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Document 390D0070

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[ 08.60 - Aides accordées par les États et autres subventions ]


390D0070
90/70/CEE: Décision de la Commission, du 28 juin 1989, concernant des aides accordées par la France à certaines entreprises sidérurgiques de première transformation de l'acier (Le texte en langue française est le seul faisant foi)
Journal officiel n° L 047 du 23/02/1990 p. 0028 - 0035



Texte:

*****
DÉCISION DE LA COMMISSION
du 28 juin 1989
concernant des aides accordées par la France à certaines entreprises sidérurgiques de première transformation de l'acier
(Le texte en langue française est le seul faisant foi.)
(90/70/CEE)
LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 93 paragraphe 2 premier alinéa,
après avoir mis les intéressés en demeure de présenter leurs observations conformément à l'article 93, et compte tenu de ces observations,
considérant ce qui suit:
I
Par une lettre du 25 février 1988, complétée par une lettre du 22 avril 1988, le gouvernement français a notifié à la Commission une première série de six cas d'aides à des entreprises de première transformation de l'acier filiales d'Usinor-Sacilor. Le montant total de ces aides est de 3 236,1 millions de francs français, soit environ 456 millions d'écus:
(en millions de francs français)
1.2 // // // Fillod (ingénierie et grands travaux) // 1 021 // Valexy (petits tubes) // 284 // Tréfilunion (tréfileries) // 1 246,4 // GTS (gros tubes soudés) // 293 // CFEM (offshore pétrolier) // 226,1 // CFEM (constructions métalliques) // 165,6 // // // Total // 3 236,1 // //
Le 4 mai 1988, le gouvernement français a notifié à la Commission une deuxième série de trois cas d'aides à des entreprises de première transformation de l'acier, également filiales d'Usinor-Sacilor. Cette notification a été complétée par une lettre du 17 août 1988.
Le montant total de cette deuxième série d'aides est de 652,3 millions de francs français, soit environ 92 millions d'écus:
(en millions de francs français)
1.2 // // // Métalinor (négoce des ferrailles) // 370,4 // C3F (forges et fonderies) // 152 // Chavanne-Kétin (fonderies) // 129,9 // // // Total // 652,3 // //
Les autorités françaises ont justifié ces aides par le fait que les importantes restructurations engagées par chacune de ces entreprises représenteraient une contribution à l'assainissement des marchés communautaires où elles interviennent. Les plans de restructuration accompagnant ces notifications ont été élaborés conjointement par les entreprises et par des experts indépendants, qui les ont présentés et certifiés. Ils impliquent notamment la fermeture définitive de Fillod et de CFEM (offshore pétrolier) et la cessation d'activité de Métalinor à la fin de 1988. Les plans de restructuration peuvent être schématisés par le tableau suivant: France hors-CECA: tableau des restructurations
1.2.3.4.5.6 // // // // // // // // // 31. 12. 1985 // 31. 12. 1990 // 1985-1990 // Commentaires // // // // // // 1.2.3.4.5.6 // // // // // // // Valexy (petits tubes) // Effectifs Capacités Production // 1 689 580 Kt 377 Kt // 894 400 Kt 345 Kt // - 47 % - 31 % - 8,5 % // Deux sites fermés (Noisy et Bessèges) // Tréfilunion (fils) // Effectifs Capacités (tréfileries) Production Chiffre d'affaires // 3 801 421 357 Kt 2 119 KF // 1 532 281 324 Kt 1 876 KF // - 60 % - 9 % - 12 % // Deux sites fermés (Le Havre Aciers et La Triche) // GTS (gros tubes soudés) // Effectifs Capacités // 1 546 4 740 Km 780 Kt // 685 2 000 Km 590 Kt // - 56 % - 57 % - 24 % // Trois sites fermés // // Production // 557 Kt // 514 Kt // - 8 % // (Sedan, Maubeuge, La Rougeville) // CFEM (offshore) // Effectifs // 489 // 0 // -100 % // // CFEM (constructions métalliques) // Effectifs // 1 002 // 430 // - 57 % // // C3F (forges et fonderies) // Effectifs // 2 530 // 1 538 // - 39 % // Trois sites fermés // Chavanne-Kétin (fonderies) // Effectifs Production // 889 26 Kt // 450 21 Kt // - 49 % - 19 % // // Métalinor (négoce des ferrailles) // Effectifs Production // 616 1 567 Kt // 0 0 // -100 % -100 % // // // // // // //
Le 15 juin 1988, la Commission a, d'une part, décidé de ne pas émettre d'objections à l'encontre de l'octroi des aides à l'entreprise Fillod en considérant qu'elles ne rentraient pas dans le champ d'application de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE parce qu'elles n'affectent pas les échanges entre les États membres; ce faisant, la Commission n'a fait que reprendre l'appréciation qu'elle avait déjà portée sur des aides à cette entreprise, dans sa décision 87/506/CEE (1). D'autre part, elle a décidé d'engager la procédure de l'article 93 paragraphe 2 du traité CEE à l'égard des aides destinées aux cinq autres entreprises de la première série.
Dans sa motivation, la Commission a relevé que les aides se rapportaient à des coûts sociaux (1 619,2 millions de francs français), aux coûts directs des restructurations (641,9 millions de francs français), à l'achèvement des contrats après fermeture (489,2 millions de francs français), à des couvertures de pertes (68 millions de francs français), à des investissements (301 millions de francs français), le reliquat devant encore être spécifié (116,8 millions de francs français). Elle a expliqué qu'elle n'avait pu s'assurer de la distinction entre les plans de restructuration présentés à cette occasion et ceux sur lesquels la Commission s'était déjà prononcée dans sa décision négative 87/506/CEE, susmentionnée, visant une partie des entreprises concernées dans la présente affaire. Enfin, tenant compte du fait que les secteurs en cause sont surcapacitaires au niveau communautaire, l'importance même des aides présente un risque de distorsion de la concurrence contraire à l'intérêt commun, que la Commisison ne peut méconnaître.
Le 28 septembre 1988, la Commission a également décidé d'engager la procédure de l'article 93 paragraphe 2 du traité CEE à l'égard des aides destinées aux entreprises visées dans la deuxième série de notifications. En premier lieu, elle a observé que ces aides se rapportaient à des coûts sociaux (302,3 millions de francs français), à des coûts liés aux fermetures (112 millions de francs français), et à l'apurement du passif financier de Métalinor (238 millions de francs français). Sous cette dernière rubrique figurent des remboursements destinés à la maison mère Usinor-Sacilor. Par ricochet, ces aides pourraient fausser les conditions de concurrence dans le domaine de la Communauté économique du charbon et de l'acier (CECA) dans une mesure contraire à l'intérêt commun. En second lieu, elle a estimé nécessaire de demander pourquoi l'État devait se substituer aux entreprises concernées, ou à défaut à leur maison mère, dans la prise en charge des coûts liés aux fermetures qui incombent normalement aux entreprises elles-mêmes.
