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La Guadeloupe n’a pas oublié les événements de mai 67

Flash Back / mardi 17 février 2009 par Jean-Moïse Braitberg
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La crise qui secoue les Antilles ravive des plaies toujours pas cicatrisées. En mai 1967, 80 à 200 manifestants furent tués par la police française dans les rues de Pointe-à-Pitre. Souvenirs, souvenirs.

De 80 à 200 morts dans les rues de Pointe-à-Pitre. La Guadeloupe n’a pas oublié les événements de mai 67. L’une des revendications actuelles des grévistes de Guadeloupe est de demander une commission d’enquête indépendante sur les événements des 26 et 27 mai 1967 au cours desquels, en plein pouvoir gaulliste, de 80 à 200 manifestants furent tués par la police française dans les rues de Pointe-à-Pître. « Les gens ont encore peur quarante ans après. Ils voudraient être sûr qu’ils ne risquent rien à témoigner » explique le Dr Michel Numa, 76 ans, ancien militant indépendantiste qui était en prison à Paris au moment du massacre.

Tout avait débuté deux mois plus tôt. Le 20 mars 1967, à Basse-Terre, préfecture de l’île, un riche marchand « blanc pays », lance son chien sur un artisan noir. Révolté par cet acte digne de l’apartheid, le peuple de Basse-Terre laisse libre cour à la colère accumulée depuis longtemps. Durant trois jours, les 20, 21 et 22 mars 1967, Basse-Terre est en émeute. Dans un appel au calme, le préfet déclare comprendre la colère populaire et jure que cet acte raciste sera puni. Mais contrairement aux promesses, les émeutiers seront condamnés à de fortes peines de prison. Fin du 1er acte.

« Quand les nègres auront faim, ils reprendront leur travail »

Deux mois plus tard, à Pointe à Pitre, le 26 mai 1967, jour de commémoration de l’abolition de l’esclavage, 5000 ouvriers du bâtiment sont en grève pour une augmentation de salaire de 2%. Le délégué patronal, un certain Brizard aurait lancé aux grévistes : « Quand les nègres auront faim, ils reprendront leur travail ». Une manifestation s’organise. Face aux CRS rassemblés devant la chambre de commerce, les manifestants lancent des pierres et des bouteilles. La police tire immédiatement tuant Jacques Nestor, Militant du Groupe d’Organisation Nationale de la Guadeloupe (GONG). Selon Michel Numa, les ordres du préfet Bolotte, captés sur la fréquence de la préfecture disent aux officiers CRS : « Faites usage de toutes vos armes ».

Les deux jeunes ouvriers Taret et Tidas sont tués ainsi qu’un promeneur. La population et notamment les jeunes du lycée Baimbridge, révoltée, afflue le lendemain vers le centre de Pointe-à-Pitre. Des véhicules sont brûlés, les boutiques de la rue Frébault, principale rue commerçante de Pointe-à-pitre, sont incendiées et pillées. Plusieurs policiers sont blessés à coup de pierres et de sabre. Le bruit court qu’une armurerie a été dévalisée. Le préfet désarme les policiers noirs et fait appel à des gendarmes mobiles de Martinique et de France. Sous la direction du commissaire de police Canales et du capitaine CRS Rupin, policiers et « képis rouges » se livrent à la « chasse au nègre ». Arrêtés au hasard, des personnes sont exécutées dans les locaux de la gendarmerie de Morne Niquel. Des dizaines de personnes sont blessées, dont certaines mutilées à vie comme Solange Coudrieux. « On enjambait les cadavres dans la sous-préfecture », assure un témoin qui craint encore de donner son nom.

Le bilan de ces deux journées de répression n’est toujours pas connu car de nombreuses familles ont inhumé secrètement leurs défunts et caché leurs blessés de peur des représailles. La presse de métropole a parlé de « sept morts et certainement plus ». Le nombre exact s’approcherait vraisemblablement de 85 victimes. C’est le chiffre reconnu voici une vingtaine d’années par l’ancien ministre socialiste des DOM-TOM Georges Lemoine. Chez les Guadeloupéens on parle de 200 morts.

Vers une commission d’enquête ?

Le gouvernement français profita des événements pour liquider le mouvement nationaliste guadeloupéen incarné alors par le G.O.N.G. et l’Association générale des Etudiants guadeloupéens (A.G.E.G). De nombreux militants furent arrêtés. Certains, pris en flagrant délit, furent condamnés à de lourdes peines de prison ferme. Vingt-cinq autres, accusés d’avoir participé aux manifestations, furent incarcérés à Basse-Terre et seront jugés en avril 68. Enfin, Vingt-cinq militants Guadeloupéens, dont Michel Numa furent enfermés à la prison de la Santé, accusés d’atteinte à l’intégrité du territoire.

Pour les Guadeloupéens, le travail de mémoire n’a pas été fait. Chaque année, les 26 et 27 mai, les militants qui se souviennent se rendent à la préfecture pour demander la création d’une commission d’enquête, pendant que les élus guadeloupéens observent un silence remarqué. Il est vrai qu’à l’époque, ils avaient signé un texte rendant les manifestants responsables du massacre.

Il a fallu trente ans pour que l’on reconnaisse le massacre des Algériens jetés à la Seine par la police de Maurice Papon le 17 octobre 1961. Le préfet Bolotte, comme par un fait du sort, est mort le 27 mai 2008. Combien de temps faudra-t-il encore pour que justice soit rendue, même symboliquement aux victimes noires des événements de mai 67 ?

Lire ou relire dans Bakchich :

Les Guadeloupéens se demandaient pourquoi Yves Jégo était rentré précipitamment à Paris. François Fillon a la réponse. C’est lui qui a rappelé à l’ordre le secrétaire d’État, jugé trop généreux.

