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Au procès Vivendi, ça sent le sapin…

Class Action / vendredi 4 décembre 2009 par Woodward et Newton
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L’action de groupe en cours d’examen contre Messier à New York donne des sueurs froides aux ex-dirigeants de Vivendi et réjouit les actionnaires floués des deux côtés de l’Atlantique. Enjeu estimé : 8 milliards de dollars.

À New York, les audiences de la Class Action engagée contre Vivendi, Messier son ex-président, et Hannezo l’ex-patron des finances du groupe, se poursuivent pour le moment sans coup de théâtre. On serait presque tenté de dire dans l’indifférence générale des deux côtés de l’atlantique. Impression trompeuse.

En réalité, de ce côté-ci de l’Atlantique, on surveille l’affaire comme le lait sur le feu ; dans les milieux patronaux où l’on tient les actions judiciaires de groupe pour une quasi-obscénité qu’il faut exclure le plus longtemps possible de la législation française, on commence discrètement à s’inquiéter de la tournure des évènements.

Le premier vrai sujet d’inquiétude est venu de l’audition de Blaine Nye l’expert des plaignants, venu présenter à la barre le 17 novembre, les résultats de ces travaux. Nye, qui dans une autre vie a pratiqué le football américain professionnel et a distribué, selon ses propres termes, pas mal de « corrections », s’est fait payer 4 millions de dollars d’honoraires pour sa peine. Pour ce prix là et contre toute attente, il a réussi à susciter un net regain d’intérêt de la part d’un jury somme toute, assez apathique.

Petits Porteurs - JPG - 32.2 ko
Petits Porteurs
Dessin d’Oliv’

Dopage de cours

Et le défi était de taille. Il s’agissait de mettre à mal la thèse de Vivendi selon laquelle si le cours de son action s’est réduit comme une peau de chagrin entre 2001 et 2002 c’est de la faute à pas de chance. L’éclatement de la bulle Internet, le 11 septembre, la crise de l’industrie du disque piratée jusqu’à l’os et d’autres misères sectorielles sont en effet les vrais responsables du préjudice subi par les actionnaires, clamait la direction de Vivendi ; la preuve, c’est que tous les acteurs du secteur ont vu le cours de leur titre baisser de manière significative.

« Exact  » a répondu Nye avec un sourire carnassier avant d’exposer au jury son point de vue sur la question. Il tient en peu de mots et beaucoup de chiffres et de statistiques : en occultant certaines informations défavorables et notamment le risque de liquidité que faisait courir à l’entreprise, la boulimie d’acquisitions de son président, Vivendi a contribué spécifiquement à gonfler artificiellement le cours de son action, et ce, indépendamment de la tendance observée sur l’ensemble du secteur.

D’ailleurs a-t-il ajouté, lorsque ces informations défavorables ont finalement été portées à la connaissance du marché, le cours de l’action a chuté mécaniquement à chaque fois. Bref, exclusion faite des facteurs conjoncturels, la dissimulation présumée (« the alleged fraud ») à laquelle se sont livrés les dirigeants de Vivendi, aurait coûté selon Blaine Nye, 22,52 euros par action aux actionnaires ayant détenu des actions VU entre novembre 2000 et août 2002.

Combien d’actionnaires floués ?

Les avocats de Messier, Hannezo et Vivendi ont évidemment tenté de mettre en pièces la démonstration de l’expert au cours de son contre-interrogatoire. Hélas pour eux, sans succès notable. Les observateurs américains des débats, familiers des Class Actions, ne sont pas loin de penser que le montant du préjudice de 22,52 euros par action est pratiquement gravé dans le marbre. Et dans la cervelle des jurés.

La seule question qui se pose encore est celle du nombre total d’actions ayant subi ce dommage. De ce point de vue, la Class Action dont le nombre exact des actionnaires qui y prennent part et se feront connaître à son issue est aujourd’hui inconnu, conserve donc tout son mystère.