II
Les autorités françaises ont présenté leurs observations par lettres des 18 juillet 1989 et 17 janvier 1989 en ce qui concerne la première procédure, des 28 octobre 1988 et 1er février 1989 en ce qui concerne la deuxième procédure, des 27 février et 3 mars 1989 sur les deux procédures.
Les réponses précisent tout d'abord que, tant sous l'angle des mesures de restructuration que sous celui des flux financiers, les nouveaux plans de restructuration présentés sont totalement distincts de ceux qui fondaient les précédentes mesures notifiées à la Commission et qui ont fait l'objet de la décision négative 87/506/CEE.
Elles soulignent que les nouveaux plans de restructuration visent à restaurer la viabilité des entreprises qui restent en activité, moyennant d'importantes restructurations des activités maintenues. Le coût de ces restructurations dépassant largement les capacités financières des entreprises concernées, des concours de l'État se révèlent alors nécessaires pour qu'elles soient menées à bien. Elles indiquent que, selon elles, ces concours sont ceux que tout actionnaire, placé devant la même situation, aurait apportés en vue du retour à la viabilité de ces entreprises.
En ce qui concerne plus particulièrement Tréfilunion, elles soulignent la part modeste de ses ventes sur les marchés communautaires autres que la France (1,5 %). Elles précisent qu'en cas d'évolution défavorable du marché, des restructurations supplémentaires sont prévues. Relativement à GTS, il est précisé que non seulement la capacité (- 57 %), mais aussi la production elle-même doit diminuer (- 7,7 %), de même que le chiffre d'affaires (- 14 %).
En ce qui concerne la société Métalinor, les autorités françaises ont admis le fait que, dans l'apurement du passif financier de cette société, le remboursement de certaines dettes vis-à-vis d'Usinor-Sacilor transforme pour cette dernière une créance douteuse en une rentrée de fonds. Par là apparaît un risque de distorsion de la concurrence dans le domaine CECA. En conséquence, elles ont retiré de la notification les 83,7 millions de francs français d'aides correspondant à l'apurement de ce passif. Le nouveau montant des aides projetées en faveur de Métalinor n'est plus que de 286,7 millions de francs français, dont 154,3 millions de francs français liés à l'apurement du passif financier.
Constatant que Métalinor a des activités liées à la ferraille, produit CECA, mais principalement vouées au négoce, activité CEE, la Commission a, en se fondant sur la répartition du chiffre d'affaires de la société, considéré que 80 % des aides prévues en sa faveur relèvent du traité CEE et 20 % du traité CECA.
En raison de la différence de base juridique des procédures CEE et CECA, il convient de séparer ces procédures ainsi que les aides caractérisées comme CEE de celles caractérisées comme CECA. Sur le total notifié de 2 783,6 millions de francs français (392 millions d'écus), 2 726,26 millions de francs français (384 millions d'écus) doivent ainsi être appréciés au titre du traité CEE et font l'objet de la présente décision, tandis que 57,34 millions de francs français (8 millions d'écus) seront appréciés ultérieurement au titre du traité CECA.
En ce qui concerne les coûts sociaux, les autorités françaises ont détaillé l'ensemble des mesures sociales qui ont été prises, avec pour chacune les effectifs concernés. En outre, dans cinq cas, les aides sont également destinées à couvrir des frais de portage: il s'agit des coûts salariaux afférents à une partie de la main-d'oeuvre destinée à être dégagée dans le cadre de plans sociaux approuvés par le comité d'établissement mais que les entreprises ont été contraintes de continuer à supporter du fait que la puissance publique, pour des objectifs propres en matière de préservation de l'emploi dans certaines localités, aurait utilisé certaines procédures administratives pour retarder ces licenciements.
En se fondant sur l'ensemble de ces précisions et modifications, les concours projetés par le gouvernement français sont décrits par le tableau suivant:
Ventilation des aides projetées
(en millions de francs français)
1.2.3.4.5.6 // // // // // // // // Coûts sociaux // Frais de portage // Coûts des fermetures // Autres // Total // // // // // // // // // // // // // Valexy // 106,9 // 35,8 // 73,3 // 68 // 284 // Tréfilunion // 336,6 // 336,9 // 237,4 // 335,5 // 1 246,4 // GTS // 129,7 // 22 // 49,9 // 91,3 // 292,9 // CFEM (offshore pétrolier) // 145,9 // 48 // 32,2 // - // 226,1 // CFEM (constructions métalliques) // 124,2 // 39 // 1,8 // 0,6 // 165,6 // C3F // 101 // - // 51 // - // 152 // Chavanne-Kétin // 88,9 // - // 41 // - // 129,9 // Métalinor (partie CEE) // 89,92 // - // 16 // 123,44 // 229,36 // // // // // // // Totaux // 1 123,12 // 481,7 // 502,6 // 618,84 // 2 726,26 // Pour mémoire: Métalinor (partie CECA) // 22,48 // - // 4 // 30,86 // 57,34 // // // // // //
(1) JO no L 290 du 14. 10. 1987, p. 21.
Dans le cadre des procédures, quatre États membres et deux associations professionnelles ont fait connaître leur position.
III
Comme il a été mentionné au titre I, les notifications sont intervenues après la décision négative 87/506/CEE de la Commission, relative à des aides destinées à des entreprises de première transformation de l'acier dont certaines sont les mêmes que celles ici concernées. Cette décision négative portait sur un montant de 3 147 millions de francs français d'aides (environ 443 millions d'écus), et avait été motivée par l'absence de plans de restructuration susceptibles à la fois de permettre aux entreprises concernées de rétablir leur viabilité et de constituer, en termes de restructurations, une contrepartie communautaire au sens de l'article 92 paragraphe 3 point c).
Le gouvernement français et Usinor-Sacilor agissant pour le compte de ses filiales ont formé un recours contre cette décision devant la Cour de justice des Communautés européennes, dont ils ont toutefois décidé le retrait. Le gouvernement français a confirmé en outre son intention de procéder à la suppression des aides illicites par voie de récupération.
En soumettant ses nouvelles notifications, le gouvernement français a présenté des mesures de restructuration supplémentaires détaillées, susceptibles selon lui de servir de contrepartie communautaire à des aides. À cette occasion, il a souligné que, dans l'hypothèse où tout ou partie de ses demandes seraient acceptées par la Commission, il n'avait pas l'intention de cumuler le versement des aides nouvelles avec celles qui ont fait l'objet de la décision négative 87/506/CEE.
