988-93) à des taux supérieurs au rendement du prêt EPFR après 1995, qui est de 85 % du TMM. Cela aurait dû comporter, dès 1996, des charges de portage pour le CL (projetées à l'époque à 2,1 milliards de francs en 1997, 1,8 milliard en 1998 et 1,4 milliard en 1999). Dans les intentions des autorités françaises, ceci constituait une contribution du CL aux coûts du mécanisme, et donc à sa propre restructuration. Les projections du produit net bancaire de la banque laissaient en 1995 prévoir que le CL serait en mesure de supporter pleinement ces coûts. Dans la réalité, le retard des remboursements du prêt à l'EPFR ainsi que l'évolution inattendue des taux d'intérêt de marché ont augmenté ces coûts. Toutefois, cette augmentation n'aurait pas nécessité d'aides d'urgence si le CL avait respecté ses projections de PNB. C'est donc ce dernier élément, à savoir la chute du PNB réalisé par rapport aux prévisions, qui est à l'origine des aides d'urgence. Dans la décision de 1996, la Commission avait en effet évalué, sur la base des données transmises par les autorités françaises, que l'effet de taux aurait un surcoût pour le CL de seulement 1 milliard de francs sur les trois ans de la période 1996-98 (11).

d) La clause de retour à meilleure fortune
Les termes de la clause de retour à meilleure fortune ont été correctement appliqués depuis la décision 95/547/CE. Cependant, le CL n'a versé au titre de cette clause que 6 millions de francs en 1995 et 107 millions de francs en 1996, soit des montants bien en deçà des 339 et 505 millions initialement prévus pour ces deux années, en raison de la performance de la banque, moins bonne qu'initialement projeté. Le nouveau plan présenté en juillet 1997, sur la base d'une «neutralisation» complète du prêt EPFR et des autres hypothèses sur les cessions d'actifs, présente une amélioration des résultats de la banque à partir de l'an 2000 par rapport au plan de 1995 et, par conséquent, des paiements au titre de la clause si celle-ci est maintenue.
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Une telle amélioration devrait compenser, sous réserve du maintien de la clause, le manque des versements initiaux. Toutefois, le plan soumis à la Commission en juillet 1997 (cf. ci-après) laisse planer un doute sur le maintien de la clause ou son remplacement par une solution alternative.

e) Le versement des dividendes à l'État actionnaire
Comme pour la clause, le fait que le CL ait enregistré des résultats inférieurs aux prévisions a eu pour effet la diminution des versements des dividendes du CL à l'État actionnaire et de la valeur des actions détenues par ce dernier, par rapport aux estimations initialement retenues. La Commission rappelle qu'elle avait estimé dans la décision 95/547/CE que la valeur de la part des résultats du CL pour l'État revenait à 10 milliards de francs en valeur actualisée. Le tableau suivant retrace les projections initiales et les nouvelles estimations des résultats nets du CL après clause.
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f) L'utilisation des produits de cession à des fins de restructuration
Le CL a indiqué qu'il avait utilisé 14,8 milliards de francs provenant des produits de cessions réalisées pour financer l'ensemble des mesures de restructuration pour un montant global de 7,5 milliards de francs, le reste ayant été investi en trésorerie ou pour refinancer la dette. On notera toutefois que le CL a également investi près de 254 millions de francs à l'étranger. Ces investissements ont été de petite taille et ne représentent que 1,7 % des produits de cession réalisés depuis le début de 1995.

g) La suppression des déficits fiscaux reportables afférents aux aides
En vertu de l'application des principes de l'encadrement des aides à la restructuration, la Commission avait imposé à l'État français de supprimer la possibilité pour le CL de bénéficier du déficit fiscal reportable lié à ses pertes pour la partie couverte par l'augmentation de capital de 4,9 milliards de francs réalisée en 1994. La Commission avait également demandé aux autorités françaises d'éliminer la possibilité de report des autres déficits fiscaux pour le CL au moment de la privatisation, si la clause de retour à meilleure fortune était cédée.
S'agissant de la première condition, le CL a indiqué qu'il considérait qu'elle ne concerne que les pertes de 1994 correspondant à la part de l'augmentation de capital financée par l'État et la Caisse des Dépôts et Consignations (3,75 milliards de francs). La Commission remarque que dans sa décision 95/547/CE, elle a estimé que l'ensemble de l'intervention des actionnaires du CL, y compris le groupe Thomson, au sein duquel l'État détenait une participation majoritaire, et dont les ressources sont pour cette raison des ressources d'État au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CE, devait être considéré comme une aide d'État. Par conséquent, elle confirme que cette condition s'applique au total du montant de 4,9 milliards de francs de l'augmentation de capital. Par ailleurs, la Commission confirme la nécessité du respect de la deuxième condition.

5. PRÉSENTATION DES COMMENTAIRES DES TIERS

5.1 Commentaires des tiers
Dans le cadre de la présente procédure, la Commission a reçu les commentaires de la Société Générale (ci-après SG) et des autorités britanniques par lettres du 21 janvier et du 23 janvier 1997 respectivement, qui ont été transmises aux autorités françaises et auxquelles celles-ci ont répondu par courriers du 10 et du 27 février 1997. D'autres commentaires écrits ont été reçus de la part de la «British Bankers' Association» le 19 mai 1997, la «Nederlandse Vereniging van Banken» le 2 juillet 1997 et le «Bundesverband deutscher Banken» le 26 août 1997. Ces commentaires toutefois ne peuvent être pris en compte dans le cadre de la présente procédure, n'ayant été transmis qu'après l'expiration des délais de réponse prévus dans la communication de la Commission publiée dans le Journal officiel des Communautés européennes.
La SG a décidé de déférer au Tribunal de première instance des Communautés européennes la décision de la Commission de septembre 1996 d'approbation des aides d'urgence en faveur du CL, comme elle l'avait déjà fait pour la décision 95/547/CE.
S'agissant des aides supplémentaires à la restructuration qui font l'objet de la présente procédure, la SG estime que l'aide n'est pas destinée à faciliter le développement d'une activité au sens de l'article 92 paragraphe 3 point c) du traité, en reconnaissant toutefois que la seule perspective de la crise que provoquerait une défaillance du CL justifie et même impose à l'État, par sa double responsabilité d'actionnaire et de tuteur veillant à la sécurité de la place, de prendre des mesures pour rassurer les déposants et les créanciers interbancaires de ce grand établissement.
La SG considère que la Commission doit imposer aux autorités françaises l'examen de solutions alternatives de liquidation contrôlée et de vente par blocs. Un tel examen serait d'autant plus justifié compte tenu de la récidive de l'aide. Tout en maintenant à titre principal que la seule issue conforme au traité consiste dans les solutions alternatives ci-dessus évoquées, la SG estime subsidiairement que la Commission devrait compenser les dommages causés aux concurrents en imposant non seulement la cession de toutes les activités étrangères du CL (y compris celles des États-Unis d'Amérique et d'Asie du Sud-Est, qui sont les plus rentables), mais également celle d'activités menées en France telles que la gestion mobilière (collective ou individuelle) pour compte de tiers, les filiales de crédit à la consommation et d'assurance vie ou encore certaines fractions du réseau de détail lui-même. Dans le même sens, la SG relève que l'appui apporté par les autorités françaises et la Commission aux réductions d'effectifs envisagées par le CL constituerait pour cet établissement non pas une contrepartie contraignante à l'octroi des aides financières, mais bien plutôt une forme supplémentaire d'aide, dans la mesure où cet appui serait refusé aux banques privées, ainsi empêchées de porter leur taux de rentabilité au niveau de leurs concurrents européens.
Enfin, la SG attire l'attention de la Commission sur les conditions de la future privatisation du CL, notamment sur le plan de renforcement du ratio de solvabilité de la banque jusqu'à près de 6 % en «tier one» (c'est-à-dire le ratio «dur» des fonds propres au sens restrictif du terme) avant cette privatisation, ce qui constituerait une très grave distorsion de concurrence, compte tenu des effets en termes de notation par les agences de rating et par comparaison avec la privatisation de la SG réalisée en 1987 avec un ratio de solvabilité de 3 % seulement qu'elle n'a pu faire augmenter à 6 % que 10 ans plus tard.
Les autorités britanniques appuient l'investigation approfondie de la Commission et notent que la répétition de l'aide peut générer des attentes d'aides futures par le «management» de la banque, ce qui peut avoir un effet distorsif sur la concurrence. Elles soulignent la nécessité de contreparties sérieuses et substantielles de la part du CL qui touchent toutes les activités de la banque qui ne sont pas strictement nécessaires à la viabilité de l'activité de base. Pour cette raison, elles suggèrent de diluer les aides futures dans le temps et de soumettre leur approbation à la réalisation des mesures de restructuration et de contreparties.

5.2 Commentaires des autorités françaises et du Crédit Lyonnais
Dans un courrier du 6 décembre 1996, le Président du CL a informé la Commission qu'il avait saisi le gouvernement de la situation prévisible pour l'exercice 1996, très tôt dans le courant de la même année et à nouveau en juillet en mentionnant la nécessité d'une décision rapide. Il a aussi contesté la date de référence de la réduction de la présence commerciale du CL hors de France en affirmant que la lettre du Ministre Madelin du 18 juillet 1995, communiquée à la banque seulement plusieurs mois après son envoi à la Commission, ne définit en rien la date de référence à retenir et que la restructuration de la banque a été entreprise à partir de la fin de 1993.
Les autorités françaises ont commenté la lettre de la SG que leur a communiquée la Commission en soulignant qu'elles ont exercé pleinement la double responsabilité d'actionnaire et de tuteur que la SG leur a reconnue lors de la notification des aides d'urgence. Elles ont contesté l'analyse de la SG et des autorités britanniques quant au caractère distorsif des aides d'urgence et à la nécessité de contreparties, sur la base du fait que le CL aurait été sévèrement bridé dans le cadre du plan de 1995 et qu'un recentrage sur un coeur d'activité restreint serait prévu dans le cadre du nouveau plan de restructuration. Elles ont toutefois revendiqué la nécessité des aides à la restructuration, notamment sous forme de la «neutralisation» du prêt CL-EPFR mais également d'une éventuelle recapitalisation de la banque, dont le montant serait nécessaire pour assurer la viabilité de la banque et strictement proportionné aux besoins financiers du CL dans la perspective de sa privatisation rapide. Elles ont également affirmé que, dans le cadre de l'examen des modalités du soutien financier à la banque, elles prendront en compte la nécessité de rythmer les apports de l'État en fonction du respect par la banque des objectifs prévus par son plan stratégique.

5.3 Observations de la Commission sur les commentaires soumis
Les commentaires des tiers sont examinés dans les sections suivantes de la présente décision.
Les commentaires du CL appellent les observations suivantes de la part de la Commission. S'agissant de la date à laquelle le CL a informé les autorités françaises de la dégradation de la situation financière de la banque et de la nécessité d'une intervention de soutien de l'État, la Commission ne peut que déplorer le comportement des autorités françaises qui lui ont masqué la situation véritable de la banque alors qu'elles étaient tenues de remettre à la Commission des rapports réguliers sur l'état d'avancement du plan approuvé par cette dernière en juillet 1995. Même si cela n'enlève rien à la nécessité des aides approuvées par la Commission en septembre 1996, compte tenu en particulier du fait que la Commission ne pouvait complètement exclure le risque de conséquences dramatiques pour le CL en l'absence des aides, il est clair que les autorités françaises auraient dû notifier les aides en question bien à l'avance.
S'agissant de la date de référence pour apprécier la réduction de la présence commerciale du CL à l'étranger, la Commission ne peut pas retenir du point de vue juridique la date du 1er janvier 1994 suggérée par le Crédit Lyonnais. Il convient de remarquer que les autorités françaises n'avaient pas notifié à la Commission en 1994 la première intervention de l'État en faveur du CL et que le plan de restructuration a été présenté à la Commission, sur sa demande, seulement en 1995 et après qu'un nouveau plan d'aides eut été mis en place. Le fait que les termes de la lettre du Ministre Madelin du 18 juin 1996 n'aient été officiellement communiqués au CL qu'avec retard n'est pas non plus une raison opposable à la Commission. Il convient par ailleurs de rappeler que la base juridique la plus appropriée pour définir la date à laquelle cette obligation aura dû être accomplie est toujours la lettre du Ministre Madelin du 18 juillet 1995, dont les mots «d'ici fin 1998» sont sans équivoque.
Par conséquent, pour apprécier la réduction de la présence commerciale du CL à l'étranger, la Commission prend comme référence la contribution au 31 décembre 1994 des différentes zones géographiques au total de l'actif de la banque telle qu'elle figure dans le rapport annuel du Crédit Lyonnais, le bilan à la fin de 1994 représentant, dans ces conditions, la seule et la dernière base objective publique pouvant être prise en compte.

6. LE PLAN DE RESTRUCTURATION SOUMIS PAR LES AUTORITÉS FRANÇAISES EN JUILLET 1997

6.1 Principales caractéristiques du plan
Le plan soumis à la Commission en juillet 1997 a été établi dans la perspective d'une ouverture progressive du capital du Crédit Lyonnais, dont le principe avait déjà été arrêté par l'État lors du plan précédent approuvé par la Commission en 1995. Ce plan table sur un environnement macroéconomique caractérisé par une croissance moyenne du Produit Intérieur Brut en France de 2,3 %, et une inflation de l'ordre de 2 % par an. La stratégie suivie repose sur deux grands pôles d'activités: d'une part une banque de particuliers, de professionnels et de PME en France; d'autre part, dans les principales régions du monde, y compris la France et l'Europe, une banque «de gros» dédiée à une clientèle de grandes entreprises et d'institutionnels. Ces deux grands pôles continueront à s'appuyer sur les compétences du CL dans les activités de marché, d'ingénierie financière et de gestion d'actifs pour le compte de tiers, dont la banque prévoit le maintien.
Le plan est en outre construit autour des hypothèses suivantes:
- la «neutralisation» totale des coûts nets de portage du prêt du Crédit Lyonnais à l'EPFR;
- la cession d'une partie substantielle des opérations de la banque de détail en Europe;
- le réinvestissement en trésorerie des produits de cession.
La stratégie présentée par les autorités françaises présentait un caractère relativement conservateur en termes de croissance, et visait avant tout à restaurer la rentabilité du Crédit Lyonnais. Le Produit net bancaire (PNB) devait connaître globalement une stagnation nominale par rapport au niveau de 1996 au niveau consolidé (compte tenu des cessions) et les frais généraux baisser de près de 4 milliards de francs, de sorte que le coefficient d'exploitation de la banque (ratio des frais généraux sur le PNB) passerait de 79 % en 1996 à environ 70 % en l'an 2000, soit un niveau proche de celui des principaux concurrents français du Crédit Lyonnais, la Société Générale et la BNP. En réalité, ce plan prévoyait une restauration du produit net bancaire qui, après une forte baisse anticipée en 1997 (- 7 % en valeur, soit près de - 9 % en volume), devait être stabilisé en 1998 et connaître une reprise en 1998 et 1999. Cette reprise devait être sensible dès 1998 sur l'activité de la banque dans l'hexagone mais, compte tenu des cessions prévues sur le réseau européen, être différée en fin de période à l'échelle de l'ensemble du groupe.
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Une amélioration de la maîtrise des risques se traduisant par une diminution du taux (12) de provisionnement bancaire de 0,78 % à 0,55 % devrait sur la période apporter une contribution significative à l'évolution des résultats. Mais surtout, la banque prévoyait deux variables principales d'action permettant la restauration de ses marges et de sa rentabilité:

i) une réduction très significative des charges d'exploitation sur le réseau en France
Pour une banque à vocation universelle comme le Crédit Lyonnais, le fait de disposer d'un marché national de référence est un atout important. Le marché national de la banque doit assurer un volume d'affaires relativement stable. Il est vital pour la banque de se situer parmi les acteurs les plus performants sur le marché français afin d'être en mesure de dégager des marges qui confortent le rôle d'appui et de base stratégique de l'hexagone. De sorte qu'à l'issue du plan, l'anomalie consistant en l'incapacité de la banque de dégager des marges satisfaisantes en France serait corrigée: le Crédit Lyonnais devrait à nouveau dégager des marges importantes sur son marché national, notamment dans la banque de détail, et en retirer l'essentiel de son cash flow.
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Le plan prévoit plusieurs ensembles de mesures destinées à rétablir la situation du CL sur le marché français. Un projet de «reengineering» d'ensemble des processus de décision (projets intitulés «défi») doit permettre une restructuration très profonde de l'activité commerciale de la banque et de la chaîne de traitement de l'information. De nouveaux outils d'appréciation du risque seront mis en place pour l'activité de crédit aux PME. Un accord avec le Cetelem, spécialiste du crédit à la consommation, doit permettre au CL de développer sa position sur le segment de marché du crédit à la consommation, jusqu'à présent dominé par les établissements spécialisés. Enfin, le CL lancera une activité de banque par téléphone facilitant un suivi rapproché de la clientèle des particuliers.
Le plan soumis par les autorités françaises prévoit un important volet social. Les réductions d'effectifs, dans le cadre du troisième plan social engagé dès la mi-1996, et devant s'échelonner jusque fin 1998 devaient être de 5000 personnes, principalement par réduction d'effectifs au sein du réseau métropolitain de la banque. Ces réductions d'effectifs portent sur le réseau (3 140 personnes) et sur les unités fonctionnelles de la banque (1 860 personnes). Elles n'étaient pas censées, selon le plan soumis à la Commission, réduire significativement la capacité commerciale du Crédit Lyonnais, mais répondaient principalement à l'objectif de réduction des coûts et d'amélioration du coefficient d'exploitation.
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Au-delà de 1998, des réductions supplémentaires sont encore prévues en 1999 et 2000, portant sur [ . . . ] personnes, dont [ . . . ] au sein du réseau d'agences et [ . . . ] dans les unités fonctionnelles de la banque. Au total, par rapport à fin 1996, les effectifs du CL seraient réduits de [ . . . ] % en France (et [ . . . ] % au niveau consolidé, en tenant compte des cessions de filiales). Ces réductions d'effectifs autoriseraient des économies en frais de personnel de l'ordre de 9 % sur le réseau France pour la période du plan, contribuant ainsi significativement à la réduction des charges et à la restauration des marges du CL.
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Ce plan prévoit une rationalisation du réseau de points de ventes en France, se traduisant par 243 fermetures d'agences déficitaires en 1997 et 1998 (sur un total de 1954 agences pour particuliers en 1996), et une refonte du réseau des centres d'affaires et des points de vente pour professionnels (cf. tableau 12 ci-après). Au total, sur la période 1996-2000, le nombre de guichets de la maison mère en France passerait de 2100 à 1750, soit une réduction de près de 17 %. Sur la base des informations soumises par le CL à la banque conseil de la Commission, il apparaissait toutefois que le nombre total des points de vente du CL sur son réseau en France devait, selon la banque, passer de 2298 fin 1996 à 2146 à la fin de l'année 2000, soit seulement une diminution de 6,6 %. Cette différence entre les données présentées en juillet à la Commission et les données communiquées par le CL apparaît due au champ couvert par ces engagements qui, dans la présentation du CL, comprend l'ensemble des points de vente du CL en France, maison mère et filiales confondues.
L'ensemble de ces mesures devrait permettre le redressement des marges du réseau français. L'objectif de la banque est de porter le résultat net de la DCAF (direction centrale des activités France) de 1 à 4,3 milliards de francs en l'an 2000. Si ce pari est réussi, le CL aura fait mieux que rétablir la contribution du réseau en France au résultat, proportionnellement au chiffre d'affaires qu'il dégage, faisant ainsi de l'activité en France l'une des plus profitables du groupe.
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Une analyse de sensibilité établie par le CL a montré que, dans l'hypothèse où les crédits à la consommation croîtraient à un rythme deux fois moins rapide que prévu, où la contribution des nouveaux projets au financement du PNB de la banque (pour la DCAF) serait deux fois moins importante que prévu, et où la diminution du taux de provisionnement serait moins forte que prévu, la contribution du réseau France au résultat serait divisée par deux, mais resterait positive.

