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Au Kenya, des corrompus qui se dédouanent

mercredi 13 décembre 2006 par Xavier Monnier
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Un marché de 10 millions de dollars, des rapports confidentiels, des présomptions de corruption, un mort opportun. Au Kenya aussi, on sait faire des affaires

Aussi austère et lisse qu’il puisse paraître, le petit monde du « contrôle de qualité » a aussi ses truculentes et exotiques histoires. À condition de bien chercher et de ne pas être rebuté par des insanités comme « Pre-shipment verification of conformity » (Pvoc). Derrière cette expression aussi barbare en anglais qu’en français ( « vérification avant expédition de la conformité ») se cache une singulière réalité : l’assistance de groupes privés aux États pour les aider à recouvrer les contrôles douaniers… et au passage vérifier que les douanes ne sont pas trop poreuses.

Premiers clients de ce type de services, les États aux douaniers particulièrement corrompus et dont les finances publiques ont grand besoin de recouvrements douaniers conséquents. Répondant exactement à ces critères, le Kenya s’est depuis quelques temps lancé dans l’aventure du Pvoc. Mais ne se remet pas de son dernier appel d’offres lancé en août 2005.

Saine ironie, le marché, d’une valeur estimée à 10 millions de dollars, destiné à assainir le contrôle douanier et enrayer la corruption, n’a pas été attribué dans de transparentes conditions. Deux commissions parlementaires anti-corruption en septembre et octobre dernier, un rapport confidentiel du ministère du Commerce et de l’Industrie en février et une foultitude de missives inter-ministérielles en janvier s’en sont émus et ont finalement suspendu le contrat. Tout en évitant de désigner nommément corrompus et corrupteurs.

Sans doute une pudeur toute naturelle à évoquer les morts et une certain frilosité à égratigner les puissants.

Responsable de la bonne tenue de l’appel d’offres et de la signature du marché, le Directeur général du bureau des normes kenyans (KEBS) est décédé. Un peu alcoolisé à la sortie d’un bar, John M. Masila de son petit nom, a raté un virage en voiture, le 8 avril dernier. De toute façon, les derniers temps, le haut fonctionnaire n’avait pas l’air dans son assiette. Sa suspension était évoquée dans divers courriers inter-ministériels étalés entre le 17 janvier et le 8 février, que Bakchich s’est procuré. Et un rapport confidentiel du ministère du Commerce, daté du 13 février, pointait son rôle trouble dans l’attribution du marché de Pvoc sur lequel il avait la haute main.

Long de 48 pages et barré d’un énorme « confidential » le « report of task force to investigate the procurement of preshipment verification conformity » désigne tous les manquements de Masila observés durant l’appel d’offres et les manigances des sociétés y ayant répondu. Une fois n’est pas coutume, la société française en course, Bivac International, y apparaît comme la blanche colombe face à la perfidie des Anglais d’Intertek International et des Suisses de la SGS (Société générale de surveillance).

Placé aux premiers rangs des deux évaluations successives du comité d’experts, Bivac a été recalée lors de l’attribution de l’appel d’offres le 24 août 2005. Sans que « le comité de l’appel d’offres justifie son choix de ne pas respecter le classement des soumissionnaires donné par le comité d’évaluation », s’offusque la Task Force. Le tout aux profits de SGS et d’Intertek.

Et contrairement aux termes de l’appel d’offres, note le rapport, la signature du contrat, qui devait avoir lieu le 22 septembre, a été avancée au 14 septembre sur l’insistance de Masila… Une date tout sauf anodine. Un brin vexé d’avoir été évincée, Bivac, propriété de la Holding du baron Seillières, a réagi. Dans un premier temps en exigeant de Masila les motifs de son échec. Envoyée sur les roses par le patron du Kebs – toujours en violation des règles de l’appel d’offres note la Task force - la société assigne alors en justice, le 14 septembre, histoire de casser le contrat. « Étrange coïncidence », relèvent les têtes d’œuf… Plus troublante encore, selon le document confidentiel, Intertek aurait dû être «  disqualifiée de l’appel d’offres » pour ne pas avoir répondu aux cahiers des charges. Et a fait preuve d’un manque de fair-play évident en daubant sur Bivac, accusée anonymement de corruption en Jordanie… Autant d’éléments qui, concluent les limiers, laissent à penser qu’il « y a eu un effort délibéré et concerté afin que la SGS et Intertek international remporte le marché ».

Des rapports et courriers confidentiels à la pelle, un gros marché, un mort bien opportun, ne manque à l’affaire qu’une dimension politique pour être vraiment croustillante.

Une chance, le regretté Masila était particulièrement proche de Stanley Mugare, conseiller spécial et collecteur de fonds officiel du président Kwai Kibaki. À l’époque de l’appel d’offres, le Président était en pleine campagne référendaire. Les publicistes Anglais de Saatchi et Saatchi assuraient sa com’ et ont été plus qu’accusés d’être liés à Gina Din, la communicante locale de SGS et Intertek.

Voir en ligne : in Bakchich # 12

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