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Document 392D0328

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[ 08.60 - Aides accordées par les États et autres subventions ]


392D0328
92/328/CEE: Décision de la Commission, du 20 décembre 1989, concernant les aides accordées par le gouvernement français pour la cession des actifs du groupe MFL (Machines françaises lourdes), qui fabrique de grosses machines-outils (Le texte en langue française est le seul faisant foi)
Journal officiel n° L 182 du 02/07/1992 p. 0094 - 0098



Texte:

DÉCISION DE LA COMMISSION du 20 décembre 1989 concernant les aides accordées par le gouvernement français pour la cession des actifs du groupe MFL (Machines françaises lourdes), qui fabrique de grosses machines-outils (Le texte en langue française est le seul faisant foi.) (92/328/CEE)
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 93 paragraphe 2 premier alinéa,
ayant mis, conformément à l'article susmentionné, les intéressés en demeure de lui présenter leurs observations et vu ces observations,
considérant ce qui suit:
I
À la suite de la publication d'informations dans la presse française, la Commission a invité les autorités françaises, par lettre du 22 février 1988, à lui notifier certaines interventions des pouvoirs publics en faveur des entreprises du groupe MFL.
Malgré plusieurs lettres de rappel, les autorités françaises n'ont pas répondu à la Commission. C'est pourquoi, ayant des doutes fondés quant à la compatibilité avec le traité de ces interventions publiques présumées, la Commission a décidé d'engager une procédure formelle d'enquête conformément à l'article 93 paragraphe 2 du traité CEE. En prenant cette décision, la Commission a tenu compte de la forte concurrence qui règne parmi les fabricants de machines-outils dans la Communauté, en ce sens que toute aide octroyée à un producteur particulier comporte un risque très élevé de distorsion de la concurrence.
Cette décision a été communiquée au gouvernement français par lettre du 22 décembre 1988, dans laquelle celui-ci était mis en demeure de présenter ses observations. Les autres États membres ont été informés par lettre du 12 mai 1989.
Enfin, les autres intéressés ont été mis en demeure, par le biais de la publication d'une communication au Journal officiel des Communautés européennes du 20 mai 1989, de présenter leurs observations.
II
Les premiers renseignements concernant les interventions publiques ont été communiqués par les autorités françaises par lettre du 14 mars 1989. Ils ont été complétés par lettres des 15 juin et 20 juillet 1989, à la demande de la Commission.
Selon ces renseignements, les autorités françaises avaient décidé, en mars et en mai 1988, de contribuer au plan de redressement des unités de production de MFL, dont les actifs avaient été vendus à d'autres producteurs dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte en novembre 1987.
MFL est une société holding créée en 1983 à la suite de la fusion de plusieurs producteurs de machines-outils en deux filiales de production, Forest Line et Berthiez Saint-Étienne. La structure du groupe a été complétée par deux entreprises de commercialisation aux États-Unis d'Amérique, MFL Inc. et Goldsworthy.
La création de MFL répondait aux objectifs du plan machine-outil, mis en oeuvre en France en 1982-1985 avec le soutien des pouvoirs publics dans le but de réorganiser et d'aider à la restructuration du secteur, qui connaissait de graves difficultés. L'idée qui sous-tendait ce plan était de regrouper plusieurs petits producteurs de machines-outils en difficulté de façon à constituer de grands groupes mieux placés pour faire face à la concurrence étrangère. Dans le cadre de ce plan, le gouvernement français a investi 2,6 milliards de francs français environ (366 millions d'écus) sous la forme de prêts participatifs (61 %) et de subventions et d'avances remboursables (39 %), finançant différentes actions, telles que des mesures de restructuration sociale et de formation (40 %), la recherche et le développement et des actions commerciales (32 %), ainsi que la modernisation de l'outil de production (28 %). Il convient de noter que, en ce qui concerne les aides prévues par le plan machine-outil, la Commission a décidé, en 1986, de clore une procédure d'enquête en ne soulevant aucune objection à l'égard de l'application de ce plan, en raison de sa contribution au développement sur le plan communautaire de ce secteur d'importance stratégique.
