La certification de personnes
Un moyen d'améliorer la lisibilité des services aux entreprises

Document de synthèse initial

A l'initiative du Secrétariat d'Etat à l'Industrie, plus de trente personnes se sont réunies le 29 janvier 1998 pour travailler sur la "certification de personnes". L’animation était assurée par Insep Consulting.

Ces personnes venaient d'horizons multiples : des organismes professionnels, des organismes de certification et de qualification, du COFRAC, de l'AFNOR, des entreprises, du Secrétariat d'Etat à l'Industrie, du Ministère du Travail, et le comité de pilotage de l'étude sur "la valeur des services". La plupart d'entre elles avaient soit développé des systèmes de certification de personnes, soit déjà réfléchi à ce sujet.

Ce document présente un court résumé des points clés identifiés et un aperçu des éléments exprimés lors des témoignages et des débats qui se sont déroulés, comme toute synthèse il ne reflète pas tous les détails et toutes les nuances exprimés.

"La certification de personnes" est une façon synthétique et simplifiée de dire "La certification de qualification professionnelle d'individus". L'accent sera davantage mis, dans ce forum, sur la notion de "qualification professionnelle d'individus" que sur la notion de "certification" (voir fiche définitions utiles).

- Quelques points clés
- Témoignages, remarques et propositions
- Les spécificités de la certification de personnes
- La dimension internationale de la certification de personnes
- Les complémentarités avec les autres instruments de la confiance
- Autres thèmes


haut de page Quelques points clés

Il existe une pression internationale pour développer la certification des personnes avec une prise en compte de cette dimension dans les soumissions de marché, surtout à l'international. La position française doit prendre en compte cette pression.

Il faut redonner de la lisibilité aux différents instruments pour créer la confiance :
- certification de personnes,
- OPQ (Organisme Professionnel de Qualification),
- certification de service,
- certification de système qualité.
Il convient de montrer leur complémentarité et leur articulation.
Il convient aussi d'aider à faire des choix en dégageant des priorités (en fonction des besoins du client) afin de ne pas empiler différents modes de preuve.

Attention à la dimension économique ! Les coûts de certification peuvent être dissuasifs pour l'entreprise.

La logique de l'individu, qui s'intéresse à la certification pour se situer sur le marché du travail, est distincte de la logique du prestataire qui passe contrat avec le client.

L'individu qui intervient le fait dans une équipe : équipe du prestataire, équipe avec le client. C'est souvent une compétence collective qui est en jeu, au delà de la qualification individuelle.

Une réflexion à approfondir : quelle place pour les référentiels de qualification non normatifs, par rapport aux référentiels normatifs qui peuvent avoir une reconnaissance plus large ?

Autre thème à approfondir : le lien entre les formations qualifiantes et la certification de personnes ; comment le concrétiser ou le faire apparaître ?

Comment faire vivre les dispositifs existants, en jouant sur leur complémentarité ; comment poursuivre la construction du système national des instruments de la confiance entre client et prestataire de services.


haut de page Témoignages, remarques et propositions

Dans chaque rubrique les thèmes abordés sont indiqués en italique. Ils sont illustrés la plupart du temps de présentations ou de propos tenus par des participants, ces propos n’engagent pas le secrétariat d'Etat.
Les textes de présentation qui constituaient la base du débat sont signalés en tant que tels.

haut de page Les spécificités de la certification de personnes

Envers les clients, le but de la certification de personnes est de fournir une base d'appréciation plus objective sur la capacité des personnes, afin de développer la confiance des clients.
En interne, dans l'entreprise prestataire, le but de la certification de personnes est double :

Connaître avec précision les compétences réelles des personnes, pour constituer des équipes d'intervention pertinentes.

Intégrer cette certification, en complémentarité du système qualité de l'entreprise.

La certification de personnes nécessite un rôle actif des Ressources Humaines (RH) dans l'entreprise ; les RH identifient les compétences demandées par les clients :

La confiance du client, au-delà des CV, exige des preuves de la qualité du personnel proposé ; le CV a surtout une valeur interne à l'entreprise.

Une difficulté majeure pour construire le référentiel d'un métier ou d'une qualification : trouver ou choisir une définition du métier ou de la qualification reconnue et partagée :

Cette difficulté est d'autant plus grande quand la profession n'est pas réglementée.

