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Document 393D0349

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[ 08.60 - Aides accordées par les États et autres subventions ]


393D0349
93/349/CEE: Décision de la Commission, du 9 mars 1993, concernant une aide accordée par le gouvernement britannique à British Aerospace pour l'acquisition par celle-ci du groupe Rover, dépassant les aides autorisées dans la décision 89/58/CEE de la Commission fixant un plafond aux aides accordées pour cette opération ainsi que certaines conditions (Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi)
Journal officiel n° L 143 du 15/06/1993 p. 0007 - 0016



Texte:

DÉCISION DE LA COMMISSION du 9 mars 1993 concernant une aide accordée par le gouvernement britannique à British Aerospace pour l'acquisition par celle-ci du groupe Rover, dépassant les aides autorisées dans la décision 89/58/CEE de la Commission fixant un plafond aux aides accordées pour cette opération ainsi que certaines conditions (Le texte en langue anglaise est le seul faisant foi.)
(93/349/CEE)LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 93 paragraphe 2 premier alinéa,
après avoir mis, conformément aux dispositions dudit article, les intéressés en demeure de présenter leurs observations,
considérant ce qui suit:
I Le 28 avril 1992, la Commission a ouvert la procédure (1) prévue par l'article 93 paragraphe 2 à l'égard de mesures d'aides prises par le gouvernement du Royaume-Uni dépassant celles qui étaient autorisées par la décision 89/58/CEE de la Commission (2) (« la décision de 1988 »). La Commission considérait que ces mesures constituaient une aide d'État au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE accordée à British Aerospace (BAe) pour l'achat du groupe Rover (RG). La valeur de ces aides était estimée à 44,4 millions de livres sterling. La Commission considérait en outre ces aides comme illégales en ce qu'elles violaient la décision de 1988 et ne lui avaient pas été notifiées.
Les mesures prises par le gouvernement britannique qui ont déclenché l'ouverture de la procédure avaient fait l'objet d'une décision de la Commission en date du 17 juillet 1990 (3) (« la décision de 1990 »). Par l'arrêt qu'elle a rendu le 4 février 1992 (affaire C-294/90) (4), la Cour de justice des Communautés européennes a annulé la décision de 1990 en ce qu'elle exigeait que le gouvernement britannique récupère auprès de BAe les aides d'État qu'elle estimait contenues dans ces mesures. La Cour a rendu son arrêt à la suite d'un recours formé par BAe contre la décision de 1990. La Cour a tranché en faveur de BAe pour des raisons de procédure, au motif que, en prenant sa décision de 1990, la Commission n'avait pas respecté les règles de procédure établies par l'article 93 paragraphe 2 du traité CEE. La Cour ne s'est pas prononcée sur le fond de la décision de 1990.
Par lettre du 13 juillet 1992, le gouvernement britannique a confirmé qu'il n'avait pas d'observations à formuler à l'égard de la lettre d'ouverture de la présente procédure en date du 28 avril 1992. La Commission a reçu des observations de BAe le 18 juin 1992. Ces observations sont résumées dans la partie VIII ci-après et examinées dans la partie IX. Elles ont été communiquées le 23 juin 1992 au gouvernement britannique, qui n'a fait part d'aucun commentaire à leur sujet.
Dans le cadre de la procédure déjà ouverte par lettre du 28 avril 1992, la Commission, par lettre du 30 juillet 1992, a attiré l'attention du Royaume-Uni sur la nécessité, au cas où les aides en cause seraient jugées incompatibles avec le marché commun, d'exiger en temps voulu, c'est-à-dire lors de l'adoption d'une décision finale négative, le remboursement des intérêts sur le principal en question à compter de la date effective du versement des aides de manière à neutraliser tous les avantages indus dont auraient bénéficié BAe et le RG. Des copies de cette lettre ont été transmises le jour même à BAe et au RG.
Le gouvernement britannique a répondu à la lettre de la Commission du 28 avril 1992 par une lettre datée du 25 septembre 1992, qui est résumée ci-après au chapitre X. BAe a répondu à la lettre de la Commission du 30 juillet 1992 par la lettre du 26 août 1992, qui est résumée dans la partie VIII points ix) à xii) ci-après. Une copie de cette lettre a été transmise au gouvernement britannique, qui n'a pas émis de commentaires à son sujet.
II La décision de 1988 faisait suite à la notification, par le gouvernement britannique, de son intention d'accorder 800 millions de livres sterling au RG pour résorber ses dettes afin de pouvoir le vendre à BAe. La décision décrit de manière détaillée le contexte de la notification, les conditions de la vente à BAe de même que les critères et les motifs sur lesquels la décision est fondée, ainsi que les conditions dont celle-ci est assortie. Les points essentiels de cette décision - qui n'a jamais été contestée par le gouvernement britannique ni par aucune autre partie - qui intéressent la présente décision peuvent être résumés comme suit:
- la remise de dettes de 800 millions de livres sterling proposée par le gouvernement britannique excédait le prix proposé pour l'acquisition du RG par BAe, soit 150 millions de livres sterling, et aurait signifié que le gouvernement aurait vendu le RG pour un prix négatif équivalant à 650 millions de livres; cette mesure aurait donc constitué une aide d'État au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE,
- la Commission concluait que l'endettement net du RG au 30 juin 1988 n'était en fait que de 569,2 millions de livres sterling et non de 801,1 millions de livres sterling comme le soutenait le gouvernement britannique; ce dernier chiffre comprenait 231,9 millions de capital d'exploitation qui ne pouvait être considéré comme une dette financière,
- la Commission admettait que le prix d'acquisition du RG, soit 150 millions de livres sterling, à verser par BAe, reflétait de manière équitable la valeur nette réelle de la société sur le marché,
- l'aide à la restructuration de Rover pouvait être considérée comme compatible avec le marché commun au sens de l'article 92 paragraphe 3 point c) du traité CEE eu égard notamment aux clauses du plan d'entreprise du groupe pour la période 1988-1992 et à l'engagement des acheteurs de mettre en oeuvre intégralement le plan de restructuration; cette aide devait de toute façon être assortie d'une série de conditions très strictes,
- le montant de cette aide à la restructuration devait, eu égard à toutes les conditions en cause et notamment au coût du plan de restructuration, être limité à 469 millions de livres sterling pour rester proportionné aux problèmes que l'aide était destinée à résoudre; toute aide excédant ce montant était incompatible avec le marché commun étant donné qu'elle mettait le groupe Rover dans une situation financière plus favorable que ses concurrents de la Communauté.
