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Mathématique électorale à l’américaine

Présidentielle US / mardi 9 septembre 2008 par Doug Ireland
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Les premiers sondages depuis la fin de la convention républicaine montrent que McCain a fait le bon choix avec Sarah Palin comme colistière : Obama perd du terrain sur les problématiques économiques. Mais prudence ! La mathématique électorale américaine est un exercice de haute voltige…

Un candidat à la présidence est-il crédible quand il se présente comme le candidat de l’opposition alors qu’il est le candidat du parti au pouvoir ? La réponse à cette question pourrait bien déterminer le résultat de l’élection de novembre. En attendant cette échéance, John McCain a réservé une jolie surprise lors de son discours prononcé à la convention du Parti républicain qui s’est tenue la semaine dernière à St-Paul : il a violemment chargé sa propre formation politique !

Jamais candidat présidentiel n’a formulé tel aveu : « Nous avons été élus pour changer Washington, mais nous avons laissé Washington nous changer. Nous avons perdu la confiance du peuple américain quand des Républicains ont cédé à la tentation de la corruption » a déclaré McCain aux délégués. « Nous avons perdu cette confiance quand, au lieu de nous libérer d’une dépendance dangereuse envers le pétrole étranger, les deux grands partis ont voté une loi octroyant des subsides aux sociétés pétrolières. Nous avons perdu leur confiance quand nous avons maintenu notre emprise sur le pouvoir comme plus important de nos principes. »

John McCain, candidat républicain - JPG - 81.8 ko
John McCain, candidat républicain
© Moreno

Pas une seule fois McCain n’a prononcé le nom de George W. Bush pendant son discours (idem pour les autres orateurs intervenant en prime time), même si le candidat a voté au Sénat à 90 % les propositions soutenues par l’administration Bush. Selon l’institut Nielsen, le discours de McCain a été vu par 38,9 millions d’Américains. Soit 600 000 de plus que pour le discours de Barack Obama lors de la convention démocrate. Il faut toutefois reconnaître que le discours de McCain était précédé d’un important match de football qui lui a amené pas mal de téléspectateurs curieux. Un coup de pouce dont n’a pas bénéficié Obama.

Cette audience record a permis au Républicain de prétendre que c’est lui — et non son rival — qui incarne le fameux « changement » dont tous les sondages montrent qu’il est ardemment souhaité par le pays. Pendant ses 26 ans au Congrès, John McCain a été le fidèle serviteur du patronat. Comme son parti. Est-il donc crédible lorsqu’il opère une mutation destinée à convaincre les couches modestes frappées par la crise qu’il est le sauveur qu’elles attendent ?

Le choix de Sarah Palin commence à s’avérer payant

Le choix comme colistière de Sarah Palin, une fille de la classe moyenne qui a lutté contre des politiciens corrompus de son propre parti, était censé l’aider dans sa métamorphose. Jusqu’ici, les tout premiers sondages post-convention républicaine suggèrent que le discours de McCain et le choix de Palin ont eu l’effet escompté par son puissant et nouveau directeur de campagne, Steve Schmidt. Avant les conventions des deux grands partis, Obama et McCain étaient statistiquement à égalité. Après la convention démocrate, Obama a réussi à devancer son rival de 6 à 8 points. Mais suite à la grand-messe républicaine, les deux hommes sont de nouveau à égalité. Dans un sondage réalisé pour la chaîne de télévision ABC et publié le 6 septembre, seulement 42 % des sondés disent que Palin est « qualifiée » pour être vice-présidente, contre 66 % pour Joe Biden, le sénateur-vétéran choisi par Obama comme colistier. Par contre le public est divisé à quasi-égalité quand on lui demande si le choix de Palin accroît la confiance accordée à McCain : 43 % répondent que « oui » et 38 %, « non ».

Mais c’est dans le sondage de USA Today Gallup effectué entre le 5 et le 7 septembre que l’on voit que la stratégie du ticket McCain-Palin est définitivement payante. En effet, pour les électeurs affirmant qu’il est « probable » qu’ils votent, McCain jouit maintenant d’une avance importante de 10 points sur Obama. 54 % contre 44 % ! Et sur la question ô combien cruciale du « Qui préférez-vous pour diriger l’économie en crise ? », Obama a totalement perdu l’avance de 19 points qu’il avait encore la semaine précédant la convention républicaine et le choix de Palin. Sur le thème de l’économie, le démocrate n’affiche plus que 3 points d’avance sur McCain qui correspond à la marge d’erreur du sondage. L’échantillon des sondés fait presque deux fois la taille de celui du sondage d’ABC (environ 600 personnes pour ABC contre presque 1 000 pour Gallup, ce qui le rend plus fiable). Tout le monde attend maintenant avec impatience la sortie du meilleur sondage existant, à savoir celui du Wall Street Journal-NBC qui sera publié mercredi, pour savoir si cette tendance se confirme ou non.