À cet égard, la Commission s'est assurée qu'il y avait une distinction claire entre, d'une part, les mesures de restructuration de la première période (1982-1985), qui se rapportent aux demandes d'aides qui ont fait l'objet de la décision négative susmentionnée, et, d'autre part, les mesures de restructuration qui sont invoquées à l'appui des présentes notifications. Ces dernières ont été exposées au titre I, tandis que les premières sont décrites dans le tableau suivant, pour les sociétés concernées:
Premières mesures de restructuration
1.2.3.4 // // // // // // // 31. 12. 1981 // 31. 12. 1985 // // // // 1.2.3.4 // Valexy // Effectifs // 2 080 // 1 689 // (petits tubes) // Capacités // non déterminées // 580 Kt // // Production // 460 Kt // 377 Kt // // // // // Tréfilunion // Effectifs // 4 981 // 3 801 // (fils) // Capacités (tréfileries) // 489 // 421 // // Production // 387 Kt // 357 Kt // // Chiffre d'affaires // non déterminé // 2 119 KF // // // // // GTS // Effectifs // 1 672 // 1 546 // (gros tubes soudés) // Capacités // 4 740 Km 780 Kt // 4 740 Km 780 Kt // // Production // 600 Kt // 557 Kt // // // // // CFEM // Effectifs // // 489 // (offshore) // // 2 994 // // // // // // CFEM // Effectifs // // 1 002 // (Constructions métalliques) // // // // // // //
IV
D'une part, les concours que le gouvernement français se propose d'octroyer à ces huit entreprises ne peuvent manquer d'affecter les échanges entre les États membres au sens de l'article 92 paragraphe 1.
En ce qui concerne les tubes, dans lesquels interviennent Valexy et GTS, la part des échanges dans la production communautaire est très importante, comme l'indique le tableau suivant: (en millions de tonnes)
1.2,3.4,5 // // // // // 1986 // 1987 // // 1.2.3.4.5 // // production CEE // dont exportation // production CEE // dont exportation // // // // // // tous tubes // 13 133 // 8 410 (64 %) // 12 874 // 7 611 (59 %) // sans soudure // 3 722 // 3 071 (83 %) // 3 742 // 3 001 (80 %) // petits tubes soudés // 6 069 // 2 293 (38 %) // 6 582 // 2 360 (36 %) // gros tubes soudés // 3 342 // 3 046 (91 %) // 2 550 // 2 250 (88 %) // // // // //
L'entreprise Valexy a représenté, en 1986, 35 % du marché français de ces produits, qui est approvisionné à 40 % par d'autres producteurs communautaires. La même année, cette entreprise a livré 73 % de sa production sur le marché français, 16,5 % sur les autres marchés communautaires et 10,5 % sur les marchés tiers.
L'entreprise GTS, avec en 1986 une production de 525 000 tonnes de tubes destinés au marché gaz pétrole (plus de 90 % de sa production), représente à elle seule trente-cinq fois le marché français correspondant, soit 15 000 tonnes. Ses ventes de 1986 représentent 9,5 % des marchés hors de la Communauté (principalement en Union soviétique), 19 % des marchés communautaires autres que la France, et 80 % du marché français. Il s'agit de produits où les échanges internationaux sont particulièrement importants.
En ce qui concerne Tréfilunion, le marché communautaire de ses produits a été en 1985 de 4,62 millions de tonnes, dont 1,24 millions de tonnes ont fait l'objet d'importations (27 %). La même année, cette entreprise a vendu 63 % de sa production sur le marché français, 21 % sur les autres marchés CEE et 16 % sur les marchés tiers.
En ce qui concerne CFEM (constructions métalliques), sa production de 1986 s'est vendue à 53 % sur le marché français, 14 % sur les autres marchés CEE et 33 % sur les marchés tiers. Par comparaison, la production française de ce type de produits, dont CFEM (constructions métalliques) représente environ 5 %, s'est élevée en 1986 à 617 000 tonnes, dont 570 000 tonnes livrées en France (92,5 %) et 47 000 tonnes exportées (7,5 %).
En l'absence d'indications chiffrées disponibles sur C3F et Chavanne-Kétin, on doit constater que leurs produits (fournitures pour la sidérurgie telles que rouleaux de laminoirs, broyeurs de métal, . . .) font l'objet d'échanges intracommunautaires importants.
Les produits concernés par les activités de Métalinor (ferrailles et déchets de métaux non ferreux) font aussi l'objet d'échanges importants entre États membres, par exemple vers des pays dont la structure sidérurgique est caractérisée par une proportion importante d'aciéries électriques.
D'autre part, et comme le gouvernement français l'a lui-même souligné, le retour à la viabilité des entreprises concernées dépend de la réalisation des programmes de restructuration engagés grâce aux apports de l'État. En l'absence de ces apports et compte tenu de leurs résultats financiers négatifs antérieurs ainsi que de la situation difficile des secteurs concernés dans la Communauté (1), celles-ci n'auraient en effet pas été en mesure d'obtenir sur le marché des capitaux les moyens financiers nécessaires pour effectuer leur programme de redressement. Dès lors, non seulement le retour à la viabilité, mais encore l'existence même de ces entreprises auraient été compromis. En ce sens, les concours financiers en question sont bien des aides de nature à fausser la concurrence au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE, et ne traduisent pas seulement le comportement normal d'un actionnaire.
V
L'article 92 paragraphe 1 du traité CEE érige en principe l'incompatibilité avec le marché commun des aides présentant des caractéristiques telles que celles présentées ci-dessus, c'est-à-dire qui affectent les échanges entre États membres et menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.
Les dérogations à ce principe énoncées à l'article 92 paragraphe 2 du traité CEE sont inapplicables en l'espèce, compte tenu de la nature et des objectifs des aides envisagées.
L'article 92 paragraphe 3 du traité CEE énonce les aides qui peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun. Les dérogations ne peuvent jouer que si la Commission constate que le libre jeu des forces du marché, en l'absence des aides, ne suffirait pas à lui seul à inciter leurs bénéficiaires éventuels à agir pour atteindre l'un des objectifs visés.
Les aides envisagées ne relèvent pas de la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 lettre a) du traité CEE, relative aux « aides destinées à faciliter le développement économique des régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave
sous-emploi ». Au sein de la Communauté, les zones géographiques visées par cette possibilité de dérogation ont fait l'objet d'une détermination sur la base d'une méthode d'application des aides à finalité régionale (1). Aucune des zones de France continentale, où sont intégralement situées les entreprises en cause, n'est éligible aux aides régionales au sens de l'article 92 paragraphe 3 lettre a) du traité CEE. Au demeurant, les autorités françaises n'ont pas effectué leur notification à ce titre, mais bien en tant qu'aides sectorielles.