Les estimations vont bon train. Les plus conservatrices estiment que les 4 nationalités admises à participer à l’action collective pourraient représenter 400 millions d’actions, majoritairement détenues par des Français.

A 20 euros par action pour faire un compte rond, l’affaire pourrait coûter à Vivendi, après avoir épuisé tous ses recours, des étrennes de l’ordre de 8 milliards d’euros en principal… une addition salée pour laquelle à ce jour, aucune provision n’a été constituée. Normal. Il s’agit pas de frustrer les actionnaires actuels de Vivendi en leur infligeant des retenus sur dividendes pour couvrir des risques encore indéterminés…On imagine mal que Vivendi puisse se remettre d’une telle saignée si elle devait avoir lieu…

No Frenchies allowed

Pas étonnant donc, que depuis l’ouverture du procès, on s’efforce du côté de Vivendi, d’exclure à tout prix les Français de la fête, au prétexte assez fumeux et n’ayant nullement convaincu le juge Holwell jusqu’à présent, que leur présence dans une action collective américaine serait « anticonstitutionnelle ».

Avec une obstination qui fait plaisir à voir, les défendeurs ont donc assigné les représentants français de la Class Action, messieurs Olivier Gérard et Gérard Morel, devant le TGI de Paris. Et ce afin de faire consacrer par un tribunal français -plus enclin selon eux à leur donner raison- leurs prétentions de voir prononcer à l’encontre de Gérard et Morel et au-delà, de tous les actionnaires français potentiellement membres de la Class Action, une interdiction de fêter dignement le réveillon à New York.

L’audience du 25 novembre à Paris a surtout démontré l’extrême perplexité du tribunal qui va délibérer un bon moment quant à la recevabilité de la requête de Vivendi. D’autant que le juge Holwell, voyant venir la manœuvre, lui avait un peu gâché le plaisir quelques jours plus tôt.

Par une décision du 19 novembre, il a en effet relevé les 2 Français de leurs responsabilités de représentants des plaignants (« lead plaintiffs ») rendant ainsi sans véritable objet, l’action de Vivendi devant le TGI de Paris (« without finding that the 2 french shareholders are in any way, inadequate representatives, I have relieved them of their responsability as class representatives on the basis of the representations made on Vivendi’s behalf during oral argument. That’s the ruling of the court. I assume it’s available on line” a-t-il indiqué avec un petit sourire narquois, le 19 novembre au cours des débats)…

La bourde Cegetel

Et le pire reste à venir  : en particulier le contre-interrogatoire de Jean-Marie Messier qui risque de passer un très mauvais moment. On a déjà pu avoir un avant goût de ses maladresses lors de son audition comme témoin le 24 novembre, assisté de son avocat Maître Malone qui lui a permis jusqu’à présent de faire le malin devant le jury.

Et de commettre quelques bourdes relevées avec gourmandise par les avocats de la Class qui l’attendent au tournant : un seul exemple, celui de Cegetel est assez révélateur. « Je connais Cegetel par cœur ; je l’ai dirigée pendant 3 ans, j’allais dans les magasins Cegetel

"I did know Cegetel by heart"

Verbatim : « so it’s one company I knew very much in-depth and I was even going to the stores, so see what people were doing in the stores of Cegetel and how they were behaving. I knew I hope, as much as possible on the ground from Cegetel…” ou encore, un peu plus loin : “Not only did I know by heart, the business model of Cegetel but the processes were slightly longer than for the subsidiaries because we had minor shareholders British Telecom, Vodafone and SBC, and those minor shareholders under the agreement with Cegetel were also reviewing the accounts of Cegetel…”.

Bref, JMM a fait tout ce qu’il a pu pour rouler les mécaniques et convaincre le jury qu’il connaît Cegetel comme sa poche, jusqu’au moment ou son avocat lui a posé la question à 8 milliards d’euros sur le cash flow de Cegetel mis disposition de la holding du groupe Vivendi dans le cadre d’une convention de compte courant : « Avant mai 2002, saviez-vous que les actionnaires minoritaires de Cegetel pouvaient en demander le remboursement immédiat ?  ».