Dans ces conditions, la Commission a autorisé une aide d'État maximale en faveur du RG de 469 millions de livres sterling. En d'autres termes, le gouvernement britannique vendait la société pour un prix négatif de 319 millions de livres sterling, soit la remise de dettes de 469 millions moins le prix d'acquisition de 150 millions de livres sterling. Cette autorisation était assortie de six conditions:
- les conditions de vente du RG à BAe envisagées et notifiées à la Commission ne devaient pas être modifiées,
- l'aide devait être utilisée exclusivement pour résorber les dettes financières du RG,
- aucune aide supplémentaire ne devait être accordée à Rover avant la fin de 1992, à l'exception d'une aide régionale limitée à 78 millions de livres sterling,
- la mise en oeuvre du plan d'entreprise de Rover devait être achevée pour la fin de 1992 selon les modalités communiquées à la Commission,
- toute dépense non effectuée ou surestimée concernant l'un des éléments de l'endettement communiqué à la Commission devait être remboursée au gouvernement britannique au plus tard lors de l'achèvement du plan d'entreprise,
- le RG ne devait plus bénéficier des assurances données devant le Parlement et aucune autre garantie ne devait être accordée pour de nouvelles obligations contractées par cette société.
III La décision de 1990 était fondée sur des éléments de preuve apparus après l'adoption de la décision de 1988. Il en ressortait que, contrairement aux conditions fixées dans la décision de 1988, le gouvernement britannique avait modifié les conditions de la vente du RG de manière à accorder des aides supplémentaires de 44,4 millions de livres sterling à BAe et au RG. Ces questions sont examinées dans la partie IV ci-après.
La décision de 1990 réexaminait en outre le prix payé par BAe pour l'achat du RG à la lumière de nouvelles informations fournies par le gouvernement britannique. Ces informations comprenaient de la correspondance entre d'autres parties intéressées et le ministère du commerce et de l'industrie [Department of Trade and Industry (DTI)], des conseils fournis au gouvernement sur la façon de réaliser la vente du RG, de la correspondance en la matière avec les autorités fiscales britanniques, des états financiers concernant le RG au 30 juin 1988, ainsi que des prévisions antérieures des profits et de la capacité d'autofinancement. La Commission a conclu que, si le fait que le gouvernement britannique n'ait pas fourni ces informations à la Commission au moment de la décision de 1988 constituait un manque de coopération, les informations elles-mêmes ne lui donnaient pas motif de considérer que le prix négatif de 319 millions de livres sterling découlant de la décision de 1988 n'était pas équitable pour le vendeur comme pour l'acquéreur, eu égard notamment aux engagements pris en matière de restructuration et à l'obligation faite à BAe de ne pas vendre les activités essentielles du RG dans un délai de cinq ans. Cette obligation avait eu pour effet de réduire fortement le prix.
IV Le 21 novembre 1989, un rapport du Controller and Auditor General du UK National Audit Office (NAO) a été publié en même temps qu'un mémorandum secret du NAO qui était joint à ce rapport et qui révélait que le gouvernement britannique avait fait à BAe des concessions financières autres que celles qui étaient autorisées dans la décision de 1988. La valeur de ces concessions était estimée par le NAO à 38 millions de livres sterling. La principale conclusion du rapport du NAO était que le prix d'acquisition du RG était inférieur à la valeur réelle de la société. Le mémorandum révélait en outre l'existence de lettres en marge du contrat, l'identité des autres candidats acquéreurs et l'existence d'évaluations du RG effectuées par la banque d'affaires qui conseillait le gouvernement pendant la vente.
Un échange de correspondance et des réunions ont alors eu lieu entre la Commission et les autorités britanniques, au cours desquels les documents visés dans le mémorandum du NAO, ainsi que d'autres informations et documents, ont été transmis à la Commission. Les éléments suivants en sont ressortis qui font l'objet de la présente décision:
a) Une subvention de 9,5 millions de livres sterling a été accordée à BAe par le gouvernement britannique pour couvrir une partie des 13,6 millions de livres sterling que celle-ci avait dû débourser pour acquérir les actions détenues par les actionnaires minoritaires de Rover.
Ce montant de 9,5 millions de livres sterling a été choisi afin de rester au-dessous du seuil de 10 millions de livres sterling à partir duquel l'approbation du Parlement est requise en vertu de l'Industrial Development Act (loi sur le développement industriel) de 1982. Cette concession, et la raison qui l'a motivée, ont été communiquées au président de BAe par le secrétaire d'État au commerce et à l'industrie par lettre du 14 juillet 1988. D'après les autorités britanniques, la Commission avait été informée oralement de cette concession à l'époque de la décision de 1988.
b) Un montant de 1,5 million de livres sterling a été versé par le gouvernement britannique au RG pour couvrir les coûts de consultation qu'il a assumés à la suite de la vente.
Les autorités britanniques ont fait valoir à l'époque que ce montant représentait le coût des conseils juridiques et économiques fournis au RG au sujet de la vente et ne constituait pas une aide de nature à influencer sa position concurrentielle. Cette concession a été communiquée au président de BAe par le secrétaire d'État au commerce et à l'industrie par lettre du 14 juillet 1988.
c) Le paiement du prix d'acquisition de 150 millions de livres sterling pour le RG a été reporté du 12 août 1988 au 30 mars 1990, ce qui s'est traduit, selon les autorités britanniques, par un avantage net pour BAe de 22 millions de livres sterling.
Selon les autorités britanniques, cette concession était due à la difficulté de déterminer avec certitude l'utilisation faite par BAe des avantages fiscaux dont bénéficiait le RG. Les autorités britanniques ont donné leur accord sur la proposition de BAe de reporter le paiement par lettre du 14 juillet 1988 du secrétaire d'État au commerce et à l'industrie au président de BAe.