Quant à la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 point b) du traité CEE, elle ne peut être invoquée au motif que les aides en cause ne sont destinées ni à promouvoir la réalisation d'un projet important d'intérêt commun, ni à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un État membre.
La dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 lettre c) du traité CEE est relative aux « aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n'altèrent pas les échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun ».
On a déjà souligné ci-dessus que les aides en question n'ont pas été accordées au titre de régime d'aides régionales. Cette perspective ne sera pas prise en compte ici, sauf pour observer que, dans un nombre significatif de cas, les sites de production concernés sont localisés dans des zones éligibles aux aides régionales françaises, en raison des difficultés qu'elles connaissent au plan de l'emploi: bassins sidérurgiques du Nord et de la Lorraine, région du Havre. De ce point de vue, le maintien des emplois grâce aux activités assainies n'est pas négligeable pour les régions considérées.
Au niveau sectoriel, la Commission peut considérer comme compatibles avec le marché commun des aides à la restructuration ou à la conversion selon les critères suivants (2):
a) les aides sectorielles doivent être limitées aux cas où la situation de l'industrie concernée les rend nécessaires afin de surmonter par exemple une crise structurelle ou conjoncturelle; en restaurant la viabilité des entreprises, les aides ne doivent pas tendre à préserver le statu quo et à différer les décisions et les changements inéluctables;
b) les problèmes industriels et le chômage ne doivent pas être transférés d'un État membre à l'autre;
c) étant donné qu'il faut du temps pour procéder aux ajustements, il est normal d'accepter que des ressources soient utilisées pour alléger les coûts sociaux et économiques du changement dans certaines circonstances et moyennant des conditions strictes;
d) l'intensité des aides doit être proportionnée à celle des problèmes qu'il s'agit de résoudre, de manière à réduire au maximum les distorsions qu'elles provoquent dans le jeu de la concurrence.
À la lumière de ces critères, la Commission constate ce qui suit:
1) Les programmes de restructuration décrits plus haut étaient effectivement nécessaires à l'assainissement des entreprises concernées. Celles-ci, confrontées à des difficultés structurelles graves qui mettaient en cause leur existence, n'étaient pas capables de financer les programmes en question à l'aide de leurs seules ressources.
2) Les perspectives de viabilité des entreprises restant en activité ont été examinées et certifiées par des cabinets d'experts indépendants.
Ces perspectives sont satisfaisantes, puisqu'à l'échéance 1990 elles peuvent être résumées comme suit:
(en millions de francs français)
1.2.3.4.5 // // // // // // // Résultat net // Chiffre d'affaires // Résultat brut d'exploitation (RBE (1)) // RBE en % du CA // // // // // // Valexy (petits tubes) // 85 // 1 454 // 150 // 10,33 // Tréfilunion (fils) // 49 // 1 909 // 175 // 9,45 // GTS (gros tubes soudés) hypothèse basse // 1 // 1 355 // 67 // 4,9 // hypothèse haute // 11 // 1 531 // 81 // 5,3 // CFEM (constructions métalliques) // 20,4 // 752 // 35,7 // 4,75 // C3F (forges et fonderies) // 37 // 1 040 // 127 // 12,21 // Chavanne-Kétin (fonderies) // 9 // 337 // 38 // 11,28 // // // // //
(1) Le RBE, c'est à dire le chiffre d'affaires moins les frais de fonctionnement, est un indicateur de la capacité de l'entreprise à générer du capital pour couvrir les amortissements, les charges financières et rémunérer les capitaux propres.
(1) Il convient de mentionner à cet égard l'encadrement de certains secteurs sidérurgiques hors CECA (JO no C 320 du 13. 12. 1988 p. 3). À cette occasion, la Commission avait relevé que les conditions de marché des produits sidérurgiques prévalant depuis les années 1970 ont entrainé de graves problèmes de surcapacité. Elle a relevé également que cette crise du marché sidérurgique n'a pas frappé seulement la sidérurgie CECA mais a aussi touché les secteurs sidérurgiques hors CECA. Il y a lieu de mentionner que la portée de la présente décision est spécifique et non générale comme celle de l'encadrement; il n'y a toutefois aucune contradiction entre les deux démarches, qui procèdent du contrôle des aides à la sidérurgie hors CECA.
(1) Communication de la Commission (JO no C 212 du 12. 8. 1988, p. 2).
(2) Huitième rapport sur la politique de la concurrence, point 1.7.6.
Le critère du résultat brut d'exploitation (RBE) peut être considéré comme satisfaisant dans les six cas, dans la mesure où amortissements et charges financières peuvent toujours être financés sur ressources propres, parfois même en laissant un résultat net appréciable. Le redressement est très perceptible par comparaison avec l'année 1986, où les six entreprises concernées affichaient des pertes et même des RBE négatifs, à la seule exception de C3F, avec un modeste RBE de 0,7 % du chiffre d'affaires. Ces améliorations reflètent les gains productivité, la rationalisation de la gestion et de la production (marquée par une hausse du taux d'utilisation des capacités, ainsi que par la baisse des frais financiers) ainsi que, dans le cas de Tréfilunion, le recentrage de la production sur les produits à plus haute valeur ajoutée.
Dans le cas de GTS, le RBE reste suffisant pour que soit dégagé un résultat positif après amortissements et charges financières. Il convient d'observer que les prévisions ci-dessus reposent sur des hypothèses de marché prudentes. le marché de cette entreprise se situe à plus de 90 % dans le domaine pétrolier et gazier. Il est caractérisé par de gros contrats qui sont conclus en fonction de l'évolution du cours des hydrocarbures, qui conditionnent les besoins de transport de ces produits. Ces contrats sont susceptibles de faire varier sensiblement le chiffre d'affaires et les résultats. L'évolution récente indique des perspectives favorables pour GTS.
En ce qui concerne les activités de CFEM qui subsistent (correspondant à 60 % environ du chiffre d'affaires de 1986), il convient également de noter que le RBE est suffisant pour que soit dégagé un résultat positif. De même que GTS, CFEM (constructions métalliques) a une activité assez variable, liée à la conclusion de contrats à façon. En outre, il y a lieu de noter que les activités de CFEM comportent proportionnellement plus d'ingeniérie et moins de manufacture que d'autres entreprises de la première transformation de l'acier, ce qui implique un niveau d'amortissements à couvrir notablement plus bas que celui des autres entreprises.