Pour la création de MFL, le gouvernement français est intervenu par l'intermédiaire de la Sopari (Société nationale de participation et de restructuration industrielle) en prenant une participation majoritaire dans le capital (35,2 %). En même temps, neuf autres groupes industriels français ont eux aussi pris une participation (Usinor, Sacilor, Renault, Alsthom, Peugeot, Schneider, Snecma, Dassault, Aérospatiale). Il s'agissait, en général, de groupes nationalisés, qui avaient en commun la caractéristique d'être des utilisateurs finals de la production de MFL. C'est ainsi que MFL a été créé comme producteur spécialisé de machines-outils pour les secteurs stratégiques. La répartition de la production de MFL par secteur d'achat était la suivante: aéronautique (30 %), armement (20 %), énergie (10 %), automobile (6 %), mécanique et autres (34 %).
À la fin de 1986, les filiales de production de MFL présentaient les caractéristiques suivantes:
- Forest Line (FL) - Unités de production situées à Albert (Somme) et Capdenac (Lot), essentiellement spécialisées dans les fraiseuses; effectifs: 602 personnes; chiffre d'affaires: 376 millions de francs français et 71 millions de francs français de pertes ordinaires; depuis 1983, FL a subi des pertes ordinaires d'un montant de 191 millions de francs français.
- Berthlez Saint-Étienne (BSE) - Site Industriel à Saint-Étienne (Loire), spécialisé dans les centres d'usinage flexibles, les tours lourds et les rectifieuses; effectifs: 508 personnes; chiffre d'affaires: 242 millions de francs français et 112 millions de francs français de pertes ordinaires; depuis 1983, BSE a enregistré 389 millions de francs français de pertes ordinaires.
Ces chiffres montrent clairement que, depuis sa création en 1983 et malgré le concours très important des pouvoirs publics dans le cadre du plan machine-outil, qui a été estimé à un milliard de francs français environ, MFL a toujours connu de graves difficultés. La situation était tout aussi préoccupante pour certaines autres entreprises françaises ayant bénéficié d'aides au titre du plan machine-outil; elle était essentiellement due à la récession générale constatée dans le secteur et à l'impossibilité pour ces entreprises de concurrencer les producteurs étrangers. En conséquence, plusieurs d'entre elles ont fait faillite ou ont été reprises par des groupes japonais ou européens.
Pour MFL, la situation est devenue intolérable en novembre 1987, époque où elle a été déclarée en état de cessation des paiements et où les tribunaux de commerce français ont placé ses filiales entre les mains d'administrateurs judiciaires. Cet état transitoire était destiné à permettre d'apprécier la situation financière et les possibilités de redressement de MFL. Dans ce contexte, les autorités françaises ont pris des contacts pour trouver de nouveaux investisseurs susceptibles de venir en aide à MFL. Ces contacts ont abouti, deux groupes étant intéressés par la reprise des filiales de MFL après leur liquidation. En conséquence, le redressement de MFL a été prévu sous la forme d'une liquidation suivie d'une cession des actifs en faveur des deux repreneurs.
Forest Line (FL) - En janvier 1988, le tribunal de commerce de Paris a décidé d'accepter la seule offre d'achat présentée pour cette filiale. Le groupe français Brisard (chiffre d'affaires 700 millions de francs français; effectifs 1 200 personnes) a proposé 8 millions de francs français pour les actifs liés aux activités de FL, à l'exclusion du compte clients. En outre, Brisard a accepté de conserver 495 des 558 emplois existants. À cette fin, une nouvelle entreprise serait créée, du nom de Brisard machine-outil (BMO), à laquelle Brisard a formellement accepté d'apporter 65 millions de francs français. Le financement fixe privé de BMO serait complété par des prêts à moyen et à long terme d'un montant de 45 millions de francs français fournis par d'autres investisseurs. Enfin, en mars 1988, le gouvernement français a décidé de contribuer au redressement de l'entreprise sous la forme d'une avance remboursable de 25 millions de francs français, dont le remboursement serait échelonné sur une période de dix ans à partir du sixième exercice suivant celui de la cession des actifs, si le rapport marge brute d'autofinancement/chiffre d'affaires était alors supérieur à 15 %.