L'avantage que ce report représentait pour BAe a été calculé en se fondant sur l'hypothèse que BAe aurait dû sinon emprunter les 150 millions de livres sterling en payant les intérêts au taux de base. Toutefois, les autorités britanniques ont estimé que l'avantage brut de 33,4 millions de livres sterling devait être réduit à concurrence de l'impôt supplémentaire que BAe aurait acquitté sur le bénéfice plus élevé résultant du report du paiement.
V La Commission a procédé à un réexamen complet des éléments susmentionnés et a conclu que chacun d'entre eux contenait une aide d'État au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE et que cette aide était incompatible avec le marché commun.
Avant de reprendre point par point les concessions mentionnées plus haut, la Commission tient à formuler une observation générale: la conclusion essentielle de la décision de 1988 concernant l'élément d'aide contenu dans la vente du RG à BAe était que comme Rover - qui avait une valeur comptable positive - était vendue à BAe pour un prix négatif suivant des négociations exclusives, les conditions de vente contenaient par définition une aide d'État de la part du vendeur à l'acheteur. Il découle de cette constatation que toute autre révision ultérieure des conditions de la vente impliquant des coûts financiers supportés exclusivement par le vendeur augmente le prix négatif et constitue une nouvelle aide d'État.
En ce qui concerne les différentes concessions, la Commission tire les conclusions suivantes:
a) La subvention de 9,5 millions de livres sterling versée à BAe constitue une aide au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE. Ce paiement a été financé, comme le secrétaire d'État au commerce et à l'industrie le reconnaît dans la lettre qu'il a adressée le 12 juillet 1988 au président de BAe, « par le biais d'une subvention directe à BAe fondée sur l'article 8 de l'Industrial Development Act de 1982 ». En d'autres termes, il a été financé en vertu d'un régime d'aide approuvé. Tout paiement de cet ordre constitue par définition une aide d'État. En outre, la modification des conditions de la vente de Rover à BAe par rapport à celles qui avaient été autorisées par la Commission, de manière à conférer un avantage financier exclusif à BAe, augmentait l'élément d'aide d'État contenu dans ces conditions.
Cette aide ne faisait pas partie des conditions de la vente notifiées et constituait par conséquent une modification, contraire à la première condition de l'article 1er de la décision de 1988, des conditions de vente envisagées. L'affirmation du gouvernement britannique selon laquelle la Commission a été informée de cette concession est inexacte. Cette proposition a été faite par le secrétaire d'État au commerce et à l'industrie au membre de la Commission responsable de la concurrence à l'époque, mais a été fermement rejetée par ce dernier. Dans sa lettre du 12 juillet 1988 à BAe, le ministère du commerce et de l'industrie (DTI) recommandait un montant de 9,5 millions de livres sterling pour un coût réel de 13,5 millions de livres sterling, parce qu'une subvention supérieure à 10 millions de livres sterling nécessitait l'approbation du Parlement et comportait, par conséquent, un « risque beaucoup plus élevé d'être contestée et donc de devoir être remboursé ».
b) Le montant de 1,5 million de livres sterling payé au RG au titre de frais de consultation constitue une aide au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE. Ces frais représentent un coût normal pour cette opération qui devrait être pris en compte dans le prix final de la cession. Ils conféraient un avantage financier au groupe Rover et, comme pour la mesure évoquée au point a) ci-dessus, s'ajoutaient à l'aide d'État autorisée dans la décision de 1988.
c) Le report de vingt mois du paiement du prix d'acquisition, qui représentait un avantage de quelque 33,4 millions de livres sterling pour BAe, constituait une aide d'État au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE. La date du paiement du prix d'acquisition d'une société dans une opération telle que l'achat par BAe du RG est manifestement l'un des éléments essentiels de la transaction. Comme pour les mesures évoquées aux points a) et b) ci-dessus, cette mesure conférait un avantage financier à BAe et s'ajoutait à l'aide d'État autorisée dans la décision de 1988.
En ce qui concerne le calcul de la valeur que ce report de vingt mois du paiement du prix d'achat représentait pour BAe, la Commission avait d'abord accepté, en rédigeant sa décision de 1990, la méthode proposée par les autorités britanniques. Celle-ci se fondait sur l'intérêt théorique que BAe aurait eu à payer sur un prêt de 150 millions de livres sterling pendant vingt mois en supposant que BAe aurait versé des intérêts au taux de base en empruntant ces 150 millions de livres sterling à court terme auprès d'une banque privée. La valeur qui en résulte est de 33,4 millions de livres sterling. La Commission reconnaît que BAe aurait pu réunir ces fonds de diverses manières, par exemple sur ses propres ressources internes, par un emprunt à long terme à des conditions plus favorables, etc. En fait, BAe fait valoir qu'elle aurait pu collecter et aurait collecté les fonds nécessaires par le biais d'une émission d'obligations à long terme sur vingt-cinq ans à un taux d'intérêt de 10,97 % pour l'émetteur. Cette méthode aurait, d'après les affirmations de la société, coûté 26,8 millions au cours des vingt premiers mois, et non le montant de 33,4 millions de livres sterling calculé par le gouvernement britannique. Les calculs de BAe sont fondés sur l'hypothèse que trois versements d'intérêts de six mois seraient venus à échéance sur la période en question, mais ignorent toutes les autres conséquences liées à un emprunt contracté sur vingt-cinq ans pour répondre à un engagement de vingt mois, c'est-à-dire tous les versements d'intérêts dus pour les deux cent quatre-vingts mois restants du prêt et le risque de modification des taux d'intérêt et d'inflation. La Commission ne peut accepter que cette méthode de calcul sur mesure donne une idée raisonnable de la valeur que le report de vingt mois d'une obligation de paiement représente pour BAe. En tout état de cause, l'argument réel de BAe est que, grâce au report concédé par le gouvernement, elle a remis à plus tard l'émission d'un emprunt de vingt-cinq ans. La valeur de ce report n'a rien à voir avec les conditions réelles auxquelles un tel emprunt aurait été contracté. La concession n'a fait que reporter l'emprunt. Par conséquent, la Commission ne peut percevoir la valeur du report que comme l'intérêt théorique qui résulterait d'un emprunt contracté pour cette période de vingt mois. La proposition faite par les autorités britanniques d'adopter le taux de base pour calculer cet intérêt théorique est l'approche la plus logique et la plus réaliste puisqu'il s'agit du taux de base auquel les banques britanniques prêtent à court terme à leurs meilleurs clients. Par conséquent, la Commission conclut que la valeur de l'aide d'État contenue dans le report est de 33,4 millions de livres sterling.