3) Au moyen de la fermeture de plusieurs établissements et de différentes concentrations ou réductions de capacités dans des secteurs se caractérisant par des surcapacités communautaires, les programmes de restructuration des huit entreprises concernées contribuent à la solution des problèmes structurels existants dans ces secteurs de la première transformation de l'acier et n'ont pas pour effet de transférer d'un État membre à l'autre les problèmes industriels et de chômage dont il s'agit.
4) Pour autant que les aides projetées se limitent à la couverture de mesures sociales en faveur du personnel qui sort de l'effectif et d'autre part de coûts directement liés aux opérations de fermeture, elles peuvent être autorisées.
En ce qui concerne les mesures sociales, il s'agit de: cessation ou dispenses d'activité (1 906 salariés), congés de formation-conversion (1 161 salariés), mutations (541 salariés), licenciements (827 salariés), fonds national pour l'emploi (73 salariés), départs aidés (427 salariés), autres (194 salariés). Leur coût global s'élève à 1 123,12 millions de francs français (158,2 millions d'écus). Dans le cadre de ce raisonnement et en ce qui concerne Métalinor, la Commission n'a retenu ici que 80 % de ce type de dépenses au titre de la partie CEE des activités de l'entreprise (voir titre II).
En ce qui concerne les coûts directement liés aux fermetures et à la réorganisation de la production, il s'agit de: fermetures et restructuration des sites, démolition de bâtiments, déplacements et réimplantations de matériels, résiliations de contrats liées aux fermetures, gestion des contentieux et litiges afférents, moins-values de cession, dépréciation des immobilisations (amortissements et stocks). Ces dépenses s'élèvent au total à 502,6 millions de francs français (70,8 millions d'écus). Relativement à Métalinor, la Commission n'a retenu ici que 80 % de ce type de dépenses (partie CEE) soit 16 millions de francs français.
Finalement, le total des aides que la Commission considère comme compatibles avec le bon fonctionnement du marché commun, parce qu'elles peuvent bénéficier de la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 lettre c) du traité CEE, est donc de 1 625,72 millions de francs français (229 millions d'écus) sur le total notifié de 2 783,6 millions de francs français (392 millions d'écus), dont 2 726,26 millions de francs français (384 millions d'écus) sont appréciés dans la présente décision au titre du traité CEE.
La Commission estime qu'à concurrence de ce volume, qui est proportionné à l'ampleur des problèmes qu'il s'agit de résoudre, ces aides peuvent être considérées comme concourant au développement des activités concernées sans qu'elles altèrent les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun.
5) Par contre, il ressort de l'examen des autres dépenses auxquelles les autorités françaises se proposent d'apporter leur concours qu'elles menacent d'altérer les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun.
Il s'agit tout d'abord des dépenses mentionnées sous la rubrique « frais de portage », soit 481,7 millions de francs français (67,8 millions d'écus). Ces frais correspondent au coût des salaires des employés visés par les différentes mesures sociales, calculés entre le moment où le plan social a été adopté par le comité d'établissement et celui où il est entré effectivement en vigueur, après les procédures administratives nécessaires. Il est en effet impossible de vérifier si les salariés concernés ont contribué ou non pendant cette période à l'activité productive des entreprises. Leur prise en charge comporterait donc le risque de couvrir par des aides d'État les coûts de fonctionnement de ces entreprises, ce qui ne peut être considéré comme compatible avec le bon fonctionnement du marché commun dans les secteurs marqués par d'importantes surcapacités. Il s'agit en second lieu de dépenses d'investissements, soit au total 300,9 millions de francs français (42,4 millions d'écus), qui sont à effectuer par Tréfilunion et par GTS, et correspondant à: développement de produits nouveaux, dépenses de recherche-développement, dépenses anti-pollution et économies d'énergie, gains de productivité. Il s'agit également de contributions de l'État à la couverture des pertes passées: 317,94 millions de francs français (44,8 millions d'écus). De telles aides sont liées directement au rétablissement et au maintien de la structure technique et financière future des entreprises considérées. Dans la situation de marché des secteurs concernés, dont il a été souligné qu'elle restait caractérisée par d'importantes surcapacités, autoriser de telles aides reviendrait à donner à certains producteurs un avantage indu et, par là, à provoquer une distorsion de concurrence contraire à l'intérêt commun. La Commission considère que ce type de dépense fait partie du risque normalement assumé par les entrepreneurs que l'État n'a pas à prendre en charge.
Le total des aides que la Commission considère comme incompatibles avec le bon fonctionnement du marché commun au titre de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE est 1 100,54 millions de francs français (155 millions d'écus), parce que ces aides ne peuvent bénéficier d'aucune des dérogations prévues à l'article 92 paragraphe 3 du traité CEE,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:
Article premier
Les aides d'un montant total de 1 625,72 millions de francs français que le gouvernement français se propose d'accorder aux entreprises suivantes: Valexy (180,2 millions), Tréfilunion (574 millions), GTS (179,6 millions) CFEM (offshore pétrolier) (178,1 millions), CFEM (constructions métalliques) (126 millions), C3F (152 millions), Chavanne-Kétin (129,9 millions) et Métalinor (105,92 millions), et qui sont destinées à la couverture soit de dépenses sociales soit de frais directs de fermetures dans le cadre des plans de restructuration 1986-1990 qu'il a soumis à la Commission, sont déclarées compatibles avec le marché commun au bénéfice de la dérogation de l'article 92 paragraphe 3 lettre c) du traité CEE.
Article 2
Les aides d'un montant de 1 100,54 millions de francs français que le gouvernement français se propose d'accorder aux entreprises: Valexy (103,8 millions), Tréfilunion (672,4 millions), GTS (113,3 millions), CFEM (offshore pétrolier) (48 millions), CFEM (constructions métalliques) (39,6 millions), Métalinor (123,44 millions), et qui sont destinées au paiement des salaires des employés visés par les plans sociaux entre l'approbation de ce plan par le comité d'établissement et son entrée en vigueur effective, dits frais de portage, celles destinées à des investissements non liés aux réductions de capacités, ainsi que celles destinées à la couverture des pertes passées, sont déclarées incompatibles avec le marché commun au titre de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE.
Par la présente décision, le gouvernement français est tenu de ne pas octroyer ces aides. Dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, il informe la Commission des mesures qu'il a prises pour supprimer les projets d'aides interdites afin de ramener leur niveau total au montant autorisé à l'article 1er.
Article 3
La présente décision ne concerne pas la partie des aides notifiées en faveur de l'entreprise Métalinor et qui tombe dans le champ d'application du traité CECA, soit 57,34 millions de francs français.