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  • La Guadeloupe n’a pas oublié les événements de mai 67
    le mardi 27 juillet 2010 à 12:40, François a dit :
    Beaucoup d’imprécisions dans ce papier. Taret n’était pas ouvrier mais employé de bureau et étudiant à l’Institut Vizioz (droit). "Le riche marchand de basse-terre" n’était pas un blanc pays, mais un français d’origine tchèque. "Deux mois plus tard, 26 mai, jour d’anniversaire de l’abolition de l’esclavage", non, veille de ce jour. Etc… Des détails, certes mais qui montre bien que c’est le foutoir dans la mémoire et qu’il y a un vrai travail à faire.
  • La Guadeloupe n’a pas oublié les événements de mai 67
    le mardi 10 mars 2009 à 12:04, J-R du 91 a dit :
    Bonjour, je suis né en France, mon père est picard et ma mère martiniquaise, je trouve honteux le comportement de nos dirigeant, qu’il soit de gauche ou de droite. J’ai 40 ans et je découvre aujourd’hui ce qui c’est passé en Guadeloupe en 1967,que c’est il passé en martinique.La Guadeloupe a raison de se révolté contre les descendants des esclavagistes qui continue à considéré les antillais comme des bons négre,travailleur et docile. Je suis fière d’être Francais,mais j’aime aussi la Martinique.L’état doit nous dire la vérité sur les événements de mai 1967.
    • La Guadeloupe n’a pas oublié les événements de mai 67
      le mercredi 27 mai 2009 à 10:59, JKB a dit :

      Deux articles dans le Monde

      http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/05/26/en-guadeloupe-la-tragedie-de-me-67-refoulee_1198153_3224.html

      http://www.lemonde.fr/societe/article/2009/05/26/quarante-ans-de-silence-et-toujours-pas-de-bilan-authentifie_1198154_3224.html

      Quand aux descendants d’esclavagistes, ils sont peut être plus nombreux aux Antilles qu’en métropole et leur couleur de peau n’est peut être pas celle à laquelle on pense en premier à la suite d’un raisonnement simpliste. Vous êtes bien placé pour le savoir.

      Les Antillais sont à la fois des descendants d’esclaves et des descendants d’esclavagistes, intimement mêlés dans les mêmes personnes. Ce n’est peut être pas facile à assumer. Pourtant c’est nécessaire pour aller de l’avant, cesser de se plaindre, prendre son destin en main.

  • La Guadeloupe n’a pas oublié les événements de mai 67
    le dimanche 1er mars 2009 à 00:25, JKB a dit :

    Vous écrivez "80 à 200 morts" !

    Il n’y a donc pas d’état civil en Guadeloupe ?

    Comment peut on brandir des chiffres aussi imprécis sur un problème aussi sérieux ?

    Je trouve d’autres sources parlant de 7 morts ou de 87 …

    Ou sont les listes de noms ?

    • La Guadeloupe n’a pas oublié les événements de mai 67
      le dimanche 1er mars 2009 à 12:10, Xavier Monnier a dit :
      Bonjour, votre argument est étrange. OUI il est parfois difficile de chiffrer des morts, quad les autorités les cachent. Autre exemple les massacres de 47 à Madagascar, avec un fourcher de 10 000 à…100 000 morts
      • La Guadeloupe n’a pas oublié les événements de mai 67
        le lundi 2 mars 2009 à 20:30, JKB a dit :

        Mais Madagascar n’était pas un département Français et je ne pense pas que les déclarations de naissances étaient obligatoires.

        En Guadeloupe, il est possible de consulter des registres et d’interroger des témoins pour retrouver les noms des potentielles victimes.

        Par exemple, on sait précisément qui ont été les fusillés du mont Valérien.

        Pour mai 67 en Guadeloupe, j’ai trouvé un nom sur Internet, rien d’autre.

        Personne n’a essayé de faire de liste ? Pas de thèse d’étudiant en histoire ?

        Ce serait une honte de ne pas les honorer en se souvenant de chacun d’eux. Mais évidement ce manque de précision peut cacher une tentative de multiplier le nombre réel des victimes. Pour être crédible il faut être sérieux. Pour honorer les morts, aussi.

        Pour le moment, j’ai trouvé ce document d’époque

        http://svr1.cg971.fr/lameca/dossiers/mai1967/col_tract/pages/1967-06_tract01a.htm

  • La Guadeloupe n’a pas oublié les événements de mai 67
    le jeudi 26 février 2009 à 13:54, dremelli a dit :
    mais ne veut surtout pas avoir un noir ou un arabe comme voisin. Et bien, j’ai vécu un certain temps dans ce voisinage. J’espère ne jamais a voisiner avec "des noirs ou des arabes" ! Ce n’est pas possible. Vous vivez bruyament et ce toutes les heures de jours comme de nuit. Merci pour ceux qui travaillent et se lévent tôt !Avec le ’cirque" que vous faites toute la nuit" ! JE PUIS VOUS DIRE QUE LE REVEIL N’ETAIT PAS GLORIUEX ! Merci pour votre incivilité. Merci pour le désordre que vous laissez dehors !Etc……………… Si c’est cela, NON, je ne souhaites plus vivre dans un tel voisinage ! Civilisez-vous et apprenez à vivre comme de bons citoyens gaulois ! Aimez notre pays comme nous aimons le vôtre. Ou alors retournez chez vous ! Merci de m’avoir lu !
  • La Guadeloupe n’a pas oublié les événements de mai 67
    le mercredi 18 février 2009 à 09:33, ZADIGLEVIZIR a dit :
    exact mais sur RMC il a dit également qu’il se verrait bien s’installer à la … Goadeloupe…. Chiche …
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