La Commission n'accepte pas l'argument développé par les autorités britanniques en révélant cette aide, selon lequel le montant « brut » de l'aide doit être diminué de 11,4 millions pour tenir compte du fait que les charges financières occasionnées par un tel prêt auraient réduit la rentabilité de BAe et, par conséquent, sa dette fiscale (pour un taux de l'impôt sur les sociétés de 35 %), pour arriver ainsi à un chiffre « net » de 22 millions de livres sterling. Une analogie peut être faite en l'espèce avec les cas où il y a lieu d'examiner l'élément d'aide contenu dans les prêts à taux réduit ou au taux zéro. Dans de tels cas, la Commission a pour pratique constante de considérer que la valeur brute intégrale de la réduction des taux d'intérêt constitue l'élément d'aide d'État du prêt. De la même façon, la Commission s'en tient en l'espèce à sa pratique établie qui consiste dans ces conditions à définir l'aide d'État comme la valeur brute du report. Elle considère par conséquent que la valeur de cette aide d'État doit être fixée à 33,4 millions de livres sterling.
La décision de 1988 établissait que les aides au RG autorisées - et par extension les aides non notifiées en faveur de la même opération - restreignaient la concurrence et affectaient le commerce entre États membres, et qu'elles constituaient par conséquent des aides d'État au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE. Le fait que le bénéficiaire véritable de la majorité de ces aides, BAe, exerce également toute une série d'autres activités commerciales dans la Communauté et dans le monde entier ne modifie en rien cette conclusion. À compter de la date de la vente de Rover à BAe, cette dernière se livrait directement au commerce de véhicules à moteur entre États membres du fait qu'elle était seule propriétaire de l'entité économique poursuivant ses activités, le RG.
VI Ces aides, qui ne faisaient pas l'objet de la notification initiale de la remise de dettes de 800 millions de livres sterling en faveur du RG, auraient dû être notifiées à la Commission comme il est prévu à l'article 93 paragraphe 3 du traité CEE. Étant donné que le gouvernement britannique n'a pas notifié au préalable son intention d'accorder ces aides additionnelles, la Commission n'a pu se prononcer sur les mesures avant leur mise en oeuvre. Par conséquent, les aides sont illégales puisqu'elles ont été accordées en violation de l'article 93 paragraphe 3 du traité.
À cet égard, il convient de rappeler que, eu égard au caractère impératif des règles de procédure prévues par l'article 93 paragraphe 3 du traité CEE qui revêtent également de l'importance sous l'angle de l'ordre public, et auxquelles la Cour de justice a reconnu un effet direct dans l'arrêt qu'elle a rendu le 19 juin 1973 dans l'affaire 77/72 (5), l'illégalité de l'aide en question ne peut être redressée a posteriori.
VII En examinant si les trois aides d'État définies ci-dessus sont compatibles ou non avec le marché commun, la Commission doit tenir compte de tous les éléments en cause, y compris de la situation économique et de la situation sur le marché déjà prises en considération dans la décision de 1988, de même que des conditions imposées par la décision [voir le point 20 des motifs de l'arrêt rendu par la Cour le 3 octobre 1991 dans l'affaire C-261/89, Italie contre Commission (6)]. À cet égard, il convient de rappeler que l'objet et l'effet des trois aides additionnelles accordées à BAe par le gouvernement britannique étaient de rendre les conditions d'acquisition du RG plus favorables pour BAe que celles que la Commission avait considérées comme compatibles avec le marché commun au sens de l'article 92 paragraphe 3 point c) et partant, autorisées et stipulées dans sa décision de 1988. Elle avait en effet estimé que ces conditions représentaient l'aide maximale qu'elle pouvait considérer comme compatible avec cet article eu égard aux engagements donnés dans le plan de restructuration 1988-1992. La mise en oeuvre de ce plan reste l'élément sur la base duquel le critère selon lequel la compatibilité de l'aide autorisée de 469 millions de livres sterling et de l'aide non autorisée de 44,4 millions de livres sterling doit être examinée. Or, la Commission n'a pas constaté de modification des circonstances ou des faits pouvant l'amener à réviser la conclusion à laquelle elle était parvenue dans sa décision de 1988, à savoir que le montant de 469 millions de livres sterling était l'aide d'État maximale en faveur de cette opération qu'elle pouvait considérer comme compatible avec le marché commun. Aucun argument dans ce sens n'a d'ailleurs été avancé par le gouvernement britannique ou par BAe. Par conséquent, la Commission conclut que toutes les aides additionnelles accordées à BAe pour racheter le RG postérieurement à la décision de 1988 sont incompatibles avec le marché commun.