Article 4
Le gouvernement français informe la Commission dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision des modalités d'octroi des aides autorisées aux entreprises bénéficiaires.
En ce qui concerne la période de restructuration (1986-1990), il communique à la Commission un rapport annuel sur les résultats financiers des entreprises restant en activité avant le 30 juin de l'année qui suit la période sous examen. Ce rapport indique notamment l'état d'avancement des mesures de restructuration prévues (réductions d'effectifs, fermetures de capacités), ainsi que le chiffre d'affaires, le résultat brut d'exploitation et le résultat net pour chacune de ces entreprises.
Article 5
La République française est destinataire de la présente décision.
Fait à Bruxelles, le 28 juin 1989.
Par la Commission
Leon BRITTAN
Vice-président
2 293 ( 38 %)
6 582
2 360 ( 36 %)
gros tubes soudés
3 342
3 046 ( 91 %)
2 550
2 250 ( 88 %) // // // // //
L'entreprise Valexy a représenté, en 1986, 35 % du marché français de ces produits, qui est approvisionné à 40 % par d'autres producteurs communautaires . La même année, cette entreprise a livré 73 % de sa production sur le marché français, 16,5 % sur les autres marchés communautaires et 10,5 % sur les marchés tiers .
L'entreprise GTS, avec en 1986 une production de 525 000 tonnes de tubes destinés au marché gaz pétrole ( plus de 90 % de sa production ), représente à elle seule trente-cinq fois le marché français correspondant, soit 15 000 tonnes . Ses ventes de 1986 représentent 9,5 % des marchés hors de la Communauté ( principalement en Union soviétique ), 19 % des marchés communautaires autres que la France, et 80 % du marché français . Il s'agit de produits où les échanges internationaux sont particulièrement importants .
En ce qui concerne Tréfilunion, le marché communautaire de ses produits a été en 1985 de 4,62 millions de tonnes, dont 1,24 millions de tonnes ont fait l'objet d'importations ( 27 %). La même année, cette entreprise a vendu 63 % de sa production sur le marché français, 21 % sur les autres marchés CEE et 16 % sur les marchés tiers .
En ce qui concerne CFEM ( constructions métalliques ), sa production de 1986 s'est vendue à 53 % sur le marché français, 14 % sur les autres marchés CEE et 33 % sur les marchés tiers . Par comparaison, la production française de ce type de produits, dont CFEM ( constructions métalliques ) représente environ 5 %, s'est élevée en 1986 à 617 000 tonnes, dont 570 000 tonnes livrées en France ( 92,5 %) et 47 000 tonnes exportées ( 7,5 %).
En l'absence d'indications chiffrées disponibles sur C3F et Chavanne-Kétin, on doit constater que leurs produits ( fournitures pour la sidérurgie telles que rouleaux de laminoirs, broyeurs de métal, . . .) font l'objet d'échanges intracommunautaires importants .
Les produits concernés par les activités de Métalinor ( ferrailles et déchets de métaux non ferreux ) font aussi l'objet d'échanges importants entre Etats membres, par exemple vers des pays dont la structure sidérurgique est caractérisée par une proportion importante d'aciéries électriques .
D'autre part, et comme le gouvernement français l'a lui-même souligné, le retour à la viabilité des entreprises concernées dépend de la réalisation des programmes de restructuration engagés grâce aux apports de l'Etat . En l'absence de ces apports et compte tenu de leurs résultats financiers négatifs antérieurs ainsi que de la situation difficile des secteurs concernés dans la Communauté ( 1 ), celles-ci n'auraient en effet pas été en mesure d'obtenir sur le marché des capitaux les moyens financiers nécessaires pour effectuer leur programme de redressement . Dès lors, non seulement le retour à la viabilité, mais encore l'existence même de ces entreprises auraient été compromis . En ce sens, les concours financiers en question sont bien des aides de nature à fausser la concurrence au sens de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE, et ne traduisent pas seulement le comportement normal d'un actionnaire .
V
L'article 92 paragraphe 1 du traité CEE érige en principe l'incompatibilité avec le marché commun des aides présentant des caractéristiques telles que celles présentées ci-dessus, c'est-à-dire qui affectent les échanges entre Etats membres et menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions .
Les dérogations à ce principe énoncées à l'article 92 paragraphe 2 du traité CEE sont inapplicables en l'espèce, compte tenu de la nature et des objectifs des aides envisagées .
L'article 92 paragraphe 3 du
traité CEE énonce les aides qui peuvent être considérées comme compatibles avec le marché commun . Les dérogations ne peuvent jouer que si la Commission constate que le libre jeu des forces du marché, en l'absence des aides, ne suffirait pas à lui seul à inciter leurs bénéficiaires éventuels à agir pour atteindre l'un des objectifs visés .
Les aides envisagées ne relèvent pas de la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 lettre a ) du traité CEE, relative aux " aides destinées à faciliter le développement économique des régions dans lesquelles le niveau de vie est anormalement bas ou dans lesquelles sévit un grave
sous-emploi ". Au sein de la Communauté, les zones géographiques visées par cette possibilité de dérogation ont fait l'objet d'une détermination sur la base d'une méthode d'application des aides à finalité régionale ( 1 ). Aucune des zones de France continentale, où sont intégralement situées les entreprises en cause, n'est éligible aux aides régionales au sens de l'article 92 paragraphe 3 lettre a ) du traité CEE . Au demeurant, les autorités françaises n'ont pas effectué leur notification à ce titre, mais bien en tant qu'aides sectorielles .
Quant à la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 point b ) du traité CEE, elle ne peut être invoquée au motif que les aides en cause ne sont destinées ni à promouvoir la réalisation d'un projet important d'intérêt commun, ni à remédier à une perturbation grave de l'économie d'un Etat membre .
La dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 lettre c ) du traité CEE est relative aux " aides destinées à faciliter le développement de certaines activités ou de certaines régions économiques, quand elles n'altèrent pas les échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun ".
On a déjà souligné ci-dessus que les aides en question n'ont pas été accordées au titre de régime d'aides régionales . Cette perspective ne sera pas prise en compte ici, sauf pour observer que, dans un nombre significatif de cas, les sites de production concernés sont localisés dans des zones éligibles aux aides régionales françaises, en raison des difficultés qu'elles connaissent au plan de l'emploi : bassins sidérurgiques du Nord et de la Lorraine, région du Havre . De ce point de vue, le maintien des emplois grâce aux activités assainies n'est pas négligeable pour les régions considérées .