Par ailleurs, les autorités françaises ont décidé de financer un plan social exceptionnel pour les 63 travailleurs non repris par BMO. Cette contribution exceptionnelle de l'État d'un montant de 4,972 millions de francs français a été fournie en dehors du cadre du FNE (Fonds national de l'emploi), régime général d'aide applicable en France en cas de licenciement. Avec ce budget supplémentaire, les travailleurs en question recevront des indemnités complémentaires de licenciement, des primes à l'embauche, des allocations de reconversion et, le cas échéant, des allocations exceptionnelles de préretraite.
Berthiez Saint-Étienne (BSE) - La cession de la deuxième filiale de MFL a eu lieu en deux étapes en raison de l'échec de la première tentative.
En mars 1988, le tribunal de commerce de Saint-Étienne, chargé de mettre en oeuvre le plan de redressement judiciaire de BSE, a décidé d'accepter l'offre de reprise présentée conjointement par le groupe français Smits-Lièvre et la société belge Pégard. Ces deux repreneurs proposaient cinq millions de francs pour l'acquisition des actifs liés à l'activité de BSE, à l'exclusion du compte clients. En même temps, ils acceptaient de conserver 160 des 344 emplois préexistants. Le plan de cession prévoyait la création d'une nouvelle société, Berthiez Productics (BP), à laquelle les nouveaux actionnaires devaient apporter 12 millions de francs français. Trente millions de francs français supplémentaires seraient fournis par des investisseurs privés sous la forme de prêts à moyen et à long terme. Enfin, en mai 1988, le gouvernement français a décidé de contribuer au plan de redressement de BP en lui consentant une avance remboursable de 17 millions de francs français assortie des mêmes conditions que celle accordée à BMO, à savoir que le remboursement serait effectué sur dix ans à compter du sixième exercice suivant celui de la cession des actifs, si le rapport marge brute d'autofinancement/chiffre d'affaires était alors supérieur à 15 %.
En outre, comme pour l'autre reprise, le gouvernement français a décidé de financer un plan social en faveur des travailleurs licenciés (coût: 16,2 millions de francs français) visant à atteindre les mêmes objectifs que celui de FL.
Néanmoins, malgré les efforts déployés, les nouveaux actionnaires n'ont pas réussi à relancer l'activité de l'entreprise. En octobre 1988, ils ont été contraints de placer l'entreprise entre les mains d'administrateurs judiciaires dans le cadre d'une nouvelle procédure de redressement judiciaire. Le tribunal de commerce de Saint-Étienne a de nouveau examiné les perspectives de viabilité de BP et l'éventualité d'une deuxième cession à un autre investisseur privé intéressé par la reprise de l'entreprise. C'est dans ce contexte qu'en novembre 1988 le tribunal a accepté l'une des deux offres faites initialement par de nouveaux acquéreurs potentiels. Il convient de noter à cet égard que les deux offres étaient pratiquement équivalentes en ce qui concerne le prix d'acquisition et les conditions du plan social et qu'elles consistaient l'une et l'autre en une cession des actifs sans reprise du passif. Selon les minutes du tribunal, l'offre acceptée était celle qui garantissait la situation financière la plus saine dès le début sous la forme d'un financement durable. Dans ces conditions, l'offre qui a eu la préférence était celle présentée par le groupe Brisard, qui avait déjà repris les actifs de l'autre ancienne filiale de MFL.
Brisard a proposé un prix d'acquisition de 7,4 millions de francs français pour le fonds de commerce, les stocks et les comptes clients de BP et s'est engagé à créer une nouvelle société qui permette de conserver 140 des 169 emplois préexistants. Pour sa part, la municipalité de Saint-Étienne a acheté les terrains et les bâtiments de l'ancienne société BSE pour 4 millions de francs français et a signé un contrat de location avec la nouvelle société.
