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Document 392D0329

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[ 08.60 - Aides accordées par les États et autres subventions ]


392D0329
92/329/CEE: Décision de la Commission, du 25 juillet 1990, relative à l'aide accordée par le gouvernement italien à un fabricant de produits ophtalmologiques (Industrie ottiche riunite - IOR) (Le texte en langue italienne est le seul faisant foi)
Journal officiel n° L 183 du 03/07/1992 p. 0030 - 0035



Texte:

DÉCISION DE LA COMMISSION du 25 juillet 1990 relative à l'aide accordée par le gouvernement italien à un fabricant de produits ophtalmologiques (Industrie ottiche riunite - IOR) (Le texte en langue italienne est le seul faisant foi.) (92/329/CEE)
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 93 paragraphe 2 premier alinéa,
après avoir mis les intéressés en demeure de présenter leurs observations, conformément aux dispositions dudit article, et vu ces observations,
considérant ce qui suit:
I
La société anonyme Industrie ottiche riunite (IOR) est née en 1969 d'une fusion entre Filotecnica Salmoiraghi et Officine Galileo di Marghera. De 1975 à 1983, elle a eu pour actionnaire unique Finmeccanica puis, de 1983 à 1986, la société Sofin, toutes deux membres du holding public IRI.
En octobre 1986 a eu lieu une privatisation partielle d'IOR. Le 15 de ce mois-là, en effet, 50 % des actions de cette entreprise ont été vendues à la société Finalp, à leur valeur nominale de 2 milliards de lires italiennes et son département « lentilles de contact » est passé aux mains du groupe Ciba-Geigy. Cette privatisation est achevée en mars 1989 lorsque Finalp acquiert les 50 % restants du capital d'IOR.
Avant sa privatisation partielle, IOR n'a jamais été rentable. Ses pertes d'élevaient en effet à 8,2 milliards de lires italiennes en 1982, 5,6 milliards en 1983, 6,5 milliards en 1984, 11,5 milliards en 1985 et 11,9 milliards en 1986, ce qui correspond respectivement à 31 %, 18 %, 19 %, 26 % et 24 % du chiffre d'affaires de ces mêmes années. Chaque fois, ces pertes ont été couvertes par l'actionnaire public de l'entreprise. Les pertes encourues en 1985 et prévues pour la période du 1er janvier au 15 octobre 1986 ont été couvertes par une avance de 17,3399 milliards de lires italiennes octroyées par la société Sofin; par la suite, lors de la privatisation partielle d'IOR en octobre 1986, Sofin a renoncé à faire valoir ses droits sur cette créance.
Cette intervention a eu lieu sans notification préalable de la Commission, contrairement aux dispositions de l'article 93 paragraphe 3 du traité.
II
La Commission, ayant appris que Sofin avait consenti une avance de 17,3 milliards de lires italiennes à IOR et avait ensuite renoncé à sa créance, et considérant que des interventions de cette sorte peuvent constituer une aide d'État, a invité le gouvernement italien, par lettres datées respectivement du 30 novembre 1987, 20 janvier 1988 et 13 avril 1988, à lui fournir des renseignements à ce sujet.
Par télex datés du 29 février et du 13 juin 1988, le gouvernement italien a répondu de manière incomplète en ce qui concerne la privatisation et déclaré qu'il fallait voir dans l'intervention de la Sofin une décision d'actionnaire normale et non pas une forme d'aide d'État.
Après un premier examen des informations disponibles, la Commission a estimé que les 17,3 milliards de lires italiennes octroyés à IOR par son actionnaire public constituent effectivement une aide d'État interdite par les dispositions de l'article 92 paragraphe 1 du traité et qui ne remplit pas les conditions nécessaires pour bénéficier d'une des dérogations prévues audit article.
La Commission n'a pas pu non plus exclure la possibilité que le financement d'IOR après le 15 octobre 1986 contenait d'autres éléments propres à une aide d'État. En conséquence, elle a décidé, le 3 novembre 1988, d'ouvrir la procédure prévue à l'article 93 paragraphe 2 du traité à l'égard de ces aides et a invité le gouvernement italien, par lettre datée du 25 novembre 1988, à lui présenter ses observations.