Au niveau sectoriel, la Commission peut considérer comme compatibles avec le marché commun des aides à la restructuration ou à la conversion selon les critères suivants ( 2 ):
a ) les aides sectorielles doivent être limitées aux cas où la situation de l'industrie concernée les rend nécessaires afin de surmonter par exemple une crise structurelle ou conjoncturelle; en restaurant la viabilité des entreprises, les aides ne doivent pas tendre à préserver le statu quo et à différer les décisions et les changements inéluctables;
b ) les problèmes industriels et le chômage ne doivent pas être transférés d'un Etat membre à l'autre;
c ) étant donné qu'il faut du temps pour procéder aux ajustements, il est normal d'accepter que des ressources soient utilisées pour alléger les coûts sociaux et économiques du changement dans certaines circonstances et moyennant des conditions strictes;
d ) l'intensité des aides doit être proportionnée à celle des problèmes qu'il s'agit de résoudre, de manière à réduire au maximum les distorsions qu'elles provoquent dans le jeu de la concurrence .
A la lumière de ces critères, la Commission constate ce qui suit :
1 ) Les programmes de restructuration décrits plus haut étaient effectivement nécessaires à l'assainissement des entreprises concernées . Celles-ci, confrontées à des difficultés structurelles graves qui mettaient en cause leur existence, n'étaient pas capables de financer les programmes en question à l'aide de leurs seules ressources .
2 ) Les perspectives de viabilité des entreprises restant en activité ont été examinées et certifiées par des cabinets d'experts indépendants .
Ces perspectives sont satisfaisantes, puisqu'à l'échéance 1990 elles peuvent être résumées comme suit :
( en millions de francs français )
1.2.3.4.5Résultat net
Chiffre d'affaires
Résultat brut d'exploitation ( RBE ( 1 ))
RBE en % du CA // // // // //
Valexy ( petits tubes )
85
1 454
150
10,33
Tréfilunion ( fils )
49
1 909
175
9,45
GTS ( gros tubes soudés ) hypothèse basse
1
1 355
67
4,9
hypothèse haute
11
1 531
81
5,3
CFEM ( constructions métalliques )
20,4
752
35,7
4,75
C3F ( forges et fonderies )
37
1 040
127
12,21
Chavanne-Kétin ( fonderies )
9
337
38
11,28 // // // // //
( 1 ) Le RBE, c'est à dire le chiffre d'affaires moins les frais de fonctionnement, est un indicateur de la capacité de l'entreprise à générer du capital pour couvrir les amortissements, les charges financières et rémunérer les capitaux propres .
( 1 ) Il convient de mentionner à cet égard l'encadrement de certains secteurs sidérurgiques hors CECA ( JO no C 320 du 13 . 12 . 1988 p . 3 ). A cette occasion, la Commission avait relevé que les conditions de marché des produits sidérurgiques prévalant depuis les années 1970 ont entrainé de graves problèmes de surcapacité . Elle a relevé également que cette crise du marché sidérurgique n'a pas frappé seulement la sidérurgie CECA mais a aussi touché les secteurs sidérurgiques hors CECA . Il y a lieu de mentionner que la portée de la présente décision est spécifique et non générale comme celle de l'encadrement; il n'y a toutefois aucune contradiction entre les deux démarches, qui procèdent du contrôle des aides à la sidérurgie hors CECA .
( 1 ) Communication de la Commission ( JO no C 212 du 12 . 8 . 1988, p . 2 ).
( 2 ) Huitième rapport sur la politique de la concurrence, point 1.7.6 .
Le critère du résultat brut d'exploitation ( RBE ) peut être considéré comme satisfaisant dans les six cas, dans la mesure où amortissements et charges financières peuvent toujours être financés sur ressources propres, parfois même en laissant un résultat net appréciable . Le redressement est très perceptible par comparaison avec l'année 1986, où les six entreprises concernées affichaient des pertes et même des RBE négatifs, à la seule exception de C3F, avec un modeste RBE de 0,7 % du chiffre d'affaires . Ces améliorations reflètent les gains productivité, la rationalisation de la gestion et de la production ( marquée par une hausse du taux d'utilisation des capacités, ainsi que par la baisse des frais financiers ) ainsi que, dans le cas de Tréfilunion, le recentrage de la production sur les produits à plus haute valeur ajoutée .
Dans le cas de GTS, le RBE reste suffisant pour que soit dégagé un résultat positif après amortissements et charges financières . Il convient d'observer que les prévisions ci-dessus reposent sur des hypothèses de marché prudentes . le marché de cette entreprise se situe à plus de 90 % dans le domaine pétrolier et gazier . Il est caractérisé par de gros contrats qui sont conclus en fonction de l'évolution du cours des hydrocarbures, qui conditionnent les besoins de transport de ces produits . Ces contrats sont susceptibles de faire varier sensiblement le chiffre d'affaires et les résultats . L'évolution récente indique des perspectives favorables pour GTS .
En ce qui concerne les activités de CFEM qui subsistent ( correspondant à 60 % environ du chiffre d'affaires de 1986 ), il convient également de noter que le RBE est suffisant pour que soit dégagé un résultat positif . De même que GTS, CFEM ( constructions métalliques ) a une activité assez variable, liée à la conclusion de contrats à façon . En outre, il y a lieu de noter que les activités de CFEM comportent proportionnellement plus d'ingeniérie et moins de manufacture que d'autres entreprises de la première transformation de l'acier, ce qui implique un niveau d'amortissements à couvrir notablement plus bas que celui des autres entreprises .
3 ) Au moyen de la fermeture de plusieurs établissements et de différentes concentrations ou réductions de capacités dans des secteurs se caractérisant par des surcapacités communautaires, les programmes de restructuration des huit entreprises concernées contribuent à la solution des problèmes structurels existants dans ces secteurs de la première transformation de l'acier et n'ont pas pour effet de transférer d'un Etat membre à l'autre les problèmes industriels et de chômage dont il s'agit .
4 ) Pour autant que les aides projetées se limitent à la couverture de mesures sociales en faveur du personnel qui sort de l'effectif et d'autre part de coûts directement liés aux opérations de fermeture, elles peuvent être autorisées .
En ce qui concerne les mesures sociales, il s'agit de : cessation ou dispenses d'activité ( 1 906 salariés ), congés de formation-conversion ( 1 161 salariés ), mutations ( 541 salariés ), licenciements ( 827 salariés ), fonds national pour l'emploi ( 73 salariés ), départs aidés ( 427 salariés ), autres ( 194 salariés ). Leur coût global s'élève à 1 123,12 millions de francs français ( 158,2 millions d'écus ). Dans le cadre de ce raisonnement et en ce qui concerne Métalinor, la Commission n'a retenu ici que 80 % de ce type de dépenses au titre de la partie CEE des activités de l'entreprise ( voir titre II ).