Dans ce cas précis, le gouvernement français n'a consenti aucune avance à la société issue de la deuxième cession, qui s'appelle Berthiez SA. Néanmoins, en raison des nouveaux licenciements que cela a occasionné, le gouvernement français a décidé de financer un nouveau plan social exceptionnel de 3,5 millions de francs français en faveur de ces travailleurs, qui présente les mêmes caractéristiques que ceux mis en oeuvre pour FL et BSE.
Enfin, il convient de noter que, dans le cadre de la consultation des autres intéressés, les gouvernements de deux autres États membres ont présenté des observations. Celles-ci ont été communiquées aux autorités françaises par lettre du 7 septembre 1989, qui mettait le gouvernement français en demeure de présenter ses observations dans un délai d'un mois. Aucune réponse n'a été reçue.
III
Lorsqu'elle a examiné les interventions des pouvoirs publics en faveur des entreprises du groupe MFL, la Commission a vérifié si ces mesures comportaient des éléments d'aide en se fondant sur les articles 92 à 94 du traité CEE.
À première vue, les autorités françaises sont intervenues en faveur de MFL de deux manières: d'une part, en finançant les plans sociaux exceptionnels mis en oeuvre en faveur des travailleurs licenciés et, d'autre part, en consentant des avances pour les plans de redressement des sociétés issues de la cession des actifs de MFL.
En ce qui concerne le premier type d'intervention (le financement par l'État de plans sociaux exceptionnels en faveur des travailleurs licenciés), certains de leurs éléments, à savoir les indemnités complémentaires de licenciement et les dépenses exceptionnelles de préretraite, qui sont prises en charge par l'État et qui sont les dépenses que l'entreprise doit normalement supporter pour réduire ses effectifs, devraient, par conséquent, être pris en charge par l'entreprise en cours de restructuration. Néanmoins, dans le cas d'espèce, il n'est pas possible de soutenir que les contributions en question des pouvoirs publics constituent des aides qui déchargent les nouvelles entreprises des dépenses que les anciennes étaient contraintes de supporter pour réduire leurs effectifs. Les acquéreurs des actifs n'étaient tenus par aucun engagement légal vis-à-vis des travailleurs exclus de leurs offres de reprise. C'est pourquoi les aides accordées à ces travailleurs licenciés ne peuvent pas être considérées comme favorisant les nouvelles entreprises en ce sens qu'elles déchargeraient celles-ci des dépenses qu'elles auraient dû supporter pour réduire leurs effectifs, étant donné que cette réduction était, de toute façon, la conséquence de la cession effectuée dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire. Par conséquent, il est permis de conclure que, dans le cas d'espèce et comme l'ont indiqué les autorités françaises, les aides accordées pour les plans sociaux étaient, en fait, destinées à atténuer les conséquences défavorables des licenciements sans avoir aucune incidence positive pour les nouvelles entreprises.
En ce qui concerne le deuxième type d'intervention, il apparaît que l'octroi des avances comporte deux éléments d'aide. D'une part, le fait même de prêter de l'argent sans intérêt a pour effet d'éviter aux nouvelles entreprises de devoir supporter les coûts normaux de financement de leurs plans de redressement. D'autre part, il y a un élément d'aide dans les conditions prévues par les pouvoirs publics pour le remboursement des avances, avec de longs différés d'amortissement pour le principal de la dette et un remboursement conditionnel lié à la marge brute d'autofinancement future, qui pourrait se traduire, en définitive, par le non-remboursement des avances, ce qui en ferait de pures subventions. Aucune de ces conditions n'est compatible avec celles qui sont normalement applicables aux opérations de crédit effectuées en économie de marché. Au contraire, elles ont été délibérément conçues par les autorités françaises pour faciliter le redressement des entreprises.