VIII Les observations présentées par BAe peuvent être résumées comme suit:
i) les concessions additionnelles accordées par le gouvernement britannique à BAe (« les avantages ») n'ont pas abouti à la vente du RG à BAe à une valeur inférieure à la valeur réelle;
ii) les avantages n'ont pas affecté et n'auraient pu affecter la conduite des activités du RG après sa vente à BAe et n'auraient pu affecter le commerce;
iii) BAe et le RG sont des parties innocentes qui ont agi de bonne foi tout au long de l'affaire;
iv) sans ces avantages, BAe n'aurait pas acheté RG, ce qui « aurait compromis la réalisation des objectifs de la Commission »;
v) la récupération des avantages pénaliserait BAe et RG tout en enrichissant indûment le gouvernement britannique;
vi) les avantages ne constituent pas une aide d'État: un investisseur privé se trouvant dans la situation du gouvernement britannique au moment de la vente aurait accepté les trois concessions, en particulier s'il était soucieux de ne pas compromettre la vente et avait des préoccupations d'ordre social à l'égard des actionnaires minoritaires;
vii) il n'y a aucune preuve que les avantages aient eu un effet quelconque sur le commerce dans la Communauté; il ne peut être établi qu'ils ont affecté le comportement d'aucune des branches de BAe après qu'ils aient été accordés par le gouvernement;
viii) même si ces avantages devaient être considérés comme des aides d'État, ils n'ont pas été quantifiés correctement pour trois raisons: d'abord, la Commission aurait dû les répartir sur les différentes activités de BAe; deuxièmement, la Commission a surestimé la valeur du report de paiement du prix d'achat de RG en se fondant sur le taux d'intérêt indiqué par le gouvernement britannique; troisièmement, dans toute injonction de remboursement, la Commission devrait prendre en considération l'incidence de la fiscalité sur l'avantage que représente pour BAe le report du paiement du prix d'achat;
ix) si la décision de la Commission de 1990 n'avait pas été illégale, la récupération des intérêts aurait été déterminée conformément à la pratique appliquée par la Commission en 1990, c'est-à-dire à compter de la date fixée pour le remboursement de l'aide, comme le laisse présager la communication par laquelle la Commission ouvrait la procédure prévue par l'article 93 paragraphe 2 du traité CEE. Par conséquent, la Commission ne peut se prévaloir de l'erreur qu'elle a commise en n'adoptant pas une décision légale en 1990, pour aggraver encore la situation de BAe et du RG en leur appliquant une pratique administrative qu'elle a adoptée ultérieurement;
x) les systèmes juridiques développés se fondent sur le principe bien établi que les modifications non seulement des lois, mais également des pratiques administratives ne peuvent avoir d'effet rétroactif. À cet égard, la Cour de justice des Communautés européennes a annulé, dans l'arrêt qu'elle a rendu dans l'affaire 344/85 (7), une décision de la Commission au motif que celle-ci n'avait pas suivi la pratique en vigueur à l'époque considérée et qui avait été modifiée à la date de la décision contestée;
xi) les arrêts de la Cour de justice cités dans la lettre du 30 juillet 1992 ne permettent pas de considérer automatiquement que les intérêts doivent toujours être comptés à partir de la date d'octroi de l'aide d'État illicite. La Cour n'a fait aucune déclaration à cet effet dans l'une ou l'autre affaire. La décision de la Commission en cause dans l'affaire Tubemeuse (8) n'ordonnait pas la récupération de l'intérêt: les faits en cause dans l'affaire FNCEPA (9) différaient plus encore de ceux qui font l'objet de la présente procédure;
xii) si elle devait appliquer sa nouvelle pratique en ce qui concerne le report de paiement, la Commission confirmerait les pénalités imposées à BAe, qui serait alors redevable de pénalités sur des pénalités; le gouvernement britannique tirerait alors largement profit de toute décision constatant qu'il a agi illégalement. En effet, l'obligation de verser des intérêts à compter de la date effective de réception des aides aurait pour effet de détériorer la position de BAe par rapport à ce qu'elle aurait été si le gouvernement britannique et BAe n'avaient pas convenu du report de la date de paiement du prix d'achat pour le RG. Une nouvelle pénalité s'ajouterait alors à celle qui découle du fait que la Commission n'a pas tenu compte, en calculant l'intérêt théorique sur le report du paiement du prix d'achat du RG, des taux d'intérêt réels que BAe aurait pu obtenir sur les marchés monétaires en 1988, et de l'effet différent de la taxation de l'aide et de son remboursement au Royaume-Uni.
Ces arguments sont examinés point par point dans la partie qui suit.
IX BAe fait valoir [VIII i)] qu'il ressort de l'ouverture de la présente procédure en vertu de l'article 93 paragraphe 2 du traité CEE que la « Commission considère presque certainement que, en raison des avantages, le gouvernement britannique a vendu RG à BAe à une valeur inférieure à sa valeur réelle. » Cette affirmation n'est pas conforme à la vérité. La Commission a déjà précisé dans sa décision de 1990 qu'elle avait réexaminé le prix versé par BAe pour RG à la lumière de tous les documents qui étaient apparus après la décision de 1988, mais qu'elle avait conclu que les éléments qu'ils contenaient ne modifiaient pas son point de vue initial selon lequel le prix d'acquisition de 150 millions de livres sterling, ou le prix négatif de 319 millions de livres sterling auquel le gouvernement avait vendu le RG compte tenu de la remise de dettes de 469 millions de livres sterling, représentait un prix équitable tant pour l'acheteur que pour le vendeur, eu égard à toutes les conditions dont la vente était assortie. Il n'est pas pertinent de soutenir, comme le fait BAe, que la Commission a été induite en erreur par le gouvernement britannique qui lui a fait croire que BAe était disposée à acheter le RG aux conditions fixées dans la décision de 1988. La Commission ne fonde pas ses décisions sur leur acceptabilité ou non pour les parties en cause, mais veille à assurer la compatibilité des mesures d'aide avec les critères prévus par le traité. Dans le cas d'espèce, la décision de 1988 fixe le montant maximal de l'aide qui peut être considérée comme compatible avec le traité.
En ce qui concerne l'argument exposé à la partie VIII point ii), BAe fait valoir qu'il ne peut y avoir de lien de cause à effet entre l'existence d'avantages et la conduite des activités du RG. « Une fois que BAe avait acheté le RG, le montant "était une affaire classée" ». La Commission ne peut admettre qu'elle soit tenue de déterminer les modifications du comportement commercial d'une entreprise qui a reçu une aide d'État. Il serait manifestement absurde d'imposer à la Commission une telle obligation, qui compromettrait gravement le rôle qui lui revient de contrôler les aides d'État dans la mesure où elles affectent le commerce entre États membres. Il est bien établi en tout état de cause que l'octroi d'une aide à une entreprise qui exerce ses activités dans la Communauté affecte le commerce intracommunautaire et entraîne une distorsion de la concurrence, du fait qu'elle améliore la position financière de celle-ci.