ii) la «neutralisation» du prêt à l'EPFR
Parmi les différents volets du plan de sauvetage du CL en 1995, il avait été prévu que le CL financerait le mécanisme de la défaisance, par un prêt de 145 milliards de francs accordé à l'EPFR à un taux privilégié, inférieur au taux de marché. De sorte que l'État, à qui revient la charge finale de l'apurement des pertes du CDR par l'intermédiaire de l'EPFR, pourrait grâce à ce prêt à taux privilégié alléger le coût de financement du portage des actifs du CL transférés au CDR.
Le schéma retenu prévoyait, ainsi qu'indiqué précédemment, un taux de service du prêt du CL à l'EPFR de 7 % en 1995, ramené à 85 % du TMM (le taux à court terme du marché monétaire) à partir de 1996. L'État y trouvait un avantage: pour l'EPFR, cet avantage peut être estimé annuellement sur la base du différentiel entre le taux à court terme du prêt du CL et le taux à long terme auquel il devrait en l'absence de ce prêt se refinancer, et est actuellement annuellement d'environ 2,5 à 3 % du taux sur l'encours du prêt. En 1997, cet avantage de taux du mécanisme institué par l'État avait de la sorte, pour l'EPFR, et compte tenu de l'encours du prêt, une valeur d'environ 2,8 à 3,3 milliards de francs. Pour le CL, au contraire, ce prêt, partiellement adossé à des passifs de refinancement contractés à un taux supérieur, et dont l'origine est antérieure à la défaisance de 1995, est pénalisant et a une contribution négative au résultat d'exploitation de la banque, à hauteur du différentiel entre les taux créditeurs sur son passif de refinancement du prêt et le taux débiteur sur le prêt. Comme une partie importante des passifs de refinancement du CL sont des passifs à taux fixes, toute baisse des taux se traduit, compte tenu de la définition du taux du prêt à l'EPFR, par un accroissement de la charge nette de portage du prêt.
Selon le CL, la banque a mis en place de septembre 1995 à fin 1996 des outils de couverture partielle du risque de taux qu'elle encourait compte tenu de la structure de ses passifs de refinancement du prêt. Ces outils dérivés de couverture, de type «swaps», auraient permis en 1995-1996 de limiter les coûts de portage d'environ 670 millions de francs (soit une couverture très partielle sur le risque de taux pris, comme le démontre le montant de la neutralisation par la suite encore nécessaire), dont elle a tenu compte dans le calcul du coût de taux de l'aide d'urgence (afférent au prêt à l'EPFR) pour 1996, soit 5,84 %. Au vu de ces éléments, et compte tenu de la couverture très partielle de taux mise en place en 1995, il apparaît toutefois que le CL a anticipé une évolution différente des taux d'intérêt lui permettant de supporter une charge inférieure. De sorte que l'aggravation des pertes supportées par la banque sur le prêt accordé à la défaisance lui est en partie imputable, à concurrence du risque de taux qu'elle a pris. Les autorités françaises ont fait réaliser fin 1997 par un cabinet indépendant un audit des opérations liées au prêt à l'EPFR dont elles n'ont pas communiqué les résultats à la Commission.
À la connaissance de la Commission, la banque n'a pas depuis fin 1996 eu recours à des méthodes de couverture de risque de taux sur le prêt à l'EPFR, au demeurant largement caduques, une baisse des taux de plus de deux points étant entre-temps intervenue depuis la décision 95/547/CE.
En septembre 1996, lors de la notification des aides d'urgence, les autorités françaises ont demandé la «neutralisation» complète des effets du prêt du CL à l'EPFR jusqu'en 2014 en rehaussant le taux d'intérêt prévu sur le prêt de 85 % du TMM (taux du marché monétaire de court terme) à un taux correspondant au coût de refinancement du CL (il a été établi par la suite dans le cadre des travaux de la banque conseil de la Commission que ce taux évoluerait entre un niveau de TMM + 2,5 en début de période et TMM + 0,2 en fin de période). Cette demande a été confirmée dans le plan présenté à la Commission en juillet 1997. Cette mesure, selon les autorités françaises, devait permettre de tirer un trait sur le passé en cessant de pénaliser le CL pour les conséquences financières de la stratégie d'expansion l'ayant conduit à la crise de 1993-95.
Il s'agit en réalité selon la Commission d'une «sur-neutralisation» car le rehaussement proposé du taux va au-delà du taux du marché, et vient aussi compenser les erreurs initiales de couverture des risques de taux du prêt du CL à l'EPFR. Sur la base d'un scénario de remboursement du prêt et de données de «spread de taux» (l'écart entre le taux à l'actif sur le prêt à l'EPFR et la moyenne pondérée des taux sur les passifs de refinancement) soumis par le CL à la banque conseil de la Commission, cette composante de l'aide peut être estimée à 20,2 milliards de francs sur la période 1997-2014 (en actualisant les flux futurs avec le taux du marché monétaire sur lequel les spreads de taux ont été définis dans ce scénario, soit 3,19 %). Il convient de noter que la banque et les autorités françaises, sur la base d'un taux d'actualisation de long terme, parviennent à un chiffrage différent de l'aide actualisée afférente à la neutralisation, qu'elles estiment à un montant d'environ 17,2 milliards de francs (pour la période 1997-2014), selon la même méthode, hormis le taux d'actualisation retenu, et qui a été validée par la banque conseil de la Commission. Il convient également de souligner que si les hypothèses conventionnelles sous-jacentes à un tel calcul, notamment l'échéancier de remboursement du prêt du CL à l'EPFR, étaient substantiellement modifiées, alors le calcul de l'aide afférente à la neutralisation serait caduc et devrait être réexaminé sur des bases nouvelles. La Commission, à la date de la présente décision, n'a pas connaissance de changements justifiant une telle réestimation et constate que les autorités françaises ont maintenu l'estimation qu'elles ont réalisée sur la base d'hypothèses sous-jacentes similaires.
À la demande de la banque conseil de la Commission, le CL a réalisé une étude de la sensibilité de la valeur de la «neutralisation» du prêt CL-EPFR à une hausse des taux d'intérêt. Toutes choses égales par ailleurs, cette étude montre qu'en cas de remontée de 1 % des taux d'intérêt à court terme (accompagnée d'une hausse des taux à long terme de 0,5 %), le coût de la neutralisation du prêt serait différent de 500 millions de francs par rapport au montant de 17,2 milliards de francs auquel aboutit la banque. La Commission, sur cette base, et compte tenu de l'augmentation d'environ 0,3 % du TMM intervenue entre la mi-1997 et la présente décision, conclut que les conditions conventionnelles sur la base desquelles elle a estimé à 20,2 milliards de francs le coût de la «neutralisation» du prêt fin 1997 sont encore vérifiées.
Dans leur courrier en date du 31 mars 1998, les autorités françaises proposent de modifier le mécanisme sous forme d'une «neutralisation» totale du prêt jusqu'en l'an 2000 (à l'instar de leur notification précédente) et, à partir de 2001 et jusqu'en 2014, d'une «neutralisation» à un taux de court terme (qu'elles ne spécifient pas mais qui pourrait être le PIBOR, et qui est selon les conditions du marché compris entre TMM et TMM+0,2 %). La Commission a estimé les effets économiques de la nouvelle proposition des autorités françaises. La différence est faible, et porte (en valeur actualisée au 31.12.1997) sur 2,3 milliards de francs, l'aide passant de 20,2 à 17,9 milliards de francs. Cette différence minime s'explique par le fait que le prêt à l'EPFR a un coût de portage pour le CL, pour la partie dépassant le TMM, qui est principalement afférent à la période 1997-2001.
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À l'appui de leur proposition, les autorités françaises ont considéré qu'en l'absence de la neutralisation des coûts de portage du prêt à l'EPFR, la viabilité de la banque pourrait être remise en cause, en raison des réactions potentielles de sa clientèle, de ses contreparties, et des agences de notation qui pourraient dégrader sa notation. Les autorités françaises ont en outre justifié auprès de la Commission cette mesure en considérant qu'elle devait faciliter l'ouverture du capital de la banque.
Le plan soumis par les autorités françaises à la Commission en juillet 1997 envisageait une autre option possible: au lieu d'une neutralisation annuelle des coûts de portage du prêt à l'EPFR, le CL serait remboursé de manière anticipée et recevrait une soulte représentant la différence actualisée entre le coût des passifs affectés au refinancement de l'EPFR (13) jusqu'à leur extinction et le coût des refinancements de passifs de court terme. Toutefois, dans les discussions ultérieures entre la Commission et les autorités françaises, celles-ci n'ont pas fait état d'une intention de suivre cette option. Il convient à ce sujet de noter que l'État trouvait dans le mécanisme institué un avantage relatif, ainsi qu'il a été présenté ci-dessus, puisqu'il finançait sur toute la période du prêt (potentiellement jusqu'en 2014) des emplois à long terme (le portage par l'EPFR du prêt participatif au CDR) par des ressources collectées à un taux inférieur, c'est-à-dire un taux de court terme. La solution de la neutralisation a l'avantage d'être moins onéreuse pour l'EPFR qu'un remboursement anticipé du prêt assorti d'un emprunt à long terme: compte tenu de la restructuration progressive des passifs du CL adossés au prêt, le taux du prêt après «neutralisation» devrait progressivement baisser jusqu'à rejoindre le PIBOR à partir de l'année 2004 ou 2005. Le taux de référence du mécanisme du prêt restant le TMM, l'État pourrait de la sorte, bien qu'à des conditions moins avantageuses, continuer à assurer les coûts de portage de la défaisance à un taux proche du taux de court terme.

6.2 Mesures présentées par les autorités françaises en contrepartie des aides à la banque
Outre la restructuration du réseau France prévoyant des fermetures d'agences présentées par les autorités françaises comme des contreparties aux aides reçues par le CL, le plan de juillet 1997 prévoit une cession de la majorité des opérations dans la banque de détail en Europe, y compris de la principale filiale du CL, la Bank für Gemeinwirtschaft (Allemagne, ci-après BfG, détenue à 50 % plus une action). D'importantes provisions (4,4 milliards de francs) sont prévues par le plan sur les exercices de 1998 et 1999 en vue d'anticiper l'impact négatif de la vente, telle que prévue en 1997, avec perte de la BfG à l'horizon 2000. Le plan prévoit toutefois que la date de cession de la BfG peut être modifiée. Les autorités françaises ont également proposé que la contrainte de calendrier imposée en 1995 sur les contreparties au premier plan d'aides (c'est-à-dire la cession de 50 % des actifs de la banque en Europe avant le 31 décembre 1998) soit desserrée pour éviter que le CL ne soit amené à faire appel à son actionnaire pour financer la destruction de fonds propres liée aux cessions. Les désinvestissements stratégiques seraient étalés jusqu'en l'an 2000, les cessions étant décidées lorsque les conditions financières le permettraient.
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Les autorités françaises ont considéré qu'en décidant de céder ses filiales avant la mise en place de l'euro, le CL se privait des possibilités offertes par un marché bancaire des particuliers mieux intégré en Europe, et qu'il s'agissait par conséquent d'un effort substantiel libérant des parts de marché pour ses concurrents en Europe.
Hors de France, la stratégie de la banque reposerait, à l'issue de son désengagement de la banque de détail en Europe, sur un recentrage sur les métiers de crédit aux grandes entreprises, financements structurés et financements de projets, marchés de capitaux, gestion d'actifs et de flux, gestion privée et négoce international. Ces métiers seraient désormais organisés en «lignes mondiales» afin de mieux accompagner les clients de la banque dans leurs opérations internationales. Ce recentrage traduirait l'abandon de la stratégie de banque «universelle» du CL hors de France.