Et là, l’ex Maître du Monde s’est lamentablement contredit en répondant impulsivement : « I had no idea. For me it was a common current account between a group and a company  »… ("Aucune idée. Pour moi c’était un compte courant banal normal entre un groupe et une entreprise") Encore heureux qu’il connaissait Cegetel “par cœur” qu’est-ce que ça aurait donné dans le cas contraire ! 

Nul doute que le garçon va ressentir un grand vide au creux de l’estomac lorsque le juge Holwell va prononcer à l’attention des avocats des plaignants, la phrase rituelle des séries TV produites par les studios Universal : “Maîtres, le témoin est à vous  ».

Un vent de panique

D’autant que les plaignants ont mis la main sur un rapport d’expert agissant à la demande de Vivendi, et tendant à prouver que le contrôle de la trésorerie quotidienne du groupe était d’une fiabilité toute relative. Madame Christine Hammer – c’est son nom - que certains observateurs facétieux ont déjà surnommée « if I had a Hammer » a par exemple attesté que le 13 décembre 2001, lorsque Monsieur Dupont-Lhotellain le trésorier de Vivendi, annonçait fièrement que la trésorerie du groupe s’élevait à 3,25 milliards d’euros, elle n’en comptait pour sa part, que 6 millions c’est-à-dire quasiment rien pour un groupe de cette importance !

Pris de panique Maître Slifkin, l’un des avocats des défendeurs a imploré le juge Holwell d’empêcher la partie adverse de faire usage de cette pièce : (« it’s quite a big deal to, now, for the first time ever, suggest to this jury, that the company lied in those financial statements, with respect to the level of cash..  » - autrement dit : c’est une toute autre paire de manches de suggérer au jury pour la première fois dans ce procès, que la société ait pu mentir dans ses comptes sociaux en ce qui concerne le niveau réel de son cash…Diantre.

Violation du contrôle judiciaire

Un bonheur ne venant jamais seul, Maître Canoy alias « Columbo » qui mène comme chacun sait, la danse à Paris contre Vivendi, vient de déposer une plainte contre Messier et Hannezo pour violation du contrôle judiciaire.

Selon lui, les tourtereaux semblent en effet avoir passé par profits et pertes, - une de plus - l’obligation qui leur avait été faite par le juge d’instruction français de l’affaire et dont ils n’auraient pas encore été formellement relevés, de ne pas se rencontrer et de ne communiquer sous aucun prétexte.

Leurs multiples tête-à-tête new-yorkais lors des suspensions de séance dont prétendent avoir été témoins de nombreux observateurs du procès américain, dont « Columbo » lui-même, n’étaient sans doute que des mirages…

Décidément, à quelques jours de Noël, ça commence à sentir le sapin à New York pour Vivendi et ses ex-dirigeants.

A lire sur Bakchich.info :

Le procès en correctionnelle de l’ex-PDG de Vivendi s’ouvrira le 21 janvier. Il est poursuivi pour diffusion d’informations fausses ou trompeuses sur le niveau d’endettement du groupe, manipulation de cours et abus de biens (…)
Ordonnance de renvoi en correctionnelle pour sept acteurs du dossier Vivendi dont Messier, Hannezo et Licoys. Une victoire de l’avocat Karel Canoy, alias "Columbo".
Le capitalisme à visage humain c’est possible. Il suffit de regarder les doux mails envoyés par Guillaume Hannezo à son patron Jean-Marie Messier, juste avant l’éjection de J2M en 2002.