En ce qui concerne l'argument développé à la partie VIII point iii), la Commission considère que, abstraction faite des circonstances particulières du cas d'espèce, il n'est pas nécessaire d'établir qu'une entreprise n'était pas une partie innocente ou n'a pas agi de bonne foi pour exiger le remboursement d'une aide d'État illégale et incompatible avec le traité. [Voir, par exemple, la décision de la Commission 92/11/CEE (Toyota, Royaume-Uni) (10)]. En fait, les éléments de preuve réunis dans la présente affaire indiquent que le gouvernement britannique comme BAe connaissaient bien les problèmes que pouvaient poser, au regard de l'article 92 du traité CEE, les avantages concédés par le gouvernement. La lettre adressée par le secrétaire d'État au commerce et à l'industrie au président de BAe le 12 juillet 1988 ne confirme guère l'affirmation selon laquelle le gouvernement britannique et BAe ignoraient que les concessions qui étaient négociées à ce moment-là risquaient de poser des problèmes graves pour la Commission si elles étaient découvertes. Dans sa lettre, le secrétaire d'État proposait trois possibilités de réviser les conditions d'acquisition notifiées en reportant le paiement des 150 millions de livres sterling: « en ce qui concerne le report du paiement de la contrepartie de 150 millions de livres sterling, je peux vous proposer trois possibilités présentant en ordre croissant le risque que le report sera décelé par la Commission européenne, auquel cas celle-ci pourrait exiger le remboursement de l'intérêt théorique économisé. . . Je suis prêt à prendre celle de ces options que vous préférez. »
En ce qui concerne l'argument exposé à la partie VIII point iv), BAe a indiqué que le remboursement des avantages par BAe compromettrait « les objectifs de la Commission ». C'est à tort que BAe impute deux objectifs à la Commission dans son évaluation de l'affaire: d'abord, que le RG ne devait pas rester dans le secteur public, mais être vendu à un acquéreur privé, et deuxièmement, que le RG devait être vendu à BAe plutôt qu'à un des concurrents du RG. Or, tels n'étaient pas les objectifs de la Commission; ceux-ci visaient exclusivement à assurer le respect des critères et des objectifs énoncés à l'article 92 du traité. Le problème de la privatisation du groupe Rover relevait de la responsabilité du gouvernement britannique. Sur le deuxième point, la vente hypothétique du RG à un concurrent aurait certainement pu, comme BAe le fait valoir, engendrer des problèmes de concurrence tout différents de ceux qu'a provoqués la vente à BAe, mais ceux-ci n'auraient pas eu à être examinés au regard de l'article 92 du traité CEE.
En ce qui concerne les arguments exposés à la partie VIII point v), la Commission ne peut admettre que, en vérifiant dans quelle mesure des aides d'État sont compatibles avec le marché commun, elle doive s'abstenir de prendre une décision qui serait inacceptable pour les parties directement en cause ou veiller à ce que les termes de sa décision garantissent la mise en oeuvre du projet notifié. Contrairement à l'argument développé par BAe, la Commission ne tente pas de « refaire un accord en faveur de l'une des parties et au détriment flagrant de l'autre partie qui avait agi de bonne foi tout au long de l'affaire. » La Commission a fondé sa décision initiale sur les conditions notifiées de la vente du RG. Les conditions révisées de la vente n'ont pas été notifiées à la Commission: au contraire, elles lui ont délibérément été dissimulées, si bien que BAe ne peut reprocher à la Commission les conclusions auxquelles celle-ci est parvenue sur ces conditions révisées qui sont finalement ressorties de l'enquête du NAO. De même, l'argument de l'enrichissement indu du gouvernement britannique résultant du remboursement de l'aide par BAe est sans objet au regard de l'article 92 du traité CEE. Le remboursement d'une aide d'État illégale a pour objectif essentiel de restaurer le statu quo et, par la même occasion, de supprimer les distorsions de concurrence.
En ce qui concerne l'argument développé à la partie VIII point vi), BAe maintient qu'un acheteur privé se trouvant dans la position du gouvernement britannique au moment de la vente aurait en fait accepté chacune des trois concessions accordées à BAe et que celles-ci ne constituent donc pas des aides d'État. BAe fait valoir que les concessions ont toutes été accordées en application de clauses d'un contrat, ayant donc une force obligatoire, passé entre elle-même et le gouvernement, que BAe a donné une contrepartie valable (c'est-à-dire qu'elle a procédé à l'achat) et que chacune de ces différentes concessions représentait une opération commerciale normale que l'on pouvait considérer comme acceptable par un vendeur privé dans la position du gouvernement britannique. La Commission considère pour sa part que la question du caractère obligatoire des concessions pour les parties conformément au droit britannique n'a rien à voir avec leur statut d'aide d'État. La Commission ne peut être restreinte dans son examen des aides d'État par le statut prétendument obligatoire des opérations examinées, en particulier lorsque celles-ci ne lui ont même pas été divulguées.
La Commission comprend la motivation profonde des parties qui ont accepté ces concessions, à savoir d'éviter les répercussions pleines et entières des conclusions de la Commission sur les conditions d'acquisition du groupe Rover, ainsi qu'il ressort de la lettre adressée par le président de BAe au secrétaire d'État au commerce et à l'industrie le 6 juillet 1988. On ne peut affirmer toutefois que BAe ait offert une contrepartie valable pour ces concessions. Ces dernières représentent « des conditions de vente révisées » unilatéralement « pour l'acquisition du groupe Rover » (lettre du 6 juillet 1988) par rapport aux conditions notifiées de l'acquisition, toutes exclusivement aux dépens du gouvernement britannique. Même s'il fallait admettre qu'un vendeur privé aurait accepté ces concessions exigées par l'acheteur au dernier moment comme constituant « une pratique normale », il n'en reste pas moins que celles-ci représentent une modification tout à fait substantielle des conditions du contrat notifié à la Commission. Comme les conditions de l'acquisition notifiée contenaient d'emblée un montant très important d'aide d'État, toute révision de ces conditions accordant des concessions financières unilatérales à BAe constituait automatiquement une aide d'État. Le fait que ces concessions représentent des aides d'État est en outre confirmé par les arguments avancés par BAe elle-même, selon lesquels la vente ne se serait pas faite en leur absence.
En ce qui concerne l'argument développé à la partie VIII point vii), la position de la Commission quant aux effets des aides sur le commerce intracommunautaire est exposée au dernier paragraphe de la partie V ci-dessus.