7. ÉVALUATION DES AIDES SUPPLÉMENTAIRES PAR RAPPORT À CELLES APPROUVÉES PAR LA COMMISSION EN 1995

7.1 Les incertitudes sur le montant total des aides
La Commission ayant plafonné à 45 milliards de francs le montant des aides approuvées en 1995, il est nécessaire d'évaluer le montant des aides supplémentaires avant d'examiner leur compatibilité avec le traité. On rappellera que, outre les 45 milliards de francs d'aides autorisées en 1995, la Commission a également autorisé environ 4 milliards de francs d'aides d'urgence en septembre 1996.
Il convient de rappeler que les éléments de coût pour l'État décomptés dans le total des aides au CL sont les suivants:
- la recapitalisation du CL de 1994 (soit 4,9 milliards de francs), à laquelle les autorités françaises avaient envisagé dans le plan soumis à la Commission en juillet 1997 d'ajouter éventuellement une seconde recapitalisation d'un montant non spécifié;
- les pertes actualisées du CDR prises en charge par l'EPFR sous forme d'abandons de créances (par voie d'appels en garantie) sur le prêt participatif de 145 milliards de francs accordé (dont 10 milliards de francs ont été convertis en garantie sur des emprunts du CDR auprès de tiers);
- les coûts actualisés de portage de l'emprunt de 135 milliards de francs de l'EPFR au CL; ces coûts pourraient augmenter si la «neutralisation» du prêt du CL est mise à exécution de 1997 à 2014, qui représente un coût actualisé d'environ 20 milliards de francs;
- les coûts actualisés de portage supplémentaires constatés si l'EPFR exerce son droit de tirage sur un crédit supplémentaire de 10 milliards de francs que le CL s'était engagé à lui accorder à partir du 1er janvier 1998;
- les coûts actualisés de portage supplémentaires que l'EPFR pourrait constater s'il doit, compte tenu de sa situation de trésorerie, avoir recours à des emprunts sur le marché en supplément de son emprunt auprès du CL.
L'ensemble des coûts de la défaisance doit être soldé par l'État sous forme de recapitalisations de l'EPFR par des allocations budgétaires dont l'échéancier et les montants ne sont pas connus à ce stade, et qui sont susceptibles de s'étaler sur toute la durée du prêt du CL à l'EPFR, c'est-à-dire jusqu'en 2014, ainsi que par les revenus de la clause de retour à meilleure fortune (14) et de la privatisation du CL.
À titre liminaire, et comme on pourra le constater sur le calcul des aides (cf. ci-dessous), il convient de remarquer que certaines des aides sous examen, en particulier la «neutralisation» du prêt du CL à l'EPFR pour 1995-96 (approuvée par la Commission en septembre 1996 dans les mesures d'urgence au Crédit Lyonnais) ainsi que la «neutralisation» du prêt projetée par les autorités françaises à partir de 1997, sont une partie intégrante des coûts de portage du prêt du CL à l'EPFR. La Commission identifie néanmoins la «neutralisation» du prêt comme une aide spécifique: elle est additionnelle par rapport au plan approuvé en 1995 et sa mise à exécution signifierait que le CL se verrait allégé d'un coût estimé en valeur actualisée à environ 20 milliards de francs, pour la période 1997 (inclus) à 2014. La «neutralisation» au sens où l'entendent les autorités françaises signifie que le CL se verrait déchargé des charges nettes afférentes au prêt à l'EPFR et que la valeur actualisée de la banque serait immédiatement augmentée, par cette correction, en proportion (15) du montant actualisé de cette «neutralisation». De sorte que la banque bénéficierait immédiatement des effets futurs de la neutralisation. Pour cette raison, la Commission considère que la valeur actualisée de la «neutralisation» sur toute la période 1997-2014 est immédiatement à prendre en compte, dans son intégralité, en tant qu'aide nouvelle à la banque. La Commission note que les autorités françaises, dans un courrier qu'elles lui ont adressé le 3 avril 1998, paraissaient suivre la même approche sur ce point, et incluent la valeur totale de la «neutralisation» dans leur estimation du montant des aides au CL.
L'évaluation du montant des aides au CL rencontre par ailleurs plusieurs difficultés liées aux spécificités du schéma de la défaisance mis en place par les autorités françaises, et à un certain nombre d'incertitudes entretenues par les autorités françaises dans le plan soumis à la Commission en juillet 1997.
Le montant des pertes qui sera in fine à la charge de la défaisance et donc de l'État est à ce stade inconnu. Ces pertes potentielles comportent une première composante, les pertes du CDR, estimées au 31 décembre 1996 à 100,2 milliards de francs. Il convient de souligner que ce chiffre de 100,2 milliards de francs, présenté le 1er juillet 1997 dans le rapport de l'EPFR au ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie et au Parlement français, est un chiffre non certifié par les commissaires aux comptes du CDR. Les autorités françaises, interrogées par les services de la Commission à ce sujet, ont indiqué qu'elles ne seraient pas, compte tenu de la spécificité de la défaisance, en mesure de produire des comptes du CDR certifiés. Seules les pertes déjà constatées par le CDR et imputées à l'EPFR par des appels en garantie sur le prêt participatif, soit environ 45 milliards de francs fin 1996, pouvaient début 1998, avant la clôture des comptes 1997 du CDR, être considérées comme certaines, en l'état de l'information disponible. Lors de réunions tenues début mai 1998, les autorités françaises ont fait savoir à la Commission qu'elles disposaient d'estimations des pertes supplémentaires du CDR en 1997 pour un montant supplémentaire de 3 milliards de francs, soit une perte totale de 48 milliards de francs fin 1997. Compte tenu de l'actif restant (environ 80 milliards de francs, 110 milliards de francs d'actifs ayant déjà été cédés ou liquidés), les autorités françaises concluent que la perte ne peut normalement dépasser 128 milliards de francs. La Commission convient qu'une partie du risque résiduel de l'EPFR sur le CDR (celui qui a trait à ses actifs) diminue avec l'avancement du programme de cession d'actifs, qui avaient atteint fin 1997 58 % des apports d'actifs bruts au CDR au 1er janvier 1995.
Les autorités françaises n'ont toutefois pas été en mesure de prendre d'engagements sur le montant maximal que pourraient atteindre les pertes du CDR. Le risque nominal supporté par l'EPFR, qui a accordé un prêt participatif de 145 milliards de francs au CDR (utilisé à hauteur de 123,5 milliards de francs par ce dernier, auxquels s'ajoutent dix milliards de francs pris sur l'enveloppe du prêt et transformés en garantie), n'a pas été plafonné par le Parlement et porte sur la totalité des pertes du CDR, quand bien même elles atteindraient, voire dépasseraient, le montant de 145 milliards de francs du prêt participatif.
Le risque supporté par l'EPFR sur le CDR dépasse son exposition sur les actifs initialement transférés à la défaisance, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, les investissements en capital dits de «sauvegarde» au sein des actifs cantonnés, sur le bien-fondé desquels la Commission ne se prononce pas à ce stade, augmentent l'exposition du CDR sur les actifs recapitalisés et, par voie de conséquence, l'exposition de l'EPFR sur le CDR et les risques de pertes de la défaisance (16). La Commission, malgré des demandes répétées aux autorités françaises, n'a à ce stade qu'une connaissance très incomplète de ces opérations (17). Quand bien même ces investissements auraient, comme le soutiennent les autorités françaises, pour effet de réduire les pertes de la défaisance, à ce stade, ils se traduisent par une augmentation du risque afférent à la garantie de l'État. En outre, de nombreux risques hors bilan ont été transférés du CL au CDR sous forme de garanties sur ses filiales ou sur des actifs qui n'avaient pas été transférés au CDR lors de sa création. De plus, le périmètre de consolidation du CDR a été élargi en 1996, sans que la Commission soit à ce stade en mesure d'apprécier si cet élargissement augmente significativement l'exposition au risque du CDR et de l'EPFR: cet élargissement du périmètre de consolidation en 1996 doit en effet être examiné au vu des risques pour le CDR dont étaient déjà assortis les nouveaux actifs en question avant leur inclusion sous forme d'actifs dans le périmètre du cantonnement. Par ailleurs, des pertes supplémentaires sont apparues et pourraient continuer à augmenter, en raison notamment de l'augmentation du nombre des procédures judiciaires engagées. Ces procédures atteignaient à la mi-1997 le nombre de 75, dont 52 en France et 23 à l'étranger. Certaines de ces procédures sont susceptibles d'aboutir à des dédommagements du CDR et à un allégement subséquent du coût de la défaisance. D'autres se traduisent toutefois, en cas d'issue défavorable pour le CDR, par des risques hors bilan importants, dont l'estimation est fragile et peut sensiblement évoluer dans le temps. De plus, les procédures judiciaires ont un effet négatif dans la mesure où elles rendent plus difficile la liquidation ou la cession des actifs sujets à contentieux, qu'elles ralentissent voire interrompent.
Tout décalage dans le calendrier des cessions d'actifs du CDR, par rapport au calendrier initialement prévu pour leur cantonnement au sein de la défaisance (vente de 50 % des actifs en 3 ans et de 80 % des actifs en 5 ans), augmente les frais de gestion et les pertes d'exploitation du CDR. En outre, les remboursements du CDR à l'EPFR ont été ralentis par le fait que certains passifs tiers (sur les passifs d'environ 60 milliards de francs qui lui ont été apportés au CDR, en plus du prêt participatif de l'EPFR) ont été remboursés par le CDR selon un rythme accéléré par rapport au calendrier de 5 ans initialement prévu, en raison de l'exigibilité de certains de ces passifs liée au retrait d'agréments sur ses filiales bancaires. À cela s'ajoute la complexité croissante des cas (les actifs les plus faciles à réaliser l'ayant déjà été) qui ralentira les opérations de défaisance prévisibles à l'avenir, et verra augmenter les risques de moins-values. De plus, l'abandon de la logique liquidative, lors de la réforme du CDR en décembre 1997, peut également avoir pour effet de prolonger les coûts de gestion de la défaisance, et donc les pertes imputées à l'État via l'EPFR. Les retards de réalisation des actifs du CDR n'ont pas d'effet direct sur ses pertes (hormis l'augmentation des frais d'exploitation du CDR imputés en pertes) mais par contre ont pour effet de prolonger l'incertitude et d'augmenter le coût nominal de portage de la défaisance au niveau de l'EPFR. L'expérience de ce type de défaisance tend à montrer qu'avec le temps, ce sont les actifs de moins bonne qualité qui restent en portefeuille, et que leur réalisation est de plus en plus difficile. En outre, les sociétés cantonnées peuvent réaliser des pertes importantes, qui s'imputeront en pertes de la défaisance, indépendamment de leur valeur d'actif.
Par ailleurs, la Commission, malgré deux courriers adressés aux autorités françaises à ce sujet (en date du 1. 12. 1997 et du 5. 2. 1998), n'a reçu aucune réponse concernant un calendrier possible de recapitalisations de l'EPFR par l'État, qui permettrait d'anticiper une diminution de l'encours du prêt du CL à l'EPFR. Il convient sur ce point de souligner que, selon un échéancier établi à partir d'hypothèses conservatrices, remis par le CL à la banque conseil de la Commission, l'encours du prêt pourrait rester proche de 100 milliards de francs jusqu'à la fin de la période du prêt, soit jusqu'en 2014.
Les coûts de portage ne sont pas inclus dans le chiffrage des pertes du CDR. Ils seront également à la charge de l'EPFR et donc, in fine, du budget de l'État. Les coûts de portage de la défaisance enregistrés au niveau de l'EPFR seront accrus en proportion du retard des remboursements du CDR à l'EPFR. En valeur nominale (18), dans l'hypothèse d'un portage du prêt sur la totalité de la période selon le calendrier remis par le CL à la banque conseil de la Commission (et sans faire aucune hypothèse supplémentaire sur des emprunts de l'EPFR), et en tenant compte de la neutralisation du prêt projetée par les autorités françaises, ces coûts de portage atteindraient sur l'ensemble de la période du mécanisme (de 1995 à 2014) un montant nominal total de près de 100 milliards de francs, dont 78 milliards à partir du 1er janvier 1997. Ces coûts nominaux seront in fine à la charge du budget de l'État et des contribuables, tout comme les pertes de la défaisance. D'autre part, en valeur nominale, les coûts de portage sont également sensibles à l'évolution des taux: une augmentation de 1 % du TMM se traduirait également par une augmentation de 13 milliards de francs en valeur nominale. Cette sensibilité nominale à l'évolution des taux aurait joué favorablement pour l'EPFR depuis 1995, compte tenu de la baisse des taux à court terme, si le prêt du CL n'avait pas été «neutralisé» en 1995-96. Mais elle peut à nouveau jouer en sens contraire si les taux se tendent (hors neutralisation du prêt). L'incertitude sur le montant des coûts de portage peut néanmoins être en partie éliminée par un calcul d'actualisation incluant la somme actualisée des coûts de portage et des pertes (Cf. ci-après).
Il convient aussi de souligner que les coûts de portage ont déjà augmenté par rapport aux estimations initiales de 1995 en raison de deux facteurs: d'une part, le CDR n'a effectué qu'une faible fraction des remboursements du prêt participatif de l'EPFR initialement prévus, de sorte que, par voie de conséquence, l'EPFR n'a pas pu rembourser son emprunt au CL aussi vite que prévu et que les intérêts courants sont plus élevés que prévu; d'autre part, les recapitalisations de l'EPFR par l'État ont été insuffisantes, si bien que celui-ci a accumulé des arriérés d'intérêt vis-à-vis du CL, qui s'imputent en augmentation des coûts de portage nominaux. Ainsi, non seulement l'EPFR pourrait ne pas rembourser le capital du prêt du CL avant de nombreuses années, mais ses dettes pourraient croître si, comme au cours des deux dernières années, les intérêts de retard s'accumulent en raison du retard ou de l'insuffisance des recapitalisations par l'État. Dans son rapport 1997 (19), l'EPFR tire une véritable sonnette d'alarme en soulignant que, s'il perçoit uniquement des remboursements de son prêt participatif au CDR et des versements de l'État correspondant aux seuls intérêts de retard, il devra s'endetter pour payer les intérêts de l'emprunt au CL (parce que ceux-ci ne sont pas capitalisables avec le gisement de l'emprunt). Selon l'EPFR, «la capacité d'emprunt au titre du paiement des intérêts, plafonnée à 50 milliards de francs par la loi du 28 novembre 1995, pourrait être entièrement utilisée d'ici 2002 à 2004.» L'EPFR conclut (20) qu'«en toute hypothèse il serait souhaitable d'éviter de financer des pertes irrécouvrables par recours à un endettement qui ne ferait qu'accroître l'addition finale».
Ces éléments montrent qu'une dérive très significative des coûts de la défaisance est possible, non seulement au niveau du CDR par des pertes sur actifs et risques hors bilan, mais aussi de l'EPFR par une dérive des coûts de portage. L'EPFR qualifie dans son rapport 1997 cet effet d'effet «boule de neige», qui pourrait conduire l'État à supporter, outre le coût des intérêts «primaires» (ceux du prêt du CL à l'EPFR), celui des intérêts de ces emprunts supplémentaires destinés à servir les intérêts du prêt principal. Si les craintes de l'EPFR se réalisent et que celui-ci est obligé d'emprunter les ressources nécessaires au service du prêt du CL, les coûts de portage de l'ensemble du mécanisme pourraient connaître une dérive nouvelle, aussi longtemps que les recapitalisations de l'EPFR par l'État seront insuffisantes, et ce notamment si les emprunts de l'EPFR doivent être effectués à des taux de moyen et long terme (environ 4,5 à 5,5 % début 1998) très supérieurs au taux du service de l'emprunt de l'EPFR au CL (85 % du TMM, soit un taux d'environ 3 % début 1998). À titre indicatif, si en 2003 l'encours de nouveaux emprunts de l'EPFR atteint 50 milliards de francs, le coût annuel de portage de la défaisance pourrait passer de 2,9 milliards de francs (service du prêt du CL actuellement prévisible, hors neutralisation) à un montant compris entre 4,4 et 5,5 milliards de francs, suivant que l'EPFR se refinance à court terme ou à long terme.
En outre, l'État envisage aujourd'hui, à la suite de la décision de transférer à l'EPFR la participation du CDR au sein de la holding Artemis, initialement cantonnée au CDR, de faire jouer à l'EPFR un rôle de portage d'actifs qui n'était pas prévu dans le plan soumis à la Commission en 1995. Il s'ensuit que des moins-values comptables ou des pertes de cession pourraient être enregistrées au niveau de l'EPFR. Logiquement, ces moins-values ne seront plus à la charge du CDR dont l'estimation des pertes est allégée à concurrence des provisions à effectuer sur Artemis, de sorte que ce transfert doit être sans conséquences au niveau de l'ensemble de la défaisance.
Les autorités françaises avaient par ailleurs laissé entendre dans le plan présenté en juillet 1997 qu'elles pourraient procéder à une nouvelle recapitalisation du CL, sans en indiquer le montant. Le cas échéant, cette recapitalisation aurait été ajoutée par la Commission au calcul du montant total des aides en question. Elles n'ont toutefois pas donné suite à cette éventualité.
Dans la décision 95/547/CE, un certain nombre d'éléments avaient été pris en déduction du montant des aides. Le coût de portage de l'obligation coupon-zéro avait été déduit et ne pourra l'être dans le nouveau chiffrage des aides au CL, les autorités françaises ayant clairement confirmé, dans le courrier du 31 mars 1998 adressé par le ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie au Commissaire Van Miert, qu'elles prévoyaient la suppression de cette obligation de financement d'une obligation coupon-zéro. Ceci a pour effet d'augmenter de 7,8 milliards de francs, par rapport au plan de 1995, les aides estimées au CL, la banque étant déchargée de cette obligation. Un autre élément, la valeur actualisée des revenus générés par la clause de retour à meilleure fortune, avait été pris en déduction ainsi que la valeur résiduelle du CL (après déduction de la clause). Dans ses courriers du 31 mars et du 3 mai 1998 au Commissaire Van Miert, le ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie a formellement indiqué que la France s'engageait à transférer le CL au secteur privé avant la fin de l'année 1999, et que la clause serait l'objet d'un «apurement». Compte tenu de ces engagements et de cette échéance rapprochée, la Commission considère qu'il convient de déduire du montant brut des aides la valeur de la participation de l'État dans la banque (environ 82 %), plutôt que, ainsi qu'elle l'avait fait en 1995, la somme de la clause et de la valeur résiduelle de la banque.
À la différence de la Commission qui avait pris en compte en 1995 un montant possible d'aides au CL de 45 milliards de francs, les autorités françaises avaient à l'époque considéré que le mécanisme financier de sauvetage mis en place serait autofinancé par les revenus de la clause de retour à meilleure fortune, de la privatisation du CL, et de la capitalisation des intérêts de l'obligation à coupon-zéro initialement prévue, de sorte que le solde budgétaire net de l'opération pour l'État serait nul et que les contribuables n'en supporteraient pas le coût. Dans son rapport du 1er juillet 1997 au ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie et au Parlement, l'EPFR conclut (21) que «sur le plan financier, les résultats déjà enregistrés et l'évolution des prévisions de pertes pour l'avenir rendent illusoire l'équilibre financier à l'origine prévu sur l'ensemble de la période». Toutefois, les autorités françaises et la Commission divergent encore sur la nature et l'estimation du montant des aides qui doivent être retenues dans la présente décision.
En particulier, la Commission ayant considéré qu'il convenait d'inclure dans les aides au CL la totalité des pertes du CDR, les autorités françaises ont refusé une telle imputation d'ensemble, dans leurs contacts avec la Commission ainsi que dans deux notes adressées le 25 novembre 1997 et le 3 avril 1998 à la Commission, au motif que, depuis le transfert à la défaisance des actifs cantonnés, le CL, qui n'est représenté au sein d'aucun des organes du CDR, avait perdu, conformément à la décision 95/547/CE, tout rôle dans la gestion et les décisions de cession ou de liquidation de ces actifs. De plus, les règles comptables s'appliquant à des actifs cantonnés dans la défaisance diffèrent de celles qui s'appliquaient lorsque ces actifs contribuaient à l'exploitation de la banque. Les règles s'appliquant dans des hypothèses de continuité d'exploitation deviennent en partie caduques, ce qui a conduit à l'amortissement accéléré des écarts d'acquisition d'actifs, imputés dans l'augmentation des pertes du CDR. Selon les autorités françaises, l'augmentation d'environ 40 milliards de francs de pertes estimées de la défaisance (de 60 milliards provisionnés en 1995 à 100,2 milliards estimés au 31. 12. 1996) ne pouvait pour cette raison être imputée au CL. De sorte que les aides au CL prises en compte dans le calcul total se limiteraient aux pertes initialement transférées à la défaisance. Dans un courrier du 3 avril 1998, les autorités françaises suggèrent toutefois une autre méthode possible, consistant à prendre en compte les pertes effectives du CDR au 1er janvier 1997, soit 64,3 milliards de francs, et à les actualiser, coûts de portage inclus, avec un taux à long terme, ce qui leur permet d'aboutir à une valeur de 59 milliards de francs, soit un montant quasi similaire à celui qu'elles obtiennent par la première méthode.
La Commission ne peut souscrire aux arguments présentés par les autorités françaises. La raison d'être de l'ensemble de la défaisance, en 1995 et depuis lors, est le plan de sauvetage du CL sans lequel la banque aurait dû être liquidée. S'il suffisait de créer une structure de défaisance pour couper tout lien entre l'entreprise allégée de ses mauvais actifs et l'imputabilité à l'entreprise aidée de tout ou une partie des pertes de ladite structure, les obligations découlant de l'article 92 du traité pourraient être tournées par les États membres qui pourraient recourir à la création de tels véhicules financiers pour se soustraire à l'application du traité. Dans le cas d'espèce, le fait générateur des pertes de la défaisance est réputé être, sauf preuve du contraire dans des cas particuliers à établir, le transfert en 1995 des actifs douteux du CL au CDR, qui est une filiale à 100 % du CL (bien que non consolidée comptablement parce que ses pertes sont imputées à l'EPFR et non pas à sa maison mère). Le coût de la création de la défaisance, qui inclut les écarts mentionnés par les autorités françaises (passage d'une logique d'exploitation à une logique de liquidation), est selon la Commission l'un des coûts spécifiques de cette opération en faveur de la banque, et doit être pris en compte comme une forme de «badwill» attachée à la création de la défaisance. La Commission ne pourra conclure que des pertes de la défaisance ne sont pas imputables au CL, en tant que bénéficiaire, que s'il peut être établi que le CDR n'a pas agi en tant que gestionnaire avisé et en vue de la cession à meilleur prix des actifs cantonnés ou de leur liquidation, et à due concurrence des conséquences financières de ces décisions. Les autorités françaises n'ayant pas avancé d'arguments en ce sens, la Commission ne peut à ce stade, à titre conservatoire, qu'imputer en aides au CL l'ensemble des pertes de la défaisance.
Il convient de souligner que l'hypothèse d'une augmentation des aides afférentes à ces coûts de la défaisance, par rapport au montant initialement approuvé, avait été expressément envisagée dans la décision 95/547/CE qui prévoit, à son article 2 point c) qu'en cas d'augmentation des coûts du mécanisme, la Commission réexamine le montant des contreparties prises en considération dans ladite décision. La Commission note que les autorités françaises n'ont pas contesté cette disposition de la décision 95/547/CE et qu'elles ne sont donc pas fondées à faire à présent un raisonnement différent. Elle note également que le «mécanisme» visé par la décision 95/547/CE est clairement l'ensemble du mécanisme de la défaisance du CL et ne saurait être interprété de façon restrictive comme une simple partie de celui-ci, ainsi que le suggérerait la prise en compte de l'augmentation des coûts de portage afférents à la «neutralisation» du prêt présentée par les autorités françaises, à l'exclusion de l'augmentation de l'ensemble des autres coûts de portage et des pertes de la défaisance.
Il résulte de ce qui précède que la Commission est fondée à prendre en compte l'ensemble des pertes de la défaisance, tant les pertes constatées au niveau du CDR que les pertes supplémentaires qui pourraient apparaître au fur et à mesure au niveau de l'EPFR, principalement sous forme d'une augmentation des coûts de portage. Tous les éléments précédents, et la très grande incertitude qui demeure sur le coût total final de l'opération de sauvetage de la banque pour l'État, conduisent la Commission à raisonner sur une fourchette très ouverte d'estimation des aides, en ajoutant aux coûts vraisemblables à ce stade (valeur basse de la fourchette) ceux qui pourraient apparaître compte tenu des aléas du mécanisme de la défaisance.