III
Par lettre du 25 janvier 1989, le gouvernement italien a présenté ses observations dans le cadre de cette procédure. Il a indiqué que Sofin avait investi environ 7 milliards de lires italiennes dans IOR au cours de la période allant de 1983 à 1986, afin d'améliorer la productivité et l'efficacité de celle-ci. En couvrant les pertes d'IOR, la société Sofin agissait donc comme tout investisseur l'aurait fait dans une situation semblable, étant donné que cette dernière - en tant que seul et unique actionnaire d'IOR jusqu'en octobre 1986 - était responsable des dettes d'IOR en vertu de la législation italienne.
Le gouvernement italien a, par ailleurs, souligné la volonté de la société Finalp d'assainir la situation d'IOR en 1986 en lui fournissant des garanties bancaires, en y investissant 14 milliards de lires italiennes et en créant des synergies avec d'autres entreprises qu'elle contrôle.
Les résultats financiers d'IOR en 1987 témoignant du succès de cette restructuration, le gouvernement italien ne partageait pas le point de vue de la Commission selon lequel le versement de 17,3 milliards de lires italiennes effectué par Sofin constituait une aide d'État. Toutefois, au cas où la Commission interpréterait malgré tout cette intervention comme une aide, le gouvernement italien estimait que les dérogations prévues au paragraphe 3 de l'article 92 devraient lui être applicables étant donné les similitudes entre cette affaire et trois autres, citées dans le 17e rapport de la Commission sur la politique de concurrence (points 224, 227 et 229), dans lesquelles la Commission avait clos la procédure.
Dans une lettre datée du 16 février 1989, le gouvernement italien a fourni onze annexes de sa lettre du 25 janvier, contenant principalement des données factuelles relatives à la comptabilité et à la privatisation d'IOR.
En réponse à cinq questions supplémentaires soulevées par la Commission dans une lettre datée du 11 octobre 1989, le gouvernement italien a fourni un certain nombre de renseignements dans son télex du 19 décembre 1989. Ces questions portaient respectivement sur un paiement de 5,661 milliards de lires italiennes effectué par la Sofin à IOR en 1987, les conditions auxquelles la Sofin avait prêté 6 milliards de lires italiennes à IOR, celles auxquelles la Sofin avait continué à détenir 50 % du capital d'IOR entre le 15 octobre 1986 et le 15 mars 1989, les détails financiers de la privatisation partielle d'octobre 1986 ainsi que les autres candidats éventuels au rachat d'IOR. Sur ce dernier point notamment, des renseignements supplémentaires ont été fournis par un courrier reçu le 12 juin 1990 et lors d'une réunion bilatérale tenue le 6 juillet 1990.
Dans le cadre de la consultation des autres intéressés, la Finalp, la Sofin et IOR ont également soumis des observations; aucune d'entre elles n'a considéré que l'action du gouvernement italien revêtait un caractère quelconque d'aide d'État, et elles ont été unanimes pour estimer que, quand bien même on décèlerait de tels éléments, ceux-ci seraient sans aucun doute compatibles avec le marché commun.
Les gouvernements de trois autres États membres, à savoir l'Allemagne, le Danemark et les Pays-Bas, ont, dans le cadre de la procédure, soumis des observations qui abondent dans le sens de la décision prise par la Commission d'ouvrir la procédure.
Toutes les observations présentées par des tierces parties ont été transmises au gouvernement italien par une lettre datée du 18 septembre 1989 invitant ce dernier à faire part de ses commentaires. Ceux-ci sont parvenus à la Commission dans un télex daté du 17 janvier 1990.
IV
L'octroi de fonds aux entreprises publiques par leur actionnaire peut comporter des éléments d'aide d'État. Pour pouvoir vérifier, il convient en premier lieu, en laissant de côté toute considération sociale ou tout aspect de politique régionale ou sectorielle, de considérer si, dans un cas semblable, un actionnaire privé procéderait à cette intervention dans les mêmes conditions, sur la base de la rentabilité escomptée de l'opération.
En ce qui concerne IOR, la Commission remarque que les pertes cumulées de la société au cours de la période 1982-1986 s'élèvent à 43,7 milliards de lires italiennes, les fonds propres s'élevant à 4 milliards de lires italiennes.
