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Petite histoire de lobbying ordinaire : un amendement à vau-l’eau

A jeûn / jeudi 15 mai 2008 par Hélène Constanty
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Le lobby de l’eau fait flic-flac dans les couloirs du ministère de la Santé pour éviter que les particuliers installent des récupérateurs d’eau de pluie.

Il était une fois un gentil député qui proposa une idée toute simple à ses collègues. Constatant :

– que la sécheresse faisait jaunir les fanes des radis dans les potagers ;

– que, dans de nombreuses régions, l’été, les restrictions d’eau empêchaient les conducteurs de nettoyer leur auto le dimanche et de brancher le jet pour que les enfants s’aspergent dans le jardin…

Patrick Beaudouin, maire de Saint-Mandé et député UMP du Val-de-Marne déposa donc, le 8 décembre 2005 (j’ai calculé pour vous, ça fait déjà deux ans et demi), une proposition de loi sur le bureau du président de l’Assemblée nationale. Une proposition bien modeste, ma foi, visant à « encourager l’installation de citernes d’eau de récupération des eaux de pluie ». L’idée ne date pas d’hier : l’eau de pluie qui ruisselle sur le toit est recueillie dans une citerne, filtrée, et repart dans les tuyaux de la maison. Évidemment, on ne peut pas la boire, mais on peut l’utiliser pour arroser le jardin, remplir le réservoir des toilettes et laver le linge. Cela permet d’économiser, mine de rien, jusqu’à 70 m3 d’eau par an et par famille. Et de réduire d’autant la facture d’eau. Remarquons au passage que Patrick Beaudoin n’a rien inventé : en Allemagne, ce genre d’installation écolo est subventionnée depuis… 1986 !

Logiquement, sa proposition aurait dû finir au panier, comme l’écrasante majorité des idées déposées par les députés. Dans notre système institutionnel, seuls les projets présentés par le gouvernement parviennent à trouver leur place dans l’ordre du Parlement… Mais Patrick Beaudouin, qui a de la suite dans les idées, revint à la charge et proposa à nouveau son idée, sous forme d’amendement, lors du vote de la loi sur l’eau, en 2006. Et là, miracle, l’amendement fut adopté à l’unanimité par ses collègues, qui eurent la fugace impression, une fois n’est pas coutume, de faire œuvre utile pour leurs concitoyens. La loi sur l’eau du 30 décembre 2006 prévoit donc un crédit d’impôt de 25% pour les particuliers qui installent ce système.

Pas de ristourne d’impôts pour les économes de l’eau

Nous sommes en mai 2008. Question : si j’installe un récupérateur d’eau de pluie dans ma cour, est-ce que je peux demander une ristourne sur mes impôts ? Eh bien non ! Le décret d’application de la loi n’est toujours pas publié. Pas besoin de vous faire un dessin… « Un grand nombre de personnes concernées par la réforme commencent à penser que ce retard pourrait être dû au lobbying actif et efficace des compagnies de traitement et de distribution d’eau craignant la diminution de leurs recettes » a osé Patrick Beaudouin, lors d’une séance de questions orales, le 8 avril. L’eau, dans notre pays, est le domaine réservé de trois puissantes firmes : Véolia, Suez et Saur, qui se donnent un mal fou pour choyer les élus. Qu’ont-elles fait ? D’abord, elles ont essayé de mobiliser les sénateurs. En décembre 2006, les députés avaient voté, en première lecture, un crédit d’impôt de 40%. Les sénateurs, bien briefés par les lobbyistes de l’eau, ont tenté de réduire ce cadeau fiscal à 15%. Un compromis fut finalement trouvé à 25% en deuxième lecture.

Mais une fois la loi votée, que faire ? Bon sang, mais c’est bien sûr ! L’eau de pluie, c’est sale et ça donne des boutons ! Les « chargés de relations institutionnelles » des compagnies d’eau ont fort opportunément ressorti un avis émis par le Conseil supérieur d’hygiène publique, en septembre 2006. Cette vénérable institution, fondée au 19ème siècle, conseillait alors le gouvernement sur un certain nombre de questions sensibles, comme l’eau et le nucléaire. Elle a été dissoute mi-2007, pour laisser place au Haut Conseil de la santé publique. Bref, ils en ont fait des tonnes auprès du ministère de la Santé pour faire traîner les choses en longueur.

Le gouvernement, par la voix d’Hubert Falco, a promis à Patrick Beaudouin (« je comprends votre exaspération », lui a-t-il dit, plein de compassion) que l’arrêté serait bientôt publié. Chiche !