7.2 Fourchette d'estimation du coût des mesures prévues en faveur du Crédit Lyonnais
Le mécanisme institué par les autorités françaises consiste à financer la répartition sur une longue période, s'étalant potentiellement jusqu'en 2014, du coût budgétaire de l'opération, par un mécanisme fondé sur un emprunt (de l'EPFR au CL) à des taux construits autour du taux du marché à court terme (TMM), auquel pourraient s'ajouter d'importants emprunts de l'EPFR sur le marché si les recapitalisations de l'État ne couvrent pas ses besoins de trésorerie immédiats, pour honorer le paiement des annuités d'intérêt du prêt du CL. Les autorités françaises, en ne préjugeant pas de choix budgétaires futurs, ont gardé une grande flexibilité dans le mécanisme, quant au rythme auquel se feront les remboursements budgétaires du coût de l'opération. Pour simplifier ce mécanisme et le calcul qui doit être fait de son coût, on peut considérer, en supposant que le cantonnement d'actifs au sein du CDR a pris fin, que l'État a chaque année le choix de verser une soulte budgétaire pour solde de tout compte à l'EPFR, permettant à ce dernier de rembourser immédiatement l'encours restant du prêt que lui a accordé le CL, ou bien de continuer à laisser courir ce prêt, sur le financement à des taux de court terme tels que définis en 1995.
Dans la mesure où les remboursements du CDR ne suffisent pas à rembourser les annuités d'intérêt du prêt du CL, l'État devrait normalement recapitaliser l'EPFR pour maintenir à flot sa trésorerie et éviter que l'EPFR n'encoure d'annuités de retard. Si par contre l'État, comme cela a été le cas en 1995 et 1996, n'assure pas ce financement minimal de l'EPFR, ce dernier devra s'endetter massivement auprès du marché financier, ainsi que l'indique le rapport 1996 de l'EPFR précédemment cité. Par ailleurs, la contrainte de recapitalisations futures de l'EPFR par le budget de l'État a fortement augmenté depuis l'abandon de l'obligation à coupon-zéro que devait souscrire l'EPFR grâce à un tirage de 10 milliards de francs sur le prêt du CL.
Les flux qui seront constatés interviendront pour la plupart dans un futur, proche ou lointain, selon les choix de recapitalisation de l'EPFR faits par l'État: ceci implique que les montants nominaux de portage du prêt à l'EPFR ou de pertes du CDR soient actualisés pour tenir compte, à l'instant où est constaté chaque flux, de la valeur de l'argent, rapporté dans le cadre de la présente décision au 31 décembre 1997. Si l'État avait financé le mécanisme de la défaisance par l'emprunt à long terme, par exemple sous forme d'obligations d'État à 10 ou 15 ans, il conviendrait d'actualiser les flux futurs de remboursement du prêt ainsi que le montant nominal de la perte totale estimée du CDR par un taux de long terme. Puisque le mécanisme en question prévoit un financement de la défaisance sur des taux à court terme définis autour du TMM, ceci implique que le taux d'actualisation pris en compte par la Commission pour les pertes de la défaisance et leur portage soit un taux de court terme. Il convient de noter que le fait que la Commission retienne une actualisation des flux futurs sur la base d'un taux d'intérêt à court terme rend l'évaluation du coût de portage quasi indépendante de l'évolution des taux, de sorte que la Commission, dans sa fourchette d'évaluation, ne prend pas en compte d'hypothèses sur l'évolution des taux d'intérêt à court terme et que le calcul du coût total de l'opération aboutit à des montants identiques en 1997 et en 2014. Dès lors, un scénario de sensibilité sur le risque de taux, nécessaire pour évaluer le coût nominal, n'apparaît pas nécessaire sous les présentes hypothèses d'évaluation du coût actualisé de l'opération de défaisance (22) (nonobstant les éléments dont il a été fait état ci-dessus, section 6.1, sur la sensibilité du coût de la «neutralisation» à une variation des taux du calcul). Le tableau 15 est construit sur une présentation du coût actualisé au 31 décembre 1997, tel qu'il résulterait de l'obligation, au 31 décembre 1997, de solder les pertes de l'opération par une soulte budgétaire pour solde de tout compte.
Sur cette base, les montants d'aides au CL, en valeur brute et sans préjuger des éléments qui pourraient être pris en déduction, peuvent être calculés (en francs constants au 31. 12. 1997), en prenant en compte les pertes du CDR, les coûts de portage, la neutralisation du prêt à l'EPFR et la recapitalisation octroyée par l'État en 1994 (déjà incluse dans le montant de l'aide de 45 milliards de francs approuvé en 1995). Cette méthode aboutit à des résultats similaires à ceux que l'on obtiendrait en actualisant la somme des recapitalisations du CL et de l'EPFR par l'État dont, pour les raisons indiquées ci-dessus, il n'était possible de connaître ni le montant exact, ni l'échéancier futur, dont il convient de retrancher les revenus de l'EPFR (principalement, dans l'hypothèse d'une cession de la clause de retour à meilleure fortune, les revenus de la privatisation du CL, qui seront alloués à l'EPFR).
L'incertitude quant au montant de pertes du CDR qui doit être pris en considération introduit un premier facteur d'aléa dans l'estimation des aides. Ces pertes ont été estimées au 31 décembre 1996 par le CDR à 100,2 milliards de francs. La Commission, qui ne dispose pas d'actualisation de cette estimation au 31 décembre 1997, doit se référer à ce chiffre fin 1996 et l'inclure dans la valeur basse de la fourchette d'aides. Ainsi qu'indiqué ci-dessus, les pertes du CDR sont prises en charge par l'EPFR par le mécanisme du prêt participatif qu'il a accordé au CDR, ce dernier ne lui remboursant pas les pertes qu'il encourt. La garantie de l'EPFR sur le CDR va toutefois au-delà du montant de 145 milliards de francs du prêt participatif (y inclus la tranche complémentaire de 10 milliards de francs qui n'a finalement pas fait l'objet d'un tirage du CDR, mais a été convertie en garantie de l'EPFR sur des emprunts externes de 10 milliards de francs du CDR) et couvre notamment tous les éléments de hors bilan, en particulier les risques judiciaires liés aux nombreux litiges en cours sur les actifs cantonnés. De sorte que l'estimation finale du montant des pertes du CDR est particulièrement incertaine.
La Commission, dans le calcul du montant des aides au CL, doit prendre en compte l'éventualité d'une augmentation imprévue des pertes du CDR par rapport au niveau de 100,2 milliards de francs estimé au 31 décembre 1996. Malgré la diminution du risque résiduel au fur et à mesure de l'avancement du programme de cessions, et pour tenir compte des pertes supplémentaires qui pourraient apparaître par ailleurs, comme souligné ci-dessus, il paraît prudent à ce stade de considérer le risque afférent à la totalité du prêt participatif comme la base de calcul pour le haut de la fourchette d'estimation des pertes du CDR. Pour cette raison, compte tenu de la chronique passée d'erreurs d'estimation par les autorités françaises, et pour garder une marge d'erreur suffisante, la Commission considère que la fourchette de 100,2-145 milliards de francs doit être retenue dans le calcul total des aides au titre des pertes possibles du CDR.
Les coûts de portage reportés ci-dessous sont actualisés au 31 décembre 1997. Il est par ailleurs prévu que l'EPFR, pour faciliter sa gestion de trésorerie, puisse émettre à partir du 1er janvier 1998 un emprunt supplémentaire de 10 milliards de francs au CL. L'augmentation des pertes de la défaisance rend plus urgentes les recapitalisations de l'EPFR par l'État pour faire face aux obligations de service de l'intérêt du prêt du CL. En l'absence d'indications précises de l'État sur une chronique de recapitalisations futures, et compte tenu des difficultés de trésorerie de l'EPFR l'ayant contraint à des retards de paiement d'intérêts, assortis de pénalités, sur ses versements d'intérêts au CL, il conviendrait normalement de calculer la valeur haute de sa fourchette dans l'hypothèse où l'EPFR aurait recours à partir de 1998 à un emprunt de 10 milliards de francs supplémentaires au CL, pour lequel un protocole d'accord existe entre le CL et l'EPFR. De plus, dans l'hypothèse pessimiste qu'évoque l'EPFR dans son rapport 1997, l'encours des emprunts supplémentaires de l'EPFR sur le marché pourrait atteindre aux alentours de 2003 le plafond de 50 milliards de francs fixé par la loi (l'EPFR indique un horizon possible de 2002-2004) si l'État n'apporte pas les recapitalisations nécessaires. Il convient en effet de rappeler qu'aux termes de la loi du 28 novembre 1995 portant création de l'EPFR (23), celui-ci est autorisé à emprunter, dans la limite de 50 milliards de francs, pour payer les intérêts du prêt qui lui est consenti par le Crédit Lyonnais (article 3).
Toutefois, sur la base de l'engagement des autorités françaises de privatiser le CL en 1999, la Commission n'a pas pris en considération ces risques de dépassement des coûts, dans l'estimation du montant des aides supplémentaires au CL: si le CL est effectivement privatisé en 1999, l'EPFR pourrait percevoir immédiatement la valeur de la participation de l'État vendue, ce qui donnerait un ballon d'oxygène important à la trésorerie de l'EPFR, lui évitant de s'endetter, et lui permettant même de diminuer l'encours du prêt du CL par un remboursement du principal. Dans l'hypothèse où l'État garderait 10 % du capital, et où ses participations pour un montant de 72 % du capital de la banque (il en détient environ 82 %) seraient vendues, ceci signifie que l'EPFR recevrait en 1999, au moment de la privatisation, une injection de fonds d'environ 25 milliards de francs (24). Ceci ne suffira toutefois pas pour assurer durablement le service du prêt de la banque, de sorte qu'il est essentiel que l'État continue de recapitaliser régulièrement l'EPFR pour que le scénario évoqué dans le rapport de l'EPFR ne se réalise pas.
Les autorités françaises feront probablement en réalité des allocations budgétaires réparties dans le temps, d'une part pour permettre le service des annuités d'intérêt de l'emprunt de l'EPFR au CL, mais aussi pour effectuer des remboursements du principal de cet emprunt afin de ne pas avoir à effectuer un seul paiement en principal en 2014, et en répartir la charge sur de nombreux exercices budgétaires (elles ne peuvent toutefois prendre d'engagements sur ce point sans préjuger de l'autorité du Parlement français en matière budgétaire). Sous réserve qu'elles recapitalisent régulièrement et suffisamment l'EPFR pour satisfaire ses besoins de trésorerie et lui éviter d'avoir à emprunter, le chiffrage de l'aide n'est pas dépendant de l'échéancier exact des recapitalisations par l'État. Le présent chiffrage est établi sur cette base.
Il convient de souligner que les deux scénarios d'évaluation figurant ci-dessous dans le tableau 15 sont établis sur des hypothèses nécessairement simplificatrices: la Commission ne dispose pas des éléments permettant de simuler un tableau prévisionnel d'emplois-ressources de l'EPFR, qui, seul, permet d'approcher avec précision le coût final de l'opération. La Commission considère toutefois que la fourchette très ouverte d'évaluation du coût du mécanisme de défaisance présentée ci-dessous donne l'image la plus objective possible à ce stade de la fourchette dans laquelle se situera in fine le coût d'ensemble du mécanisme pour l'État.
>EMPLACEMENT TABLE>
Sur la base de ces deux scénarios d'hypothèses haute et basse, le montant d'aides tel que résultant du plan de juillet 1997, pris en valeur brute (c'est-à-dire avant toute déduction des revenus de la clause de retour à meilleure fortune et de la privatisation), afférent au mécanisme de la défaisance (en lui additionnant le coût actualisé de la recapitalisation de 1994) peut être estimé en valeur actualisée entre environ 130 et 175 milliards de francs.
La Commission, compte tenu du schéma très particulier de la défaisance qui allouera à l'EPFR les produits de privatisation de la banque, prend en déduction du montant brut des aides la valeur de la participation de l'État au sein du CL. La banque conseil de la Commission a estimé, fin 1997, à environ 34 à 35 milliards de francs la valeur du CL sur la base des éléments du plan présenté en juillet 1997 et des informations apportées par le CL fin 1997. La Commission a par ailleurs pris connaissance d'estimations plus récentes, de sources indépendantes réalisées en avril 1998, qui valorisent la banque à un niveau sensiblement supérieur, autour d'une moyenne de 46 milliards de francs. Cependant, certaines de ces évaluations sont réalisées à périmètre de consolidation inchangé, et sur la base de l'hypothèse d'une neutralisation complète du prêt. Ces estimations ont été faites avant que soient décidées les cessions d'actifs supplémentaires en contrepartie des aides examinées dans le cadre de la présente décision. D'après le plan d'affaires révisé communiqué par la banque à la Commission début mai 1998, ces cessions ont un impact considérable sur le niveau d'activité et les résultats de la banque, se traduisant à l'horizon 1999 par une diminution d'environ 7 à 10 milliards de francs du produit net bancaire et de 3,3 à 6 milliards de francs du résultat brut d'exploitation (25), par rapport aux prévisions du plan de juillet 1997. Dans la mesure où la valeur d'une entreprise est en premier lieu la somme actualisée de ses «cash flows», il en résulte une correction significative de la valeur de la banque qui n'a, à ce stade et compte tenu de ces derniers développements, pas pu être complètement prise en compte, ni dans les dernières évaluations de différentes sources réalisées de la banque, ni par le marché.
La Commission, sur cette base, et malgré une forte marge d'incertitude, doit à titre conservatoire se limiter dans le cadre de la présente décision à l'évaluation réalisée par sa banque conseil fin 1997. Dans l'hypothèse d'une déduction complète de la valeur de la participation de l'État (82 % du capital) au sein du CL, soit environ 28 milliards de francs, du montant brut des aides, le coût net pour l'État de l'opération d'aides au CL redescendrait dans une fourchette comprise entre 102 et 147 milliards de francs. En tout état de cause, les revenus de la privatisation, aussi élevés soient-ils, ne remettent pas en cause le caractère considérable des aides supplémentaires en question.
La fourchette élargie d'aides in fine retenue par la Commission est sur cette base, et compte tenu des aléas du mécanisme de la défaisance et du montant exact des revenus de la privatisation du CL, comprise dans une très ample fourchette, entre 102 et 147 milliards de francs, ce qui correspond environ à des valeurs doubles et triples des aides approuvées en 1995 et 1996.
Dans leur courrier à la Commission du 3 avril 1998, les autorités françaises présentent un chiffrage différent de l'aide, aboutissant à une fourchette de 52,4 à 71,2 milliards de francs. En appliquant une marge d'erreur de 10 % à la valeur haute de la fourchette, ainsi que l'avait fait la Commission dans sa décision 95/547/CE, elles arrivent à la conclusion que l'aide totale au CL peut être estimée à 80 milliards de francs au maximum.
La Commission ne peut retenir cette estimation, pour les raisons suivantes:
i) Tout d'abord, ainsi qu'indiqué ci-dessus, les autorités françaises n'imputent pas en aides au CL la totalité des pertes de la défaisance, mais seulement celles qui ont été évaluées lors du transfert des actifs et créances cantonnés au CDR en 1995. Cette imputation partielle aboutit à minorer les pertes d'environ 40 milliards de francs par rapport à la valeur des pertes du CDR retenue par la Commission comme valeur basse de la fourchette d'estimation des pertes du CDR. La Commission, pour les raisons indiquées ci-dessus, ne peut retenir une telle imputation seulement partielle des pertes du CDR, qui représente l'élément de divergence principal entre le calcul des autorités françaises et le sien. Lors de réunions fin 1997 avec les représentants du CL et des autorités françaises, notamment lors d'une réunion tenue le 28 novembre 1997, la Commission a clairement indiqué que la totalité de l'augmentation des pertes du CDR serait, à ce stade, à prendre en compte en tant qu'aides au CL. Les représentants de la Commission ont réitéré aux autorités, cette position lors d'une réunion tenue début mai 1998 à Bruxelles.
ii) La deuxième divergence importante a trait à la prise en compte des risques inhérents au système de la défaisance. La Commission considère que la garantie donnée par l'EPFR au CDR (soit 145 milliards de francs) pourrait être très largement utilisée, au-dessus de l'estimation des pertes de 100,2 milliards de francs, la dérive des pertes du CDR constatée jusqu'à présent pouvant continuer. De sorte que la fourchette haute de l'estimation des aides doit prendre en compte tout le risque afférent au prêt (en théorie, il est même supérieur, puisque la garantie de l'État est illimitée). Dans un tel scénario, cette dérive des pertes du CDR pourrait être accompagnée d'une dérive des coûts supplémentaires de portage à la charge de l'EPFR, obligeant éventuellement l'EPFR à recourir aux possibilités d'emprunt sur le marché dont il a été doté par la loi. Ce deuxième élément important de divergence implique une fourchette haute à 45 milliards de francs de plus que le montant pris en compte par les autorités. La Commission adopte une méthode plus globale que les autorités françaises visant à appréhender l'ensemble des pertes possibles de la défaisance au niveau de l'EPFR.
iii) Troisièmement, les autorités françaises actualisent les pertes et les coûts de portage (les coûts de portage de base du prêt et sa «neutralisation») par un taux de long terme, celui des emprunts d'État (les obligations assimilables du trésor, OAT) à 10 ans, soit environ 5,7 %. La Commission concorde avec les autorités françaises sur la méthode qui consiste à actualiser l'addition des pertes et des coûts de portage. Elle souligne toutefois que le taux d'actualisation de long terme aboutit mécaniquement à un chiffre d'actualisation des pertes cumulées avec les coûts de portage inférieur en 2014 au montant nominal de ces pertes en 1997 (ou, selon la méthode, en 1995), puisque les coûts de portage sont des coûts définis par un taux de court terme (85 % du TMM), inférieur de plus de deux points au taux d'actualisation à long terme retenu par les autorités françaises. Un tel calcul d'actualisation par des taux de long terme, sur lequel est construite l'estimation des autorités françaises, appliqué à un mécanisme sur une aussi longue période (1995-2014), compte tenu de l'ampleur des pertes et de l'encours du prêt, a un impact quantitatif significatif et aboutit, dans l'hypothèse où la perte est réalisée en 2014, à une minoration de plus de 25 milliards de francs des pertes actualisées de la défaisance. Ce calcul suppose implicitement que l'État est en mesure de transformer une ressource à 85 % du TMM en un emploi à long terme à 5,7 %, soit, au taux actuel, 2,7 % d'intérêt de plus. Dans l'hypothèse où l'État serait structurellement en position de prêteur, il serait en mesure de bénéficier de la transformation d'un emprunt à taux courts en un prêt à taux long (mais alors la présente défaisance n'aurait pas été nécessaire avec de telles modalités). Toutefois, l'État est structurellement dans une position d'emprunteur et n'est de ce fait pas en position de bénéficier des possibilités de transformation qu'aurait permises le prêt du CL, qui a été entièrement affecté au CDR et ne produit que des pertes. Une tentative de bénéficier d'une telle possibilité de transformation des taux courts en taux longs, le coupon-zéro, initialement prévue en 1995, a échoué, pour un montant de 10 milliards de francs seulement, très inférieur à celui des pertes en question (et qui, de surcroît, devait être financée par le CL et non par l'État); a fortiori, la Commission n'est donc pas en mesure de conclure que l'État est en position de tirer parti des possibilités de transformation de taux créées par l'emprunt au CL à des taux de court terme, à hauteur du montant total de la perte (au moins 100 milliards de francs).
Si tel était le cas, l'État aurait pu faire en 1997, sachant que la perte était alors estimée à 100 milliards de francs, une dotation budgétaire de plusieurs dizaines de milliards à l'EPFR, que celui-ci aurait pu replacer à long terme à un taux de 5,7 % jusqu'en 2014, pour bénéficier du différentiel de taux court terme/long terme. La Commission ne peut donc retenir un raisonnement d'actualisation basé sur un taux de long terme, qui introduit une minoration des coûts de la défaisance sans relation avec la réalité du mécanisme en question. À titre subsidiaire, elle note que, même si l'État était en position de bénéficier de telles possibilités de transformation de taux, un risque de taux subsisterait (le risque que les taux courts remontent au niveau des taux longs, par exemple en cas de surchauffe conjoncturelle) qu'elle devrait alors prendre en compte dans son estimation, de sorte que le résultat de son estimation serait comparable.
iv) Quatrièmement, ainsi qu'indiqué ci-dessus, la Commission n'a pas pris en considération dans le précédent chiffrage les risques de dérive des coûts de portage soulignés par le rapport de l'EPFR en 1997. Sur base de tels risques, le haut de la fourchette d'évaluation de la Commission devrait être augmenté du service de la dette que pourrait contracter l'EPFR auprès du CL (tranche de 10 milliards de francs supplémentaires) et du marché (autorisation d'emprunt de 50 milliards de francs donnée par la loi).
Ces multiples divergences conduisent la Commission à ne pas retenir l'estimation du montant des aides au CL présentée par les autorités françaises.

7.3 Aides supplémentaires au Crédit Lyonnais par rapport au montant autorisé en 1995 par la Commission
En conclusion, les aides supplémentaires par rapport au montant autorisé par la Commission dans la décision 95/547/CE comprennent:
- les pertes supplémentaires du CDR prises en charge par l'État par le mécanisme du prêt participatif de l'EPFR au CDR;
- les coûts de portage supplémentaires de l'EPFR, en particulier notamment la «neutralisation» du prêt du CL à l'EPFR de 1995 à 2014;
- l'abandon de l'obligation à coupon-zéro prévue dans le plan d'affaires de 1995 et la décision 95/547/CE, dont les revenus actualisés avaient été pris en déduction des aides approuvées.
La Commission rappelle que, dans sa décision 95/547/CE, à l'article 2 point c), elle a prévu que «si les coûts du système, estimés à 45 milliards de francs français, sont dépassés, il y a lieu de réexaminer l'importance de la réduction de la présence commerciale du Crédit Lyonnais», telle qu'acceptée par les autorités françaises. Il résulte de ces éléments que tout dépassement du plafond autorisé de 45 milliards de francs français doit faire l'objet d'un réexamen dans le cadre de la présente décision, en vue de déterminer si les aides supplémentaires en question sont compatibles avec le marché commun.
Comparée au montant des aides approuvées en 1995 et 1996, l'aide supplémentaire estimée est en tout état de cause considérable. Selon les hypothèses, sur la base d'une fourchette élargie d'aides de 102 à 147 milliards de francs telle que résultant du calcul précédent, l'aide supplémentaire nominale est comprise dans une fourchette entre 53 et 98 milliards de francs de plus que le montant total de 49 milliards de francs autorisé par la Commission en 1995 et 1996. Une telle augmentation, aboutissant à un montant d'aides unique dans les annales de la Communauté, ne peut être approuvée que sur la base de contreparties très substantielles.

8. CARACTÈRE D'AIDES D'ÉTAT DES MESURES PUBLIQUES DE SOUTIEN EN FAVEUR DU CRÉDIT LYONNAIS
En application du principe dit de «l'investisseur privé en économie de marché», et pour autant que les mesures en question affectent les échanges et faussent ou menacent de fausser la concurrence, la Commission a indiqué, dans la communication (26) aux États membres (auparavant citée) de 1993, que des injections en capital au sein d'entreprises publiques contiennent des éléments d'aides d'État si, dans des circonstances analogues, un investisseur privé n'aurait pas, compte tenu de la rémunération attendue de l'apport de fonds, procédé à l'injection de capital en question.
Il convient tout d'abord de noter que le montant unique des sommes financières mobilisées dans cette opération d'aides, la plus importante de l'histoire de la Communauté en faveur d'une même entreprise, désigne l'État comme le seul acteur ayant pu mobiliser de telles sommes, de par sa capacité quasi illimitée de financement par l'impôt ou par l'emprunt sur le marché. Aucun groupe privé en Europe ni vraisemblablement dans le monde n'aurait eu la capacité financière suffisante pour mobiliser un tel montant d'aide.
Deuxièmement, les fonds mobilisés, dont le montant actualisé brut est 130 milliards de francs français (minimum), ne produiront qu'un faible retour sans proportion avec l'effort financier consenti. L'État ne peut récupérer sur les montants investis que la valeur combinée de la clause de retour à meilleure fortune et des revenus de privatisation du CL. De sorte que, l'État ne récupérant pas sa mise de fonds, le retour sur investissements des fonds publics affectés au sauvetage du CL est très négatif et ne peut en aucun cas être comparé au retour sur investissements qu'attendrait un opérateur privé dans une opération financière à risque, estimé en 1995 lors de la décision 95/547/CE sur le Crédit Lyonnais à taux annuel de rentabilité de 12 % par an des capitaux investis. Le principe de l'investisseur privé en économie de marché n'étant pas satisfait, il convient de conclure que les mesures de sauvetage et de restructuration de la banque en question sont des mesures d'aide.
Les autorités françaises avaient après la première recapitalisation du CL en 1994 invoqué l'obligation de respecter la contrainte réglementaire de fonds propres introduite par la directive 89/647/CEE du Conseil du 18 décembre 1989 relative à un ratio de solvabilité des établissements de crédit (27). Elles ont par ailleurs indiqué à la Commission lors de la notification des aides d'urgence en 1996 qu'à défaut de celles-ci, le CL risquait d'être dans l'incapacité de respecter le ratio minimal de solvabilité prévu par ladite directive. La Commission, ainsi qu'elle l'avait déjà indiqué dans sa décision 95/547/CE, souligne sur ce point que le fait qu'une contrainte réglementaire sur la solvabilité des banques ait été introduite par une directive communautaire ne saurait ôter à une injection de fonds publics ou à toute mesure d'effet équivalent, destinée au respect de cette directive, le caractère d'une aide si, dans des circonstances similaires, un investisseur privé n'aurait pas jugé qu'un tel investissement lui apportait une perspective de rémunération normale. Le respect de la directive communautaire s'entend uniquement dans une perspective de continuité d'exploitation et de maintien de la licence bancaire de l'entreprise recapitalisée. Cette directive, en revanche, n'interdit nullement de mettre un établissement de crédit en liquidation, s'il apparaît qu'une injection de fonds propres supplémentaires ne satisferait pas le principe de l'«investisseur privé en économie de marché» rappelé ci-dessus et constitue de ce fait une aide d'État mobilisant des fonds publics, dont la compatibilité avec l'intérêt commun, au même titre que celle de toute aide, doit alors être examinée au regard des règles du traité. De sorte que les autorités ne sauraient opposer au respect de l'article 92 du traité la directive communautaire instituant une contrainte réglementaire de solvabilité.
Il convient également de rappeler que la Commission avait conclu dans sa décision 95/547/CE que les mesures en question, qu'elle avait à l'époque évaluées à un montant net de 45 milliards de francs, étaient des aides, que ce soit la première augmentation de capital de mai 1994 ou la prise en charge par l'État des deux premières opérations de défaisance. La présente décision ayant pour objet l'augmentation des pertes et des coûts de portage de la défaisance (y inclus la «neutralisation» du prêt du CL à l'EPFR) et l'abandon de l'obligation de coupon-zéro prise en déduction de l'aide dans la décision 95/547/CE, les mesures ainsi visées n'ont pas une nature différente des précédentes dont elles traduisent la dérive des coûts. Les aides visées par la présente décision sont l'augmentation de la valeur des aides estimées par la Commission dans sa précédente décision: elles sont donc des aides d'État au même titre que les aides initialement estimées par la Commission en 1995.
La Commission a en particulier examiné les dispositions prévues à l'article 52 de la loi bancaire du 24 janvier 1984 autorisant le Gouverneur de la Banque de France «à inviter les actionnaires et sociétaires d'un établissement de crédit à lui fournir le soutien qui lui est nécessaire si la situation le justifie». La Commission constate que dans plusieurs cas récents les actionnaires privés d'établissements de crédit en difficulté, malgré les montants financiers en jeu très inférieurs à celui de la présente opération, ont refusé de suivre l'invitation du Gouverneur de la Banque de France à faire un nouvel apport en capital (28). Elle considère que cet appel à la solidarité des actionnaires n'a pas de caractère obligatoire, et qu'il est légitime que les actionnaires examinent l'opportunité d'un nouvel apport de fonds sur la base des perspectives de rentabilité qu'aurait toute nouvelle injection en capital ou toute mesure équivalente, sur la base du plan de redressement de l'établissement de crédit en question, et conformément au principe de l'investisseur privé en économie de marché rappelé ci-dessus. Telle est au demeurant l'interprétation de la Cour d'appel de Paris, qui a rendu le 13 janvier 1998 un arrêt (29) aux termes duquel l'article 52 ne saurait être interprété dans un sens coercitif. L'État actionnaire ne saurait donc, sur la base de l'article 52, considérer que son intervention en renflouement de la banque était requise de par la loi indépendamment des règles du traité.
Le respect de la discipline du marché prévoyant la possibilité que les établissements de crédit structurellement non rentables soient sanctionnés, et le cas échéant expulsés du marché dans le cadre d'une liquidation, constitue un élément fondamental afin d'assurer la confiance des opérateurs économiques. En revanche, le maintien artificiel en vie d'établissements insuffisamment rentables comporte des distorsions de concurrence importantes, un problème d'aléa moral et se traduit in fine en une fragilisation du reste du système bancaire. D'un autre côté, il provoque de graves distorsions dans l'allocation des fonds et donc un dysfonctionnement de l'économie dans son ensemble. La Commission partage sur ce point l'avis de la Commission Bancaire française qui note dans son rapport 1995 qu'une restructuration ordonnée du système bancaire français implique que les établissements de crédit, qui sont des entreprises comme les autres et qui de ce fait ne doivent pas être à l'abri des sanctions du marché, puissent disparaître (30). De sorte que la disparition d'institutions bancaires ne doit pas être considérée comme étant en soi un signe de l'inadéquation des mécanismes existants de supervision, mais un signe que les forces du marché sont à oeuvre et que les banques n'en sont, pas plus que d'autres, protégées. La Commission constate, sur cette base, que les objectifs de la politique de la concurrence et ceux de la politique prudentielle en matière bancaire ne sauraient être opposés, puisque les deux visent un objectif commun, celui du développement d'un secteur bancaire concurrentiel et sain. Ceci implique que les autorités de supervision bancaire doivent prévoir des politiques permettant d'accompagner la disparition d'entreprises bancaires non compétitives.
Lors de la notification des mesures transitoires d'urgence en septembre 1996, les représentants des autorités françaises ont, au cours des réunions tenues avec la Commission, fait état, en cas d'insolvabilité de la banque, du risque d'une crise systémique pouvant se propager à l'ensemble du système financier et à l'économie tout entière, au demeurant dépendant des mesures d'accompagnement d'un processus de liquidation qu'auraient le cas échéant prises les autorités françaises. La Commission n'était pas à l'époque en mesure d'exclure dans un bref laps de temps le risque d'insolvabilité du CL, et n'est pas dans cette hypothèse en mesure d'exclure un tel risque de propagation de la crise du CL à l'ensemble du secteur financier. La Commission ne conteste pas l'existence possible d'un tel risque, dont elle a tenu compte en approuvant les mesures d'urgence qui lui ont été notifiées à l'époque, dans l'attente d'un examen sur le fond de l'ensemble du dossier, y compris d'un nouveau plan de restructuration, ainsi que prévu par les lignes directrices de la Commission sur les aides au sauvetage et à la restructuration. La Commission note toutefois que l'État ne peut en permanence invoquer le risque d'une telle crise pour se soustraire aux conséquences de l'article 92 du traité.
Ainsi qu'elle l'avait noté dans sa décision 95/547/CE, la Commission considère que l'ampleur unique des pertes occasionnées par le sauvetage du CL s'explique en grande partie par la carence des moyens de contrôle de l'État actionnaire sur l'entreprise et le retard avec lequel les premières mesures importantes de restructuration ont été prises. Ces coûts traduisent un comportement qui ne peut être imputé à un actionnaire avisé et manifestent une grave carence de gouvernement d'entreprise, ayant conduit à des dérives multiples caractérisées par l'irresponsabilité des décisions des précédents dirigeants de la banque, le manque de transparence de la gestion et des comptes de l'entreprise et une chaîne de prise de décisions ne prenant pas en compte l'évaluation des risques qui figure normalement au cours du processus de décision d'une banque. La carence des contrôles internes et externes de la banque, associée à la stratégie d'expansion forcée de la banque à la fin des années 1980 et au début des années 1990, explique l'ampleur unique du sinistre financier du CL. La Commission souligne que cette carence de gouvernement d'entreprise a été accentuée par la confusion des rôles de l'État actionnaire, de l'État entrepreneur, de l'État providence et de l'État régulateur, confusion qui a conduit l'État actionnaire à laisser dégénérer une situation d'une gravité inédite, contraire à ses intérêts patrimoniaux.
Ainsi que la Commission l'a noté dans sa décision 95/547/CE, elle ne dispose pas d'éléments chiffrés permettant d'établir que les coûts cumulés de la recapitalisation de 1994 et les coûts prévisibles de la défaisance du CL à la charge du budget de l'État sont supérieurs aux coûts que l'État aurait encourus si une autre solution de vente ou de liquidation avait été choisie. En tout état de cause, le coût aurait été moindre si l'État était intervenu avant le déclenchement de la crise.
La Commission prend en particulier note des exemples de jurisprudence des tribunaux français, dans des cas précédents, étendant la responsabilité de l'État sur le passif de liquidation au-delà de ses apports au capital de l'entreprise. La Commission et la Cour de justice des Communautés européennes, dans des précédents analogues (31), ont déjà rejeté l'argument étendant la responsabilité de l'État actionnaire sur le passif de liquidation au-delà de ses apports au capital de l'entreprise, au motif que cette extension de responsabilité établissait un amalgame entre les rôles de l'État actionnaire et de l'État providence. La jurisprudence des tribunaux ne retire rien au caractère d'aide d'une telle opération: en effet, l'État actionnaire, qui connaissait cette jurisprudence sur la base de la loi relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises de 1985 (32), aurait dû prendre, longtemps avant les mesures actuellement examinées, des dispositions de renforcement du contrôle des risques dans la phase d'expansion de la banque, puis de restructuration ou de liquidation de la banque lorsque la crise est apparue. Il n'a donc pas fait en la circonstance preuve d'un comportement d'actionnaire ni d'investisseur avisé en économie de marché, selon le principe applicable rappelé ci-dessus. Indépendamment de ce point, la Commission considère en outre que les autorités françaises n'ont pas apporté la preuve, requise dans le cadre de la loi de 1985, que l'État actionnaire était assimilable à un dirigeant de droit ou de fait de l'entreprise. Dans cette hypothèse, les dirigeants de droit ou de fait encourent une responsabilité sur le passif de liquidation de l'entreprise en cas de fautes de gestion, et à hauteur des conséquences financières de celles-ci. Enfin, la Commission note que, quand bien même ces éléments non démontrés seraient établis, de telles dispositions ne permettraient pas à l'État français de se soustraire à l'application de l'article 92 du traité sans contradiction avec le principe de droit qui veut que nul ne puisse fonder son argumentation sur ses propres fautes.
Si bien que, quand bien même une liquidation du CL aurait eu des coûts directs ou indirects très supérieurs à ceux des mesures prises par les autorités françaises, cette situation qui est imputable aux carences de l'État actionnaire, pendant de nombreuses années, ne saurait donc être invoquée pour considérer que les mesures en question ne sont pas des aides. Il résulte de tous ces éléments que le caractère d'aide des mesures de sauvetage et de restructuration de la banque ne peut être contesté en invoquant le coût le cas échéant très supérieur qu'aurait une liquidation de la banque, fût-ce dans un contexte éventuel de crise financière et systémique.