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12 MESSAGES
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Forum

  • Au procès Vivendi, ça sent le sapin…
    le samedi 5 décembre 2009 à 16:46, VOLTAIRE a dit :
    heureusement que la justice d’Obama est là pour nous rappeler à la saine décence par rapport à la justice française indibutablement aux ordres de l’éxécutif et surtout de Sarkozy !!!!on espère qu’il en prendra un max aux USA car là bas les interventions et pressions ça n’existent pas pire c’est puni sévèrement à la différence de la FRANCE où c’est un sport national … vraiment désolé pour ses chaussettes à l’alezan…et pour les magistrats à la française….
  • EN SAVOIR PLUS SUR LA" CLASS ACTION"
    le vendredi 4 décembre 2009 à 15:03
    Petit actionnaire Français de Vivendi allez voir : cabinet-frederik-karelcanoy.blogspot.com
    • EN SAVOIR PLUS SUR LA" CLASS ACTION"
      le samedi 5 décembre 2009 à 16:53
      d’habitude dans l’affaire des frégates c’était top secret défense et là c’est anticonstitutionnel !…. décidément la France de Sarkozy fait dans la flibuste lorsque les amis du monarque sont en cause…. heureusement les jurés populaires made in USA à… 40 dollards de la vacation ne s’en laissent pas compter….certainement et encore des minables anti démocrates dirait l’autre zèbre !!!!
      • EN SAVOIR PLUS SUR LA" CLASS ACTION"
        le mardi 8 décembre 2009 à 15:45
        vous ne faites pas honneur aux flibustiers ces derniers étaient … courrageux… parlons plutôt de boucaniers le terme serait plus approprié pour ce genre de malfrats présumés….
  • Au procès Vivendi, ça sent le sapin…
    le vendredi 4 décembre 2009 à 13:16, Edmond Flouz a dit :

    Dans sa dernière lettre aux actionnaires ("Novembre 2009 - Class Action") Jean-François Dubos, Secrétaire Général du Groupe écrit " …Le procès a commencé le 5 Octobre. Il devrait durer approximativement 3 mois. Si Vivendi gagne, les avocats des plaignants paieront les frais. Si vivendi est condamné, chaque membre de la class action devra former une requête assortie de documents probants afin d’être indemnisé et ce n’est qu’à ce moment là qu’on connaîtra le nombre et le montant de l’indemnisation. Chacune de ces requêtes peut être contestée. Ces chiffres étant impossibles à déterminer aujourd’hui, c’est la raison pour laquelle nous n’avons pas provisionné…".

    Depuis cette désopilante missive, ses collègues l’appellent "Dubos Dématte" dans les couloirs du 42, avenue de Friedland !

  • Au procès Vivendi, ça sent le sapin…
    le vendredi 4 décembre 2009 à 12:13, Pascal a dit :
    Le plus grave dans cette affaire (les actionnaires ont pris des risques avec des voyous, c’est leur problème) C’est que sont devenues les "provisions pour renouvellement des réseaux d’eau potable" -5 milliards d’Euros- de la CGE Compagnie Générale des Eaux, filiale de Vivendi future Veolia, et vache à lait de Messier. Sans renouvellement des tuyaux, on va à la catastrophe sanitaire en France. L’Etat français doit attaquer Messier, Vivendi, Veolia,… Voir l’Empire de l’Eau, Yavn Stefanovitch, Ramsay ed. ou www.eauxglacees.com ou carnets d’eau du Diplo (article Plus belle la vie avec Henri Proglio)
  • Au procès Vivendi, ça sent le sapin…
    le vendredi 4 décembre 2009 à 11:37, le bal masqué a dit :

    Il ne faut pas hésiter à changer de banque et à exprimer nos convictions et nos désaccords ; c’est ce que j’ai fait, en passant de la caisse d’épargne à la banque postale, afin de protester contre la nomination de François PEROL.

    Je n’ai certes pas gagné grand chose sauf la satisfaction de voir la tête de mon banquier devant ce choix.

    Dans un second temps je transfèrerai une partie de mon épargne à la NEF mais ils sont apparemment très demandé et les rendez-vous ne sont pas rapides.

    Aujourd’hui je fais ce qui me plaît me plaît … derrière mon loup, j’embrasse qui je veux je veux …OH Hé, Ho Hé…

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