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Le business du foie gras vous en bouche un coin

Canards / lundi 21 décembre 2009 par Eloi Fitzgerald
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Le foie gras n’est plus haut-de-gamme. Une descente aux affaires qui offre de plus en plus de débouchés, au grand dam des éleveurs.

Jadis produit de luxe, le foie gras est tombé bien bas. Les industriels qui se sont rués ces dernières années sur cette production haut de gamme viennent d’offrir 350.000 parts de foies gras à onze associations humanitaires.

Par quel miracle la Comtesse du Barry est-elle venue jouer les bonnes fées au Secours Populaire, remplaçant les boîtes de corned-beef ou de cassoulet par ces ballotines longtemps réservées aux clients de chez Fauchon ?

C’est l’hebdo des professionnels de l’agro-alimentaire qui vend le morceau : « l’année 2008 a marqué pour le foie gras la fin d’une décennie de croissance soutenue et révélé des surcapacités industrielles de production », révèle Les Marchés du 12 novembre. Au passage, on apprend que les 14 tonnes offertes aux pauvres ne représenteraient que « 1/20ème des méventes de 2008 en grandes surface ».

Le foie gras des quatre saisons

Le lobby du foie gras ne se contente pas de fourguer ses stocks d’invendus aux Restos du Coeur. Après avoir tenté de relancer la consommation à Pâques, arguant du caractère hautement «  festif » de sa production, l’interprofession a lancé une grande campagne de pub dès le 11 novembre : « à la Saint-Martin, le foie gras revient », ont seriné pendant trois semaines affiches et spots télé, accompagnant une mise en place précoce de boîtes et de terrines dans les rayons des supermarchés.

Le CIFOG (Comité Interprofessionnel des Palmipèdes à Foie Gras), commanditaire de cette campagne de promotion, avait plus discrètement commandé en début d’année aux éleveurs de baisser leur production de 10%. Seuls les militants anti-gavage, qui assimilent cette pratique à de la torture, ont bruyamment applaudi à cette mesure. Selon leurs calculs, 4 millions de canards auraient été épargnés cette année.

Un sous-produit de luxe du maïs

Claude Laberdesque, qui élevait 25.000 canards gras dans sa ferme des Pyrénées-Atlantiques, n’a ainsi pas hésité à réduire son élevage de 3.600 têtes en deux ans, raconte La Dépêche du Midi. Il faut dire que cet éleveur béarnais, qui cultive aussi du maïs, est également le président d’Euralis Palmipèdes, un groupement de 700 producteurs qui gavent 10 millions de canards.

Propriétaire des marques Monfort, Rougié et Bizac, la coopérative Euralis, basée à Pau-Lescar, est aujourd’hui le premier producteur mondial de foie gras. Son usine de Maubourguet (Hautes-Pyrénées), ancien fief du ministre de l’agriculture Jean Glavany (PS), peut abattre et transformer 5 millions de canards par an et emploie jusqu’à 1.200 saisonniers.

L’ex-Coop de Pau, qui a construit sa fortune sur la commercialisation du maïs en Aquitaine, n’est pas le seul géant vert à avoir fait irruption dans le monde du gras. D’autres coopératives agricoles du Sud-Ouest ont compris que le maïs n’était pas seulement bon pour les poules et les cochons. Maïsadour et Vivadour, deux coopératives rivales des Landes et du Gers, ont mis fin à leurs querelles de clocher pour prendre le contrôle de la société Delpeyrat, spécialisée dans le foie gras. Les deux coopératives gasconnes, associées à une troisième de Vendée, pèsent ainsi 8,5 millions de canards et 25% de la production française de foies gras depuis 2005.

Plus récemment, la coopérative basque Lur Berri vient de lancer cet été une OPA amicale sur Labeyrie, le n°1 du foie gras en grande surface. Déjà fournisseurs officiels de la marque, avec 3 millions de canards élevés par 300 producteurs, les basques ont profité de la crise financière qui a durement frappé les propriétaires islandais de Labeyrie, rois du saumon fumé, pour prendre pied à leur tour sur ces créneaux de luxe.

Les gaveurs s’étranglent

Quand on sait qu’il faut « embuquer » 10 kilo de maïs pendant 2 semaines dans le gosier de chaque canard à gaver pour produire des foies d’environ 500 grammes qui seront vendus de 5 à 20 euros les 100g, on comprend mieux tout l’intérêt des producteurs de petits grains jaunes, qui ont trouvé là une valorisation autrement plus lucrative que le pop-corn des salles de cinémas.

Surtout qu’il faut déjà donner plus de 17 kilos d’aliments, à base de maïs ou d’autres céréales, pour produire un « canard prêt à gaver », livrés par bandes aux gaveurs par ces coopératives qui contrôlent toute la filière de production, depuis la naissance des poussins jusqu’à la transformation des foies. Dans cette véritable chaîne industrialisée, l’éleveur n’est plus qu’un maillon. Il gagne moins de 4 euros par canard gavé. Un ancien gaveur repenti des Landes, Philippe Lapaque, a ouvert un blog pour dénoncer cet « esclavagisme moderne ».

Une nouvelle étape dans l’industrialisation de la production fait s’étrangler les éleveurs-gaveurs : le gavage des femelles. Les foies des canes, plus petits, sont réputés de moindre qualité. Le CIFOG a interdit cette pratique depuis 1995, date de la première crise de surproduction en France. Mais elle est toujours en vigueur en Bulgarie et en Hongrie, autres grands pays producteurs en Europe. Euralis, qui dispose d’une filiale en Bulgarie depuis 2006, ne s’en prive pas.

Du coup, Maïsadour vient à son tour de se lancer dans le gavage des femelles dans un centre des Landes, « à titre expérimental ». Les petits éleveurs du Sud Ouest ont d’autant plus de mal à avaler cette banalisation du foie gras que la surproduction semble durer. Trois abattoirs de canards gras ont fermé cette année, dans le Morbihan, l’Aveyron et les Landes.

Les âmes sensibles opposées au gavage, elles, devraient être soulagées d’apprendre que des millions de poussins femelles ne passeront plus directement dans un broyeur. La cane de Jeanne, chère à Brassens, a regagné le droit de mourir « au gui l’an neuf ».

Trêve des confiseurs - JPG - 31.7 ko
Trêve des confiseurs
Dessin de Ray Clid

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5 MESSAGES

Forum

  • ne soyez pas complice d’une telle torture
    le samedi 26 décembre 2009 à 17:30, alain a dit :
    Il est impossible de produire du foie gras sans souffrance animale
    • Foie gras étranger
      le mardi 9 mars 2010 à 13:28, Jules l’Africain a dit :
      Vous parlez des pays de l’Est…Quid des foies produits au Laos et en Chine ???? Ou sont-ils vendus ? par quelles marques ? Comment les débusquer ?
  • Le business du foie gras vous en bouche un coin
    le lundi 21 décembre 2009 à 14:21, kialmi a dit :
    Il y en a vraiment qui ne reculent devant aucune arnaque pour faire du fric… "elle est pou belle la vie ?" comme dirait Titeuf !
    • Le business du foie gras vous en bouche un coin
      le mercredi 23 décembre 2009 à 16:17, kerloen a dit :
      ça ferait une super série télé ça !!
  • Le business du foie gras vous en bouche un coin
    le lundi 21 décembre 2009 à 07:23, Phil2922 a dit :
    Robert Lamoureux n’a jamais pu manger le foie gras du canard qu’il pourchassait dans son sketch… !!
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