Anomalie constitutionnelle

Pour comprendre qui gagnera la Maison-Blanche en novembre, il faut connaître l’anomalie de la Constitution américaine voulant que la présidence ne revient pas au candidat récoltant le plus grand nombre de voix mais à celui qui affiche une majorité au Collège électoral. Chaque Etat y dispose d’un nombre de voix égal au total du nombre de sénateurs et de membres de la Chambre des Représentants que l’Etat envoie au Congrès. Ainsi, le candidat démocrate Al Gore a perdu l’élection de 2000, en dépit du fait qu’il a gagné la majorité des voix, parce que la Cour Suprême (dominée par des républicains conservateurs) a ordonné à la Floride d’arrêter de recompter les voix populaires disputées. Puisqu’à ce stade Bush ne disposait que d’une minuscule avance de 527 votes en Floride, il a emporté ses 27 voix au Collège électoral de justesse et, donc, la présidence. C’est mathématique ! Avant les conventions, lorsque les sondages montraient une quasi-égalité entre Obama et McCain, le staff démocrate se montrait serein (du moins en public) parce qu’il louchait sur le Collège électoral où l’état-major d’Obama pensait être plus proche de la majorité nécessaire de 270 voix que McCain.

Aujourd’hui, selon l’excellent site web Real Clear Politics, Obama dispose de 183 voix acquises d’avance au Collège électoral et 66 supplémentaires dans les Etats qui penchent pour lui. Soit un total de 238 voix qui ne le situent qu’à 32 voix du Saint-Graal de la majorité (avec dix Etats encore « indécis »). McCain, lui, possède 142 voix solidement acquises et 32 dans des Etats qui penchent de son côté. Ce qui fait un total de 174 voix et signifie que la tâche est plus rude pour le candidat républicain qui doit encore gagner une centaine de voix.

Real Clear Politics calcule ses résultats exclusivement sur les données des sondages les plus récents pris dans chacun des 50 Etats américains. Pour CNN, qui, dans ses calculs, ajoute aux sondages les données et tendances historiques des élections précédentes ainsi que, pour cette année, les dépenses publicitaires de chaque candidat dans chaque Etat, le résultat est légèrement meilleur pour Obama. Le démocrate affiche un total de 242 voix dans le Collège électoral contre 189 pour McCain, avec 8 Etats indécis. La prudence reste toutefois de mise car ces chiffres datent d’avant les deux conventions.

Sacré Michigan !

Le premier Etat visité par John McCain et Sarah Palin après leur sacre lors de la convention républicaine est le Michigan, un des Etats étiqueté comme « indécis. » Dans la bourgade de Sterling Heights, dans le comté de McComb, un bastion de la classe ouvrière blanche, ils ont réussi à réunir 10 000 personnes si enthousiastes que les journalistes suivant McCain ont rapporté ne pas avoir vu cela auparavant. Interrogés par les reporters, les ouvriers présents affirmaient être venus « pour Sarah ». Le Michigan est le lieu de naissance des « démocrates reaganien », ces membres de la classe ouvrière blanche qui ont déserté le Parti démocrate pour élire Ronald Reagan à la Maison-Blanche. A première vue, c’est un terreau fertile pour les démocrates en raison de son taux de chômage de 8,5 % (le plus élevé des Etats-Unis) et du nombre élevé (deux fois plus que la moyenne nationale) de maisons saisies par les banques lors de la crise des « sub-primes ».

Tout cela est bien beau, mais Obama n’est pas à la fête dans le Michigan. Ceux qui ont suivi de près les primaires démocrates se souviennent que son parti a interdit aux candidats à l’investiture présidentielle de faire campagne dans cet Etat. Objectif de la direction du parti : punir l’Etat d’avoir avancé la date de sa primaire contre l’avis des instances nationales. Résultat, Obama n’a pas fait campagne dans le Michigan et y est mois connu que dans les Etats sillonnés pendant les primaires. C’est aussi la raison pour laquelle il ne dispose pas sur place d’une structure de volontaires comme c’est le cas ailleurs où le vote des primaires était pourtant contesté. Autre conséquence de ce micmac, les démocrates n’ont pas pu, non plus, organiser de campagne de recrutement dans le Michigan pour étoffer les listes électorales pendant les primaires. Ainsi, selon les chiffres officiels, en 2008, seuls 80 000 nouveaux électeurs ont été ajoutés par rapport à 2004. A titre de comparaison, dans l’Ohio voisin, où la primaire entre Obama et Hillary a été particulièrement meurtrière, on a enregistré un million de nouveaux électeurs cette année.