De l'avis de la Commission, un investisseur privé n'aurait pas payé près de onze fois le montant de son investissement initial en cinq ans à seule fin de pouvoir en céder la moitié à sa valeur nominale, comme Sofin l'a fait en 1986. Par conséquent, l'octroi de 17,3399 milliards de lires italiennes par Sofin en 1986, d'abord sous forme de crédit puis sous forme de don, constitue une aide d'État.
Dans le cadre de la procédure, le gouvernement italien a affirmé que la Sofin avait agi rationnellement en couvrant les pertes d'IOR, étant donné qu'elle était le seul et unique actionnaire de cette entreprise jusqu'au 15 octobre 1986 et, à ce titre, responsable devant la loi italienne pour toutes ses dettes. La liquidation d'IOR lui aurait donc coûté plus cher encore.
La Commission doit s'inscrire en faux contre ce point de vue. Ordinairement, en effet, un investisseur privé hésitera à se mettre dans la position d'actionnaire unique d'une société, s'il lui faut de ce fait assumer une responsabilité illimitée; il s'assurera, dans ce cas, que des gains supplémentaires viennent compenser ce risque additionnel.
S'agissant d'IOR, la Commission note que Finmeccanica (groupe IRI) est devenu le seul et unique actionnaire d'IOR en 1975 lorsqu'elle a acquis les parts détenues par Montedison. En 1983, IRI a transféré IOR de Finmeccanica à la Sofin. Selon les renseignements communiqués par IOR, qui n'ont pas été contredits par le gouvernement italien, IOR n'a pas dégagé de bénéfices une seule année depuis sa création en 1969 jusqu'en 1988, après sa privatisation partielle. La Commission est d'avis que Finmeccanica, la Sofin et, plus généralement, le holding public IRI a, en devenant le seul et unique actionnaire d'IOR, pris un risque que tout investisseur privé aurait refusé de prendre. Par conséquent, le statut d'unique actionnaire d'IOR qui était celui de la Sofin en 1986 ne modifie en rien le jugement porté plus haut, à savoir que le montant de 17,3399 milliards de lires italiennes fourni par la Sofin en 1986 en vue de couvrir une partie des pertes d'IOR constitue une aide d'État.
Un autre argument avancé par le gouvernement italien, par la Sofin et par IOR concernait les engagements financiers de Finalp, en lesquels ils voyaient la contrepartie des interventions de la Sofin. En particulier, Finalp financerait des investissements dans IOR à concurrence de 14 milliards de lires italiennes - en réalité, ce montant a atteint 20 milliards de lires italiennes -, rétablirait la rentabilité d'IOR et libérerait la Sofin des engagements contractés et des garanties émises en sa qualité d'actionnaire unique d'IOR.
Pour sa part, la Commission considère que les engagements financiers de Finalp visant à rétablir la rentabilité d'IOR lui ont certes bénéficié à elle-même ainsi qu'à IOR, mais beaucoup moins à la Sofin qui s'est retirée complètement d'IOR en mars 1989 en cédant les 50 % qu'elle détenait encore du capital d'IOR à Finalp. L'action de cette dernière ne modifie donc pas l'opinion de la Commission selon laquelle les interventions de la Sofin datant d'avant le 15 octobre 1986 constituaient une aide d'État.
La Commission a en outre vérifié si des éléments d'aide supplémentaire ne se cachaient pas dans les prix auxquels le département « lentilles de contact » d'IOR a été vendu à Ciba-Geigy et le reste du capital de cette même entreprise cédé à Finalp en 1986 et en 1989.
Ciba-Geigy a payé 130 millions de lires italiennes le rachat du département « lentilles de contact » d'IOR, un prix nettement inférieur à sa valeur comptable de l'époque. Quant au montant versé par Finalp en 1986 et 1989, il correspondait à la valeur nominale du restant du capital d'IOR - 1 000 lires italiennes par action.
La Commission note qu'en 1986 la Sofin a demandé à un cabinet comptable autre que celui auquel elle recourait ordinairement d'évaluer la valeur théorique d'IOR au 31 décembre 1985. Le chiffre donné en réponse était de moins 32,455 milliards de lires italiennes.