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  • Petite histoire de lobbying ordinaire : un amendement à vau-l’eau
    le mardi 9 juin 2009 à 16:50, Stefan a dit :

    Travaillant dans une collectivité ayant repris de haute lutte le contrôle de l’assainissement, ce sujet était justement au menu de notre réunion de service de ce matin.

    et de se dire que, cette solution présentant des intérêts environnementaux indéniables, elle posait qd même un problème de facturation complexe. En effet, si M. X mets en place un recyclage de ses eaux de pluies, qu’il les renvoies à la station d’épuration, mais que son voisin M. Y ne le fait pas, M. Y sera désavantagé car lui aussi participera financièrement à la dépollution des eaux de pluies souillées de M. X (vous me suivez ?).

    Tout ça pour dire que cette idée, très bonne, doit être accompagnées de mesure permettant d’en faire un outils égalitaire et non une solution que certains pourraient mettre en place sur le dos de leur voisin.

    Les collectivités ne faisant pas de bénéfices (tout est réinvestit), leur principal soucis est de conserver une prestation égale pour tout les usagers… ce qui n’est pas toujours facile, ce cas le prouve bien.

    Cordialement.

  • Petite histoire de lobbying ordinaire : un amendement à vau-l’eau
    le mercredi 22 avril 2009 à 23:32
    Le coût de l’èpuration de l’eau (collecte et traitement) est actuellement couvert par une taxe sur le m3 d’eau potable consommée. L’eau potable recyclée (toilettes,lessive..)ne supporte pas cette taxe mais doit cependant être traitée.La réaction des méchants lobbyistes est peut-être justifiée dans ce cas ou alors les collectivités locales se verront facturer une quantité d’eaux traitées largement supérieure à l’eau potable facturée et qui paiera ? le contribuable quelle que soit sa consommation.
  • Petite histoire de lobbying ordinaire : un amendement à vau-l’eau
    le jeudi 7 août 2008 à 18:15
    L’eau de pluie est "gratuite", sauf pour le lobbying de l’eau (pertes de revenus des con - tribuables). Encore une fois le "commerce et les gros sous" à haut niveau politique font fi de la liberté du Français moyen. En ALLEMAGNE ils ont compris depuis déjà 22 ans (1986). Que le "lobbying" Français investisse dans l’appareillage et les installations de récup. d’eau de pluie au lieu de se "réfugier" derrière les politiques. A faire regretter de naître Français !
  • Petite histoire de lobbying ordinaire : un amendement à vau-l’eau
    le samedi 21 juin 2008 à 16:38

    @mat

    Si, mat, lortograf, c top !!!!

  • Lobbying, maladie évolutive endement à vau-l’eau
    le dimanche 18 mai 2008 à 21:34
    Malheureusement, le lobbying , tel un cancer est en train de se généraliser. La France et bien sur l’Europe sont gravement touchés. Lorsque la population va se rendre compte et ressentir les effets du lobbying sur leur société et en subir les conséquences, leur confiance envers leurs élus et autres gouvernants va sombrer. A partir de ce moment là, je crois que notre société risque la déstabilisation qui pourrait entrainer des conflits de différents degrés . Mais peut être suis je pessimiste, je l’espère……….
    • Lobbying, jeu de la démocratie endement à vau-l’eau
      le lundi 26 mai 2008 à 14:34, Jean-Claude Dus a dit :

      Analyser le lobbying en le considérant comme un cancer est ridicule. Il s’agit simplement d’une pratique qui consiste à chercher à influencr les décisions publiques. Dès lors, associations, ONG, entreprises, syndicats, … tous font du lobbying. C’est le jeu de la démocratie et de la libre expression des acteurs de la socitéé civile. Prenez le projet de loi OGM : sans le lobbying des groupes de pression écolos comme Greenpeace, le texte voté aurait été bien plus pro-OGM qu’il ne l’est finalement. Cf. l’article suivant : http://www.debateco.fr/112,807/20080521-lecerf-lobby-groupe-interet-pression-ogm-texte-loi-parlement-vote.html

      Dans le cas de l’eau pluviale, le blocage vient probablement des distributeurs d’eau mais aussi du lobby sanitaire (sous la houlette du ministère de la santé).

      • Lobbying, jeu de la démocratie endement à vau-l’eau
        le mardi 27 mai 2008 à 17:40
        Sauf que certains loobies sont bien mieux écoutés que d’autres, ayant des arguments (souvent sonnants et trébuchants) auxquels aucun élu sensé -et soucieux de sa réélection- ne peur résister… Entre GreenPeace et Monsanto, qui aura l’oreille des pouvoirs publics ? Qui Bachelot (ex-pharmacienne) écoutera-t-elle le mieux : Les laboratoires Mérieux ou une obscure association de malades ou de victimes ?
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