9. DISTORSION DES ÉCHANGES ENTRE LES ÉTATS MEMBRES
La libéralisation des services financiers et l'intégration des marchés financiers ont pour effet de rendre les échanges intracommunautaires de plus en plus sensibles à des distorsions de la concurrence. Cette tendance ne fait que s'accentuer dans le contexte de l'union économique et monétaire (33). Avec la création de la monnaie unique, les échanges au sein de la Communauté pourront se développer sans risque ni coût de change. Bien que, en principe, les établissements financiers puissent exercer leur métier sans frontières, ils trouvent des obstacles à leur expansion à l'étranger. Ces obstacles sont souvent liés à la protection des établissements nationaux contre les effets de la concurrence, protection qui rend l'entrée dans le marché pour les concurrents étrangers moins avantageuse. Les aides qui ont pour but de permettre la survie des établissements financiers en dépit de leurs moindres rentabilité et capacité de faire face aux défis concurrentiels, comme celles octroyées au CL, risquent donc de fausser la concurrence au niveau communautaire, puisqu'elles rendent plus difficile l'entrée des établissements financiers étrangers sur les marchés nationaux.
Sans les aides en question, le CL devrait être liquidé ou vendu, en une ou plusieurs entités, à une ou plusieurs institutions plus solides, éventuellement dans le cadre d'une procédure judiciaire. Dans une telle éventualité, l'établissement ou ses activités pourraient faire l'objet d'un achat de la part d'un concurrent étranger voulant s'installer ou augmenter sa présence commerciale en France. Une telle procédure faciliterait une dispersion des actifs et des parts de marchés du CL auprès d'un nombre élevé d'acquéreurs potentiels. Il est à noter que le plan soumis par les autorités françaises en juillet 1997 ne prévoit pas la cession séparée de chaque filiale française et étrangère du CL, mais la simple mise en bourse du CL dans son ensemble.
En outre, une aide à un établissement d'envergure internationale comme le CL fournissant des produits financiers diversifiés aux entreprises qui sont en concurrence sur les marchés internationaux et offrant des services financiers aux particuliers en concurrence avec d'autres établissements financiers européens, tout en élargissant son activité à l'étranger à travers son réseau d'agences en dehors de la France, est susceptible d'avoir un effet distorsif sur les échanges intracommunautaires. En particulier, les aides en question pourraient permettre au CL, entre autres, la restructuration d'un certain nombre de ses activités à l'étranger qui sont en concurrence avec d'autres établissements financiers communautaires.
Il est à noter qu'en 1997, les activités internationales du CL ont contribué à hauteur de 810 milliards de francs au total de l'actif de la banque, soit 54 % du total. La part de l'activité européenne dans le total de l'actif de la banque était de 32 % à la fin de 1997, ce qui correspond à environ 474 milliards de francs français.
Par conséquent, il faut considérer que l'intervention publique en question relève de l'article 92 paragraphe 1 du traité, puisqu'elle constitue une aide d'État qui fausse la concurrence dans une mesure susceptible d'affecter les échanges intracommunautaires.

10. EXAMEN DE LA COMPATIBILITÉ DES AIDES AU CRÉDIT LYONNAIS

10.1 Cadre légal, critères et méthode de l'examen de la compatibilité des aides en faveur du Crédit Lyonnais
Après avoir déterminé la nature d'aide d'État des mesures sous examen, selon l'article 92 paragraphe 1 du traité, la Commission doit examiner si celles-ci peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun, au sens de l'article 92 paragraphes 2 et 3 du traité.
En l'espèce, il faut d'abord considérer qu'il ne s'agit ni d'une aide à caractère social octroyée à des consommateurs individuels, ni d'une aide de nature à (et octroyée pour) faciliter le développement de certaines régions françaises. Il ne s'agit pas non plus d'une aide destinée à remédier à une grave perturbation économique, puisque l'aide vise à remédier aux difficultés d'un seul bénéficiaire, le CL, et non pas à des difficultés aiguës de tous les opérateurs du secteur. Par conséquent, l'aide octroyée ne peut pas non plus être qualifiée comme étant d'intérêt européen commun. Seule la dérogation prévue au point c) de l'article 92 paragraphe 3 pourra être prise en considération. En vertu de celle-ci, la Commission a le pouvoir d'autoriser «les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités économiques [ . . . ] quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun». Dans l'évaluation de la compatibilité de l'aide avec l'intérêt commun, la Commission tient compte de l'ampleur des distorsions de concurrence, des contreparties prévues pour limiter ces distorsions, de la limitation des aides au strict nécessaire et de la viabilité de l'entreprise aidée.
La Commission a formalisé les conditions d'application de cette dérogation dans l'encadrement sur les aides à la restructuration (34). Ces lignes directrices énoncent que «les aides à la restructuration posent des problèmes particuliers en matière de concurrence, étant donné qu'elles peuvent aboutir à transférer une part inéquitable de la charge d'une adaptation structurelle et des problèmes sociaux et industriels qui en découlent à d'autres producteurs qui ne bénéficient pas d'une aide ainsi qu'à d'autres États membres». La Commission considère que les aides à la restructuration peuvent contribuer au développement d'activités économiques sans affecter les échanges dans une mesure contraire à l'intérêt communautaire lorsque les conditions suivantes sont remplies, à savoir:
1) un plan de restructuration basé sur des hypothèses réalistes et permettant de rétablir dans un délai raisonnable la rentabilité minimale requise des capitaux investis et d'assurer ainsi la viabilité à long terme de l'entreprise;
2) l'apport de contreparties suffisantes pour compenser l'effet distorsif de l'aide sur la concurrence, et pouvoir ainsi conclure que l'aide n'est pas contraire à l'intérêt commun;
3) la proportionnalité de l'aide aux buts recherchés et la limitation du montant de l'aide au strict minimum nécessaire à la restructuration, afin que l'effort de redressement soit supporté au maximum par l'entreprise elle-même;
4) la mise en oeuvre intégrale du plan de restructuration et l'exécution de toute autre obligation prévue dans la décision finale de la Commission;
5) la mise en place d'un système de contrôle de la condition précédente.
En application de l'encadrement des aides à la restructuration, les aides à la restructuration ne devraient normalement être nécessaires qu'une seule fois. Vu le caractère doublement additionnel des aides en question par rapport à celles qui avaient été approuvées en 1995 et en 1996 ainsi que leur importance et leur effet distorsif, l'examen du respect des conditions susmentionnées doit être particulièrement rigoureux et détaillé.

10.2 Contexte concurrentiel des activités du CL et effets distorsifs des aides
Le secteur bancaire européen, et particulièrement français, traverse une phase d'ajustement caractérisée par une concurrence aiguë, sous l'impulsion de la libéralisation des marchés des capitaux, de la rapidité des évolutions technologiques, et de l'achèvement de la monnaie unique. Le décloisonnement définitif des marchés et la perte des revenus des commissions de change entre les monnaies des pays de l'Union économique et monétaire vont accroître les tensions concurrentielles au sein de la Communauté. Cette situation est de nature à accélérer une intégration de l'offre sous forme de regroupements d'entreprises bancaires, ou, plus largement, financières, en raison notamment des complémentarités existant entre la banque et l'assurance (les réseaux bancaires sont en effet, au cours des dernières années, devenus l'un des principaux distributeurs des produits d'assurance). Un tel phénomène d'intégration de l'offre provoquera inéluctablement des restructurations supplémentaires afin de permettre aux nouveaux groupes constitués de bénéficier pleinement des synergies créées et d'éliminer les redondances résultant des opérations de regroupement.
Le Crédit Lyonnais exerce ainsi ses activités financières dans des contextes très compétitifs. Les activités de banque de détail aussi bien que celles de banque de gros et de marché de capitaux sont soumises à de fortes pressions concurrentielles. Dans les activités de banque commerciale en Europe, la concurrence a pour effet de réduire les marges d'intermédiation financière, qui connaissent une érosion régulière depuis une décennie. Les banques tentent de lutter contre cette perte de valeur ajoutée par des prestations génératrices de commissionnement, dont la part dans le PNB connaît une croissance sur la moyenne des établissements financiers français.
Ainsi qu'exposé précédemment, les aides d'État en faveur du CL dérivent de plusieurs facteurs: une exposition excessive et non maîtrisée sur l'immobilier, une politique imprudente d'expansion à l'étranger, mais également un système de contrôle inefficace de la part de son actionnaire qui n'a pas su arrêter à temps les comportements risqués de ses dirigeants. En d'autres termes, le système global de gouvernement d'entreprise du CL s'est montré inadéquat.
Étant donné le retard avec lequel le CL a réagi au retournement cyclique et à l'apparition de ses difficultés (le marché immobilier connaît une baisse continue des loyers et des prix depuis 1990), compte tenu de la lenteur des processus de redressement, il est clair que les aides à présent considérables sont également la conséquence de la confiance que les dirigeants du CL ont placée dans l'État actionnaire, en tout état de cause obligé de couvrir les erreurs du passé, comme le montrent bien les arguments apportés par les autorités françaises sur les coûts des solutions alternatives. Évidemment le CL n'était pas le seul groupe à s'être lancé dans une politique hautement spéculative, mais seuls les établissements publics ont pu compter sur des aides d'État alors que les établissements privés ont été contraints par les marchés de se restructurer de façon drastique ou de suivre une procédure de règlement judiciaire. Il en résulte une asymétrie des conditions de concurrence entre les établissements bancaires publics et privés qui constitue une grave distorsion des conditions normales du marché. Dans le cas d'espèce, il y a lieu de croire que si le CL n'avait pas en permanence eu le soutien total implicite ou explicite de l'État, il ne se serait pas lancé dans la politique hasardeuse qu'il a conduite, ou qu'en tout état de cause il aurait entrepris son redressement plus tôt et avec plus de détermination.
Un tel soutien public, qui finalement signifie une «assurance survie» pour les établissements défaillants, ainsi que souligné par le rapport d'information n° 52 du Sénat français (35), a également pour effet de protéger leurs créanciers. Mais une telle protection élimine pour les créanciers l'incitation à contrôler le comportement de leurs débiteurs. Les établissements ne sont plus soumis au contrôle et à la sanction des marchés. Une telle protection n'est pas seulement indue et excessive, mais elle a aussi pour conséquence «d'inciter à une mauvaise gestion des établissements de crédit» - comme affirmé par le Parlement européen et le Conseil de l'Union européenne dans la directive 94/19/CE (36) du 30 mai 1994 relative aux systèmes de garantie des dépôts. Le soutien de l'actionnaire, qui à son tour a permis le soutien des marchés, a eu pour effet de retarder la correction nécessaire et d'augmenter les aides d'État finales. Par conséquent, et conformément aux déclarations du Conseil et du Parlement européen, la Commission souscrit pleinement à l'argument, établi dans le monde académique et par la pratique des crises bancaires dans plusieurs pays, soulignant l'importance de ce problème d'effet pervers ou aléa moral («moral hazard») pour expliquer la crise du CL.
Il convient également de souligner que l'effet distorsif des aides sur la concurrence ne concerne pas seulement la politique passée du CL et des banques publiques aidées, mais peut également créer des anticipations sur l'avenir. Comme l'ont affirmé les autorités britanniques dans leurs commentaires soumis dans le cadre de la présente procédure, la répétition de l'aide peut générer des attentes d'aides futures par le «management» de la banque, ce qui peut produire de nouveaux effets distorsifs sur la concurrence. De plus, les aides d'État aux institutions les plus fragiles jouent un rôle néfaste et contribuent aux pressions à la baisse des marges du secteur. Les aides d'État, surtout lorsqu'elles présentent un caractère répétitif, comme dans le cas du CL, représentent une prime à l'inefficacité et vont à l'encontre de la discipline de marché. Pour cette raison, les lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration énoncent que les aides ne devraient être normalement nécessaires qu'une seule fois.
Une telle situation, se traduisant par un soutien quasi systématique de l'État aux établissements publics en difficulté (CL, GAN-CIC, Crédit Foncier de France, Marseillaise de Crédit, Comptoir des Entrepreneurs) et le caractère répétitif de la plupart de ces opérations de sauvetage, a pour effet d'exacerber les conditions de concurrence que rencontrent les banques françaises et européennes dans l'hexagone. Elle aggrave les difficultés du secteur financier dans son ensemble et pèse tout particulièrement sur la rentabilité des banques privées, ce qui représente une grave distorsion de concurrence, y compris pour les banques des autres États membres opérant en France, ou voyant le développement de leurs activités en France entravé par cette situation. Ainsi que souligné par un rapport du Commissariat général au Plan (37), l'asymétrie des conditions d'entrée et de sortie du secteur bancaire qui en résulte est de nature à provoquer un encombrement artificiel du secteur bancaire français, alors que la contrepartie normale de la libre entrée dans la branche devrait en être la libre sortie. Cette incohérence est l'une des causes essentielles, voire la cause principale, des difficultés du secteur bancaire français (38). Selon le rapport précédemment cité de la Commission des Finances du Sénat, «en écartant systématiquement l'option de la liquidation et celle de la vente, les gouvernements n'ont fait que rendre ces (leurs) options plus coûteuses, une fois l'inefficacité du renflouement avérée. Le Crédit Lyonnais illustre malheureusement cette vérité: le coût de la procrastination s'avère élevé» (39).
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Toute solution durable pour le CL et le système bancaire public en France doit donc passer par une réforme du système global de contrôle de la gestion («corporate governance») du groupe et de ses établissements et par une solution au problème d'aléa moral provoqué par le soutien en dernier ressort de l'État. Dans le cas d'espèce, la Commission considère que les engagements de privatisation et de contraction drastique du groupe pris par le gouvernement français apporteront une solution durable aux déficiences du gouvernement d'entreprise constatées dans le passé.
Dans ce contexte, il convient de noter que l'interprétation de l'article 52 de la loi bancaire de 1984 donnée dans de nombreux cas par les autorités françaises (précédemment citée, cf. section 9 ci-dessus) ajoute un élément distorsif supplémentaire aux conditions de concurrence en vigueur dans le secteur bancaire français. Selon les autorités françaises, les actionnaires seraient dans l'obligation d'apporter leur soutien à l'établissement défaillant si les autorités monétaires les y invitent. Il convient sur ce point de souligner que ceci introduit une inégalité entre les banques privées et les banques publiques, dont l'actionnaire dispose de moyens illimités, et qu'une telle interprétation suscite des comportements économiques irrationnels d'allocation des ressources, fausse le fonctionnement normal du marché et les conditions de concurrence en vigueur dans le secteur bancaire français. Cette interprétation coercitive de la loi bancaire, récemment rejetée par un arrêt de la Cour d'appel de Paris, a certainement durablement contribué au comportement imprudent des dirigeants des entreprises bancaires publiques françaises, forts du soutien quasi systématique de leur actionnaire. En provoquant de telles anticipations, elle a accentué les distorsions de concurrence déjà existantes. Le fait que les autorités françaises invoquent encore, dans de nombreuses affaires de crises bancaires, le caractère coercitif qu'elles attribuent à l'article 52, montre que les leçons des crises à répétition des établissements bancaires publics français n'ont pas été complètement tirées au niveau de l'État actionnaire et qu'il est prêt à répéter certaines erreurs du passé.
Au lieu d'un tel soutien quasi inconditionnel, surtout lorsque les autorités françaises mettent elles-mêmes en avant l'argument d'un risque de propagation au reste de la sphère financière d'une crise systémique dans le cas de grandes banques telles que le CL (argument connu comme l'argument du «too big to fail»), la Commission considère qu'au contraire les autorités françaises doivent, dans l'intérêt commun, suivre une stratégie différente de résolution des crises bancaires, afin d'en minimiser les effets distorsifs sur la concurrence. La politique qu'elle préconise vise à encourager la responsabilité des comportements des dirigeants des entreprises bancaires, publiques comme privées. Pour cela, il importe non seulement que les autorités responsables fassent clairement et publiquement savoir que les établissements de crédit seront normalement soumis aux sanctions du marché et que les banques, pas plus que les autres entreprises, ne sont pas à l'abri d'une liquidation (ainsi que l'écrit la Commission bancaire française dans son rapport 1995 précédemment cité), mais aussi que l'État actionnaire agisse en conséquence lors du traitement des crises bancaires, et sans opérer de discrimination entre les banques publiques et les banques privées. Une telle politique doit être accompagnée de mesures de protection des petits déposants par des instruments tels que les fonds de garantie des dépôts (40). Elle requiert aussi des stratégies d'accompagnement de processus de liquidation ordonnée des établissements bancaires défaillants, visant à circonscrire les crises et à éviter leur propagation au niveau du reste du secteur financier et de l'économie. La Commission considère que les États membres disposent d'instruments, tels que les garanties temporaires de passif, permettant d'encadrer de tels processus de liquidation ordonnée et permettant le cas échéant d'éviter le développement d'une crise systémique. La Commission a consulté un groupe de «sages» constitué d'ex-gouverneurs de banques centrales des États membres, qui lui ont fait part de leur assentiment sur ce point.

