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Liberté d’expression en danger

Témoignage / lundi 27 avril 2009 par Claude-Marie Vadrot
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Claude-Marie Vadrot, journaliste à Politis et chargé de cours à Paris 8, a souffert de pressions à l’occasion d’un cours « hors les murs ».

Je suis inquiet, très, très inquiet..

Vendredi dernier, à titre de solidarité avec mes collègues enseignants de l’Université de Paris 8 engagés, en tant que titulaires et chercheurs de l’Education Nationale, dans une opposition difficile à Valérie Pécresse, j’ai décidé de tenir mon cours sur la biodiversité et l’origine de la protection des espèces et des espaces, que je donne habituellement dans les locaux du département de Géographie (où j’enseigne depuis 20 ans), dans l’espace du Jardin des Plantes (Muséum National d’Histoire Naturelle), là où fut inventée la protection de la nature. Une façon, avec ce « cours hors les murs », de faire découvrir ces lieux aux étudiants et d’être solidaire avec la grogne actuelle mais sans les pénaliser avant leurs partiels.

Mardi, arrivé à 14 h 30, avant les étudiants, j’ai eu la surprise de me voir interpeller dès l’entrée franchie par le chef du service de sécurité, tout en constatant que les deux portes du 36 rue Geoffroy Saint Hilaire était gardées par des vigiles…

– « Monsieur Vadrot ?

– Uuh… oui

– Je suis chargé de vous signifier que l’accès du Jardin des Plantes vous est interdit.

– Pourquoi ?

– Je n’ai pas à vous donner d’explication….

– Pouvez vous me remettre un papier me signifiant cette interdiction ?

– Non, les manifestations sont interdites dans le Muséum.

– Il ne s’agit pas d’une manifestation, mais d’un cours en plein air, sans la moindre pancarte.

– C’est non ! »

Les étudiants, qui se baladent déjà dans le jardin, reviennent vers l’entrée, le lieu du rendez vous. Le cours se fait donc, pendant une heure et demie, dans la rue, devant l’entrée du Muséum. Un cours qui porte sur l’histoire du Muséum, l’histoire de la protection de la nature, sur Buffon. A la fin du cours, je demande à nouveau à entrer pour effectuer une visite commentée du jardin. Nouveau refus, seuls les étudiants peuvent entrer, pas leur enseignant. Ils entrent et, je décide de tenter ma chance par une autre grille, rue de Buffon. Où je retrouve des membres du service de sécurité qui, possédant manifestement mon signalement, comme les premiers, m’interdisent à nouveau l’entrée.

Vague relent de stalinisme

Évidemment, je finis par me fâcher et exige, sous peine de bousculer les vigiles, la présence du Directeur de la surveillance du Jardin des Plantes. Comme le scandale menace, il finit par arriver. D’abord parfaitement méprisant, il finit pas me réciter mon CV et le contenu de mon blog. Cela commence à ressembler à un procès politique, avec descriptions de mes opinions, faits et gestes. D’autres enseignants du département de Géographie, dont le Directeur Olivier Archambeau, président du Club des Explorateurs, Alain Bué et Christian Weiss, insistent et menacent d’un scandale.

Le directeur de la Surveillance, qui me dit agir au nom du Directeur du Muséum (où je pensais être honorablement connu), commençant sans doute à discerner le ridicule de sa situation, finit par nous faire une proposition incroyable, du genre de celle que j’ai pu entendre autrefois, comme journaliste, en Union soviétique :

« Écoutez, si vous me promettez de ne pas parler de politique à vos étudiants et aux autres professeurs, je vous laisse entrer et rejoindre les étudiants »

Je promets et, évidemment, ne tiendrai pas cette promesse, tant le propos est absurde.

J’entre donc avec l’horrible certitude que, d’ordre du directeur et probablement du ministère de l’Éducation Nationale, je viens de faire l’objet d’une « interdiction politique ». Pour la première fois de mon existence, en France.

Je n’ai réalisé que plus tard, après la fin de la visite se terminant au labyrinthe du Jardin des Plantes, à quel point cet incident était extra-ordinaire et révélateur d’un glissement angoissant de notre société. Rétrospectivement, j’ai eu peur, très peur…

À lire ou çà relire sur Bakchich.info :

Après dix semaines de conflit, les étudiants craignent pour leur année. Chez les enseignants, généralement payés, le réveil est moins rude.
Les enseignants-chercheurs ont manifesté en masse hier dans les rues pour dénoncer un projet de décret modifiant leur statut. Au premier rang, des présidents d’université et des députés UMP … ça sent le crâmé (…)
Lassé de voir leur mouvement caricaturé par le quotidien du soir, le mouvement des enseignants-chercheurs a décidé de passer à l’attaque et de taper là où ça fait mal.

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1 MESSAGES

Forum

  • Liberté d’expression en danger
    le lundi 27 avril 2009 à 14:24

    Très bon article. Pour poursuivre l’invesgation, les blogs "Education nationale" sont surveillés par l’agence de communication I&E et plus particulièrement par le pôle I&E décision (agence située dans le 9e arrondissement de Paris).

    Dans l’émission Parlons net, présentée par D. Abiker, avec pour invité T. Saussez, Julien Martin de Rue89 explique qu’il n’a jamais eu d’autorisation pour un reportage dans la cellule de veille de l’Elysée dirigée par Nicolas Princen. Je pense qu’il n’a pas essayé la cellule de veille du SIG (dans le 7e) qui existe belle et bien, elle aussi, et qui est tout aussi verrouillée. Ce sont cependant des agences de communication (comme Spintank (l’agence de Versac), Euro RSCG C&0 (surtout pour les grandes entreprises), ou I&E… entre autres) qui décrochent les marchés publics de veille des différents ministères. Le marché du ministère de l’éducation nationale est conséquent car l’exécutif considère le milieu enseignant comme un moteur du mouvement social. Les profs sont surveillés de près, mais les élèves aussi, comme le prouve l’épisode récent du blog d’ado qui avait fait l’objet d’un flicage totalement disproportionné jusqu’à son lycée.

    Saussez explique dans Parlons net que la veille a toujours existé, certes. Mais jamais la veille n’avait été source de telles pressions. La comparaison avec le stalinisme se confirme de jour en jour.

    Par ailleurs, un élément très intéressant de l’émission avec Saussez qui n’a pas buzzé sur le net : Julien Martin de Rue89 affirme que le site d’info Rue89 a été approché par la communication du gouvernement pour du publi rédactionnel sur les mesures gouvernementales. Sans succès, évidemment. Mais est-ce le cas partout ?

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