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MODES DE VIE / Le billet d’Alain Riou

L’art contemporain nous sauvera

Le billet d’Alain Riou / jeudi 1er avril 2010 par Alain Riou
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Musicien de jazz, journaliste au Nouvel Obs et invité du "Masque et la Plume" sur France-Inter, Alain Riou fait son cinéma.

Comme la plupart des ploucs, j’ai longtemps ricané devant l’art conceptuel, m’esbaudissant de la suffisance des artistes, de l’insuffisance de leur inspiration et de la divine crédulité des acheteurs. J’ai même déploré que, dans son délicieux dernier film "Achille et la tortue", Takeshi Kitano ne lui règle pas son compte plus nettement, jusqu’au moment où j’ai appris qu’il exposait lui-même chez Cartier.

Car vous n’avez pas idée du prix qu’atteignent désormais les petits tas de parpaings consacrés, genre celui qui égaie la pelouse de l’Orangerie des Tuileries. Comme disait Georges Feydeau, ces choses-là coûtent « la vie d’une famille pendant six siècles ».

Or je viens d’apprendre que les sociétés du CAC 40 qui ont réalisé l’an dernier 49 milliards de bénéfices en ont refilé 70% à leurs actionnaires et traders.

Ce qui signifie, d’une part, la misère pour les salariés, la fin de tout pouvoir d’achat et, d’une certaine façon, celle du capitalisme, les personnes comme vous et moi n’ayant plus assez d’argent pour payer les produits que l’industrie fabrique. Et, d’autre part, l’augmentation programmée du prix des logements, des terres agricoles et des produits de première nécessité où se font ces ahurissants bénéfices, entraînant l’explosion des cours. Naguère, on coupait le cou des accapareurs.

Hélas, la civilisation a reculé, et c’est là que l’art contemporain, dont je suis finalement devenu le plus enragé des thuriféraires, donne toute la mesure de son génie.

Je m’explique.

Vous prenez un urinoir, vous y collez une signature chicos, comme l’a fait Marcel Duchamp, et l’objet promu d’art atteint aussitôt une valeur prodigieuse, mais rigoureusement virtuelle. Sa vente et sa revente, à ces traders qui l’aiment tant, assécheront, qu’on me pardonne l’image, une immense quantité de liquidités qui n’iront pas faire des bulles sur le riz ou les terres et qui n’affameront plus personne. En effet, avec un peu de doigté dans l’art de l’ustensile, nos amis les traders se boufferont, autour de lui, entre eux.

Viendra le temps où le cours de l’urinoir aura tendance, comme disent si plaisamment nos banquiers, à s’apprécier, c’est-à-dire à se casser la gueule. Alors apprécierons-nous nous-mêmes. En connaisseurs.

Retrouvez le billet d’Alain Riou chaque semaine dans Bakchich Hebdo, en vente chez tous les marchands de journaux. 1 euro.

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4 MESSAGES

Forum

  • L’art contemporain nous sauvera
    le jeudi 1er avril 2010 à 11:13
    Mmmmmmhoui, m’enfin la dimension "vengeur social" d’un Hirst ou d’un Koons m’échappe toujours - et probablement pour longtemps encore.
  • L’art contemporain nous sauvera
    le jeudi 1er avril 2010 à 10:01, Patrick Sargos a dit :
    Vers de nouvelles richesses. Merci beaucoup pour votre intéressant article. Mais je pense que vous n’avez pas pris la pleine mesure du phénomène que vous annoncez. En effet, les Chinois quittent leur campagne pour aller faire de l’art contemporain à Shangaï, les Africains arrêtent de fabriquer des faux dans leurs innombrables ateliers de faussaires, car ils se sont rendu compte que l’art contemporain rapportait immensément plus avec cent fois moins de travail. La planète entière, et surtout le tiers-monde, se lance dans l’art contemporain comprenant enfin où est la planche de salut. Tous ces artistes sont en train de créer des richesses incommensurables ; la pauvreté fait maintenant partie du passé. Une rectification cependant à votre article. Quand vous parlez de l’urinoir qui vaut une fortune, vous vivez dans le passé. Maintenant c’est l’urine qui a de la valeur. Un simple bocal d’analyse médicale est suffisant. Nous sommes encore plus riches que vous ne le pensiez !
  • L’art contemporain nous sauvera
    le jeudi 1er avril 2010 à 09:34
    Hélas, 1000 fois hélas, la valeur de l’urinoir a beau être virtuelle, l’argent utilisé par l’amateur/spéculateur pour l’acheter ne l’est pas. Il a forcément été prélevé, à un moment ou un autre, sur une production de richesse réelle… Et en plus, l’acheteur déduira le prix de l’urinoir de son ISF, faisant échapper cet argent à toute redistribution vers les producteurs de richesses (…qui finiront par se sauver eux-même, comme dit la chanson)
  • L’art contemporain nous sauvera
    le jeudi 1er avril 2010 à 02:09
    En voilà un bel amalgame ! Pour info, Duchamp est l’inventeur de l’anti-art, s’élevant contre la bourgeoisie de l’époque. L’inventeur du concept-art, Henry Flint, se revendique également de l’anti-art. Rien à voir avec la financiarisation actuelle de l’Art qui produit des Damien Hirst et companie. Revoyez vos classiques.
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