10.3 Examen de la viabilité du Crédit Lyonnais dans les hypothèses du plan soumis à la Commission en juillet 1997
Il convient de rappeler que le principe général établi dans les lignes directrices sur les aides à la restructuration devrait être «de n'autoriser une aide que dans les cas où il est de l'intérêt de la Communauté qu'elle le soit.» La Commission a en premier lieu procédé, avec l'appui de sa banque conseil, à une analyse du plan soumis par les autorités françaises dans le cadre de cohérence interne des hypothèses de ce plan. Un tel examen du plan ne préjuge nullement des changements qui pourraient devoir lui être apportés compte tenu des politiques communautaires en matière d'aides d'État, de sorte que ces hypothèses ne sont pas considérées par la Commission comme intangibles.
Selon le plan des autorités françaises, avec une «neutralisation totale» du prêt, le CL connaîtrait une croissance continue de ses résultats, qui passeraient de 0,2 milliard de francs en 1996 à 3,2 milliards de francs en l'an 2000 (résultat net part du groupe, après distribution de la clause). Après l'an 2000, selon la banque conseil de la Commission, compte tenu du résultat élevé atteint, ces résultats se stabiliseraient et ne connaîtraient plus qu'une croissance plus lente.
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À la suite des mesures de restructuration prises sur le réseau France, la principale source de marges du CL à l'issue du plan serait le réseau métropolitain, qui dégagerait environ 57 % du résultat net (41) du CL dès l'an 2000.
Les travaux menés par la banque conseil de la Commission aboutissent, en prenant tels quels les objectifs fixés par le CL (mise en bourse progressive du capital à l'horizon 2000, stratégie d'une banque universelle en France et d'une banque d'entreprises dans le reste du monde), à plusieurs conclusions.
En ce qui concerne la France (DCAF), les projections du CL apparaissent raisonnables à la banque conseil de la Commission. Elles sont fondées sur une stratégie explicite visant à défendre les parts de marché existantes et à réduire les coûts opérationnels. Le plan repose sur la réussite du programme de réduction des coûts et l'amélioration de la qualité des actifs. Dans la mesure où le CL n'ambitionne pas de regagner de parts de marché (sauf pour le crédit à la consommation dans le cadre de son partenariat avec le Cetelem), les objectifs fixés paraissent à sa portée. La banque conseil de la Commission a effectué une analyse de sensibilité montrant que, même dans l'hypothèse où le CL réduirait ses frais généraux et son coefficient d'exploitation à un rythme sensiblement moins rapide que prévu, sa rentabilité ne serait pas remise en cause. Par contre, la croissance des fonds propres serait beaucoup plus lente et le ratio de solvabilité («tier one») ne dépasserait 5 % qu'à partir de l'an 2000. Une augmentation de 20 % du niveau de provisionnement par rapport à celui du plan aurait un impact moindre sur le résultat et le ratio de fonds propres. La banque conseil de la Commission a considéré que, dans la mesure où les hypothèses du plan d'affaires en termes de volume d'affaires et de Produit Net Bancaire étaient plutôt conservatrices, une analyse de sensibilité sur une baisse du PNB n'était pas requise.
La banque conseil de la Commission a examiné les autres opérations du CL. Elle a souligné que sa performance en Europe dépendait largement, sur la période du plan, de la performance de la BfG (dont la cession n'est envisagée dans le plan qu'à l'horizon 2000) dont les résultats devraient être stabilisés à la suite de sa restructuration et des réorientations stratégiques introduites. Dans la mesure où le plan prévoit d'importantes cessions en Europe, ses performances sur le vieux continent seront affectées par des éléments exceptionnels suivant que le CL dégage des plus ou moins-values de cession. La banque conseil de la Commission a noté qu'à la suite du désengagement du CL de ses activités de banque de détail dans le monde, et de l'intégration en cours des activités de marchés et de banque d'entreprises, d'importantes synergies permettaient d'améliorer la couverture globale des grands clients de la banque et plaçaient la banque dans une situation favorable pour atteindre ses objectifs. En particulier, Crédit Lyonnais Americas, qui est l'une des rares banques aux États-Unis d'Amérique à disposer de droits de banque commerciale et de banque d'affaires, ainsi que Crédit Lyonnais Securities Asia, très spécialisé sur les activités de courtage de marché, représentaient deux points forts du groupe. Ces deux points d'appui solides confortaient le caractère raisonnable de la stratégie internationale et des projections financières de la banque.
Sur la base des travaux de sa banque conseil, la Commission a conclu que le plan d'affaires qui lui a été présenté en juillet 1997 était globalement réaliste de par les hypothèses retenues, prévoyant une croissance raisonnable et n'impliquant pas d'objectifs trop ambitieux pouvant conduire le CL à une politique de prix agressive. Ce plan, cohérent dans sa structure, fait apparaître des niveaux de rentabilité suffisants à l'horizon 2000, de sorte que le CL apparaît viable à long terme, dans les hypothèses d'aides et de contreparties présentées par les autorités françaises en juillet 1997. Les résultats du CL en 1997 semblent globalement confirmer cette analyse. On notera que le PNB du CL a été supérieur à celui de 1996 alors que le plan prévoyait une réduction importante du PNB.
Ces conclusions doivent être pondérées par plusieurs éléments. La performance du CL doit être examinée au regard de celle des établissements qui lui sont les plus comparables. Compte tenu des différents métiers exercés par le CL, une telle comparaison n'est pas simple et requiert l'examen d'un nombre considérable d'établissements et de marchés suivant des critères multiples, concernant la taille, la structure, l'organisation, la rentabilité, la distribution, la présence sur le marché national et à l'international, etc. Cet examen a été conduit par la banque conseil de la Commission non seulement par rapport aux banques françaises les plus proches du CL, telles que la Société Générale et la B.N.P., mais aussi également eu égard aux évolutions en cours dans les autres marchés bancaires en Europe et dans le monde.
Il ressort de cette analyse que les efforts de restructuration entamés par le CL sont importants mais encore à ce stade inachevés. Le CL présente encore un volume important de personnel et un nombre élevé d'agences, ce qui se traduit par des frais généraux considérables. Le transfert à la défaisance de 190 milliards de francs d'actifs a amélioré la rentabilité brute du portefeuille (mesurée par les ratios marge d'intérêt sur actifs moyens et résultat brut d'exploitation sur actifs moyens), mais les ratios de rentabilité nette du CL (retour sur actifs et sur fonds propres) restent nettement inférieurs à ceux de ses concurrents comparables. Le niveau du coefficient d'exploitation (76 % en 1997) est encore trop élevé par rapport à ceux des concurrents français du CL (ayant un ratio d'environ 70 %) et étrangers (ayant un ratio d'environ 60 %).
Dans la perspective de la phase finale de l'union économique et monétaire, des réductions supplémentaires de ce ratio seront très probablement nécessaires pour la plupart des banques européennes et a fortiori pour le CL. Du point de vue de la qualité des actifs, la défaisance a certainement permis une amélioration considérable et aujourd'hui le niveau de couverture des créances douteuses a été rétabli à des niveaux plus appropriés. Compte tenu du fait que le contrôle des risques a été le facteur critique qui explique la plupart des problèmes du CL, il reste cependant à vérifier à moyen terme la capacité de la banque, que lui apporteront ses nouveaux systèmes de gestion des risques, d'anticiper, de prévenir et de gérer des risques majeurs dans le moyen terme et également de faire face avec ses propres moyens à des événements imprévus.
On notera, enfin, que par rapport à la stratégie poursuivie en termes d'extension géographique et de métiers, la taille du CL et en particulier la dimension de ses engagements pondérés, comportent un niveau de capitalisation inférieur à celui de ses concurrents, ce qui a pour effet, entre autres, d'alourdir son coût de financement sur les marchés en raison de son faible «rating» et de limiter sa marge de croissance possible. Sans les aides que le CL a reçues, il aurait dû considérablement réduire ses parts de marché en France, qui restent proches de celles de ses principaux concurrents. Le CL ne pourra renouer avec une stratégie de croissance, en valeur absolue et en termes de parts de marché, que lorsqu'il aura accumulé un niveau de fonds propres très supérieur aux fonds dont il dispose actuellement, ce qui suppose, si la banque n'est pas recapitalisée, une chronique régulière de résultats positifs sur plusieurs années.
Si bien qu'il convient de conclure, sur la base du plan notifié, que le CL est viable, mais qu'il doit encore conduire des efforts considérables afin de consolider le redressement en cours. La Commission, dans ses conclusions quant à la viabilité du CL, devra également prendre en compte les modifications très substantielles qu'il est nécessaire d'apporter au plan présenté compte tenu des exigences de minimisation des aides, et de contreparties pour les distorsions de concurrence, telles que prévues par les règles de concurrence communautaires (Cf. sections 10.4 et 10.5 ci-après).

10.4 Proportionnalité des aides aux coûts et avantages de la restructuration Modification des prévisions du plan notifié
Il convient de rappeler que les lignes directrices sur les aides au sauvetage et à la restructuration énoncent que «pour limiter les distorsions de concurrence il faut éviter que l'aide ne soit accordée sous une forme qui amène l'entreprise à disposer de liquidités excédentaires qu'elle pourrait consacrer à des activités agressives susceptibles de provoquer des distorsions sur le marché et qui ne seraient pas liées au processus de restructuration.» Pour apprécier si les aides sont proportionnées au but recherché et si le CL contribue dans toute la mesure de ses moyens au plan de restructuration soumis à la Commission, ainsi que requis par les lignes directrices sur les aides à la restructuration, la Commission a établi une différence entre les aides découlant de l'augmentation des pertes du CDR et celles qui avaient trait à la modification des conditions du prêt du CL à l'EPFR.
Les aides au CL au titre des pertes du CDR et de l'EPFR découlent pour l'essentiel du fait générateur de la défaisance en 1995, et il est difficile pour les pouvoirs publics d'en moduler le montant, sauf à remettre en cause les principes de base de la défaisance et notamment l'imputation des pertes du CDR à l'EPFR. Elles sont, de par leur origine (sauf erreurs de gestion du CDR, demeurant à établir cas par cas), imputables au CL dans la mesure où le CDR a repris les actifs et les créances de mauvaise qualité de la banque. Comme le CDR est une filiale non consolidée du CL (où le CL n'a plus, en vertu de la décision 95/547/CE, aucun pouvoir de décision), ces pertes n'affectent plus la situation financière du CL, ne lui étant plus imputées puisque l'État les prend à sa charge sous forme de recapitalisation de l'EPFR.
En revanche, les conditions de taux du prêt du CL à l'EPFR ont un impact direct sur la rentabilité du CL. Ainsi que le montre le tableau 13 précédent, la «neutralisation» des coûts nets de portage de ce prêt modifie très sensiblement les résultats du CL. Il s'agit d'une variable d'action possible pour l'État, qui a déjà eu recours à de telles modifications par le biais des aides d'urgence de 1995 et 1996 en vue d'améliorer la situation financière du CL. Pour cette raison, la Commission a examiné la proportionnalité aux objectifs recherchés des aides supplémentaires sur la base de la neutralisation du prêt à l'EPFR et de la suppression du coupon-zéro, qui représentent une augmentation importante du coût du portage de l'opération pour l'EPFR, à la charge de l'État.
La «neutralisation» du prêt à l'EPFR ne peut éventuellement être considérée comme nécessaire que si le CL n'est pas en mesure de financer lui-même les charges qu'il supporte sur le prêt à l'EPFR (en plus de la rémunération de 85 % du TMM). Il convient de rappeler que cette construction est une forme de contribution du CL au plan de redressement, permettant de limiter les aides. Il convient également de souligner que la «neutralisation» n'est pas assimilable à une opération d'investissement (avec aides) affectant le bilan de la banque, mais est un produit imputé à son compte de résultat. Pour cette raison, la nécessité de la neutralisation doit être appréciée par rapport à la situation financière du CL.
Le CL a, début mai 1998, réalisé de nouvelles prévisions de résultats sur la base des contreparties de cessions d'actifs prises en compte dans le cadre de la présente décision. Ces données réactualisées montrent que les hypothèses de base du plan sont profondément modifiées et que, de 1997 à 1999, le CL ne pourrait dégager un résultat positif sans une neutralisation du prêt, dont le montant est supérieur pour chacune de ces années au résultat (avant clause) dégagé par le CL. L'écart est particulièrement sensible en 1999, le CL prévoyant un résultat net inférieur de 2 milliards de francs à celui des prévisions de juillet 1997. La Commission peut admettre que, sans «neutralisation» du prêt à l'EPFR de 1997 à 1999, des pertes risquent de créer des tensions sérieuses, compte tenu du mauvais rating du CL et de sa mise sous surveillance début 1998 par l'agence de notation Moody's, si bien que la restructuration en cours serait compromise. La Commission reconnaît que les charges de restructuration prévues dans le cadre du plan de fermetures et de cessions auquel s'est engagé le gouvernement français pèsent lourdement sur les années 1998 et 1999, qui sont deux années stratégiques dans la vie du groupe en vue de la privatisation qui doit être achevée en octobre 1999.
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Par ailleurs, ainsi que des représentants du CL l'ont indiqué dans une réunion tenue le 7 mai 1998, le CL envisage, une fois les restructurations liées aux cessions effectuées, d'être à partir de l'an 2000 en mesure de financer son développement sans la «neutralisation» totale du prêt initialement proposée par les autorités françaises en juillet 1997. Il convient de souligner que les nombreux éléments liés aux restructurations consécutives à la présente décision ne sont pas récurrents au-delà de l'an 2000, vu le calendrier des cessions d'actifs qui devront être achevées le 31 décembre 2000. De sorte que les perspectives de moyen terme du CL, lors de sa privatisation en 1999, devraient être nettement plus favorables, sous réserve qu'il poursuive les efforts de restructuration interne engagés visant, notamment, à faire redescendre son coefficient d'exploitation (ratio frais généraux sur PNB) à un niveau d'environ 70 %.
La Commission considère que la privatisation du CL et la fin des incertitudes liées au plan d'aides vont profondément modifier les conditions d'exploitation de la banque. Son accès au marché pour augmenter ses fonds propres sera facilité. Le CL devrait bénéficier d'une baisse progressive du coût de ses ressources d'emprunt, actuellement plus onéreuses que celles de ses concurrents, en raison de sa mauvaise notation. Ses marges de taux devraient de ce fait revenir au niveau de celles de ses principaux concurrents. L'amélioration des marges de taux conforterait le redressement de l'exploitation engagé avec la réduction du coefficient d'exploitation. De sorte que, à la suite de la privatisation, les conditions devraient être réunies pour que s'engage un cercle vertueux durable. La Commission note par ailleurs que les problèmes du CL sont devenus particulièrement aigus dans une phase de retournement conjoncturel défavorable, en 1992 et 1993. Une banque est particulièrement sensible à l'évolution de la conjoncture, non seulement parce que sa croissance s'en ressent directement (dans le cas présent, la croissance du CL devrait à moyen terme rester faible en raison du maintien d'un mécanisme de bridage), mais aussi parce que les risques de ses clients et le taux de défaillance sur ses créances sont beaucoup plus faibles lorsque la conjoncture macroéconomique est bonne. Compte tenu des bonnes perspectives à moyen terme de l'économie européenne, grâce au contexte de croissance et de stabilité créé par l'Union économique et monétaire, la Commission considère que la poursuite du redressement du CL devrait pouvoir s'effectuer dans un contexte favorable, lui permettant de mener à bien les restructurations en cours et la réduction drastique de son bilan découlant de la présente décision, y compris compte tenu des limitations imposées à sa croissance par la présente décision. Sur cette base, la Commission considère, vu les nouvelles estimations du CL, que le diagnostic de viabilité fait à partir du plan initial de 1997 demeure fondé.
La Commission conclut que la neutralisation complète du prêt peut être accordée au CL pour les années 1997, 1998 et 1999 et qu'au delà, le CL pourra faire face aux charges de refinancement des passifs longs adossés au prêt à l'EPFR sans que sa viabilité soit remise en cause.
Cette limitation n'affecte pas le montant des aides telles que calculées (cf. tableau 15) sur la base de la neutralisation complète du prêt au CL. L'État perd en variation de la valeur de la banque l'équivalent de la diminution de l'aide, de sorte que l'impact, en termes patrimoniaux pour l'État, sur le montant net de l'aide est négligeable (42).
Sur cette base, les aides supplémentaires dont la compatibilité est examinée dans le cadre de la présente décision sont évaluées à une fourchette de 53 à 98 milliards de francs par rapport aux aides approuvées par la Commission en 1995 et 1996.
Par ailleurs, la Commission et le gouvernement français sont convenus qu'un mécanisme financier puisse être instauré, dont l'effet soit équivalent à l'effet de bridage qu'exerce l'obligation pour le CL de financer le prêt à l'EPFR à 85 % du TMM, soit au-dessous de son taux de refinancement au TMM. Le mécanisme de substitution, conformément au principe de l'investisseur privé en économie de marché rappelé ci-dessus, ne devra pas comporter d'aides nouvelles au CL (cf. ci-après section 10.6), et comportera un rehaussement à 100 % du TMM du taux de service du prêt à l'EPFR.
Compte tenu de cet élément, la Commission note que la non-mise en oeuvre du prêt de 10 milliards de francs du Crédit Lyonnais à l'EPFR, destiné à financer la souscription par l'EPFR d'une obligation à coupon-zéro, bien que représentant un manque à gagner pour l'État (pris en compte par la Commission dans le calcul des aides et les obligations de contreparties en découlant), l'EPFR étant privé d'une possibilité de transformation d'une ressource à taux de court terme en un emploi à taux de long terme, est sans effet direct sur le Crédit Lyonnais, qui se voit simplement déchargé d'une obligation d'emprunt et de prêt de 10 milliards de francs au TMM, sans effet sur son compte de résultat et sur son ratio de solvabilité (43).

10.5 Existence de contreparties proportionnées aux distorsions de concurrence causées par les aides au Crédit Lyonnais
L'analyse d'ensemble que la Commission fait en présence d'une aide à la restructuration d'une entreprise en difficulté doit prendre en compte l'intérêt commun au maintien de l'activité de l'entreprise en question, compte tenu du contexte concurrentiel du secteur, et d'autre part l'altération des conditions de concurrence provoquées par cette aide. Ces distorsions de concurrence peuvent être réduites par la limitation des aides au strict nécessaire, mais aussi par l'imposition à l'entreprise de contreparties compensatoires. Si la Commission est de la sorte en mesure d'obtenir une réduction substantielle des distorsions de concurrence, les aides, sous réserve des autres conditions prévues par l'encadrement à la restructuration, peuvent être déclarées compatibles avec l'intérêt commun.

a) Éléments d'évaluation des distorsions de concurrence
Il convient tout d'abord de rappeler que, en l'absence des aides qu'il a reçues, le CL aurait dû être mis en liquidation. Ainsi que prévu dans les lignes directrices de la Commission sur les aides au sauvetage et à la restructuration (44), le rôle des contreparties aux aides est d'atténuer les distorsions de concurrence liées aux aides sur les principaux marchés sur lesquels l'entreprise aidée est en concurrence avec des entreprises similaires. Avec les capacités ou les parts de marché ainsi libérées, cette réduction offre à ses concurrents une forme de compensation et permet d'atténuer autant que possible les distorsions de concurrence provoquées par les aides.
Il convient d'ajouter que des contreparties sous forme de cessions d'actifs du CL, se traduisant par une réduction de son bilan, telles que celles qui avaient été prévues par les autorités françaises en vue de la précédente décision 95/547/CE, permettent au CL d'affecter les produits de cession au financement du plan de restructuration et ainsi de faire contribuer l'entreprise, dans toute la mesure du possible, à celui-ci. De sorte que des contreparties substantielles peuvent également contribuer, dans le cas d'espèce, à la limitation des aides au strict nécessaire. La Commission est toutefois consciente des contraintes de marché pouvant dans certains cas rendre difficile la pleine valorisation des actifs cédés du CL.
Dans le secteur bancaire, la contrainte de solvabilité introduite par la réglementation bancaire européenne (le noyau de fonds propres «durs» est fixé à un minimum de 4 % des actifs pondérés, et les fonds propres au sens large doivent en représenter au minimum 8 %) introduit une obligation qui limite les capacités de croissance des institutions de crédit. En réalité, une telle contrainte de capitalisation existe dans l'absolu à moyen et long terme pour toute forme d'entreprise, mais dans le secteur bancaire elle s'exerce de façon permanente et immédiate, est directement quantifiable, et ne peut être temporairement relâchée dans le cadre d'une stratégie de croissance suivie par un établissement de crédit. Une institution de crédit ne satisfaisant que strictement la contrainte de solvabilité ne dispose pas de marge de croissance, tant qu'elle n'est pas en mesure d'attirer de nouveaux capitaux propres ou de faire croître ses capitaux propres par un niveau de profit significatif. De sorte qu'une institution inefficace voit sa croissance très directement «bridée», alors qu'une banque réalisant des bénéfices importants dispose d'une marge de croissance en relation avec sa rentabilité. Cet effet de bridage de la croissance des institutions les moins performantes en raison de la contrainte de solvabilité illustre très directement la complémentarité entre les politiques prudentielles préventives et les politiques de concurrence. La Commission, dans l'examen des contreparties proposées par les autorités françaises, a également pris en compte les engagements du gouvernement permettant de maintenir un bridage de la banque qui compense en partie l'effet distorsif des aides (cf. ci-après section 10.6).
Il résulte de la contrainte de solvabilité qu'une estimation théorique très indicative de la distorsion de concurrence est, dans le cas d'aides à des établissements de crédit, possible. Si les aides sont assimilables à des injections en capital, alors la distorsion de concurrence peut s'apprécier en termes d'actifs pondérés. Une injection en capital de 1 milliard de francs, ou toute mesure d'effet équivalent, permet à une banque d'accroître les actifs pondérés dans son bilan (compte tenu de la contrainte de solvabilité réglementaire de 4 à 8 %), et donc son niveau d'activités. Cette opération se traduit par une distorsion de concurrence potentielle de l'ordre de 12,5 à 25 milliards de francs (sans l'aide en question, la banque n'aurait pu augmenter de 12,5 à 25 milliards de francs le montant de ses actifs pondérés). Une telle relation implique aussi que, si l'aide à une institution de crédit dépasse ses fonds propres, la distorsion de concurrence est supérieure à la totalité de ses actifs pondérés. Le rôle des contreparties est, dans un tel contexte, de limiter la distorsion de concurrence ainsi estimée de façon très indicative.
Dans le cas d'espèce, le CL a pu bénéficier d'aides d'un montant total au moins double, voire triple du montant de ses fonds propres actuels (44 milliards de francs en 1997), si bien que la distorsion de concurrence théorique mesurée sur la base de la méthode indicative ci-dessus, et mesurée en termes d'actifs de bilan, a été égale à la totalité des actifs pondérés de la banque (elle ne peut dépasser ce montant). Ces aides ont donc non seulement permis la survie du CL, sans quoi elle aurait dû être liquidée, mais aussi le maintien d'un niveau d'activités qu'il aurait, même si les aides avaient été moins généreuses, dû considérablement réduire (bien au-delà des réductions déjà opérées) pour respecter la contrainte de solvabilité, si bien qu'il n'aurait en tout état de cause certainement pas pu stabiliser ses parts de marché en France ainsi qu'il y est parvenu au cours des deux dernières années (cf. tableau 5 section 3). Le bridage de la croissance introduit par la contrainte de solvabilité n'a donc que très partiellement eu l'effet contraignant qu'il aurait dû avoir sans toutes, ou même une partie de, ces aides.
Il résulte de cet état de faits que les concurrents français et européens du CL ont, vu le montant des aides, subi un niveau de distorsion de concurrence exceptionnellement élevé. Dans l'intérêt commun, pour que les aides puissent être approuvées, il importe que des contreparties très importantes soient présentées par les autorités françaises, dédommageant suffisamment les concurrents pour les distorsions subies du fait du refus des autorités françaises de laisser jouer les mécanismes du marché.