Présentation : La Société Nationale des Ingénieurs Professionnels de France (SNIPF) certifie les ingénieurs dans leur spécialité ; elle utilise la définition professionnelle décrite en 1938 par le Bureau International de Travail (BIT) de Genève ; sur cette base, un même référentiel et un système commun de validation ont été construits en français, en anglais et en allemand ; la SNIPF a été accréditée début 1997 par le Comité Français d'Accréditation (COFRAC); en France, c'est le Conseil National de Ingénieurs et Scientifiques de France (CNISF) qui tient un registre des ingénieurs certifiés et assure des contrôles qui peuvent entraîner le retrait de la certification.

Des problèmes subsistent en France : certains signalent des attributions "généreuses" du titre d'ingénieur dans certaines entreprises, et cela peut conduire à des refus de certification lors du contrôle, d'où des incidences fâcheuses sur les carrières individuelles.
Par ailleurs, d'autres voient des divergences avec l'Education Nationale sur la définition de la compétence.

Autre remarque : il ne faut pas "scolariser" l'examen des compétences en ne validant que des connaissances. Il faut valider une expérience réelle et concrète, évolutive et complexe en intégrant son contexte : le système doit donc être souple et tenir compte des approches différentes (par exemple dans le nucléaire).

Autre perspective, Syntec Conseil en management conduit une réflexion sur la qualification individuelle des consultants :

Présentation : Ce système de qualification devra être explicite ; il fera l'objet d'un audit par Syntec Conseil en management, l'organisme professionnel, chargé de faire respecter le référentiel. Le label de qualification individuelle se renouvellera chaque année lors d'une revue annuelle des compétences.

Le référentiel en préparation comporte six composantes :
- pour l'organisme prestataire :
  - la qualité du système de recrutement,
- le bon fonctionnement du système de formation continue, d'apprentissage, de validation des acquis, de capitalisation.
- pour les personnes :
  - l'évaluation de l'expérience professionnelle (durée, complexité, expertises, …),
- l'appréciation du respect de l'éthique professionnelle (déontologie, honnêteté, sens de la responsabilité, …),
- l'évaluation du professionnalisme (missions réalisées, satisfaction des clients, valeur ajoutée, …),
- l'appréciation de l'effort de développement personnel.

Tous les cabinets de conseil ont un dispositif de gestion des compétences. Ils ne souhaitent pas un dispositif qui leur soit extérieur ; celui-ci doit être souple en tenant compte du fait que le conseil en management a de multiples facettes.

Cette approche ne prends pas appui sur une certification par tierce partie, mais sur le système de management propre au cabinet.

La responsabilité légale des certifiés et des organismes certificateurs est un grand débat :

C'est un sujet difficile et délicat qui n'est pas stabilisé en France où la jurisprudence est encore peu développée dans ce domaine (quelle responsabilité pénale ou quelle responsabilité civile ?).

Le "marketing" des certifications de personnes est indispensable :

Aujourd'hui, les certifications de personnes ne sont pas reconnues en France et une démarche de type "marketing" est incontournable, comme le font les anglo-saxons.
Aujourd'hui encore, des entreprises prennent parfois des intérimaires parce qu'elles ne savent pas reconnaître la qualification des personnes.
Pour ce type d'approche "marketing", un référentiel et des modalités claires d'attribution des certifications sont indispensables, mais ne suffisent pas : il faut aussi un système de contrôle, des modalités de mise à jour et un dispositif de développement de la notoriété.

Il est important de bien définir pourquoi on veut prendre appui sur une certification de personnes dans une situation donnée ; quelle est la justification de ce dispositif ?

Les motifs de l'entreprise ne se confondent pas avec ceux de la personne :

- La motivation de l'individu peut lui être personnelle : situer sa compétence par rapport à un marché du travail, se situer par rapport à ses collègues ou à sa hiérarchie, ... L'indépendant a besoin d'une reconnaissance externe.
- L'entreprise peut souhaiter utiliser au mieux les instruments de preuve de la qualité dont elle dispose déjà avant de mettre en oeuvre de nouveaux instruments.
- Mais les entreprises peuvent aussi avoir des craintes d'inflation ou d'élévation des coûts, si ces dispositifs concernant la qualification des personnes s'étendent trop vers le personnel d'exécution alors que, simultanément, les clients maintiennent une pression vers la baisse des prix.
- Il est important de rester clair et lisible, tant en interne que pour les clients.
- Dans quelques cas, il peut y avoir conflit entre les intentions de l'entreprise et les attentes des employés.

haut de page La dimension internationale de la certification de personnes

Les britanniques mettent l'accent sur la démonstration de la valeur fournie par le prestataire de services :
Pour cela, les britanniques prennent appui sur différents supports mis au point avec pragmatisme.