La même année, la Sofin a invité cinq candidats éventuels à la reprise d'IOR à soumettre une offre; la Sofin n'imposait par ailleurs aucune condition préalable qui aurait pu influencer le montant de ces offres. Sur ces cinq candidats, trois se montrèrent intéressés par le rachat d'IOR. L'offre la plus intéressante des trois fut celle de Finalp, tant en termes du prix offert que des perspectives de continuité.
Finalp n'étant pas intéressée par la reprise du département « lentilles de contact » d'IOR, la Sofin vendit les actifs correspondants - le département en question enregistrait alors des pertes mensuelles de 200 millions de lires italiennes - à Ciba-Geigy, le seul candidat qu'elle ait pu trouver, à un prix fixé lors de négociations bilatérales.
À la lumière des renseignements communiqués par le gouvernement italien, la Sofin, Finalp et IOR, la Commission est d'accord pour estimer que les termes de la privatisation d'IOR sont comparables à ceux que la Sofin aurait pu obtenir dans une procédure ouverte et que, par conséquent, la privatisation d'IOR ne recelait pas d'éléments supplémentaires d'aide d'État.
Enfin, la Commission s'est également penchée sur la période de transition allant du 15 octobre 1986 au 15 mars 1989, durant laquelle la Sofin détenait encore 50 % des actions d'IOR, cela pour s'assurer que la Sofin n'avait pas financé au cours de cette période une part exagérée du programme de restructuration d'IOR.
Dans le cadre de la procédure, le gouvernement italien a souligné que la Sofin avait perçu un dividende fixe sur sa participation de 50 % au capital d'IOR, qui s'était élevé à 536 millions de lires italiennes en 1988 et 898 millions en 1989. La Sofin touchait en outre des intérêts - dont le montant correspondait au taux de base des établissements bancaires - sur un prêt de 6 milliards de lires italiennes consenti à IOR.
Bien que l'on puisse se demander si la situation d'IOR justifiait le choix du taux de base, la Commission veut bien admettre que la phase de cofinancement d'IOR entre le 15 octobre 1986 et le 15 mars 1989 ne présente pas d'autres éléments d'aide d'État.
En conséquence, la Commission identifie une seule aide de ce type, celle accordée à IOR en 1986 qui s'élevait à 17,3399 milliards de lires italiennes.
V
À la fin de 1985, IOR employait 494 personnes, principalement dans la production de verres de vision en verre et matière organique pour lunettes traditionnelles ainsi que pour lentilles de contact.
Comme l'indiquent les tableaux suivants, les lentilles ophtalmologiques, qu'elles soient montées (Nimexe 90.04) ou non (Nimexe 90.01) donnent lieu à des échanges commerciaux:

Exportations de verres ophtalmologiques (Nimexe 90.01 + 90.04) d'Italie dans d'autres États membres
Année Dans d'autres États membres (en millions d'écus) Pourcentage du total
des exportations
intracommunautaires
(en %) 1985 34,1 13 1986 43,7 14 1987 48,7 15 1988 50,1 15
Importations de verres ophtalmologiques (Nimexe 90.01 + 90.04) en Italie en provenance d'autres États membres
Année En provenance
d'autres États membres
(en millions d'écus) Pourcentage du total
des importations
intracommunautaires
(en %) 1985 29,6 12 1986 32,7 12 1987 34,2 12 1988 41,2 12
Il existe donc une concurrence entre fabricants de verres de lunetterie. D'après les données communiquées dans le cadre de la procédure, IOR a représenté 27 % de la production italienne de ces verres en 1985, 27,7 % en 1986 et - à la suite de la vente de son département « lentilles de contact » - 22,2 % en 1987.