b) Contreparties en Europe et dans le monde
En contrepartie du plan d'aides de 1995 et d'un montant (net) approuvé d'aides de 45 milliards de francs, les autorités françaises s'étaient engagées sur de substantielles contreparties. Ainsi qu'indiqué précédemment (Cf. section 4), dans un courrier du 18 juillet 1995 adressé à la Commission, M. Madelin, ministre de l'Économie et des Finances, s'était engagé à ce que le CL réduise sa présence commerciale hors de France de 35 % en termes de bilan, ce qui représentait environ 50 % des actifs de la banque en Europe hors de France. Cette réduction porte sur des actifs internationaux évalués à un total de 959 milliards de francs au 31 décembre 1994, soit une réduction d'actifs de l'ordre de 335 milliards de francs dans le monde, dont 310 milliards en Europe. Le CL disposait normalement d'une période s'étendant jusqu'au 31 décembre 1998 pour procéder aux cessions des actifs permettant de remplir cette obligation. Fin octobre 1997, le CL avait cédé environ 171 milliards de francs d'actifs internationaux, dont 136 milliards de francs en Europe, soit environ la moitié des engagements de réduction qu'il avait pris, représentant 17,9 % des actifs internationaux du groupe au 31 décembre 1994. Pour respecter la décision 95/547/CE, il lui fallait encore céder un montant d'actifs de 174 milliards de francs en Europe avant le 31 décembre 1998.
Deuxièmement, la Commission note que les engagements des autorités françaises sur les contreparties qu'elles pourraient apporter sur les aides supplémentaires par rapport au montant d'aides approuvé par la Commission en 1995 étaient, dans le plan présenté en juillet 1997, très insuffisants. Ces engagements portaient sur la cession des «filiales de la banque qui opèrent majoritairement dans le métier de banque de détail hors de France». Les autorités françaises, dans le plan de juillet 1997, avaient souhaité un assouplissement de la contrainte de calendrier imposée par la décision 95/547/CE, selon laquelle toutes les cessions d'actifs internationaux requises en contrepartie de l'aide devraient intervenir avant le 31 décembre 1998. Les autorités françaises avaient en juillet 1997 proposé de reporter cette contrainte à l'an 2000 en procédant aux désinvestissements stratégiques requis sur toute la durée du plan. La Commission, ainsi qu'elle l'a indiqué aux autorités françaises dans la lettre du Commissaire Van Miert à M. Strauss-Kahn, ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, du 2 avril 1998, considère que les conditions prévues dans sa décision 95/547/CE devront être respectées et que toutes les contreparties prévues en 1995 devront avoir été exécutées à l'échéance prévue, dans les conditions prévues par la décision 95/547/CE.
De plus, d'après des indications soumises par le CL, en total de bilan au 31 décembre 1994, base retenue par la Commission pour le calcul des contreparties au plan de 1995, les activités de banque de détail hors de France en Europe comptaient pour un montant d'actifs de 438 milliards de francs, soit environ 45 % des actifs internationaux de la banque et 70 % des activités du CL en Europe hors de France (sur la base du bilan au 31 décembre 1994). Or, l'engagement des autorités françaises en termes de cessions d'actifs en 1995 portait déjà sur 35 % des actifs internationaux de la banque, soit 335 milliards de francs, dont l'essentiel était à réaliser sous forme de cessions dans la banque de détail en Europe. Les nouvelles contreparties présentées par les autorités en juillet 1997 n'étaient donc au mieux en augmentation que de 30 % par rapport à celles de 1995, soit la différence d'environ 100 milliards de francs entre le niveau précédent de cession d'actifs (335 milliards de francs) et le nouveau, tel qu'il pouvait être estimé sur la base du plan de juillet 1997 (soit des cessions totales de 438 milliards de francs), alors que le total des aides au CL était, dans l'hypothèse haute présentée ci-dessus, plus de trois fois supérieur au montant approuvé en 1995. En outre, les autorités françaises avaient laissé planer une incertitude sur le champ couvert par les «filiales qui opèrent majoritairement dans le métier de banque de détail hors de France»: il n'était en particulier pas clair si, du point de vue des autorités françaises, le CL Belgium, qui était fin 1997 à part la BfG la principale filiale du Crédit Lyonnais en Europe, avec un total d'actifs de près de 70 milliards de francs français, était selon elles visé par cet engagement. De sorte que, si tel n'était pas le cas, les nouvelles contreparties à l'augmentation des aides étaient quasiment inexistantes, réduites à quelques dizaines de milliards d'actifs dans l'activité de banque de détail en Europe.
Les autorités françaises indiquaient dans le plan de juillet 1997 que la date de la mise en oeuvre de la principale contrepartie, à savoir de cession de la BfG qui représente à elle seule près de 220 milliards (45) de francs français d'actifs, pourrait être modifiée. Il convient de rappeler que la BfG est détenue à 50 % (plus une action) par le CL. Les autres actionnaires de la banque sont Aachener & Münchener (deuxième groupe d'assurance allemand) avec 25 % du capital (plus une action) et une compagnie de services financiers détenue par des syndicats, à hauteur de 25 % (moins deux actions). Lors de l'acquisition de la majorité de la BfG, le CL a accordé à ces autres actionnaires une option de vente de leur participation à un prix déterminé à l'avance, exerçable jusqu'à la fin de 1999, ainsi que la garantie de versement d'un minimum de dividendes. La BfG est faiblement rentable et les mesures de restructuration prises fin 1997 à la suite du remplacement de ses dirigeants ont pour objectif prioritaire de maintenir ses marges malgré une diminution prévue de son produit net bancaire. Au vu de l'amélioration du bénéfice de la filiale en 1997, elles semblent d'ores et déjà avoir produit des premiers résultats. La BfG représente environ 35 % des actifs du Crédit Lyonnais en Europe hors de France (périmètre fin 1994) et est donc à ce titre une contrepartie potentielle très importante pour réduire la taille du groupe. Compte tenu de ces incertitudes, il n'était toutefois pas certain qu'à l'issue du plan, en décembre de l'an 2000, les contreparties des aides des plans de 1995 et 1997 auraient été exécutées.
Compte tenu de l'augmentation considérable des aides, la Commission ne pouvait donc en aucun cas approuver le plan soumis en juillet 1997 sur la base d'un calendrier aussi peu contraignant et d'une aussi faible augmentation des contreparties.
La Commission a examiné d'autres critères possibles pour appréhender et définir les contreparties demandées au CL au titre de la présente décision mais a conclu que les cessions d'actifs tels que ses filiales ou succursales, ou des mesures équivalentes de fermeture, impliquant une réduction du bilan de la banque, et se traduisant par une réduction de sa présence commerciale effective, étaient le critère le plus fiable pour établir la nature et le niveau des principales contreparties requises, à l'instar du critère déjà retenu en 1995.
La Commission considère que, dans l'intérêt commun, les contreparties principales au plan d'aides au CL doivent porter sur l'Europe, que ce soit dans la banque de gros ou la banque de détail, parce que c'est au travers de ces activités que le CL concurrence le plus directement les autres banques au sein de la Communauté, y compris les autres banques françaises désireuses d'étendre leurs activités en Europe. C'est avec ses filiales et succursales européennes que la banque réalise une large part de ses échanges de capitaux au sein de la Communauté. Il convient de rappeler que, dans la phase d'expansion accélérée du CL à la fin des années 1980 et jusqu'au début des années 1998, la stratégie de croissance du CL avait en particulier porté sur son réseau international et singulièrement sur le réseau qu'elle a constitué en Europe. Il en résulte que le réseau européen de la banque joue un rôle central dans les distorsions des échanges provoquées par les aides.
Vu l'ampleur unique des aides, la Commission considère que la totalité des activités du CL en Europe (hors de France), soit de 620 milliards de francs (sur la base du bilan de la banque au 31 décembre 1994, date de référence), devrait être cédée. Compte tenu des contreparties de 310 milliards de francs décomptées en Europe au titre de la décision 95/547/CE (soit 50 % des actifs européens de la banque), ceci implique que le CL cède un montant d'actifs supplémentaires de 310 milliards de francs en Europe (définis, de même que les contreparties de la décision 95/547/CE, sur la base du bilan de la banque au 31 décembre 1994). Tout en admettant que, sur ces 310 milliards de francs d'actifs, environ 80 milliards d'actifs puissent être pris en contrepartie hors d'Europe, notamment en Amérique du Nord ou en Asie, le Commissaire Van Miert a fait savoir à M. Strauss-Kahn, ministre de l'Économie et des Finances, dans le courrier qu'il lui a adressé le 2 avril, qu'il s'agissait d'un niveau de contreparties indispensable pour que les aides au CL puissent être déclarées compatibles avec le traité.
Dans le présent chiffrage des contreparties exigibles en termes de cession d'actifs internationaux, la Commission est restée en deçà:
- d'une stricte proportionnalité avec le montant des contreparties exigées en 1995 qui, sur la base de la valeur haute des aides estimées, aurait impliqué des contreparties supérieures,
- de l'estimation indicative de la distorsion de concurrence théorique réalisée sur la base de la contrainte du ratio solvabilité de la banque qui impliquerait, si le montant de l'aide dépassait celui des fonds propres du CL, une distorsion de concurrence supérieure à la totalité du bilan de la banque.
La Commission considère le niveau de contreparties présenté ci-dessus comme un minimum incompressible pour qu'elle puisse déclarer les aides compatibles avec le marché commun. La Commission souligne que le niveau de contreparties qu'elle a défini est néanmoins considérable et qu'il permet une réduction très significative des distorsions de concurrence.
>EMPLACEMENT TABLE>
La Commission note par ailleurs qu'elle ne peut retenir la position de la Société Générale (cf. section 5.1 ci-dessus) suggérant d'imposer aux autorités françaises la cession de toutes les activités étrangères du CL, ainsi que d'une partie de ses activités et de son réseau en France. Une telle solution n'est pas compatible avec la viabilité de l'entreprise à l'issue du plan de restructuration. La Commission considère que les distorsions de concurrence constatées peuvent être très significativement réduites par les contreparties dont elle a fixé le montant, sans qu'il soit nécessaire de recourir à cette solution extrême.
À la suite de rencontres tenues début mai 1998 entre la Commission et les autorités françaises, le ministre M. Strauss-Kahn a adressé les 3 et 13 mai 1998 deux courriers au Commissaire Van Miert résumant les offres nouvelles de contreparties que la France s'apprêtait à proposer en vue de la présente décision. Ces contreparties portent sur l'Europe et sur le reste du monde, sous forme de la cession ou de la fermeture de filiales ou d'agences:
- en Europe, ces fermetures et cessions porteraient sur 556 milliards de francs, dont 529 milliards de francs hors de France et 27 milliards de francs de cessions en France (hors réseau d'agences),
- dans le reste du monde, les fermetures ou cessions porteraient sur des actifs évalués à 64 milliards de francs.
La liste confidentielle de ces engagements a été présentée par les autorités françaises dans un courrier adressé au Commissaire Van Miert en date du 13 mai 1998.
L'essentiel des cessions afférentes aux aides supplémentaires devra intervenir d'ici la privatisation de la banque, c'est-à-dire avant le 1er octobre 1999. Pour des motifs de marché dûment démontrés et approuvés par la Commission, les cessions qui n'auront pas pu être effectuées avant la privatisation devront l'être au plus tard avant octobre 2000.
La Commission note que les fermetures d'agences ou de filiales ont, comme les cessions d'actifs, un effet de réduction de la présence commerciale et peuvent être prises en compte en tant que contreparties. Au total, la banque respecterait ainsi la contrainte de 620 milliards de francs de cessions ou de fermetures requises par la Commission (soit 645 milliards de francs en incluant 25 milliards de francs supplémentaires de contreparties sur le reste du monde prévues en 1995). Ces contreparties, cumulées avec celles de la décision 95/547/CE, se traduisent par une réduction de plus du tiers du bilan du CL, tel qu'il était évalué au 31 décembre 1994. Les fermetures et cessions prévues libéreront des parts de marché que pourront reprendre les concurrents du CL. La Commission note que, conformément à l'intérêt commun, sur le total des contreparties présentées en 1995 et 1998 sous cette forme, 86 % des engagements du gouvernement portent sur l'Europe, dont 82 % sur l'Europe hors de France.
Sur cette base, et sous réserve des autres éléments à prendre en compte dans le cadre de la présente décision, la Commission considère que les contreparties présentées par les autorités françaises permettent de réduire très significativement les distorsions de concurrence provoquées par les aides.

c) Contreparties supplémentaires sur le réseau d'agences en France
Vu la récidive de l'aide et le montant des aides supplémentaires, potentiellement très supérieur au montant approuvé en 1995, un effort supplémentaire de la banque sur le réseau du CL en France est nécessaire en vue de libérer des parts de marché pour les concurrents du CL dans l'hexagone, particulièrement touchés par les distorsions de concurrence provoquées par les aides. Le plan présenté en juillet 1997 impliquait, sur la base d'informations soumises par le CL à la banque conseil de la Commission, une réduction à 2146 en l'an 2000 du nombre de ses points de vente en France (toutes agences incluses: points de vente particuliers, professionnels et entreprises), soit une réduction de 6,6 % par rapport au nombre de points de vente de 1996. Dans son courrier du 2 avril à M. Strauss-Kahn, le Commissaire Van Miert a demandé un effort supplémentaire du CL, se traduisant par une réduction du nombre de ses points de vente en France à 1850 en l'an 2000, que la banque conseil de la Commission a jugée compatible avec les exigences de viabilité de la banque. Cette réduction supplémentaire d'environ 300 points de vente représente une contrepartie substantielle pour les concurrents du CL, se traduisant par une réduction totale de son réseau en France de l'ordre de 20 % par rapport au niveau de 1996.
La Commission prend note des commentaires de la Société Générale soumis dans le cadre de la présente procédure (section 5.1), selon lesquels certaines mesures permettant d'augmenter la rentabilité du CL et d'améliorer sa position compétitive ne peuvent être prises en considération en tant que contreparties pour les effets distorsifs des aides. Elle souligne que les contreparties supplémentaires demandées au CL, notamment sur son réseau en France, mais aussi sur ses activités internationales, vont très au-delà des mesures de restructuration prévues par le CL dans le plan de juillet 1997.
Dans son courrier du 3 mai 1998 à M. Van Miert, M. Strauss-Kahn a pris l'engagement de réduire à 1850 le nombre d'agences en France, ainsi que demandé par la Commission.
La Commission considère sur cette base que les contreparties apportées en France (outre les 27 milliards de francs prévus sous forme de cessions) doivent s'entendre pour toutes les agences du groupe en France (particuliers, professionnels et entreprises). Elles constitueront une compensation très significative, en termes de réduction de la présence commerciale du CL, dont pourront bénéficier les concurrents français et européens du CL pour développer leurs activités sur le marché français. Ces fermetures d'agences devront intervenir au plus tard avant le 31 décembre 2000.

10.6 Mécanisme de bridage de la banque
La Commission souligne que la clause de retour à meilleure fortune instituée par les autorités françaises en 1995 exerce une forme de bridage de la croissance du CL en raison de la ponction qu'elle exerce sur les résultats et, par voie de conséquence, sur les fonds propres, et en vertu de la contrainte de solvabilité précédemment soulignée. Dans le plan présenté en juillet 1997, les autorités françaises ont indiqué qu'elles envisageaient une remise en cause de la clause de retour à meilleure fortune, sous une forme qu'elles n'avaient alors pas spécifiée. Dans leur courrier du 31 mars 1998, les autorités françaises proposent un rachat de la clause par le CL en échange d'une émission en capital réservée à l'État.
La Commission admet que le maintien jusqu'en 2014 d'une clause de retour à meilleure fortune allouant à l'État jusqu'à 60 % des bénéfices du CL est, dans la perspective de sa privatisation, difficilement compatible avec les exigences des nouveaux actionnaires privés. Afin de minimiser le coût de l'intervention de l'État et les aides, elle souligne que la clause doit alors être vendue, à un prix de marché, sur la base d'une expertise indépendante, de sorte que l'État reçoive la valeur actualisée des recettes prévues au titre de la clause, jusqu'en 2014, et que l'opération ne se traduise pas par des aides supplémentaires au CL. Cette expertise sera soumise à l'approbation de la Commission.
Par ailleurs, les autorités françaises ont fait part en mai 1998 à la Commission de leur souhait de modifier le mécanisme du prêt du CL à l'EPFR, de sorte que l'effet de bridage sur la banque exercé par le taux de 85 % du TMM applicable sur ce prêt soit maintenu par un mécanisme différent. Les autorités françaises ont proposé que la valeur actuelle du désavantage subi par le CL en raison du faible taux qu'il perçoit sur le prêt à l'EPFR (évalué par la Commission à 7,2 milliards de francs sur la période 1997-2000, en déduction des aides, cf. tableau 15) soit convertie par le CL pour la période 2000-2014. Cette conversion prendra la forme d'une modification de la définition de la clause de retour à meilleure fortune, dont le taux de rétention des bénéfices sera augmenté de telle sorte que l'effet patrimonial pour l'État, compte tenu de l'augmentation de valeur de la clause (46) et de la valeur résiduelle de sa participation au capital de la banque, soit égal à la valeur actualisée (environ 5,5 milliards de francs, pour la période 2000-2014, selon le chiffrage de la Commission) de la renonciation à 15 % du TMM par l'EPFR sur l'encours du prêt du CL.
La clause de retour à meilleure fortune, dont la valeur serait ainsi augmentée, serait alors rachetée par le CL sous forme d'une émission d'actions réservée à l'État (souscrite par l'EPFR). L'EPFR revendra ces actions dans le cadre du processus de privatisation, de sorte que l'effet patrimonial des deux opérations de modification de valeur de la clause et de cession de celle-ci sera au moins neutre pour l'État, compte tenu de la renonciation de l'État à la rémunération du prêt à l'EPFR à concurrence de 15 % du TMM et aux revenus de la clause. Sur cette base, les aides d'État au CL, déduction faite des revenus de la privatisation, ne seront pas modifiées par ces modifications du mécanisme de la défaisance.
En complément de cette opération, et pour maintenir un effet de bridage sur le CL, les autorités françaises ont pris les engagements suivants:
i) 58 % du résultat net social de la banque jusqu'à l'exercice 2003 inclus sera distribué sous forme de dividendes,
ii) ses reports fiscaux déficitaires seront abandonnés dès le rachat de la clause de retour à meilleure fortune,
iii) la croissance du bilan consolidé du CL à périmètre constant et taux de change constant sera plafonnée à 3,2 % par an entre la fin de l'année 1998 et la fin de l'année 2001 et ses ratios de solvabilité (47) seront maintenus jusqu'en 2014 au minimum à leur niveau atteint à la fin de 2001, sauf circonstances exceptionnelles dûment démontrées à la Commission et approuvées par celle-ci.
La Commission peut souscrire au mécanisme d'ensemble de rehaussement du taux du service du prêt de 85 % à 100 % du TMM de 2000 à 2014, de modification de la définition de la clause, de vente de la clause et de bridage alternatif du CL sous réserve que les conditions suivantes soient réunies:
- l'estimation de la valeur actualisée de la charge afférente au refinancement du CL sur son prêt à l'EPFR à 15 % au-dessous du TMM de 2000 à 2014, la redéfinition de la clause et la valorisation de la clause seront réalisées sur la base de l'évaluation d'un expert indépendant;
- le rapport de l'expert sera communiqué à la Commission, qui devra en approuver les conclusions, préalablement à toute modification de la valeur de la clause et à la transaction envisagée sous forme d'émission de capital du CL réservée à l'État;
- le cas échéant, la Commission pourra s'opposer à cette opération si elle estime que la pleine valorisation de la charge afférente au refinancement du CL sur son prêt à l'EPFR à 15 % au-dessous du TMM de 2000 à 2014 et la clause de retour à meilleure fortune ne sont pas assurées, de sorte que des éléments d'aide nouveaux sont susceptibles d'apparaître.
Sous réserve que les vérifications qu'elle opérera ainsi lui apportent une pleine satisfaction, la Commission peut conclure que le mécanisme de bridage en question ne comporte pas d'éléments d'aide additionnels et qu'il maintient un niveau de bridage significatif du CL au-delà.