En conclusion, les aides d'État comprises dans l'octroi d'avances de 42 millions de francs français consenties à des conditions autres que celles du marché peuvent être considérées comme ayant facilité le redressement des activités de MFL dans le cadre des nouvelles entités juridiques issues de la cession de ses actifs.
Il convient de noter que les aides comprises dans les avances sont illicites au regard du droit communautaire depuis qu'elles ont été mises à exécution, parce que les autorités françaises ne les ont pas notifiées préalablement à la Commission, conformément aux dispositions de l'article 93 paragraphe 3 du traité CEE.
Il convient de rappeler, à cet égard, que, en raison du caractère contraignant des règles de procédure prévues à l'article 93 paragraphe 3 du traité CEE, qui sont également importantes pour l'ordre public, dont la Cour de justice a reconnu qu'elles avaient un effet direct dans son arrêt rendu le 19 juin 1973 dans l'affaire 77/72, il n'est pas possible de remédier a posteriori au caractère illicite des aides en question.
L'illégalité de toutes les aides considérées résulte du non-respect des règles de procédure prévues à l'article 93 paragraphe 3 du traité CEE. En outre, dans le cas d'aides incompatibles avec le marché commun, la Commission, faisant usage de la possibilité qui lui a été ouverte par la Cour de justice dans l'arrêt qu'elle a rendu le 12 juillet 1973 dans l'affaire 70/72, confirmée par l'arrêt rendu le 24 février 1987 dans l'affaire 310/85, peut demander aux États membres de procéder à la récupération auprès des bénéficiaires d'aides octroyées illégalement.
IV
Ces aides ont faussé la concurrence entre les producteurs de la Communauté. Lorsque des aides d'État renforcent la position de certaines entreprises qui leur font concurrence dans la Communauté, elles doivent être considérées comme affectant ces autres entreprises. Il est à noter à ce propos que le secteur de la machine-outil dans la Communauté a subi, depuis le milieu des années 1970, une forte réduction de sa taille, essentiellement sous l'influence de deux facteurs: d'une part, la récession économique mondiale, qui s'est traduite par un net fléchissement des commandes, et, d'autre part, la concurrence de plus en plus forte des pays tiers. Ces deux éléments ont ravivé la concurrence déjà forte qui régnait parmi les producteurs de la Communauté. En conséquence, toute aide accordée à un constructeur particulier, qui a pour effet de lui éviter de supporter les coûts qu'il devrait normalement prendre en charge, renforce sa position par rapport à celle de ses concurrents ne bénéficiant d'aucune aide et altère, par conséquent, artificiellement leur position concurrentielle respective. À ce propos, les filiales de MFL ont toujours opéré sur les marchés étrangers en concurrençant les autres producteurs communautaires. En 1986, MFL a exporté 62 % de sa production et 17 % de ces exportations étaient destinées aux autres États membres. En outre, les machines-outils sont des biens négociables qui font l'objet d'échanges intracommunautaires importants. Selon les statistiques de la Nimexe, les exportations intracommunautaires de machines-outils ont atteint 2 268 millions d'écus en 1988, la France représentant 6,5 % de ce total. Pour leur part, les importations communautaires en provenance de pays tiers se sont élevées à 4 032 millions d'écus pour la même année.
V
L'article 92 paragraphe 1 du traité CEE dispose que les aides qui remplissent les critères qui y sont définis sont en principe incompatibles avec le marché commun. Le traité prévoit cependant certaines dérogations à cette règle générale.
Les dérogations prévues à l'article 92 paragraphe 2 ne sont pas applicables dans le cas d'espèce en raison de la nature des aides, qui ne visent pas à atteindre les objectifs mentionnés dans cet article.