Aucune donnée précise n'est disponible concernant la part de marché d'IOR à l'intérieur de la Communauté. La Sofin a néanmoins fourni une estimation, dont il ressort que les ventes de verres de contact d'IOR en 1984 correspondaient à 3,8 % de la consommation totale dans ce domaine en 1983 en Italie, Allemagne, France et Royaume-Uni. Une extrapolation, sur la base des populations, montre que la part d'IOR sur le marché des verres de contact dans la Communauté des Dix de 1983/1984 atteignait environ 3,2 %. Pour ce qui est de la lunetterie traditionnelle en verre, les ventes d'IOR représentaient 4,5 % de la consommation dans les quatre principaux États membres, ce qui, par extrapolation, donne une part de marché d'environ 3,8 % dans la Communauté des Dix de 1983/1984. De la même manière, la part de marché d'IOR dans le domaine des verres en matière plastique s'élevait à 7,7 % dans les quatre principaux États membres et environ à 6,5 % dans l'ensemble de la Communauté.
La position qu'occupaient traditionnellement les verres de marque, plus chers, s'est peu à peu effritée au profit de produits moins connus mais moins chers, dont une grande partie est importée de pays tiers.
La Communauté, prise dans son ensemble, est exportatrice nette de verres ophtalmologiques mais, comme le montre le tableau ci-après, de moins en moins fortement:
Exportations et importations de la Communauté en direction/en provenance de pays tiers
(en millions d'écus)
Année Exportations EUR-12 Importations EUR-12 1985 41,2 21,5 1986 38,9 22,1 1987 38,3 25,2 1988 37,8 27,9
Lorsque l'aide financière d'un État renforce la position de certaines entreprises par rapport à celle de leurs concurrents au sein de la Communauté, cette aide doit être considérée comme affectant les entreprises concurrentes en question.
En conséquence, l'aide accordée par le gouvernement italien à IOR affecte les échanges entre États membres et fausse ou menace de fausser la concurrence au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité.
VI
En ne notifiant pas à la Commission sa décision d'accorder une aide à IOR quand elle en était au stade de projet, le gouvernement italien a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 93 paragraphe 3 du traité.
La Commission - usant d'une possibilité que lui donnent l'article 93 paragraphe 2 du traité ainsi que la Cour de justice par son arrêt du 12 juillet 1973 rendu dans l'affaire 70/72 (1), confirmé par l'arrêt du 24 février 1987 dans l'affaire 310/85 (2) - peut exiger des États membres qu'ils récupèrent auprès des bénéficiaires les aides octroyées qui n'ont pas été notifiées au préalable et qui sont jugées incompatibles avec le marché commun.
VII
Les dérogations à l'incompatibilité générale des aides prévues à l'article 92 paragraphe 2 du traité ne sont pas applicables en l'espèce, du fait que l'aide octroyée n'entre pas dans le champ d'application dudit paragraphe.
L'article 92 paragraphe 3 du traité dresse une liste des aides qui peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun. La compatibilité avec le traité doit être déterminée dans le contexte de la Communauté et non dans celui d'un seul État membre. Afin de garantir le bon fonctionnement du marché commun en tenant compte des principes de l'article 3 point f) du traité, les dérogations aux principes de l'article 92 paragraphe 1 énumérées au paragraphe 3 du même article doivent être interprétées strictement lorsqu'un régime d'aide ou un cas individuel d'application est examiné.
En particulier, elles ne sont applicables que dans le cas où la Commission est à même d'établir que, sans l'aide, le jeu des forces du marché ne permettrait pas d'obtenir à lui seul du futur bénéficiaire qu'il adopte un comportement de nature à contribuer à la réalisation de l'un des objectifs visés par ces dérogations.
Appliquer ces dérogations à des cas dans lesquels l'aide ne contribue pas à la réalisation d'un de ces objectifs ou bien ne joue pas un rôle essentiel à cet effet reviendrait à accorder indûment un avantage aux entreprises de certains États membres, dont la position financière se trouverait renforcée, et pourrait affecter les échanges entre États membres et fausser la concurrence sans qu'aucune des justifications au sens de l'article 92 paragraphe 3 puisse être invoquée.
Le gouvernement italien n'a pu donner et la Commission n'a pu déceler aucune indication permettant de penser que l'aide en question entre dans l'une ou l'autre des catégories susceptibles de bénéficier d'une dérogation en vertu de l'article 92 paragraphe 3.