10.7 Engagements de privatisation pris par les autorités françaises
En complément de l'examen des conditions de compatibilité des aides sous examen, la Commission prend note des engagements de privatisation de la banque pris par le gouvernement, dans la lignée des objectifs qui avaient été fixés lors de l'adoption de la décision 95/547/CE. Dans un courrier du 13 mai 1998, le ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie s'est engagé à privatiser le CL d'ici octobre 1999 selon une procédure ouverte, transparente et non discriminatoire. L'État perdra tout rôle d'actionnaire de référence, et sa part descendra à moins de 10 % du capital de la banque. Un décret de privatisation sera pris avant la fin de l'année 1998, et la procédure de vente sera lancée avant le 1er mars 1999.
La Commission prend note de ces engagements et rappelle qu'elle a entériné dans son XXIIIe rapport (48) sur la politique de concurrence de 1993 les principes généraux qu'elle applique dans les cas de privatisation, pour déterminer si ces opérations sont susceptibles d'inclure des éléments d'aide. Elle considère que la privatisation devrait apporter une solution définitive au problème de gouvernement d'entreprise relevé ci-dessus, et fera en sorte que, à l'avenir, le CL fasse appel à ses actionnaires privés et au marché pour trouver les ressources supplémentaires dont elle aura besoin.

10.8 Autres conditions à respecter en vue de la compatibilité des aides sous examen
i) La Commission souligne que les cessions des filiales et succursales de la banque doivent être interprétées en réduction du périmètre net de la banque, et être irrévocables. Elles doivent être réalisées selon des procédures transparentes, et ouvertes à tout acquéreur potentiel, français ou étranger. Les cahiers des charges ne devront pas inclure de clauses susceptibles de limiter de manière inacceptable le nombre des candidats potentiels et de cibler l'un ou l'autre candidat potentiel. Le choix des acquéreurs devra être fait dans la perspective d'optimiser les recettes des cessions. Les recettes des cessions devront être pleinement affectées au financement du plan de restructuration du CL.

ii) Respect de la présente décision
a) Un point d'étape trimestriel sera présenté par les autorités françaises jusqu'au 31 décembre 2000. Ce point d'étape comprendra une relation détaillée des cessions et fermetures d'activités convenues dans le cadre de la présente décision, comprenant la date de cession, la valeur comptable des actifs au 31 décembre 1994, la valeur de cession, les plus ou moins-values de cession réalisées. Le premier point d'étape est dû à la date du 1er octobre 1998. Les échéances suivantes sont fixées au 1er janvier 1999, au 1er avril 1999 et au 1er juillet 1999, etc. Les points d'étape trimestriels de l'année 1999 présenteront un état précis de l'avancement de la privatisation.
b) Les rapports semestriels et annuels du CL seront soumis à la Commission immédiatement après leur approbation par le Conseil d'Administration de la banque en même temps qu'une présentation de l'état d'avancement du plan d'affaires de l'entreprise.
c) La Commission disposera d'un accès sans restriction à l'information. Elle pourra, avec l'accord des autorités françaises, s'adresser directement au CL pour obtenir les explications et précisions requises. Les autorités françaises et le CL apporteront leur pleine coopération sur toutes les vérifications que pourrait demander la Commission ou, le cas échéant, un consultant qu'elle mandaterait.
d) La Commission sera étroitement informée des modalités de la privatisation de la banque. Les autorités lui transmettront préalablement toutes les informations permettant d'établir que cette privatisation suit des modalités ouvertes, transparentes et non discriminatoires. La Commission examinera ces modalités au regard des principes précédemment cités qu'elle applique dans les cas d'opérations de privatisation.

iii) Décision 95/547/CE
Les autorités françaises respecteront les engagements figurant à l'article 4 de la décision 95/547/CE, jusqu'à la fin de la défaisance.

11. CONCLUSIONS

11.1 Compatibilité des aides supplémentaires par rapport aux montants précédemment approuvés par la Commission
La Commission conclut que les mesures examinées dans le cadre de la présente procédure, relatives à l'augmentation des pertes du CDR et des coûts de portage de l'EPFR, ainsi qu'à l'abandon de la contrainte de financement par le CL de la souscription d'une émission à coupon-zéro par l'EPFR, comprennent des aides additionnelles, par rapport aux aides autorisées par sa décision 95/547/CE (soit 45 milliards de francs) et sa décision du 25 septembre 1996 (environ 4 milliards de francs). Ces aides supplémentaires sont estimées à environ 53-98 milliards de francs (49) en valeur actualisée.
Sur la base de ce qui précède, la Commission conclut:
i) que le plan de restructuration présenté par les autorités françaises a démontré la viabilité du CL; cette viabilité a été confirmée par les conclusions de la banque conseil de la Commission et le nouveau business plan soumis par les autorités françaises en mai 1998;
ii) que les aides, sous réserve de la limitation de la «neutralisation» du prêt à l'EPFR à la période 1997-1999, sont, malgré leur importance unique, limitées au strict nécessaire en vue de la viabilité de la banque;
iii) que le programme très important de cessions et fermetures auxquelles se sont engagées les autorités françaises ainsi que la limitation des aides au strict nécessaire aboutiront à faire en sorte que le CL finance, dans toute la mesure de ses moyens disponibles, une partie importante du plan de restructuration;
iv) que les autorités françaises ont présenté des contreparties permettant de conclure que, dans l'intérêt commun, le CL réduira très considérablement sa présence commerciale, si bien que son bilan à l'issue du plan de restructuration aura été réduit de plus d'un tiers par rapport au 31 décembre 1994, et en particulier que des contreparties attachées aux aides supplémentaires, comprenant 310 milliards de francs de fermetures et cessions d'actifs supplémentaires, ainsi que la réduction du réseau en France à 1 850 agences en l'an 2000, permettront de prévenir des distorsions de concurrence excessives;
v) qu'un bridage équivalent à la charge de 15 % du TMM sur le prêt à l'EPFR et à la ponction sur les résultats et les fonds propres qu'exerce la clause de retour à meilleure fortune peut être substitué à ces deux dispositions, à condition qu'il ne comporte pas d'éléments d'aides supplémentaires en faveur du CL.
L'ensemble des engagements du gouvernement a été confirmé par trois courriers en date du 13 mai 1998.
Conformément aux lignes directrices de la Commission sur les aides à la restructuration, la Commission peut conclure, sous réserve que les autorités françaises respectent les engagements figurant ci-dessous à l'article 1er paragraphe 2 et respectent les conditions imposées par la Commission à l'article 1er paragraphe 3, que les aides supplémentaires en question peuvent bénéficier de la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 point c) du traité (première partie de la première phrase) et qu'elles sont compatibles avec le marché commun.

11.2 Aides approuvées par la Commission dans sa décision 95/547/CE
Les aides approuvées par la Commission dans sa décision 95/547/CE demeurent compatibles avec le traité, sous réserve que les autorités françaises et le CL exécutent pleinement les obligations découlant de la décision 95/547/CE, à l'exception des modifications approuvées par la présente décision.
La Commission rappelle que, en exécution de la décision 95/547/CE, les autorités françaises et le CL doivent en particulier veiller au respect intégral des contreparties prévues dans le cadre de la décision 95/547/CE, c'est-à-dire la réduction de la présence commerciale hors de France du Crédit Lyonnais de 35 % en termes de bilan, ce qui représente 50 % de ses actifs en Europe hors de France. Cette réduction est à apprécier par rapport à la contribution au total de l'actif de la banque au 31 décembre 1994 et devra être achevée avant le 31 décembre 1998,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:


Article premier
1. Les mesures présentées à la Commission en septembre 1996 et celles du plan de restructuration du Crédit Lyonnais soumis à la Commission en juillet 1997, sous forme d'une neutralisation du prêt à l'EPFR, de la non-mise en place de l'obligation à coupon-zéro, ainsi que la prise en charge des pertes supplémentaires du CDR et de l'EPFR par l'État, telles que modifiées par les autorités françaises selon les modalités prévues dans la présente décision, sont des aides d'État au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CE et de l'article 61 paragraphe 1 de l'accord EEE. Ces aides supplémentaires, par rapport aux aides approuvées par la Commission dans sa décision 95/547/CE et sa décision du 25 septembre 1996, sont évaluées dans une fourchette comprise entre 53 et 98 milliards de francs français. Les aides supplémentaires en question peuvent être déclarées compatibles avec le marché commun et avec l'accord EEE, conformément à l'article 92 paragraphe 3 point c) du traité et à l'article 61 paragraphe 3 point c) de l'accord EEE, à condition que la France respecte les engagements énoncés au paragraphe 2 et les conditions énoncées au paragraphe 3.
2. La France prend les engagements suivants:
a) La France s'engage à transférer le Crédit Lyonnais au secteur privé en octobre 1999 au plus tard, de façon ouverte, transparente et non discriminatoire. Le processus pourra commencer dès 1998 avec la prise d'un décret de privatisation avant la fin de l'année, et comporter plusieurs étapes. En tout état de cause, il devra être lancé avant le 1er mars 1999. À cette occasion, la participation de l'État au capital de la banque sera ramenée à 10 % au plus, l'État s'engageant à ne plus être l'actionnaire de référence du Crédit Lyonnais.
b) À titre de contrepartie à l'aide d'État, le Crédit Lyonnais aura cédé ou liquidé 620 milliards de francs d'actifs à son bilan au 31 décembre 1994. Cette réduction porte sur l'ensemble des actifs en Europe hors de France, à l'exception notamment des activités à Londres, à Luxembourg, à Francfort et en Suisse. La banque aura la possibilité de gérer des comptes pour les services de paiement et de décaissement dans la zone euro. La conservation de ces implantations stratégiques sera compensée à due concurrence par d'autres actifs en France et dans le monde. Cet engagement complète celui pris le 18 juillet 1995 qui portait sur une réduction de 35 % dans le monde, ce qui représente 50 % en Europe, et qui est confirmé. Le solde de ces cessions devrait être réalisé au plus tard le 31 décembre 1998. La réduction globale de 620 milliards de francs devra être intervenue avant la date de privatisation. Ces deux dates pourraient être reportées au plus tard pour un an, pour des motifs de marché dûment démontrés à la Commission.
c) Le Crédit Lyonnais aura réduit son réseau en France, qui ne dépassera pas 1850 implantations commerciales en l'an 2000 pour la maison mère et ses filiales de banque de détail. Ce nombre d'unités s'applique aux implantations pour les particuliers, les professionnels et les entreprises.
d) Pour réussir la privatisation dans les délais impartis, la clause de retour à meilleure fortune et l'effet de la neutralisation partielle du prêt après 1999 seront évalués par un expert indépendant et feront l'objet d'un rachat indirect par le marché, à travers une émission de titres du Crédit Lyonnais au profit de l'EPFR qui les cédera ensuite dans le cadre du processus de privatisation. Préalablement à cette émission, l'évaluation sera transmise à la Commission.
e) Afin de maintenir les effets restrictifs de la clause de retour à meilleure fortune et de l'écart entre le taux du prêt à l'EPFR sur le potentiel de croissance du Crédit Lyonnais et de maîtriser le développement de la banque par rapport à ses concurrents, (i) 58 % de son résultat net social jusqu'à l'exercice 2003 inclus sera distribué sous forme de dividendes, (ii) ses reports fiscaux déficitaires seront abandonnés dès le rachat de la clause de retour à meilleure fortune, (iii) la croissance de son bilan consolidé à périmètre constant et taux de change constant sera plafonnée à 3,2 % par an entre la fin de l'année 1998 et la fin de l'année 2001 et ses ratios de solvabilité seront maintenus jusqu'en 2014 au minimum à leur niveau atteint à la fin de 2001, sauf circonstances exceptionnelles dûment démontrées à la Commission et approuvées par celle-ci.
f) L'exécution de tous les engagements énoncés aux points a) à e) pourra être vérifiée chaque année par un expert indépendant jusqu'à l'achèvement des cessions d'actifs. En outre, un point d'étape trimestriel et un rapport semestriel détaillé sur l'application du plan seront transmis par les autorités françaises à la Commission.
La France a adressé à la Commission par courrier du 13 mai 1998 la liste confidentielle détaillant les cessions et fermetures prévues au point b) ci-dessus.
3. Afin d'assurer la compatibilité de l'aide avec le marché commun, le gouvernement français veille au respect des conditions suivantes:
a) Mise en oeuvre:
Assurer la mise en oeuvre de tous les engagements et mesures prévus dans la présente décision, et des mesures prévues dans la décision 95/547/CE n'ayant pas été modifiées dans le cadre de la présente décision; ne pas modifier ces mesures sans l'accord préalable de la Commission.
b) Modalités des cessions d'actifs:
Les cessions des filiales et succursales de la banque doivent être interprétées en réduction du périmètre net de la banque, et être irrévocables. Elles doivent être réalisées selon des procédures transparentes, et ouvertes à tout acquéreur potentiel, français ou étranger. Les cahiers des charges ne devront pas inclure de clauses susceptibles de limiter de manière inacceptable le nombre des candidats potentiels et de cibler l'un ou l'autre candidat potentiel. Le choix des acquéreurs devra être fait dans la perspective d'optimiser les recettes des cessions. Les recettes des cessions devront être pleinement affectées au financement du plan de restructuration du Crédit Lyonnais.
c) Redéfinition et mise en oeuvre du mécanisme de bridage de la banque:
L'évaluation de la valeur actualisée de la charge afférente au refinancement du CL sur son prêt à l'EPFR à 15 % au-dessous du TMM de 2000 à 2014, la redéfinition de la clause et la valorisation de la clause seront réalisées par un expert indépendant; le rapport de l'expert sera communiqué à la Commission, et elle devra en approuver les conclusions, préalablement à toute modification de la valeur de la clause et à la transaction prévue sous forme d'émission de capital du Crédit Lyonnais réservée à l'État.
d) Suivi de la présente décision:
i) Un point d'étape trimestriel sera présenté par les autorités françaises jusqu'au 31 décembre 2000. Ce point d'étape comprendra une relation détaillée des cessions et fermetures d'activités convenues dans le cadre de la présente décision, comprenant la date de cession, la valeur comptable des actifs au 31 décembre 1994, la valeur de cession, les plus ou moins-values de cession réalisées. Le premier point d'étape est dû à la date du 1er octobre 1998. Les échéances suivantes sont fixées au 1er janvier 1999, au 1er avril 1999 et au 1er juillet 1999.
ii) Les rapports semestriels et annuels du Crédit Lyonnais seront transmis à la Commission immédiatement après leur approbation par le Conseil d'Administration de la banque, en même temps qu'une présentation de l'état d'avancement du plan d'affaires de l'entreprise.
iii) La Commission disposera en permanence pendant la durée du plan d'un accès sans restriction à l'information. Elle pourra avec l'accord des autorités françaises s'adresser directement au Crédit Lyonnais pour obtenir les explications et précisions requises. Les autorités françaises et le Crédit Lyonnais apporteront leur pleine coopération sur toutes les vérifications que pourrait demander la Commission ou, le cas échéant, un consultant qu'elle mandaterait.
iv) La Commission sera étroitement informée des modalités de la privatisation de la banque. Les autorités lui transmettront préalablement toutes les informations permettant d'établir que cette privatisation suit des modalités ouvertes, transparentes et non discriminatoires.
v) Tout report des dates de cessions et fermetures d'actifs selon les modalités reprises ci-dessus dans les engagements des autorités à l'alinéa 2.b) du présent article devra être préalablement approuvé par la Commission. Ces engagements visent exclusivement les dates de cessions et de fermetures d'actifs et laissent inchangé l'engagement de privatisation de la banque, qui devra en tout état de cause être réalisé d'ici octobre 1999 au plus tard.
e) Décision 95/547/CE:
Les autorités françaises respecteront les engagements figurant à l'article 4 de la décision 95/547/CE, jusqu'à la fin de la défaisance.

Article 2
La France informe la Commission dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision des mesures qui ont été prises pour s'y conformer.

Article 3
La République française est destinataire de la présente décision.

Fait à Bruxelles, le 20 mai 1998.
Par la Commission
Karel VAN MIERT
Membre de la Commission

(1) JO C 390 du 24. 12. 1996, p. 7.
(2) Y inclus les 40 milliards de francs d'actifs cantonnés en 1994.
(3) JO L 308 du 21. 12. 1995, p. 92.
(4) JO C 390 du 24. 12. 1996, p. 7. La décision a été notifiée aux autorités françaises par courrier du 16. 10. 1996 SG(96) D/9029.
(5) JO C 368 du 23. 12. 1994, p. 12.
(6) Voir note 5.
(7) Données non corrigées des variations de périmètre de consolidation.
(8) L'échelle de notation de l'agence de notation Standard Poor's-ADEF est la suivante: AAA: capacité à rembourser extrêmement forte; AA: capacité très forte; A: capacité forte mais sensibilité aux aléas économiques; BBB: capacité suffisante mais avec une grande sensibilité aux aléas économiques; BB et B: caractère spéculatif et incertitude de paiement; CCC, CC et C: créance douteuse; D: déjà en défaut de paiement. L'échelle de Moody's est la suivante: Aaa, Aa1, Aa2, Aa3, A1, A2, A3, Baa1, Baa2.
(9) JO C 307 du 13. 11. 1993, p. 3.
(10) Les intérêts accrus en retard sont rémunérés au taux mensuel des bons du trésor à 13 semaines (TMB), publié par la CDC.
(11) Pour plus de détails sur les aides d'urgence, la Commission renvoie à sa décision de septembre 1996 publiée au JO C 390 du 24. 12. 1996, p. 7.
(12) Taux calculé par un ratio de provisions sur encours pondérés.
(13) Les passifs non transférés à la défaisance dont il a été fait état ci-dessus.
(14) Sous réserve de son maintien.
(15) Sous réserve d'une différence liée à la fiscalité des résultats.
(16) Ainsi que l'indique le rapport de gestion du CDR de 1996, p. 35, les augmentations de capital de filiales couvertes constituent une créance sur EPFR qui ne sera exigible que lors de la liquidation ou de la réalisation des titres des filiales concernées.
(17) La Commission a ouvert la procédure au titre de l'article 92, paragraphe 3 du traité sur deux opérations: la recapitalisation et la vente de la SDBO (JO C 346 du 16. 11. 1996 et JO C 207 du 8. 7. 1997) ainsi que les recapitalisations et la vente de Stardust Marine (JO C 114 du 9. 4. 1998).
(18) Les données nominales ci-dessous ne sont pas actualisées. Pour l'actualisation, se référer ci-après au calcul de l'estimation du coût de l'opération pour l'État.
(19) Page 27 du rapport 1997 de l'EPFR.
(20) Page 29 du rapport auparavant cité.
(21) Page 29 du rapport 1997 de l'EPFR.
(22) Par contre, ainsi qu'indiqué précédemment, le CL est sensible à un risque de baisse des taux qui se traduirait pour lui par une augmentation possible du coût de portage du prêt.
(23) Cf. JORF du 30. 11. 1995, loi 95-1251 du 28 novembre relative à l'action de l'État dans les plans de redressement du Crédit Lyonnais et du Comptoir des entrepreneurs, article 3.
(24) Sur base d'une valorisation du CL d'environ 35 milliards de francs.
(25) Fourchette de réduction contingente aux hypothèses de «neutralisation» du prêt en 1999, Cf. ci-après, section 10.4.
(26) JO C 307 du 13. 11. 1993, p. 3.
(27) JO L 336 du 3. 12. 1989, p. 14.
(28) Dans d'autres cas, les actionnaires privés intervenant à l'invitation des autorités monétaires ont eu le souci de se protéger de risques judiciaires, mais n'ont pas agi en vue d'une rémunération satisfaisante de leurs apports.
(29) Affaire de la Compagnie du BTP.
(30) Commission bancaire, rapport 1995, page 13.
(31) Cf. notamment la décision 94/1073/CE de la Commission (Bull), JO L 386 du 31. 12. 1994, p. 5, et l'arrêt de la Cour du 14. 9. 1994 dans les affaires jointes C 278/92, C 279/92 et C 280/92, HYTASA, Rec. 1994, p. I-4103, point 22 des motifs.
(32) Loi du 25. 1. 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises, articles 179 et 180, Cf. JORF du 26. 1. 1985.
(33) Cf. également section 10.2.
(34) JO C 368 du 23. 12. 1994, p. 12.
(35) Voir Sénat de la République française, Banques: votre santé nous intéresse, rapport d'information fait par M. Alain Lambert (Sénateur, Rapporteur général) au nom de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur la situation et les perspectives du système bancaire français, n° 52, 1996-1997.
(36) JO L 135 du 31. 5. 1994, p. 5.
(37) Le système bancaire français, octobre 1996, contribution du Commissariat général au Plan au Groupe des finances de la Commission des Finances du Sénat, voir notamment p. 86, in rapport n° 52 de la Commission des Finances du Sénat.
(38) Cf. Rapport Lambert précédemment cité, p. 56.
(39) Cf. Rapport Lambert précédemment cité, p. 60.
(40) La directive 94/14/CE sur les systèmes de garantie des dépôts prévoit que les États membres mettent en place de tels instruments, JO L 135 du 31. 5. 1994, p. 5.
(41) DCAF et filiales de la DCAF.
(42) Selon des hypothèses conventionnelles supposant l'impact fiscal d'une variation des revenus d'exploitation, il est compensé par un coefficient multiplicateur marginal entre la valeur de la banque et celle des fonds propres.
(43) Les prêts à l'État sont à risque zéro et donc ne sont pas imputés sur le ratio de solvabilité de la banque (l'effet sur les actifs pondérés est nul).
(44) JO C 368 du 23. 12. 1994, p. 12.
(45) Exprimés, comme les autres contreparties, sur la base du bilan du CL au 31. 12. 1994.
(46) La clause augmenterait de valeur sous le double effet de l'augmentation des résultats de la banque (à concurrence de 15 % du TMM sur l'encours du prêt) et d'une modification du taux de rétention des résultats par la clause.
(47) La Commission interprète cet engagement comme portant sur le ratio de fonds propres durs («tier one») et le ratio Cooke de solvabilité.
(48) Cf. XXIIIe rapport sur la politique de concurrence, section 403, p. 276. Les principes auxquels se réfère la Commission pour examiner si une opération de privatisation donne le cas échéant lieu à des aides d'État avaient été préalablement indiqués aux autorités françaises dans un courrier du directeur général de la concurrence du 14. 7. 1993.
(49) Cf. Tableau 15.


Fin du document


Structure analytique Document livré le: 11/03/1999


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