En ce qui concerne l'argument développé à la partie VIII point viii), la Commission a déjà examiné (à la partie V ci-dessus) la question de savoir pourquoi il n'est pas nécessaire de lier ou de « rapporter » les aides aux différentes activités commerciales de BAe. Elle a également expliqué sur quelle base elle avait calculé la valeur de l'aide d'État contenue dans le report du paiement du prix d'achat. La Commission ne considère pas que l'incidence fiscale de ce report pour BAe, voire toute injonction qui serait faite ultérieurement au gouvernement de récupérer cette aide, doive entrer dans ce calcul. Les modalités des régimes fiscaux nationaux dans ce domaine relèvent de la compétence des autorités nationales. Il n'appartient pas à la Commission d'intervenir à cet égard ou de prendre ces modalités en considération, sauf lorsqu'elles sont de nature à réserver un traitement particulièrement favorable à certaines entreprises et risquent par conséquent de contenir en soi des éléments d'aide d'État et, partant, d'avoir un effet direct sur la concurrence entre entreprises de différents États membres. Tel n'est pas le cas en l'espèce. La Commission ne tient pas compte de l'incidence fiscale des mesures d'aide lorsqu'elle calcule l'équivalent-subvention brut et net des différentes aides sous l'angle de leur compatibilité, mais il n'en reste pas moins que c'est le montant brut qui constitue l'aide.
En réponse aux arguments développés à la partie VIII points ix), x) et xi), il convient d'observer, en ce qui concerne l'affirmation selon laquelle la position de BAe se trouverait détériorée par une injonction expresse de récupérer l'intérêt, que, dans sa décision du 17 juillet 1990, la Commission ordonnait simplement la récupération du montant total de 44,4 millions de livres sterling reçu à titre d'aide, mais n'ordonnait pas expressément la récupération de l'intérêt sur ce montant. On ne peut toutefois déduire de cette décision qu'aucun intérêt ne devait être récupéré, c'est-à-dire que si cette décision avait été mise en oeuvre, aucun intérêt n'aurait dû être récupéré. Selon l'économie de l'arrêt rendu par la Cour le 21 mars 1990 [dans l'affaire « Tubemeuse », citée à la partie VIII point xi) ci-dessus], la récupération de l'intérêt de même que celle du principal est nécessaire en vue de rétablir la situation antérieure (point 66 des motifs); dans le cas contraire, le bénéficiaire d'une aide illégale qui, comme dans le cas d'espèce, pourrait être augmentée par l'ajournement de la date effective de son remboursement au moyen d'une action devant la Cour de justice, en retirerait un avantage financier indu, c'est-à-dire une aide supplémentaire au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE. En outre, BAe et le RG ont, dans l'intervalle, été autorisés à bénéficier d'un avantage financier que, de l'avis de la Commission, ils n'auraient absolument pas dû avoir. Enfin, il est à noter que la Cour a rendu son arrêt dans l'affaire « Tubemeuse » avant l'adoption de la décision de la Commission du 17 juillet 1990 dans la présente affaire et que cet arrêt confirme une jurisprudence constante sur l'objet et la nécessité de la récupération des aides d'État accordées illégalement.
BAe soutient [VIII ix)] que si la décision de 1990 n'avait pas été illégale, la récupération de l'intérêt aurait été déterminée conformément à la pratique en vigueur en 1990, c'est-à-dire à compter de la date fixée pour le remboursement de l'aide dans la lettre de la Commission du 17 juillet 1990 notifiant aux autorités britanniques sa décision négative assortie d'une injonction de remboursement de 44,4 millions de livres sterling, à savoir le 18 août 1990. Cette affirmation est exacte: la Commission avait à cette époque pour pratique constante, dans ses décisions enjoignant la récupération des aides d'État illégalement versées, d'exiger la récupération de l'aide conformément aux dispositions du droit national applicable notamment aux intérêts de retard dus à l'État. Au Royaume-Uni, les règles en vigueur en la matière étaient et sont toujours les suivantes:
a) dans une procédure devant la Haute Cour (High Court) pour la récupération d'une dette ou d'un dommage, toute somme fixée par l'arrêt peut comprendre un intérêt simple, au taux considéré par la Cour comme adéquat ou fixé par le règlement de procédure, qui peut courir à compter de la date où le fait litigieux s'est produit (article 35A de la Supreme Court Act, 1981);
b) une partie doit faire valoir spécifiquement une demande d'intérêts en vertu dudit article 35A [Supreme Court Rules, Order 18, Rule 8 (4)];
c) ces intérêts courent en tout état de cause à compter de la date de l'arrêt lorsqu'il est prononcé et s'appliquent à toutes les dettes de la Couronne ou envers la Couronne (article 24 paragraphes 1 et 2; Crown Proceedings Act, 1947).
À la suite de sa décision de 1990, c'est-à-dire en mars 1991, la Commission a mis en oeuvre une pratique (qu'elle a notifiée aux États membres) consistant à exiger, dans ses décisions concernant la récupération d'aides d'État versées de manière illicite, que l'intérêt sur le montant de l'aide à récupérer coure à partir de la date du paiement effectif. Or, cette pratique n'existait pas à la date de la décision de 1990: la Commission admet par conséquent l'argument avancé par les autorités britanniques et par BAe que cette politique ne doit pas être appliquée à titre rétroactif, en particulier à la date à laquelle les intérêts devraient courir, dans le cas d'espèce. Il s'ensuit que la date à retenir est celle qui est prévue par les règles nationales en vigueur à l'époque des faits, c'est-à-dire lorsque la décision de 1990 a été prise. Il s'ensuit également que la position financière de BAe et du RG ne serait pas détériorée par rapport à celle qui était la leur en juillet 1990, s'il leur était fait obligation de verser des intérêts sur le principal en question avec effet à la date à laquelle le principal aurait dû être versé conformément à la décision de 1990, soit au 17 août 1990.
Il convient de rappeler à cet égard que, à la suite de la décision de 1990, le gouvernement britannique a fait part à la Commission de son intention de se conformer à cette décision et a engagé à cet effet une action devant la High Court contre BAe et le RG: contre la première pour récupérer le montant de 42,9 millions de livres sterling et contre la dernière pour récupérer le montant de 1,5 million de livres sterling. Dans chaque cas, la plaignante (DTI) a réclamé dans l'assignation introductive « . . . des intérêts en vertu de l'article 35A du Supreme Court Act 1981 . . . au taux que la Cour considère comme adéquat pour la période du 18 août 1990 à la date de l'assignation et pour la période à compter de cette date jusqu'à l'arrêt ou au paiement à une date antérieure. » Par conséquent, la date à laquelle ledit intérêt doit être fixé doit être déterminée par les autorités britanniques conformément à la loi et à la pratique généralement suivie, à l'époque des faits, pour les questions de récupération de dette de l'État d'une nature similaire ou (le cas échéant) identique au Royaume-Uni.