Pour ne rien arranger, les tensions raciales, exacerbées par le taux de criminalité dans la ville de Detroit, à majorité noire, sont à la hausse dans le Michigan, après que le maire noir de Detroit, Kwame Kilpatrick, ait plaidé coupable dans une série d’abus de pouvoir le 4 septembre. Il croupit depuis en prison. Mais déjà, une association de conservateurs qui soutiennent le Parti républicain ont produit un spot publicitaire dans le Michigan qui lie Obama à Kilpatrick, en utilisant une vidéo du candidat démocrate chantant les louanges du maire déchu… en 2007. Avec ses 17 voix au Collège électoral, on peut donc avancer avec certitude que le Michigan est l’une des clés d’une victoire d’Obama. Et c’est légitimement dans ces Etats « indécis » que le vrai expert en mathématique et géographie électorales américaines cherche le nom du gagnant de novembre. A bon entendeur…

Lire ou relire sur Bakchich :

La Convention du Parti républicain s’est achevée ce vendredi 5 septembre à St-Paul, dans le Minnesota. Si les délégués présents ont parfois baillé aux corneilles, la nouvelle colistière de John McCain, l’inénarrable Sarah Palin, a su galvaniser la foule. (…)
Entre le discours lumineux de Barack Obama à la convention démocrate et le choix d’une Chrétienne intégriste et ex-adepte d’un leader d’extrême-droite comme colistière par John McCain, la campagne présidentielle prend une nouvelle (…)
En chute libre dans les sondages, Barack Obama n’a pas choisi Joe Biden par hasard au poste de candidat à la vice-présidence. Une décision stratégique donc, mais qui ne l’exempte pas de reprendre en main sa campagne, devenue sacrément (…)

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4 MESSAGES

Forum

  • Mathématique électorale à l’américaine
    le jeudi 11 septembre 2008 à 21:30, trybuna Ludu a dit :
    A la fin, helas pour eux, la question va etre de savoir si les americains veulent un president Noir ou pas.
  • Mathématique électorale à l’américaine
    le mardi 9 septembre 2008 à 18:31, Bulle a dit :
    A quoi ça sert de donner des tonnes de sondages qui donnent tantôt Mc Cain, tantôt Obama, vainqueur ?
  • Mathématique électorale à l’américaine
    le mardi 9 septembre 2008 à 14:23, infiltré a dit :

    Merci pour l’analyse claire

    Ce qui sera un intéressant aussi, et vous l’avez souligné mais pas suffisamment développé c’est l’Ohio.

    encore un endroit qui sera le centre des attentions. Pour moi, le Michigan est déjà républicain.

    Pour l’Ohio, je me souviens d’une interview de poutine par un journal national US début 2006 (le new york time je crois)

    à la question du journaliste qui lui faisait presque la moral sur les magouilles électorales du Kremlin, vladimir répondait "vous voulez peut-être que je vous rappel ce qui c’est passé dans l’ohio en 2004…."

  • Mathématique électorale à l’américaine
    le mardi 9 septembre 2008 à 14:08, Tristan a dit :

    Bonjour,

    Vous écrivez que le Michigan fut "le lieu de naissance des « démocrates reaganien », ces membres de la classe ouvrière blanche qui ont déserté le Parti démocrate pour élire Ronald Reagan à la Maison-Blanche." Ce n’est pas faux, certes mais le même Etat avait déjà majoritairement voté pour le ticket républicain en 76 (Ford/Dole) et bien sûr en 72 (ticket Nixon/Agnew) C’est uniquement depuis 1992 et l’accession de Clinton à la Maison Blanche que le Michigan vote constamment en faveur du candidat démocrate (bien que la compétition fût serrée aussi bien en 2000 qu’en 2004)

    En revanche, je suis un peu plus surpris de constater que l’Iowa (seulement 7 grands électeurs mais dont la portée n’est pas à négliger) que Bush avait gagné d’extrême justesse en 2004 et Gore en 2000 aille, selon les sondages, facilement à Obama (quasiment 10 points d’écart). Si la courbe stagne sur cette ligne-là d’ici fin octobre, c’est un signe particulièrement encourageant pour le ticket démocrate.

    En revanche, on constate depuis très longtemps que celui qui ne gagne pas le Missouri perd la présidentielle. Si McCain (ou du moins sa colistière :-) se fie à la prophétie, il a de quoi pour l’instant, se montrer rassuré, l’écart étant significatif entre les deux candidats (+ 7 pour McCain)

    Je me permets déjà de pronostiquer que la Pennsylvanie ira à Obama et la Floride à McCain. Si le résultat est serré, cela se jouera donc sur l’Ohio, le Colorado, le Nevada, le New Hampshire et le Nouveau Mexique.

    Si la campagne d’Obama prend une tournure médiocre dans les deux derniers mois, il faut rajouter l’Iowa, le Wisconsin et le Michigan et si le ticket McCain/Palin n’arrive vraiment pas à convaincre, l’Indiana, le Missouri, la Virginie Ouest, la Caroline du Nord et la Virginie.

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