Parmi ces supports, ceux qui sont orientés individu sont particulièrement mis en avant (par exemple, "Chartered engineers", "National Vocational Qualifications").

De plus, ces pratiques concernant la certification de personnes sont conçues pour devenir des références pour de futurs systèmes internationaux : les anglo-saxons sont particulièrement actifs sur le plan international et assurent un marketing attentif de leurs dispositifs.

Dans les soumissions pour des marchés internationaux, l'exigence de qualifications des personnes se manifeste activement :

Les curriculum vitae (CV) sont demandés assez systématiquement et les personnes qui vont réaliser le projet sont souvent interviewées par le client.

Dans ce contexte, la demande de certification des individus va se généraliser pour démontrer la compétence des personnes, tout en minimisant les coûts d'évaluation (déplacements, traductions, interprétariat, ...).

Hors de France, le diplôme est considéré comme obsolète après quelques années. Les anglo-saxons, au-delà des diplômes, reconnaissent la formation acquise sur le terrain et tendent à imposer leur démarche dans le monde :

Certains considèrent qu'il faudrait développer un système équivalent en France et, surtout, y associer un suivi pertinent, par exemple lié à un suivi de carrière.

La raison majeure : il faut pouvoir s'exporter.

Un logisticien CPIM (Certified … ) est reconnu internationalement, donc demandé en priorité :

Présentation : Le référentiel français équivalent, développé par l'Association … (ASLOG) existe et est normalisable ; toutefois, ce n'est pas suffisant d'avoir cette assise normative, il faut être reconnu.
L'Association … (APICS), qui délivre aux USA les certifications CPIM, a un autre notoriété que l'ASLOG et c'est cette notoriété qui lui apporte une reconnaissance internationale.

En s'appuyant dès 1982 sur le modèle américain de l'International Cost Engineering Congress (ICEC) et sur celui de l'International Project Management Association (IPMA), l'Association Francophone de Management de Projet (AFITEP) a pu développer un système francophone reconnu dans le monde :

Présentation : Cette longue expérience parallèle, associée à l'ouverture sur les autres pays francophones dont le Canada, a permis de :
- monter un système reconnu par le COFRAC,
- avoir un système de contrôle des connaissances efficace et reconnu,
- construire une expérience justifiée par ses résultats,
- construire un référentiel en français (proche de la base en anglais) reconnu dans le monde,
- pouvoir faire passer les épreuves en français.

Pour rendre applicable un système de certifications, il faut réussir à l'adapter aux spécificités locales des différents pays :

Plus que la langue, c'est une adaptation à la culture locale qui est nécessaire.

Une préoccupation pour tout système de qualification de personnes consiste à être vigilant sur les pratiques qui se développent dans d'autres pays :

Les français devraient prendre conscience du fait que les anglais sont en avance dans le domaine des certifications de personnes.

Une normalisation est souvent indispensable pour une ouverture internationale.

Un système souple d'auto délivrance peut aider à lancer un système, mais il risque de manquer de lisibilité pour le client ; une forme de normalisation est souvent indispensable pour élargir le champ d'usage au-delà des frontières.

Il y a un risque d'emprise des Etats-Unis sur les certifications de personnes :

Dans de multiples domaines, les systèmes américains sont soutenus par les grandes multinationales qui en imposent ensuite l'utilisation dans le monde.

Les Etats-Unis développent une stratégie "marketing" des certifications de personnes qui permet aux employés américains d'être en position favorable.