En ce qui concerne les coûts directement liés aux fermetures et à la réorganisation de la production, il s'agit de : fermetures et restructuration des sites, démolition de bâtiments, déplacements et réimplantations de matériels, résiliations de contrats
liées aux fermetures, gestion des contentieux et litiges afférents, moins-values de cession, dépréciation des immobilisations ( amortissements et stocks ). Ces dépenses s'élèvent au total à 502,6 millions de francs français ( 70,8 millions d'écus ). Relativement à Métalinor, la Commission n'a retenu ici que 80 % de ce type de dépenses ( partie CEE ) soit 16 millions de francs français .
Finalement, le total des aides que la Commission considère comme compatibles avec le bon fonctionnement du marché commun, parce qu'elles peuvent bénéficier de la dérogation prévue à l'article 92 paragraphe 3 lettre c ) du traité CEE, est donc de 1 625,72 millions de francs français ( 229 millions d'écus ) sur le total notifié de 2 783,6 millions de francs français ( 392 millions d'écus ), dont 2 726,26 millions de francs français ( 384 millions d'écus ) sont appréciés dans la présente décision au titre du traité CEE .
La Commission estime qu'à concurrence de ce volume, qui est proportionné à l'ampleur des problèmes qu'il s'agit de résoudre, ces aides peuvent être considérées comme concourant au développement des activités concernées sans qu'elles altèrent les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun .
5 ) Par contre, il ressort de l'examen des autres dépenses auxquelles les autorités françaises se proposent d'apporter leur concours qu'elles menacent d'altérer les conditions des échanges dans une mesure contraire à l'intérêt commun .
Il s'agit tout d'abord des dépenses mentionnées sous la rubrique " frais de portage ", soit 481,7 millions de francs français ( 67,8 millions d'écus ). Ces frais correspondent au coût des salaires des employés visés par les différentes mesures sociales, calculés entre le moment où le plan social a été adopté par le comité d'établissement et celui où il est entré effectivement en vigueur, après les procédures administratives nécessaires . Il est en effet impossible de vérifier si les salariés concernés ont contribué ou non pendant cette période à l'activité productive des entreprises . Leur prise en charge comporterait donc le risque de couvrir par des aides d'Etat les coûts de fonctionnement de ces entreprises, ce qui ne peut être considéré comme compatible avec le bon fonctionnement du marché commun dans les secteurs marqués par d'importantes surcapacités .
Il s'agit en second lieu de dépenses d'investissements, soit au total 300,9 millions de francs français ( 42,4 millions d'écus ), qui sont à effectuer par Tréfilunion et par GTS, et correspondant à : développement de produits nouveaux, dépenses de recherche-développement, dépenses anti-pollution et économies d'énergie, gains de productivité . Il s'agit également de contributions de l'Etat à la couverture des pertes passées : 317,94 millions de francs français ( 44,8 millions d'écus ). De telles aides sont liées directement au rétablissement et au maintien de la structure technique et financière future des entreprises considérées . Dans la situation de marché des secteurs concernés, dont il a été souligné qu'elle restait caractérisée par d'importantes surcapacités, autoriser de telles aides reviendrait à donner à certains producteurs un avantage indu et, par là, à provoquer une distorsion de concurrence contraire à l'intérêt commun . La Commission considère que ce type de dépense fait partie du risque normalement assumé par les entrepreneurs que l'Etat n'a pas à prendre en charge .
Le total des aides que la Commission considère comme incompatibles avec le bon fonctionnement du marché commun au titre de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE est 1 100,54 millions de francs français ( 155 millions d'écus ), parce que ces aides ne peuvent bénéficier d'aucune des dérogations prévues à l'article 92 paragraphe 3 du traité CEE,
A ARRETE LA PRESENTE DECISION :
Article premier
Les aides d'un montant total de 1 625,72 millions de francs français que le gouvernement français se propose d'accorder aux entreprises suivantes : Valexy ( 180,2 millions ), Tréfilunion ( 574 millions ), GTS ( 179,6 millions ) CFEM ( offshore pétrolier ) ( 178,1 millions ), CFEM ( constructions métalliques ) ( 126 millions ), C3F ( 152 millions ), Chavanne-Kétin ( 129,9 millions ) et Métalinor ( 105,92 millions ), et qui sont destinées à la couverture soit de dépenses sociales soit de frais directs de fermetures dans le cadre des plans de restructuration 1986-1990 qu'il a soumis à la Commission, sont déclarées compatibles avec le marché commun au bénéfice de la dérogation de l'article 92 paragraphe 3 lettre c ) du traité CEE .
Article 2
Les aides d'un montant de 1 100,54 millions de francs français que le gouvernement français se propose d'accorder aux entreprises : Valexy ( 103,8 millions ), Tréfilunion ( 672,4 millions ), GTS ( 113,3 millions ), CFEM ( offshore pétrolier ) ( 48 millions ), CFEM ( constructions métalliques ) ( 39,6 millions ), Métalinor ( 123,44 millions ), et qui sont destinées au paiement des salaires des employés visés par les plans sociaux entre l'approbation de ce plan par le comité d'établissement et son entrée en vigueur effective, dits frais de portage, celles destinées à des investissements non liés aux réductions de capacités, ainsi que celles destinées à la couverture des pertes passées, sont déclarées incompatibles avec le marché commun au titre de l'article 92 paragraphe 1 du traité CEE .
Par la présente décision, le gouvernement français est tenu de ne pas octroyer ces aides . Dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, il informe la Commission des mesures qu'il a prises pour supprimer les projets d'aides interdites afin de ramener leur niveau total au montant autorisé à l'article 1er .
Article 3
La présente décision ne concerne pas la partie des aides notifiées en faveur de l'entreprise Métalinor et qui tombe dans le champ d'application du traité CECA, soit 57,34 millions de francs français .
Article 4
Le gouvernement français informe la Commission dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision des modalités d'octroi des aides autorisées aux entreprises
bénéficiaires .
En ce qui concerne la période de restructuration ( 1986-1990 ), il communique à la Commission un rapport annuel sur les résultats financiers des entreprises restant en activité avant le 30 juin de l'année qui suit la période sous examen . Ce rapport indique notamment l'état d'avancement des mesures de restructuration prévues ( réductions d'effectifs, fermetures de capacités ), ainsi que le chiffre d'affaires, le résultat brut d'exploitation et le résultat net pour chacune de ces entreprises .
Article 5
La République française est destinataire de la présente décision .
Fait à Bruxelles, le 28 juin 1989 .
Par la Commission
Leon BRITTAN
Vice-président

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Structure analytique Document livré le: 11/03/1999


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