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"L’affaire Ben Barka est un concentré du système Hassan II"

lundi 12 juin 2006 par Julie Kara
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Bachir Ben Barka, le fils du célèbre opposant marocain enlevé à Paris en 1965, revient pour Bakchich sur les derniers rebondissements judiciaires de l’affaire Ben Barka.

Quarante ans après les faits, pensez-vous que le juge Ramaël peut faire éclater la vérité ?

Bachir Ben Barka Ce qui est certain, c’est qu’il se passe des choses en surface. Le juge est déterminé à faire son travail. Il a levé le secret défense et réentendu des témoins. On peut penser que certains pourront parler plus facilement dix ou vingt ans après leur première audition. Après 1999 et la mort d’Hassan II, il y a eu un premier déblocage. Nous, la famille Ben Barka, sommes rentrés à ce moment-là au Maroc. Cela n’a pas posé de problèmes, et on pensait donc que le dossier avancerait. Malheureusement, ça n’a pas été vraiment le cas. Sur le fond (où se trouve le corps de Mehdi Ben Barka ? qui l’a exécuté ?), rien n’a avancé. Pourtant Mohammed VI a fait des déclarations - privées et publiques - qui étaient encourageantes. Mais en pratique, cela n’a pas été suivi d’effets. Les autorités sécuritaires et judiciaires du Maroc traînent les pieds. Aujourd’hui, nous en sommes à la sixième commission rogatoire du juge Ramaël. Ce qui veut dire que les cinq précédentes n’ont pas abouti et ce à cause des autorités marocaines.

Est-ce que l’audition de Driss Basri, l’ex-tout-puissant ministre de l’Intérieur d’Hassan II, et la perquisition à son domicile peuvent faire avancer le dossier ?

Pour Ramaël, entendre Basri, c’est montrer aux autorités marocaines qu’il ne lâchera pas l’affaire. Et il n’est évidemment pas dupe des réponses de Basri, qui dit ne pas connaître les protagonistes de l’affaire. De par sa position au sein de l’Etat pendant les années de plomb, Basri sait forcément beaucoup de choses. Si on parle souvent au Maroc de société orale, il ne faut pas oublier que les services secrets ont des rapports écrits, des archives. Est-ce un hasard, si, le 29 octobre 1999, quelques jours avant que Basri ne soit démis de ses fonctions, un incendie a eu lieu dans le local des archives de la DST ? Si Basri ne parle pas, c’est qu’il était et semble rester un ardent défenseur d’Hassan II. Ramaël a montré sa volonté de réentendre des témoins marocains. Pour certains, ce sont des acteurs du crime, de hauts-fonctionnaires aujourd’hui à la retraite comme Miloud Tounsi (organisateur présumé du rapt, ndlr). Celui-ci n’a jamais été inquiété : pendant longtemps on a pu le voir se rendre tous les jours à 17 heures au Yacht Club de Rabat.Il y a aussi des témoins institutionnels, comme le général Benslimane, qui, en 1965, faisait parti du cabinet Oufkir. De par ses fonctions, il a forcément des choses à dire.

Et en ce qui concerne l’audition de Driss Benzekri, président de l’Instance équité et réconciliation (IER) ?

Lui aussi doit posséder des éléments importants pour comprendre le meurtre de mon père. Je regrette que l’IER ne nous ait pas tenus au courant, nous la famille Ben Barka, de façon spontanée de ses travaux. Malgré la qualité de ses membres, le rapport de l’IER ne nous apprend rien. Pourquoi ? On ne sait pas. Pourtant, il ne peut pas y avoir de réconciliation sans vérité. L’IER a toujours fait blocage sur des points cruciaux. A croire que quarante ans après, l’affaire reste sensible.

Oufkir n’est pas le seul responsable

Les blocages sont-ils uniquement du fait de l’Etat marocain ?

Le poids du sécuritaire reste très fort au Maroc. Les responsabilités politiques sont connues et ça fait quarante ans que nous le répétons. Certains ont voulu mettre cette affaire sur le dos d’Oufkir, mais en 1965, ce n’est pas lui qui prend les décisions, c’est Hassan II le maître absolu du royaume. Après la décision politique, reste les responsabilités de l’enlèvement et du meurtre de mon père. N’oublions pas que l’enlèvement constitue en soi un acte criminel. Les blocages viennent aussi de France. Pendant trente ans, on nous a trimbalés de refus ministériel en refus présidentiel avant que soit enfin levé le secret défense. En fait, le dossier était vide, et les politiques français le savaient. En 1965, le ministère de l’Intérieur savait par le biais d’écoutes téléphoniques que l’enlèvement de mon père se préparait. Les responsabilités françaises ont-elles donc été autre chose que subalterne ? On peut se demander si la France n’a pas intérêt à cacher cette forme de complicité. Il y a donc une convergence d’intérêt à ce que la vérité n’apparaisse pas.

Avez-vous bon espoir de voir cette enquête aboutir un jour ?

Bien sûr. Il est impossible pour nous de ne pas avoir d’espoir. Apparemment, plus le Maroc traîne des pieds, plus Ramaël a l’air motivé ! Je crois qu’il est impossible que cette affaire soit enterrée et que le juge ira jusqu’au bout de son travail. Quarante ans après, la mémoire collective est toujours imprégnée de l’affaire Ben Barka car celle-ci est un concentré du système Hassan II. Connaître la vérité, c’est démonter les années de plomb. Et connaître la vérité est la seule issue.


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