Pour sa part, l'article 92 paragraphe 3 du traité énumère les aides qui peuvent être compatibles avec le marché commun. La compatibilité avec le traité doit être déterminée dans le contexte de la Communauté et non dans celui d'un seul État membre. Pour garantir le bon fonctionnement du marché commun et compte tenu du principe énoncé à l'article 3 point f) du traité, les dérogations prévues à l'article 92 paragraphe 3 doivent être interprétées de manière stricte lorsqu'un régime d'aide ou un cas individuel d'aide est examiné. Elles ne sont applicables, en particulier, que si la Commission est à même d'établir que, sans l'aide, le jeu des forces du marché ne permettrait pas d'obtenir à lui seul des futurs bénéficiaires qu'ils adoptent un comportement contribuant à atteindre l'un des objectifs visés par ces dérogations.
En ce qui concerne les dérogations prévues à l'article 92 paragraphe 3 points a) et c) et relatives aux aides destinées à favoriser ou à faciliter le développement de certaines régions, aucune des régions où sont situées les usines de MFL - Capdenac, Albert et Saint-Étienne - ne se caractérise par un niveau de vie anormalement bas ou par un grave sous-emploi au sens de l'article 92 paragraphe 3 point a), comme cela a été indiqué par la Commission (1). En outre, les avances remboursables n'ont pas été accordées dans le cadre des régimes d'aides régionales correspondants, mais sur la base de décision ad hoc du gouvernement. Par ailleurs, les aides contenues dans ces interventions ne présentent pas les caractéristiques requises des aides destinées à faciliter le développement de certaines régions économiques au sens de l'article 92 paragraphe 3 point c), parce que les aides accordées n'étaient pas subordonnées à un investissement ou à la création d'emplois, contrairement à ce qui est indiqué dans la communication de la Commission de 1979 sur les principes de coordination des régimes d'aides à finalité régionale (2).
En ce qui concerne les dérogations prévues à l'article 92 paragraphe 3 point b), les aides en question n'étaient pas destinées à promouvoir la réalisation d'un projet d'intérêt européen commun ou à remédier à une perturbation grave de l'économie de l'État membre concerné et ne présentaient pas les caractéristiques de projets de ce type. Les autorités françaises n'ont d'ailleurs pas invoqué cette dérogation.
L'article 92 paragraphe 3 point c) prévoit également une dérogation pour les aides destinées à faciliter le développement de certaines activités, quand elles n'altèrent pas les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun. À cet égard, comme cela est indiqué ci-avant, il convient de démontrer clairement la nécessité de l'aide, c'est-à-dire de montrer que, sans elle, l'objectif mentionné dans ladite dérogation ne serait pas atteint. En ce qui concerne l'intervention publique considérée, les aides contenues dans les avances consenties à des conditions autres que celles du marché ne paraissent pas indispensables même pour atteindre les objectifs essentiels poursuivis par les autorités françaises, à savoir garantir la poursuite de l'activité des entreprises cédées et le maintien des emplois existants. Selon les prévisions financières fournies par les autorités françaises, les nouvelles entreprises enregistreront, pendant leurs trois premières années d'activité, des bénéfices avant impôt de 42 millions de francs français et 2 millions de francs français environ pour BMO et BSA respectivement.
Pour la dernière de ces trois années, les bénéfices avant impôt représenteront 4,3 % et 6,8 % du total de leurs revenus respectifs. Compte tenu de ces prévisions financières, il apparaît que les entreprises concernées pourraient supporter elles-mêmes le coût d'avances consenties à des conditions de crédit normales. Par conséquent, même si on les considère du point de vue des objectifs poursuivis par les autorités françaises, les aides en question constituent un avantage totalement artificiel qui ne peut pas être justifié. Ces aides ne peuvent pas non plus être justifiées au niveau communautaire, compte tenu des fortes distorsions de la concurrence que cet avantage artificiel cause en raison de la vive concurrence qui règne parmi les producteurs.
Il convient de faire observer que, MFL ayant reçu des aides importantes pour la modernisation de son outil de production et sa restructuration dans le cadre du plan machine-outil, les entreprises issues des cessions n'auront besoin d'aucun investissement important à l'avenir pour consolider leur position concurrentielle, mais auront plutôt besoin de rationaliser et d'améliorer leur gestion, comme cela est indiqué dans les plans de redressement transmis à la Commission.