Les sociétés de certification américaines prennent pied en Europe avec leurs systèmes, souvent déjà bien "ficelés" (structurés et mis en forme), et avec la maîtrise de toute la chaîne de mise en œuvre et de contrôle associée.
Ce risque est d'autant plus grand que cette maîtrise de toute la chaîne n'est pas conforme aux règles européennes (par exemple, séparation des fonctions de certification, de contrôle et d'accréditation).

haut de page Les complémentarités avec les autres instruments de la confiance

Il existe un risque de lourdeurs résultant des strates de certifications et autres agréments :

La certification de personnes doit constituer un élément utile pour l'entreprise

Il y a des formateurs qualifiés, des habilitations techniques, des sociétés agrées (par exemple dans le nucléaire), il convient de faire vivre les dispositifs qui ont été créés avant d'en développer de nouveaux.

Il faut établir des priorités pour l'entreprise entre les différents instruments de la confiance afin d'aider à faire des choix pertinents.

L'assurance qualité (AQ) est souvent une base de départ indispensable ; la certification de personnes doit surtout être cohérente avec l'assurance qualité :

La certification de personnes correspond à des compétences individuelles.

Certaines entreprises, parce qu'il y a coproduction, voudraient qu'il y ait réciprocité (par exemple, faire des échanges de CV).
Dans le même ordre d'idée, n'oublions pas que nous sommes souvent en présence d'équipes d'intervention ; ce qui est en jeu est alors la compétence collective avec les synergies que cela suppose.

Les supports orientés individus doivent s'intégrer à d'autres dispositifs comme la certification ISO 9000 qui fait mention de la compétence.

Les entreprises ne veulent pas payer deux fois pour un même résultat.

Aujourd'hui, le client est perdu au milieu des multiples dispositifs :

Il existe des certifications et des qualifications de personnes, de service, de système, d'entreprise.
Il ne faut pas rajouter trop de dispositifs : d'abord assurer la compréhension de chaque dispositif par le client, puis aider le client dans ses choix en montrant leur complémentarité.

Pour éviter les redondances, il suffit souvent de mieux préciser les domaines de chaque dispositif : certains deviennent concurrents par manque de clarté, en particulier à l'international où il faut intégrer les nuances locales.

En conclusion, les coûts cumulés des dispositifs se retrouvent dans le prix demandé au client.

Pour le prestataire, unifier les systèmes est aussi une clé de sa crédibilité.

Pour éviter les redondances, il faut en amont faire des ponts entre les systèmes de formation qualifiante et les systèmes de certification ou de qualification de personnes :

Il faut des équivalences entre les formations initiales, les formations en alternance et les formations professionnelles.

De la même façon qu'on accrédite les organismes qui attribuent les certifications, il faudrait certifier les organismes qui font les formations.

En France, on sait mal faire le lien entre certification, qualifications professionnelles et formation ; les anglo-saxons construisent des systèmes bien imbriqués qui ont donc une grande cohésion et une facilité de compréhension pour le client et pour les personnes concernées.

haut de page Autres thèmes

La certification peut-elle se concevoir sans accréditation de l'organisme certificateur ?

Formellement, la certification est réalisée par une tierce partie, par rapport à un référentiel ; l'accréditation est une démarche volontaire de reconnaissance de la tierce partie.

Les entreprises craignent les coûts de certifications des prestataires et des autres dispositifs de reconnaissance :

Pour le client, les coûts se retrouvent dans le prix facturé.

Pour le prestataire :
Certaines entreprises ont constaté que, dans des cas précis, les améliorations peuvent compenser, voire dépasser, les dépenses faites pour mettre en place les premiers instruments de reconnaissance.
Dans la plupart des cas, les instruments de reconnaissance doivent se concevoir comme des éléments d'un processus d'amélioration permanente, dont les retours ne sont pas immédiats. Ce ne sont pas des dépenses, mais des investissements.
Pour une grosse entreprise, la certification d'un système peut coûter plusieurs centaines de milliers de francs ; en contrepartie, la certification d'une personne ne coûte que quelques milliers de francs : il est donc primordial de déterminer d'abord pourquoi certifier et pour quel besoin, afin de faire les bons choix (ne pas se lancer dans des actions top onéreuses pour l'entreprise, éviter des surcoûts).

Comment intégrer dans les conventions collectives les certifications de personnes ? Quels sont les liens entre certification de personnes et emploi ou employabilité ?

Certaines entreprises veulent utiliser les certifications de personnes comme outil de promotion interne sans qu'elles deviennent automatiquement "monnayables" en interne et encore moins à l'externe.


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© Ministère de l'Économie, des Finances et de l'Industrie, 19/05/1999