En ce qui concerne les dérogations prévues aux points a) et c) de l'article 92 paragraphe 3 pour les aides destinées à favoriser ou à faciliter le développement de certaines régions, la Commission observe que la société IOR a son siège à Porto Marghera (Venise). Cette région ne présente pas un niveau de vie anormalement bas ni un grave problème de sous-emploi au sens où l'entend la dérogation visée audit point a); elle n'appartient pas non plus au groupe de régions qui perçoit une aide régionale spéciale en vertu de la dérogation visée au point c) du même paragraphe. Enfin, les aides octroyées en vue de couvrir des pertes ne sont pas conçues pour contribuer au développement de certaines régions économiques, conformément aux principes appliqués par la Commission à la coordination des régimes d'aides à finalité régionale (3).
S'agissant des dérogations prévues au point b) de l'article 92 paragraphe 3, l'aide apportée à IOR ne visait pas à promouvoir la réalisation d'un projet important d'intérêt européen commun, ni à remédier à une perturbation grave de l'économie italienne; le gouvernement italien n'a d'ailleurs avancé aucun argument laissant entendre que ces dérogations pouvaient s'appliquer à l'aide considérée.
Quant aux dérogations visées au point c) de l'article 92 paragraphe 3 qui concernent les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités économiques pour autant qu'elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun, la Commission fait observer que l'aide consentie à IOR en 1986 par le gouvernement italien via la Sofin était basée sur les pertes subies par cette société avant le 15 octobre 1986. En l'absence de cette aide, IOR aurait dû fermer ses portes, permettant à ses concurrents en Italie, dans les autres États membres et dans les pays tiers d'étendre leurs activités.
La Commission a depuis longtemps pour politique de ne pas considérer que la couverture des pertes favorise le développement d'une activité économique en bonne santé, mais au contraire qu'une aide de ce type, plus que d'autres, altère les conditions des échanges communautaires dans une mesure contraire à l'intérêt commun. Par conséquent, l'aide octroyée à IOR afin de couvrir ses pertes ne peut prétendre bénéficier de la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 point c).
Le fait qu'IOR ait été partiellement privatisée en 1986, puis restructurée sous la houlette de la société Finalp, ne modifie en rien cette conclusion. Il en est de même des similitudes invoquées entre cette affaire et d'autres mentionnées par le gouvernement italien. Il appartient à la Commission de vérifier individuellement la compatibilité de chaque aide, en tenant compte de toutes les particularités des secteurs et régions intéressés, du type d'aide ainsi que des conditions de commerce et de concurrence, qui peuvent changer avec le temps.
En conséquence, aucune des dérogations prévues à l'article 92 n'est applicable à l'aide en question.
VIII
En conclusion, l'aide de 17,3399 milliards de lires italiennes est illicite, le gouvernement italien n'ayant pas rempli ses obligations au titre de l'article 93 paragraphe 3 du traité. En outre, comme précisé ci-dessus, elle est incompatible, car elle ne répond pas aux conditions requises pour bénéficier de l'une des dérogations prévues à l'article 92 paragraphe 3 du traité.
La Commission a décidé qu'en l'espèce il convient de ne pas exiger le remboursement de cette aide. Cette décision repose sur le délai qui s'est écoulé entre la date à laquelle la Commission a eu connaissance de l'aide et la date d'adoption de la présente décision, délai qui saurait être difficilement justifiable au regard de la jurisprudence de la Cour de justice (4) en matière de délai de procédure,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:
Article premier
L'aide d'un montant de 17,3399 milliards accordée à Industrie ottiche riunite en 1986 par le gouvernement italien est déclarée incompatible avec le marché commun. Cette aide est en outre illégale pour vice de procédure.
Article 2
La République italienne est destinataire de la présente décision. Fait à Bruxelles, le 25 juillet 1990. Par la Commission
Leon BRITTAN
Vice-président
(1) Recueil 1973, p. 813. (2) Recueil 1987, p. 901. (3) JO no C 31 du 3. 2. 1979, p. 9. (4) Ordonnance, du 11 juillet 1979, dans l'affaire 59/79 (Producteurs de vin de table), Recueil 1979, p. 2425 et arrêt, du 24 novembre 1987, dans l'affaire 223/85 (RSV), Recueil 1987, p. 4617.

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Structure analytique Document livré le: 11/03/1999


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