En réponse à l'argument résumé à la partie VIII point xii), il suffit de rappeler que la Commission, en réponse aux observations formulées par les parties, n'exige pas à présent que les intérêts courent à compter de la date effective de réception des aides en question, mais uniquement de la date à laquelle le principal aurait dû être versé conformément à la décision de 1990 si celle-ci n'avait pas été considérée par la Cour comme entachée d'un vice de procédure. Il convient d'observer en outre que, en remédiant, par la présente décision, à ce vice de procédure, elle a donné à toutes les parties en cause la possibilité de lui faire part de leurs observations et que, de cette façon, BAe et le RG ont tous deux obtenu le bénéfice de l'arrêt rendu le 4 février 1992 par la Cour de justice (cité au deuxième alinéa de la partie I ci-dessus). En tout état de cause, les arguments avancés dans ce chapitre reposent sur un malentendu, BAe faisant une confusion entre la quantification du principal de l'une des aides (33,4 millions de livres sterling, représentant le report du versement du prix d'achat pour le RG) et l'intérêt à verser sur ce principal une fois quantifié.
Les deux éléments sont appelés erronément « pénalités ». La Commission a déjà traité de la question de la quantification du principal [à la partie V point c) et au point viii) ci-dessus] et maintient que la méthode utilisée donne un résultat équitable. Il ne s'agit donc pas d'une « pénalité ». La Commission n'impose pas davantage de « pénalité » lorsqu'elle exige que l'intérêt soit versé sur le principal quantifié de la sorte car il en découlerait sinon un avantage financier injustifié pour BAe et le RG.
X Dans la lettre qu'il a adressée à la Commission le 25 septembre 1992, le gouvernement britannique réaffirme son intention de respecter et de mettre en oeuvre toute nouvelle décision de la Commission ordonnant la récupération des 44,4 millions de livres sterling d'aide qui ont accompagné la vente du RG en 1988, étant entendu toutefois que l'intérêt ne courrait qu'à compter d'une date spécifiée suivant la publication d'une telle décision. Il souligne que la proposition formulée par la Commission dans sa lettre du 30 juillet 1992 pénaliserait effectivement BAe et le RG pour avoir obtenu gain de cause devant la Cour contre la décision de 1990, ce qui ne peut être considéré comme un résultat équitable et raisonnable. Enfin, une telle démarche ne faciliterait pas, bien au contraire, la tâche du gouvernement britannique qui doit assurer le remboursement de l'aide par BAe et le RG.
Les éléments de fait et de droit contenus dans les observations formulées par le Royaume-Uni sont examinés ci-dessus. En ce qui concerne l'argument de l'équité, il y a lieu d'observer qu'autoriser le bénéficiaire d'une aide d'État illégale à en retirer l'avantage financier résultant de sa détention pendant une période assez longue est non seulement illicite, mais également inéquitable, en particulier envers les concurrents qui n'ont pas bénéficié d'une aide d'État injustifiable dans un secteur industriel sensible.
XI Dans les cas où une aide est incompatible avec le marché commun, la Commission, faisant usage de la possibilité qui lui est offerte par l'article 93 paragraphe 2 du traité CEE et par l'arrêt rendu par la Cour de justice le 12 juillet 1973 dans l'affaire 70/72 (11) (Commission/Allemagne), confirmé par l'arrêt du 24 février 1987 dans l'affaire 310/85 (12) (Deufil/Commission), peut obliger les États membres à récupérer l'aide accordée auprès des bénéficiaires. À cet effet, il est nécessaire que les autorités britanniques récupèrent immédiatement les aides incompatibles accordées à BAe et au RG par le gouvernement britannique se montant à 44,4 millions de livres sterling, conformément aux dispositions du droit national régissant la récupération des dettes de l'État en vigueur à l'époque des faits,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier
Les aides d'État supplémentaires accordées par le gouvernement britannique à British Aerospace pour l'achat du groupe Rover, dépassant le montant autorisé par la Commission dans sa décision 89/58/CEE et s'élevant à 44,4 millions de livres sterling, sont illégales étant donné qu'elles ont été accordées en violation de l'article 93 paragraphe 3 du traité CEE. Elles sont également incompatibles avec le marché commun au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE.

Article 2
Le gouvernement britannique est invité à assurer le retrait de l'aide définie à l'article 1er par le remboursement de 44,4 millions de livres sterling par British Aerospace et le groupe Rover audit gouvernement. Ce montant sera majoré du différentiel d'intérêt dont ont bénéficié British Aerospace et le groupe Rover, qui doit courir à compter du 18 août 1990 et être calculé à un taux à fixer conformément aux dispositions de la législation britannique régissant la récupération des dettes envers l'État en vigueur au 18 août 1990.

Article 3
Le gouvernement britannique informe la Commission, dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, des mesures prises pour s'y conformer.

Article 4
Le Royaume-Uni est destinataire de la présente décision.
Fait à Bruxelles, le 9 mars 1993.
Par la Commission
Karel VAN MIERT
Membre de la Commission

(1) JO no C 122 du 14. 5. 1992, p. 3.
(2) JO no L 25 du 28. 1. 1989, p. 92.
(3) JO no C 21 du 29. 1. 1991, p. 2.
(4) Recueil 1992, p. I-493.
(5) Recueil 1973, p. 611, Capolongo/Maya.
(6) Recueil 1991, p. I-4437.
(7) Arrêt du 12 novembre 1987 dans l'affaire 344/85, Ferrière San Carlo SpA contre Commission, Recueil 1987, p. 4435.
(8) Arrêt du 21 mars 1990 dans l'affaire C-142/87, Commission contre Belgique, Recueil 1990, p. 959.
(9) Arrêt du 21 novembre 1991 dans l'affaire C-354/90, Recueil 1991, p. I-5505.
(10) JO no L 6 du 11. 1. 1992, p. 36.
(11) Recueil 1973, p. 813.
(12) Recueil 1987, p. 901.

Fin du document


Structure analytique Document livré le: 11/03/1999


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