A la Une de Bakchich.info
Bakchich : informations, enquêtes et mauvais esprit
Bakchich : informations, enquêtes et mauvais esprit

Quand fouiller dans le coffre de sa propre voiture devient un délit

26 mars 2009 à 21h19

TGI de Bobigny, comparutions immédiates du mercredi 25 mars

Au mauvais endroit, au mauvais moment, mais certainement avec la bonne gueule de l’emploi. Benoît, David et Abdelhadi, 20 ans tous les trois, sont nés et ont grandi à Bondy, dans le 9-3. Ils comparaissaient ce mercredi devant le tribunal correctionnel de Bobigny pour « vol en réunion avec dégradation ». Malgré le dossier à charge de la Police, ils nient les faits.

Dans la pénombre

Le 22 mars à trois heures du matin, un véhicule de la BAC patrouille dans une cité de Villemomble (93). Garée dans un parking, une Fiat Punto vide au coffre ouvert et à la fenêtre brisée attire leur attention – le véhicule a visiblement été fracturé. À une vingtaine de mètres, trois jeunes sont garés sur le bas-côté. « Dans la pénombre » précise le PV, deux d’entre eux fouillent leur coffre à l’aide d’une lampe torche, un troisième attend à l’intérieur, assis sur la banquette arrière. Les policiers descendent et leur demandent « ce qu’ils font là ». « On est venu voir des amis dans le quartier », répond l’un. À l’intérieur du coffre encore ouvert, les policiers aperçoivent une paire de gants, une clef à molette et des outils divers. Le véhicule est alors entièrement fouillé par les agents. Par terre, à l’avant du véhicule, ils dénichent un gant en plastique renfermant une gourmette de pacotille et, sur la banquette arrière, une montre de marque Festina d’une valeur de 100€. Les trois jeunes sont aussitôt menottés et embarqués.

Oui, oui

Le lendemain, la propriétaire de la Fiat Punto est interrogée. Oui, oui, on lui a bien brisé la vitre arrière de son véhicule et « dérobé un triangle de signalisation et un gilet fluo ». Lui a-t-on aussi volé des bijoux ? Oui, dit-elle aux policiers, il y avait effectivement « un sac en plastique dans la roue de secours contenant des objets de valeur ». Reconnaît-elle cette montre et cette gourmette comme étant les siens ? Oui, ce sont effectivement ceux de son mari – un cadeau offert par leur fille. Ils n’ont du coup aucune facture, mais ce sont bien les effets de son conjoint.

« La gourmette m’appartient », assure de son côté Abdelhadi au Président du Tribunal. Et d’expliquer : « Quelques jours plus tôt, j’avais fait des réparations sur ma voiture avec des gants en plastique. En l’ôtant, ma gourmette est partie avec. J’ai jeté le gant contenant la gourmette à l’avant de ma voiture en me disant que je la récupérerais plus tard ». Benoît prend la parole à son tour : « La montre, c’est la mienne – je la retire souvent parce qu’elle est lourde et qu’elle me gène. J’ai d’ailleurs demandé à ma sœur de vous ramener la facture ».

Enquête forcée

« Monsieur le Président, la prochaine fois que je me pencherai dans le coffre de ma voiture pour y chercher quelque chose, je vérifierai auparavant qu’aucun véhicule de la BAC ne patrouille dans les alentours, lance la défense. Parce que des outils, j’en ai moi-même à l’arrière de ma voiture et je ne vois pas en quoi cela constitue une infraction ».

Casiers vides, familles unies et sans problèmes particuliers, les trois jeunes présentent le même type de profil avec un CAP en poche et quelques difficultés pour dénicher un emploi stable. L’avocate regrette que l’on ait malgré tout passé leurs identités « sous tous les fichiers existants » pour un résultat nul, que l’on ai perquisitionné chez le conducteur et que l’on se soit même rendu chez son employeur – « qui maintenant, bravo, est au courant de l’affaire » : « On reproche à ces jeunes de ne pas avoir d’ambition professionnelle, mais le seul des trois à avoir une piste de CDI, on le plombe ! » A l’entendre, l’enquête de police a bel et bien été « forcée » : « Dans ce dossier pourtant si complet, pourquoi n’y a-t-il aucune photo des pièces à convictions ? Pourquoi la victime n’est-elle pas présente ? Allons-y ! Comparons les numéros de séries de la montre et de la facture. Ah non, excusez-moi, on joue de malchance, la montre a été “rendue” à la victime ».

