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CULTURE / CHRONIQUES PATISSIÈRES

La saga des rêves de révolution

lundi 4 février 2008 par Noël Godin
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A l’honneur cette semaine, des romanciers-pamphlétaires historiques ayant déchiré splendidement la cartouche contre « Dieu, l’autorité qui bénit le Crime, Professeur, l’autorité qui dresse au Crime, Propriétaire, Banquier, Entrepreneur, Commissionnaire, Bourgeois, Patron, Roi, Maître enfin, les autorités qui entretiennent le Crime » (Ernest Coeurderoy, 1856).

La Révolution rêvée de Michel Surya (Fayard) : Empruntant son beau titre à un tableau de Marx Ernst, « rêve de révolution »(1947), une histoire prodigieusement passionnante de la littérature de parti-pris entre 1944 et 1956 saisie dans toute la complexité de ses multiples mouvements et contradictions. Pris en mains par le capitaine de flibuste de « Lignes », une des meilleures revues de combat critique d’aujourd’hui (nouvelle adresse : 85 rue de la Fontaine au Roi, 75011 Paris), le livre part du mot d’ordre prévalant à la Libération : « de la résistance à la révolution » pour analyser avec la plus radicale rigueur comment « s’est organisée la vie intellectuelle française autour de cette promesse, de ce rêve, que portait la résistance ». Et comment des auteurs comme Sartre, Breton, Blanchot, Leiris, Malraux, Péret, Lukacs, Ponge, Char, Lefebvre et Cie ont « pensé l’impasse du communisme sans pour autant renoncer à poursuivre le rêve de révolution au-delà de lui ».

Correspondance générale, tome 2, d’Octave Mirbeau (L’Age d’Homme) : Une pure merveille découlant d’un travail de recherche titanesque. Pierre Michel, l’inessoufflable historien du phénomène Mirbeau, a rassemblé ici et annoté avec sa limpidité et sa verve coutumière 1312 lettres écrites entre 1889 et 1894 par l’auteur du sulfureux Journal d’une femme de chambre. « Quand je pense qu’une cuisinière, par exemple, tient, chaque jour, dans ses mains, la vie de ses maîtres… Une pincée d’arsenic à la place de sel… Un petit filet de strychnine au lieu de vinaigre… Et ça y est ! Eh bien, non… Faut-il que nous ayons, tout de même, la servitude dans le sang ! ».

Sous la houlette pyromanesque du même Pierre Michel, les n°12, 13, 14 des embrasants Cahiers d’Octave Mirbeau (10bis, rue André-Gautier, F-49000 Angers) convoquent une manne de documents inédits, de témoignages inattendus, de références bibliographiques utiles et d’analyses pimentées du style « la production masquée » de Mirbeau (il fut le nègre de plusieurs littérateurs) ou « l’hystérie comme arme polémique dans les romans l’Abbé Jules et le Jardin des supplices ».

A lire aussi, une étude savante plaisamment torchée par Samuel Lair sur Mirbeau et le mythe de la nature (Presse Universitaires de Rennes, UHB Rennes 2, campus La Harpe, 2 rue du Doyen Denis-Leroy, F-35044 Rennes cedex).

Même les orties fleurissent ; Il faut partir ; La Société des vagabonds de Harry Martinson (Agone, BP 2326, F-13213 Marseille 02) : Tous les prix Nobel de littérature ne sont pas des cruches. Le poète prolétarien suédois Harry Martinson (1901-1978) qui le décrocha en 1974 pour « une œuvre dont l’invention formelle se soumet à une exigence de justice sociale jamais démentie » était en tout cas, lui, un « zigue à la coule » comme auraient dit les Pieds Nickelés. Et son autobiographie romancée en trois volets nourrie par son statut d’enfant abandonné « dans le blé lépreux des marais » devenant un fier trimardeur claquant du bec qu’aucune bonne âme ne peut asservir avec ses « tartines de morale » souffrirait fort bien d’être comparée aux chefs-d’œuvre subversifs de Jack London (j’ai failli dire de Gorki, mais c’est mieux que du Gorki). Les « vagabonds du travail » de Martinson sont plus chouettes que bien d’autres héros de gauche parce qu’ils « refusent simplement les directives, ce goût de la torture qui est inséparable de l’obligation de travailler ».

Dissidence – Pramoedya Ananta Toer Itinéraire d’un écrivain révolutionnaire indonésien de Anton Aropp (Kailash, 69, rue Saint-Jacques, F-75005 Paris) : L’homme de lettres Ananta Toer ne pondait pas non plus ses livres au coin de l’âtre. Après avoir ferraillé contre la colonisation hollandaise, il dénonce dès 1960 les micmacs du régime militaire d’Indonésie faisant de plus en plus allégeance au « monde libre ». En 1965, ça se corse. Dans le cadre de son programme de pacification « Ordre Nouveau » soutenu par la CIA et les services secrets britanniques, le général Suharto orchestre un massacre à grande échelle. Déporté au bagne de Buru où il croupira pendant 14 ans, Pram comme l’appelait ses amis, y continua sa lutte avec pour seule arme les mots. Car il ne disposera ni de crayon ni de papier pour écrire son bouleversant Buru Quartet. « Je racontais tous les soirs une partie de mon livre aux détenus de mon baraquement pour qu’elle s’imprime dans les mémoires ».

Nizan Destin d’un révolté de Pascal Ory (Complexe) : La réédition à peine aménagée (il n’y avait aucune raison de la retoucher plus) d’une bio sourcilleuse et pleine de sève du très craquant bolcho Paul Nizan qui croyait sincèrement aux visées révolutionnaires du PCF jusqu’à ce que ses illusions partent tragiquement en couille.

Bruno Schultz – Les régions de la grande hérésie de Jerzy Ficowski (Noir sur blanc) : Par un essayiste surtout connu pour ses écrits sur la culture tzigane en Pologne, l’histoire riche en émotions du corrosif auteur de Sanatorium au croque-mort assassiné par un nazi dans le ghetto de Drohobych en 1942 dont les mots comme les dessins avaient tellement le chic de transformer « tout tracas quotidien en cataclysme ». Le récit est prolongé par un choix de lettres cinglantes que Bruno Schultz expédia dans les années 1935 à divers artistes dont l’œuvre l’allumait.

A jumeler avec Les Boutiques de cannelle de Bruno Schulz (Gallimard L’imaginaire) : Un des vertigineux points d’orgue fantastico-cosmiques de Schulz se situant dans un « treizième mois, postiche et superfétatoire, en marge du temps réel, sur ses voies de garage ».


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