Il convient également de rappeler à cet égard que lesdites entreprises ont bénéficié de divers autres avantages circonstanciels. D'une part, les plus-values substantielles résultant de la reprise des actifs pour un prix largement symbolique dans le cadre de la procédure de liquidation de MFL. Les plus-values réalisées à l'occasion de la création de Brisard machine-outil ont été estimées par l'entreprise même à 90 millions de francs français; aucune estimation n'a été communiquée pour Berthiez SA. D'autre part, ces nouvelles entreprises ont commencé leur activité avec des effectifs mieux adaptés. Ces réductions ont été opérées sans que les entreprises doivent en supporter le coût, parce que les décisions des tribunaux de commerce relatives aux cessions des actifs dans le cadre des procédures de redressement judiciaire ont coupé les liens juridiques existant entre ces entreprises continuant leur activité et les travailleurs licenciés à la suite des reprises.
Compte tenu de ce qui précède, la Commission est arrivée à la conclusion que les aides accordées par le gouvernement français pour la poursuite des activités de MFL par les nouvelles entreprises issues de la cession des actifs du groupe ne peuvent pas bénéficier de la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 point c) du traité CEE.
Par conséquent, en résumé, les aides en question se sont révélées être illicites au regard du droit communautaire, parce que le gouvernement français n'a pas satisfait à ses obligations conformément à l'article 93 paragraphe 3. Comme cela est indiqué ci-avant, la Commission peut, en pareil cas, demander aux États membres de procéder à la récupération auprès des bénéficiaires d'aides octroyées illégalement. En tout état de cause, il apparaît après examen que ces aides sont incompatibles avec le marché commun parce que, ayant affecté les échanges intracommunautaires au sens de l'article 92 paragraphe 1, elles ne peuvent bénéficier d'aucune des dérogations prévues à l'article 92 paragraphes 2 et 3 du traité CEE. En conséquence, les aides en question doivent être retirées,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:
Article premier
Les aides publiques aux entreprises issues de la cession des actifs de MFL, à savoir Brisard machine-outil (BMO) et Berthiez Productics (BP), sous forme d'avances remboursables de 25 millions de francs français et 17 millions de francs français respectivement, consenties à des conditions autres que les conditions normales du marché, ont été accordées illégalement en violation de l'article 93 paragraphe 3 et sont incompatibles avec le marché commun en vertu de l'article 92 du traité CEE.
Article 2
Les éléments d'aide que les aides publiques visées à l'article 1er contiennent doivent donc être supprimés à compter du jour de leur octroi.
Par conséquent, en ce qui concerne l'avance de 25 millions de francs français consentie à Brisard machine-outil, le gouvernement français est invité soit à la transformer en un crédit normal assorti des conditions du marché pour ce qui concerne le taux d'intérêt et le remboursement, avec prise d'effet le jour de son octroi, soit à la retirer entièrement, soit encore à prendre toute autre mesure appropriée pour garantir que les éléments d'aide soient entièrement supprimés.
Par contre, il n'y a pas lieu de demander la suppression de l'élément d'aide contenu dans l'avance de 17 millions de francs français octroyée à Berthiez Productics, parce que le bénéficiaire initial a fait faillite et que le bénéficiaire final, Berthiez SA, n'a pas repris le passif de BP.
Article 3
Les autorités françaises informent la Commission, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, des mesures prises pour s'y conformer. Si la décision est mise à exécution après l'expiration de ce délai, les dispositions en vigueur en France en matière de paiement d'intérêts de retard à l'État seront applicables à compter de la date de notification de la décision.
Article 4
La République française est destinataire de la présente décision. Fait à Bruxelles, le 20 décembre 1989. Par la Commission
Leon BRITTAN
Vice-président
(1) JO no C 212 du 12. 8. 1988, p. 2. (2) JO no C 31 du 3. 2. 1979, p. 9.

Fin du document


Structure analytique Document livré le: 11/03/1999


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