Le jugement. Relaxe pour les trois prévenus.

Yanis, 6 ans, veut mourir : ses parents comparaissent Double peine d’un autre genre pour un prisonnier de Villepinte

5 Messages de forum

  • N’importe quoi : la victime (voiture à la vitre brisée) a eu raison de dire que des choses de valeur avaient disparu. Surtout sans préciser de quoi il s’agit, y a peut-être quelque chose de valeur à se récupérer. Puis on lui montre une montre (valeur 100 €). Effectivement, si personne ne la réclame et si elle n’appartient à personne, pourquoi ne pas rendre service aux flics en disant que c’est la sienne, tant qu’à faire ? Merci la philanthropie, ça évitera d’encombrer le service des objets perdus. Et en plus, c’est sur qu’elle fera certainement quelqu’un d’heureux à moindres frais.
  • Tres bon billet. Une petite correction "fouiller dans le coffre de sa propre voiture" est une raison plausible d’etre mis en garde a vue pour "vol en reunion avec degradation". Et une preuve suffisante pour le procureur de la Republique pour etre cite devant un tribunal en comparution immediate serait plus en phase avec la realite. Meme si bien entendu cette raison n’est a mon sens pas suffisante pour un placement en garde a vue et le debut d’une enquete en flagrance et encore moins pour la citation devant une juridiction correctionnelle.

    Au niveau de l’enquete, c’est comme assez etrange qu’aucune releve d’empreintes digitales et ADN ait ete fait sur les objets contreverses qui ont ete saisi a la suite de la perquisition dans le vehicule des mis en cause. Ou encore que l’on n’ait pas demande au plaignant et aux mis en cause d’apporter des photos ou on le voit porter ces objets.

    Article 56 du code de procedure penale : (..) "Avec l’accord du procureur de la République, l’officier de police judiciaire ne maintient que la saisie des objets, documents et données informatiques utiles à la manifestation de la vérité."

    Bien entendu si les objets n’etaient pas restitue aux mis en cause mais donnes a un tiers cela serait un vol.

    En tout cas les mis en cause peuvent maintenant demander des dommages et interets a la juridiction de proximite de leur domicile par une simple declaration au greffe mettant en cause l’agent judiciaire du tresor (il represente l’administration dans les proces) pour la violation de l’article 8 de la Convention (perquisition du vehicule hors flagrance), les articles 5-1c), 5-2,5-3 et 5-4 de la Convention (detention policiere de garde en vue en l’absence de raisons plausibles et de flagrance) et article 1 du protocole 1 de la Convention (non restitution des objets saisie).

    La demande de dommage est interets devant la juridiction de proximite doit etre inferieur a 4000 euros et il n’y a pas d’appel apres c’est directement un pourvoi en cassation puis la Cour europeene des droits de l’homme.

    Bonne requete !

    • Je reste dubitatif sur vos dernières remarques :
      - Qu’est-ce qui vous permet de dire que le cadre d’enquête n’est pas celui de la flagrance ?
      - Quant à affirmer qu’il n’existe aucune raison plausible laissant croire que ces individus ont pu commettre ce vol, je reste tout de même plus que circonspect en lisant les circonstances dans lesquelles ceux-ci ont été interpellés. Il y avait bien matière à les suspecter !
    • Au niveau de l’enquete, c’est comme assez etrange qu’aucune releve d’empreintes digitales et ADN ait ete fait sur les objets contreverses qui ont ete saisi a la suite de la perquisition dans le vehicule des mis en cause.

      Vous n’êtes pas sans savoir qu’on ne cherche l’ADN que dans les affaires de vol de scooter ;-)

    • il faudra m’expiquer comment faire une comparution immédiate sans garde à vue…. !et m’expliquer la différence entre une comparution immèdiate et une comparution devant le tribunal correctionnel… ?!